Introduction
Chaque producteur cherche A maximiser, quantitativement et qualitativement, le résultat de son actité : une bonne distribution de ses produits est un des éléments essentiels de cette maximisation. Il ne suffit pas, en effet, d'avoir un bon produit, bien adapté A un bon
marché potentiel : il faut également mettre ce produit A la disposition de ses utilisateurs dans les meilleures conditions possibles de temps, de lieu, d'image, de prix, d'entretien après la vente.
Pour choisir sa politique
de distribution, l'entreprise a A sa disposition une méthode dont les étapes vont lui permettre de bien poser le diagnostic avant d'ensager les éventuelles solutions :
» identification de ses objectifs;
» évaluation de son potentiel;
» examen des différentes méthodes de distribution et de leurs caractéristiques;
» examen des
moyens habituellement utilisés pour distribuer les différents types de produits;
» examen des incompatibilités entre types de distributeurs;
» détermination des solutions ensageables;
» choix de la meilleure solution dans l'état actuel de connaissance des différents éléments.
A. Identification des objectifs de l'entreprise
Parmi les multiples objectifs que se la firme, quelques-uns ressortissent totalement ou en partie A sa politique de distribution :
» augmenter les ventes de produits actuellement distribués;
» lancer un nouveau produit;
» intéresser de nouveaux segments de clientèle;
» modifier le positionnement d'un produit;
» améliorer son image auprès de sa clientèle actuelle et potentielle;
» s'assurer un meilleur contrôle de la distribution
Le choix final devra donc tenir compte du ou des objectifs sés.
B. Evaluation du potentiel de l'entreprise
La firme a des produits, des
clients actuels et potentiels, des concurrents, une force de vente, des moyens financiers, un savoir-faire en matière de
communication commerciale; ou bien elle manque de certains de ces éléments, d'une force de vente suffisante, de savoir-faire promotionnel
Il est donc indispensable de dresser un état de ses possibilités, acquis, contraintes. On cherchera la réponse aux questions :
' Quelles sont les fonctions assurées par notre produit ?
' S'adresse-t-il A un seul ou A plusieurs segments de clientèle ?
' Quelle image en ont les acheteurs et les utilisateurs ?
' Quelles sont les caractéristiques quantitatives et qualitatives de sa clientèle (mode, lieu, période, fréquence d'achat) ?
' Quelles sont ses performances dans les différents types de point de vente qui le distribuent actuellement (coût de distribution, chiffre d'affaires, marge nette) ?
' Si le produit n'est pas encore distribué, comment voulons-nous le positionner (bas de gamme, haut de gamme) ?
' Si le produit est déjA distribué, dans quelle phase de son cycle de e se trouve-t-il ?
La plupart de ces questions doivent également AStre posées pour ce qui concerne les produits concurrents présents sur le marché.
D'autres questions concernent la force de vente :
' Est-elle en nombre suffisant pour nous permettre d'atteindre nos objectifs ?
' A-t-elle une connaissance suffisante de sa clientèle potentielle (distributeurs ou utilisateurs professionnels) ?
' Connait-elle bien la concurrence ?
Il faut aussi s'interroger sur la capacité publi-promotionnelle de la firme :
' Quel est notre savoir-faire en matière de communication commerciale ?
' Savons-nous animer un réseau de distribution ?
' Savons-nous le contrôler ?
La réponse A ces questions est fondamentale. En dehors des biens professionnels d'équipement lourd, et de quelques autres cas, le producteur ne peut guère assurer tout seul la distribution de ses produits. S'y opposent en effet :
» la dispersion de la clientèle ;
» la faible importance unitaire de nombre de commandes;
» leur fréquence élevée;
» la nature périssable des produits;
» leur prix unitaire : faible, le producteur a tout intérASt A pratiquer une distribution de masse par l'intermédiaire de nombreux points de vente ; mais élevé, les distributeurs hésiteront A le stocker et le producteur pourra en reniliser la prise en charge directe de sa distribution1;
» l'importance de l'investissement logistique nécessaire : moyens de transport, dépôts de stockage, personnel, sommes immobilisées;
» des contraintes légales : produits pharmaceutiques2, réglementation concernant le refus de vente3, etc.
