Tout comme le producteur, le distributeur ' qu'il s'agisse d'un point de vente ou d'un groupe
de distribution ' doit appliquer la démarche et les techniques de marketing A son activité : connaitre sa zone de chalandise, les attentes de sa clientèle potentielle et ses caractéristiques socioprofessionnelles, l'ampleur de l'assortiment qu'il lui proposer et son niveau de prix, et en général, mais plus particulièrement dans le cas de la vente moderne en libre-service, les différentes méthodes de renilisation du point de vente.
A. L'information sur le marché
a. La zone de chalandise
La zone de chalandise est la zone géographique qui renferme l'ensemble des
clients potentiels d'un point de vente. Ses dimensions rient beaucoup selon le type de produits qu'il vend :
» Les magasins de proximité, aux articles de
consommation courante, ont une zone de chalandise restreinte mais relativement sle, car c'est le côté pratique et la rapidité d'achat qui importent aux clients.
» Des magasins plus grands draineront plus de clientèle potentielle, d'autant plus nombreuse qu'elle sera plus proche.
» Ceux qui vendent des biens anomaux ' équipement, habillement ' ou des articles de mode, sont l'objet d'un double effet, d'attraction et d'ésion de la clientèle. Celle-ci souhaite er ant d'acquérir des biens d'achat réfléchi, d'un prix relativement élevé : elle accepte donc de faire un déplacement plus important que pour les achats courants (attraction), mais pour la mASme raison, elle ne se limite pas A un seul point de vente mais en visite plusieurs (ésion).
Le distributeur cherche la plupart du temps A délimiter sa zone d'attraction de manière empirique, A l'aide de sectiunes1, d'obsertions sur le terrain, de petites enquAStes, de la ventilation des chèques reA§us en paiement. Quelques chercheurs ont essayé de modéliser le phénomène, mais ces traux restent théoriques2.
b. La clientèle potentielle
La population de la zone de chalandise est caractérisée par de très nombreux facteurs d'importance inégale mais dont un maximum doit AStre connu par le distributeur pour pouvoir s'y adapter. Il faut tenir compte :
» de ceux qui y résident et y traillent; de ceux qui y résident mais traillent au-dehors; ceux qui résident au-dehors mais viennent y trailler; de la densité de la population; des groupes quantitatifs de tranches d'age; de l'évolution démographique; de la structure de l'emploi; des catégories socioprofessionnelles
Les éléments ci-dessus se trouvent dans les publications statistiques publiques (insee) et parapubliques (Chambres de Commerce).
Ils permettent de se faire une idée d'ensemble du potentiel d'achat d'une part, du comportement de consommation et des attentes d'autre part : le choix de l'assortiment du point de vente en dépend.
Une autre source intéressante de renseignements sur le potentiel commercial d'une zone (ville, département, région) est l'utilisation de la - richesse vive -, ou ensemble des ressources employées par les ménages A l'achat de biens et services de toute nature (épargne et thésaurisation exclues). Elle est calculée par l'Institut Proscop3 ' A partir d'un grand nombre d'indicateurs représentant des consommations connues dont la corrélation avec la consommation totale est également bien connue ' pour la France entière, par zone, par habitant de la zone. Six indices spécifiques A des produits correspondant A leur élasticité de consommation en fonction de la riation de la richesse vive sont également proposés, permettant d'éluer le potentiel de vente d'un magasin dans sa zone de chalandise : on constate des écarts dépassant i A 10 pour les communes de toute taille, i A 3 pour les départements, 1 A 4 pour les agglomérations; par exemple, 1 étant la moyenne nationale de richesse vive par habitant, on trouve 1,33 pour la région parisienne, 0,96 pour l'Alsace, 0,85 pour la Picardie, 0,83 pour la Bretagne, 0,76 pour la Corse, etc.; ou encore, 1,5 pour Strasbourg et l'agglomération de Paris et 0,90 pour Brest.
c. La concurrence
Le distributeur cherchera quels sont ses concurrents1 proches, mais aussi ceux qui, tout en étant lointains, peuvent profiter ' parce que vendant des biens anomaux, proches d'équipements sociaux (bureau de poste, crèche, sécurité sociale, banque) ou de lieux d'attraction (parc, cinéma) ' de l'élétion du pouvoir d'achat de ceux qui font partie de sa zone de chalandise.
d. L'assortiment
Grace A la
connaissance de tout cela, le distributeur composer son assortiment, c'est-A -dire choisir les produits qu'il vendre et leur niveau de prix, correspondant aux possibilités financières de sa clientèle potentielle et A ses attentes, et tenant compte de ce que propose la concurrence, de faA§on A reniliser au mieux son activité.