C. Examen des caractéristiques de la distribution
Le producteur doit également connaitre les différentes formes de distribution et leurs caractéristiques, ainsi que le type de distribution habituel des différents types de produits :
' La distribution ouverte, ou de masse, passe par un très grand nombre de points de vente ' tous, A la limite ' éparpillés sur tout le territoire. Elle conent particulièrement aux biens de grande
consommation courante, de prix relativement faible, dont l'achat est fréquent, rapide, parfois d'impulsion, et dont la vente n'exige pas de
compétence particulière. On doit les trouver partout car on ne fera pas l'effort d'aller les chercher si on ne les trouve pas A proximité : les plus accessibles seront les plus vendus.
' La distribution exclusive au contraire, très restrictive, n'accorde qu'A un petit nombre de distributeurs la revente des produits. C'est elle que choisissent les producteurs soucieux de maintenir dans l'esprit du public une image très forte de la qualité de leur produit (orfèvrerie Christofle, par exemple) ou ceux dont le produit, très technique, requiert une compétence particulière du revendeur, souvent chargé du serce après vente, du dépannage.
' La distribution sélective est A mi-chemin entre les deux précédentes. Il n'y a pas, dans ce cas, contrat d'exclusité, mais les distributeurs en nombre restreint sont choisis en raison de leur compétence, de leur image, du degré de couverture de leur zone d'actité1. Ce mode de distribution, comme le précédent, conent aux biens anomaux, d'achat peu fréquent, réfléchi, au prix relativement élevé, voire très élevé, pour lesquels les acheteurs potentiels n'hésitent pas A se déplacer, A er prix et caractéristiques, A s'informer La distribution sélective conent en fait A un bien plus grand nombre de produits que la formule - exclusive - : celle-ci doit AStre en fait réservée aux marques ' plus qu'aux produits ' que l'acheteur potentiel veut absolument et qu'il n'échangera pas contre une autre, mASme s'il lui faut attendre ou aller chercher plus loin.
Dans le cas de la distribution exclusive toujours, dans le cas de la distribution sélective chaque fois que le nombre de points de vente A serr le permet, le producteur traitera directement avec le détaillant, sans passer par le grossiste : le circuit doit rester court.
' Le franchisage, en très forte expansion depuis quelques années, est une forme de distribution exclusive portée A l'extrASme et perfectionnée. Le producteur de bien ou de serces a en effet un contrôle total de son circuit sans bourse délier. Mieux, il en tire un bénéfice accru. Ce sont les franchisés qui supportent l'investissement nécessaire pour créer le point de vente et son aménagement, acheter le stock, de mASme que les
salaires du personnel, etc. De plus, ils versent périodiquement au franchiseur une redevance proportionnelle A leur chiffre d'affaires, et s'engagent A pratiquer point par point la
politique commerciale définie par le franchiseur. Celui-ci dispose ainsi d'un réseau sans en supporter les charges financières et le fournit de manière exclusive la plupart du temps en marchandises, avec un stock minimum et un prix de vente imposés ainsi qu'un quota de vente annuel A respecter. En contrepartie, le franchiseur apporte son concours publicitaire et promotionnel et surtout son nom, sa marque, sa réputation, qui sont la raison d'exister de ce type de distribution1, auquel ressortissent pratiquement tous les biens ou serce autres que ceux de très grande consommation qui nécessitent au contraire une distribution très ouverte, de masse.
D. Influence du cycle de e du produit sur sa distribution
Quel que soit le mode de distribution choisi pour un produit donné A un moment donné, il n'est pas forcément immuable et il peut évoluer, en particulier en fonction de la phase de son cycle de e où se trouve le produit comme des changements intervenus sur le marché, etc.
1 / Lors de la phase de lancement, plusieurs cas sont possibles :
' c'est un produit existant, arrivant sur un marché
concurrentiel : selon le positionnement souhaité, haut ou bas de gamme, selon le caractère anomal, banal, l'entreprise peut choisir, dans le premier cas, une distribution sélective avec des avantages financiers susceptibles d'intéresser les distributeurs, dans le deuxième une distribution ouverte, seule capable de diffuser partout et rapidement le produit;
' c'est un produit plus ou moins nouveau sur un marché où la concurrence ne joue pas encore A plein : dans la perspective d'un positionnement haut, l'entreprise peut chercher A - écrémer- le marché en distribuant A prix élevé de manière sélective, voire exclusive; dans le cas d'un produit de grande consommation, une distribution ouverte est indispensable, appuyée par un prix particulièrement bas destiné A intimider la concurrence, A la dissuader au moins pendant un certain temps, de venir se battre sur le mASme terrain ' il faut une surface financière suffisante pour procéder de la sorte.
2 / Lorsque le produit est en phase de croissance, cela signifie qu'il continue A AStre acheté :
' dans le cas du bien banal la distribution, si elle ne l'est pas encore, doit AStre la plus vaste et diversifiée possible, en raison du phénomène d'infidélité A la marque, de plus en plus fréquent;
' dans le cas du bien anomal la pratique, successivement, de la distribution d'écrémage puis de pénétration peut AStre intéressante : il s'agit d'élargir la distribution en mASme temps qu'on diminue le prix chaque fois qu'un segment de clientèle potentielle a été exploité, A la manière de filons successifs1; cette politique est particulièrement applicable aux articles de mode comme A tous ceux qui bénéficient de prescripteurs, et le produit se trouve de plus en plus largement diffusé; elle s'applique également aux produits anomaux A l'origine mais dont l'usage se banalise sous les effets conjugués de leur succès et de l'arrivée sur le marché de concurrents de plus en plus nombreux, ce qui en diminue fortement le prix2.
3 / La phase de maturité, où le produit est bien installé sur son marché, doit AStre suie avec attention : s'il est en effet facile de savoir qu'un produit est en phase de lancement puis de croissance, les choses se compliquent par la suite : combien de temps le succès va-t-il durer ? N'y a-t-il pas risque de eillissement, de désaffection, de remplacement A plus ou moins court terme ?
Banals ou anomaux, la distribution des produits doit faire ici aussi l'objet de la plus grande attention, et les distributeurs seront particulièrement suis : il ne faut pas perdre de vue que s'ils peuvent AStre prescripteurs, ils peuvent également AStre des freins et qu'ils sont en tout cas un écran entre le producteur et les acheteurs-utilisateurs de son produit.
Tout ce qui précède indique suffisamment que la distribution, n'est qu'un des éléments du marketing-mix et qu'il faut rendre son choix cohérent avec le type de produit, sa nature, la clientèle A laquelle il s'adresse, etc.
Il faut aussi tenir compte, avant de choisir un mode de distribution, de nombreuses incompatibilités ainsi que des conflits qui peuvent surgir A l'occasion des pratiques commerciales.
E. Les conflits dans la distribution des produits
Un certain nombre de procès ont eu lieu depuis les années 50, qui ont défrayé la chronique en leur temps, et surtout fait jurisprudence : Edouard Leclerc contre les producteurs d'épicerie qui refusaient de le livrer parce qu'il faisait des rabais systématiques sur
les prix de vente que voulaient imposer ces derniers; Nivéa contre Carrefour, accusé de concurrence déloyale s-A -s des commerA§ants traditionnels parce qu'il vendait en discount ses produits ' comme les autres, d'ailleurs; la Fnac contre Brandt Frères, qui refusaient de livrer les caméras Beaulieu pour préserver les revendeurs traditionnels de la remise de 20 % appliquée par le distributeur; sans parler des procès intentés en 1983 contre Leclerc qui - s'obstine - A vendre moins cher, en l'occurrence l'essence
C'est que producteurs et distributeurs n'ont pas les mASmes objectifs, ou, s'ils les ont, divergent sur la manière de les atteindre. Les deux veulent vendre, le plus et au meilleur prix, c'est-A -dire faire le plus de profit possible. Mais lorsque pour cela un distributeur - casse les prix-, il risque de gASner un producteur qui ne souhaite pas que son produit en soit l'objet, c'est-A -dire paraisse bradé.
Les producteurs peuvent aussi AStre en conflit avec des petits distributeurs mécontents des conditions plus favorables qu'ils accordent A la grande distribution (remises pour quantité, conditions favorables de paiement, etc.).
Une autre source de conflit a été la politique des - produits libres-, c'est-A -dire sans
marque de producteur, c'est-A -dire en fait sous marque de distributeur que Carrefour a développé en 1976 : de nombreux producteurs ' et non des moindres ' et mASme des publicitaires l'ont accusé de concurrence déloyale, de - cracher dans la soupe -, etc. C'est que le succès des - produits libres - menaA§ait directement la vente des produits - de marque- vendus A
des prix et avec des marges plus élevés. On constate cependant huit ans après que les uns et les autres se vendent très bien (voir plus bas, chap. 16).
Comment éter, sinon l'apparition de conflits, du moins leurs conséquences désagréables ?
' Les producteurs doivent veiller A ne pas mettre tous leurs œufs dans le mASme panier, autrement dit A ne pas tomber dans la fatalité de la loi des 20/80 : celui dont une grande partie du chiffre d'affaires est entre les mains d'un petit nombre de distributeurs risque de perdre sa liberté, voire d'en mourir : c'est le cas de nombre de sous-traitants, de nombre de petits producteurs attirés par l'illusion d'AStre fournisseurs de la grande distribution, réduits A accepter ses conditions draconiennes ou A disparaitre.
' Les producteurs doivent s'efforcer de faire demander leurs produits par le consommateur, pour que le distributeur se sente obligé de le référencer s'il ne veut pas perdre des ventes : cela empASche le boycott par un ou plusieurs types de distribution1.
' Les producteurs peuvent s'efforcer de prévenir les causes de conflit, en mettant au point des gammes de produits spécialement réservées A tel ou tel type de distribution.
C'est ce que fait L'Oréal pour ses laques et shampooings : une marque (un nom, un conditionnement) différente pour les coiffeurs, les parfumeurs, la distribution ouverte.
C'est aussi ce que fait Coca-Cola : de petites bouteilles de 19 cl pour les bars, des bouteilles moyennes et grandes (21 cl et 1,5 1) pour les épiceries et les grandes surfaces, des cartons de 12 grandes bouteilles pour les hypermarchés et des boites métalliques pour les aons et les manifestations publiques (sportives, par exemple) et enfin, des distributeurs automatiques pour les entreprises, usines, écoles, collectités. Il va sans dire que, de la mASme faA§on, la force de vente et les méthodes employées sont différentes et fonction des caractéristiques du point de distribution.
F. La question des incompatibilités
Une fois en possession de tous les éléments qui précèdent, le producteur est mieux renseigné pour faire un choix de type de distribution. Mais il doit encore examiner la question délicate des incompatibilités entre circuits, ou entre circuits et l'image qu'a la clientèle potentielle du produit A distribuer. Quelques exemples qui ont fait date vont l'y aider :
' L'us Time Corp., qui avait mis au point dans les années 40 une montre au mécanisme simplifié, solide et bon marché, voulut la distribuer en France, dans les années 60, sous sa marque Kelton, par le circuit - logique - des horlogers-bijoutiers. Ceux-ci refusèrent, sous prétexte que leur image patirait de la vente d'un produit de bas de gamme ' la raison réelle de leur refus étant la faible marge dont ils bénéficieraient et l'impossibilité de se rattraper sur les réparations, qui étaient faites directement par le fabricant, A BesanA§on. Devant ce refus, la firme dut faire preuve de créatité, et décida de distribuer dans les librairies-papeteries, les bureaux de ac ! de nombreux autres distributeurs de - marchandises générales - suirent devant le succès de la marque ' sauf les horlogers-bijoutiers.
' Lorsqu'en 1953, les laboratoires Guigoz voulurent lancer les premiers aliments en pots pour bébés ils savaient qu'ils se heurteraient A la méfiance, voire A l'hostilité des jeunes mères, soucieuses de préparer - le meilleur - pour leur bébé et qui refuseraient donc des aliments - industriels -. Ils trouvèrent la solution qui rendait compatibles la forte résistance psychologique et le mode de distribution : un circuit réputé sérieux, car- scientifique- puisque médical, celui des pharmacies. Pour emporter l'adhésion des distributeurs, le producteur leur consentait une marge bénéficiaire importante ainsi que la vente exclusive en pharmacie, ce qui excluait la concurrence - des autres -x. Pour emporter l'adhésion des jeunes mères et renforcer celle des pharmaciens, une forte action de communication et d'incitation était menée par les siteurs médicaux auprès des prescripteurs (médecins, pharmaciens et maternités) et par le truchement d'échantillons ainsi que de brochures explicatives sur l'alimentation des bébés.
' Vingt ans plus tard, en 1973, la concurrence entre dentifrices était rude et Elida-Gibbs, qui distribuait de manière ouverte ses marques Signal, Pepsodent et Très Près, décide de commercialiser son nouveau produit - A renforcement contre la plaque dentaire Mentadent P - par le canal des pharmacies, pour bénéficier de l'effet de halo paramédical mais commet en mASme temps l'erreur de le vendre également dans les grandes surfaces, d'où l'échec des deux formules : incompatibilité entre le positionnement de banalité et de produit courant opposé A celui de bien anomal vendu en pharmacie, hostilité des pharmaciens qui n'admettent pas que leurs produits soient aussi trouvés dans les grandes surfaces.
Une cohérence entre l'image que l'on veut donner du produit et sa distribution est indispensable; de plus, ils se renforcent mutuellement, au lieu de se détruire.
G. Le choix des circuits
Le producteur sait maintenant comment il ne doit pas distribuer son produit, comment il peut le faire. Il lui reste A évaluer les meilleures chances de succès, non seulement A court mais A moyen et long terme, par le choix de telle ou telle formule, éventuellement par la combinaison de plusieurs d'entre elles.
Aucune méthode de choix n'est parfaite, aussi la meilleure solution semble-t-elle AStre de les employer toutes successivement et d'en er les résultats avant de faire un choix définitif, car elles ne sont que des réducteurs d'incertitude.
a. Méthode des rendements és
Cette première approche met en regard les coûts de distribution supportés par chaque circuit ensageable, ainsi que le chiffre d'affaires et le bénéfice net escompté dans chacune des solutions, ce qui peut se représenter sous la forme : chiffre d'affaires ' coût de distribution coût de distribution le numérateur représentant la marge bénéficiaire.
Il faut pour cela partir de comptes d'exploitation présionnels capables de permettre l'estimation, pour chaque formule de distribution possible :
» du niveau des ventes pour la période considérée;
» du chiffre d'affaires;
» de la marge brute dégagée;
» des frais variables de distribution répartis selon les différentes fonctions (sites des représentants, publi-postage, catalogues, publicité, promotion, emballage, livraison, facturation).
On s'aperA§oit par exemple une fois les estimations faites :
' qu'un circuit qui supporte moins de coûts de distribution qu'un autre jusqu'A un certain niveau des ventes le dépasse au-delA de ce niveau, parce que ses frais fixes étaient moindres mais ses frais variables supérieurs;
' que le chiffre d'affaires réalisé ne suffit pas A emporter la décision, car il peut AStre grevé d'un poids trop important de frais variables, ce qui réduit d'autant la marge bénéficiaire : c'est par exemple le cas de points de vente nombreux et aux commandes de faible valeur unitaire, ce qui reent cher au producteur. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il faut cesser de fournir ces distributeurs, car cela peut AStre une erreur sur le tactique, en contrecarrant, par exemple, une politique de présence dans les points de vente : il vaut mieux aider ces magasins peu renles A le devenir en les aidant publi-promotionnellement, comprimer les coûts qu'ils occasionnent en les sitant moins souvent ou en traitant par téléphone, diminuer les marges au-dessous d'une certaine quantité, et en dernier recours seulement se séparer des points de vente vraiment trop coûteux, sauf si ces coûts sont compensés par le bénéfice réalisé avec les autres ainsi que par celui, psychologique, que l'on retirera de la présence du produit sur le terrain concurrentiel.
b. Méthode des fonctions dominantes
Afin de faire correspondre au mieux les circuits au produit et A son marché, on peut chercher A mettre en édence et A hiérarchiser les fonctions de distribution A assurer en analysant les caractéristiques du produit et celles de sa consommation. P. Avril1 prend deux exemples, le prASt-A -porter féminin en coton et le charbon.
Dans le premier cas, on trouve une valeur au kilo très élevée, un encombrement faible, une valeur - spéculative - (coton), un caractère - périssable - (mode), des séries de production moyennes en raison de la nécessité de commercialiser des gammes larges (modèles) et profondes (tailles et coloris), et en face un achat peu fréquent, A l'unité et une exigence de choix. Les fonctions distributives dominantes sont essentiellement commerciales : assortiment, information et promotion, les serces tels que l'échange, le financement des stocks.
Dans le deuxième cas, on trouve une valeur au kilo très faible, un encombrement moyen, un produit sle mais salissant, des séries de production très élevées, une production non saisonnière mais un achat saisonnier la plupart du temps, en vrac, mais également d'appoint, par sacs. Les fonctions dominantes sont cette fois le transport, le fractionnement et le stockage pour amortir les A -coups de la demande : la fonction logistique est ici essentielle dans le choix du circuit, alors que dans le premier cas c'est la fonction commerciale.
c. Méthode de la notation pondérée des facteurs
Il s'agit d'un modèle simple de compensation, A l'aide duquel le producteur :
» sélectionne un certain nombre de critères de choix de distributeur;
» attribue A chaque critère un coefficient de pondération pour les hiérarchiser par ordre d'importance;
» attribue A chaque type de distribution une note pour chacun des critères considérés.
Une fois ces opérations effectuées, il calcule la note finale obtenue par chaque type de distribution, ce qui lui permet de les classer.
En d'autres termes, une fois les différents modes de distribution ensageables sélectionnés, et des critères choisis ainsi que la pondération de chacun, on dresse un leau multicritères A double entrée et en totalisant les colonnes on obtient le score de chacun des circuits en balance.
Le principal intérASt de cette méthode est probablement la nécessité, pour le producteur, de procéder A une analyse relativement approfondie, d'une part, pour détecter, parmi tous les modes de distribution possibles, ceux qui pourraient convenir A son produit dans la situation de marché dans laquelle il se trouve; d'autre part, pour élir les critères pertinents ' sans en oublier aucun ' susceptibles de er vérilement les différents types de distribution, sans oublier la difficulté inhérente A une bonne pondération. Autre conséquence de cette démarche : plusieurs responsables A divers titres (ventes, commercial, marketing, logistique, finance) vont également réfléchir A la question, vont s'informer davantage, vont confronter leurs points de vue et vont AStre, par lA mASme, solidaires du choix définitif.
De tout ce qui précède, nous pouvons conclure que la bonne méthode pour choisir un type de distribution en minimisant les
risques d'erreur est de les appliquer toutes sur le papier et de er leurs avantages et inconvénients respectifs : il s'agit en fait de faire une simulation, une projection dans l'avenir des résultats qu'entrainerait l'application des différentes formules ensageables. Cela implique une connaissance préalable du produit, du marché, du comportement des acheteurs, des caractéristiques des distributeurs, de la politique suie par la concurrence, directe et indirecte, de ce que coûterait et rapporterait chaque formule.
Il faut aussi savoir innover et prendre certains risques calculés. En 1964, on a vu apparaitre en supermarché les aliments pour bébés en petits pots de la marque Jacquemaire : Guigoz le premier avait lancé le produit et fait accepter le concept en s'appuyant sur l'image très forte car paramédicale de la pharmacie dix ans après, Jacquemaire a lé sur la banalisation du concept, le
développement des supermarchés, l'évolution de la mentalité des jeunes mères, en un mot sur la- modernisation -. En mASme temps apparaissaient dans les mASmes surfaces de vente des couches pour bébés fabriquées en Suède, produit jusqu'alors distribué en pharmacie. Comme les petits pots Jacquemaire, elles ont été très bien acceptées.
D'autres exemples d'innovaiion ou d'originalité dans les méthodes de distribution existent : Tupperware, le fabricant américain de boites en matière plastique, ne vend plus ses produits qu'A travers son réseau de ménagères qui organisent des réunions A domicile; Singer a trouvé une formule intéressante : la Société a éliminé le risque de conflit entre ses magasins de vente au public et ses vendeurs A domicile en confiant les premiers en franchisage aux épouses des seconds chaque fois que cela est possible dans les lles de 12 000 A 20 000 habitants, la Société gardant la propriété des magasins dans les lles plus grandes Les ventes que ne fait pas l'un, l'autre peut encore les faire, et le démarcheur peut appuyer son argumentation en proposant A la cliente hésitante de se rendre dans le point de vente, si cela peut la rassurer.
H. Mise en place et gestion du système choisi
a. Choix des intermédiaires
Une fois effectué le choix du mode de distribution ainsi que celui des circuits concernés, le producteur va le mettre en place et le gérer.
La mise en place commence par le choix, lorsque c'est possible, des intermédiaires. Lorsqu'il s'agit de distribution ouverte la question ne se pose pas : tous les commerA§ants, grossistes ou détaillants sont susceptibles de commander les produits et réciproquement d'AStre sollicités par le fabricant. S'agissant par contre de distribution exclusive ou sélective, la question se pose dans toute son acuité, et se complique mASme d'une
donnée supplémentaire, l'image et la notoriété du producteur. Si celles-ci sont fortes, il sera très demandé et n'aura que l'embarras du choix; si elles ne le sont pas, c'est lui qui sera en position de demandeur, ce qui est très gASnant.
Mais les deux cas ont leurs inconvénients :
» dans le premier, le producteur risque de se voir opposer l'interdiction du refus de vente et d'antagoniser tous les distributeurs qu'il aura éconduits;
» dans le deuxième, il devra les attirer par des conditions favorables, essentiellement de marge bénéficiaire et de conditions de paiement ainsi que de non-concurrence.
Dans les deux cas également, le producteur doit vérifier, A l'aide d'une liste de contrôle, l'aptitude des intermédiaires A bien vendre ses produits, sans risquer de lui nuire par leur défaillance éventuelle dans tel ou tel domaine.
b. Conditions de collaboration
Producteurs et distributeurs s'engagent réciproquement, formellement ou tacitement sur un certain nombre de points.
' Le prix de vente des produits ure sur un document qui fixe A la fois le - prix catalogue - ou prix de vente au public, et la remise consentie au distributeur, calculée sur le prix du catalogue et qui représente sa marge brute; il peut obtenir des sur-remises au-delA d'une certaine quantité commandée, pour référencement d'un nouveau produit pendant la période de lancement, etc.
' Les conditions de paiement sont très importantes : l'usage commercial, variable selon le secteur d'actité, veut que l'on accorde un escompte de i ou 2 % pour paiement comptant, et que le paiement des traites se fasse A trente ou soixante jours - fin de mois -. La grande distribution cependant, profitant d'un rapport de force en sa faveur, a imposé A ses fournisseurs la pratique du quatre-ngt-dix ou cent ngt jours fin de mois, ce qui entraine le paiement des marchandises quatre ou cinq mois après la livraison au point de vente; la rotation des stocks y étant rapide, le distributeur a vendu les produits plusieurs fois avant de les avoir payés, bénéficiant ainsi d'un crédit fournisseur gratuit et générant une forte trésorerie1. C'est lA une des raisons de la croissance rapide des grands groupes de la distribution.
' Les conditions de vente concernent les délais de livraison, le minimum de commande, le niveau du stock que doit détenir le distributeur dans certains cas, ainsi que les quotas de vente A réaliser par l'intermédiaire dans l'année et le cas échéant les exclusités territoriales et les clauses de non-concurrence.
' Les serces réciproques A se rendre peuvent avoir trait A l'information sur les clientèles, la concurrence Dans le cas des concessionnaires exclusifs et des franchisés, des contrats très détaillés régissent les relations et donc la totalité des serces réciproques, très nombreux et touchant A tous les éléments de la commercialisation.
c. Motivation des distributeurs
Les intermédiaires ont besoin d'AStre poussés, motivés, surtout si, comme c'est le cas le plus fréquent, ils vendent aussi les produits concurrents. Le producteur doit donc agir sur eux A tous les stades de la e du produit : lors du lancement, pour le faire référencer tout en étant l'arrASt des ventes de celui qui le précédait; en phase de croissance, pour éter la rupture de stock, obtenir un linéaire plus important et mASme une- mise en avant-; en phase de maturité, pour empAScher le ralentissement des ventes et le déclin du produit; dans cette dernière phase, pour faire mourir le produit harmonieusement, tous stocks vendus
Il existe diverses techniques promotionnelles en direction des distributeurs : les avantages financiers et les autres.
Les avantages financiers intéressent particulièrement grossistes et détaillants, mais pour éter les abus le législateur a mis en place une réglementation antidiscriminatoire : toute sur-remise ou avantage financier particulier doivent AStre justifiés par un serce correspondant assuré par le distributeur1 :
' les remises de référencement sont les plus fréquentes ; elles ont une durée limitée A la période de lancement du produit, et atteignent 7 A 15 % de son prix, en fonction de l'importance de la commande; elles peuvent aussi AStre une somme fixe;
' les remises sur quantité servent A régulariser les commandes, de mASme que : les remises pour commande hors saison; les indemnités pour utilisation de la plv, etc.
D'autres techniques promotionnelles peuvent AStre mises en œuvre :
' la stimulation de la force de vente des grossistes et des détaillants, comme celle des propres vendeurs du producteur;
' les concours entre distributeurs, de trines, par exemple;
' la formation des représentants des grossistes, etc.
I. Contrôle et modification de la forme de distribution choisie
Un bon choix A un moment donné ne le reste pas forcément toujours. Il faut donc surveiller l'adéquation de la forme de distribution choisie A ses produits dans leur marché, comme on surveille le comportement des acheteurs, les actions de la concurrence, etc.
Ce contrôle continu ' par analyses périodiques ' de la bonne adaptation de la distribution au marché doit tenir compte de facteurs quantitatifs et qualitatifs, en gardant toujours en mémoire que la commercialisation fait partie d'un ensemble qui se comporte comme un système : toute modification d'un quelconque de ses éléments entrainera la modification de l'ensemble, en raison de leur interdépendance8.
Les diverses méthodes que nous avons vues plus haut pour le choix du type de distribution seront employées périodiquement pour évaluer la validité actuelle du choix passé :
' la renilité des différents distributeurs est-elle suffisante ?
' leur image s'est-elle maintenue ?
' rendent-ils un niveau de serce able A la clientèle ? etc.
On se demandera s'il faut continuer A travailler avec le mASme type de distribution et les mASmes intermédiaires, s'il ne faut pas en retrancher ou en ajouter, ou encore procéder A la refonte du mode de commercialisation parce que le marché a évolué, que l'attitude de la clientèle s'est modifiée et que de nouveaux segments potentiels sont apparus, ou pour d'autres raisons encore
Voici deux exemples de modifications apportées A la distribution de produits pour des raisons différentes, dans des contextes différents :
» Les galettes Saint-Michel étaientdistribuécspardes concessionnaires-confiseurs en gros avec accord d'exclusité réciproque ; le succès des efforts publi-promotionnels de la firme fut si grand (50 % d'augmentation des ventes et demande de référencement par d'autres distributeurs) qu'elle abandonna la première formule pour s'adresser A l'ensemble des grossistes1.
» L'orfèvrerie de luxe Christofle était distribuée par 1 800 vendeurs enron ; lorsque la firme s'aperA§ut que 1 200 d'entre eux, les deux tiers, ne faisaient que 10 % du chiffre d'affaires total et se servaient de ses produits comme d'articles d'appel, causant ainsi tort A son image et lui coûtant cher de surcroit, elle s'en sépara pour ne garder qu'un nombre restreint de distributeurs qui faisaient l'essentiel de son chiffre d'affaires. Mais cela ne se fit pas sans mal car ce fut la cause d'un conflit aigu, les revendeurs mécontents engageant diverses actions pour faire revenir le fabricant sur sa décision, s'appuyant en particulier sur la réglementation du refus de vente : ne pouvant pas appliquer une formule d'exclusité stricto sensu, la firme sélectionna ses distributeurs A l'aide de conditions que la loi lui permettait d'imposer A ses revendeurs, comme un volume d'achat, donc de vente, minimal, une surface minimale de devanture A réserver aux articles de la marque, l'obligation d'avoir en stock en permanence une collection complète des articles-Ce deuxième exemple est intéressant A plusieurs titres : modification d'un
réseau inadapté, conflit avec les distributeurs, nécessité, pour tourner la loi, de modifier les conditions de collaboration avec les intermédiaires.
Cela montre bien, si besoin était, que la politique de distribution, élément majeur du marketing-mix, relève de la direction du marketing en liaison avec la direction générale, tant le choix, délicat, nécessite d'évaluations et de calculs, quantitatifs et qualitatifs, tant un choix erroné peut avoir de conséquences facheuses pour l'entreprise.
La distribution physique des produits
En période de forte concurrence, et alors que la plupart des producteurs savent proposer des produits de qualité équivalente, la lutte porte sur les prix ' c'est le cas dans les temps de
crise économique des années 70 et 80 ' et sur l'ensemble des serces annexes rendus par le fabricant aux distributeurs et A la clientèle finale et par les distributeurs A celle-ci. Ces serces, fortement souhaités, sont nombreux :
» rapidité de livraison;
» capacité de faire face A une brusque et forte demande ;
» rapidité du dépannage (pièces détachées) ;
» facilité pour rendre des produits défectueux;
» rapidité pour se les faire remplacer ou rembourser;
» possibilité de commander en petites comme en grosses quantités;
» assurance de ne pas tomber en rupture de stock ;
» coût minimal de chacun de ces serces;
» si possible, fourniture gracieuse de certaines de ces facilités.
Mais ces serces coûtent très cher. De plus en plus en effet, l'augmentation du prix des produits proent moins de celui des matières premières et de la fabrication que de celui des serces - d'accomnement - ' manutention, stockage, transport, conditionnement, publi-promotion ' en raison de la très forte augmentation du coût de l'énergie, de la main-d'œuvre, etc.
C'est pour cette raison que depuis une ngtaine d'années certains1 ont appelé l'attention des responsables de l'entreprise sur ce- continent inconnu- que représente, plus encore que la distribution physique, la logistique commerciale, grace A laquelle de nombreux progrès dans la qualité du serce sont possibles en mASme temps que la réduction d'un certain nombre de coûts.