L'assortiment est déterminé par trois dimensions : son ampleur, sa largeur, sa profondeur.
» L'ampleur correspond aux différentes fonctions que permet d'assurer l'assortiment ' clouer, visser, scier, percer ' qui comprendra donc des marteaux, des tournevis, des scies, des perceuses.
» La largeur correspond au nombre de modèles différents d'un mASme produit : des tournevis A lame plate, cruciformes, testeurs de phase, réversibles, A percussion, automatiques
» La profondeur représente, pour un modèle, le tournevis cruciforme, les différentes dimensions, matières du manche (bois ou plastique), couleurs2.
L'exemple d'ampleur, largeur et profondeur ci-dessus correspond A l'assortiment d'un magasin spécialisé dans le bricolage. S'il s'agit d'un point de vente de type hypermarché, on trouvera une très grande ampleur, car un maximum de fonctions sont satisfaites (bricolage, cuisine, habillement, jardinage, mécanique, ameublement, etc.), une largeur moyenne (tous les tournevis cités ne s'y trouvent pas), et une faible profondeur (deux tailles au plus). A l'autre bout de l'échelle, un petit magasin très spécialisé aura un assortiment très peu ample, mais plus ou moins large et très profond.
B. La renilisation du point de vente
La recherche de la renilité maximale du magasin, compte tenu de l'importance de l'investissement très lourd en surface de vente, personnel, marchandises et alors que la concurrence par l'abaissement
des prix atteint rapidement sa limite, passe par le choix du meilleur assortiment et celui du meilleur agencement de l'espace de vente. Autrement dit, par l'utilisation des techniques marchandes permettant d'optimiser la règle des cinq Q.1 : quel produit vendre, A quel endroit le placer, A quel moment, en quelle quantité, A quel prix. Ces techniques forment ce qu'on appelle le merchandising2. Pour les mettre en œuvre, le distributeur doit connaitre sa clientèle et AStre conscient de la nécessité de s'adapter A toute modification de celle-ci comme de son environnement (voir encadré sur les marques de distribution).
a. L'assort/ment
Pour déterminer l'ampleur de l'assortiment, la connaissance de la catégorie de clientèle et de son comportement d'achat est nécessaire. Mais pour aller plus loin dans l'analyse, d'autres
données sont indispensables pour chaque référence et par période considérée :
» la marque; le prix de vente; la marge brute; le nombre d'unités vendues; le chiffre d'affaires; le taux de rotation; la longueur de linéaire occupée.
Cela demande du temps, et si le petit distributeur doit le calculer - A la main -, les groupes de distribution utilisent l'informatique et les informations fournies par les panels de consommateurs et de distributeurs ainsi que leurs propres obsertions en magasin pour éluer avec finesse l'assortiment le plus renle et l'adapter en permanence.
Mais ceux qui n'ont pas les
moyens de procéder A de telles analyses peuvent s'inspirer, conjointement avec ce qu'ils constatent dans leurs rayons, d'une méthode simple dite ABC, qu'ils peuvent essayer d'adapter A leur cas particulier : il s'agit, A partir de la constatation générale que la vente est inégalement répartie entre les produits, de chercher si dans leur magasin elle correspond A peu près A la répartition ABC (. 16.1) :
' 65 % des ventes sont réalisées par 10 % des articles A;
' 25 % des ventes sont réalisées par 25 % des articles B;
' 10 % des ventes sont réalisées par 65 % des articles C.
Cela dit, cette répartition n'est qu'approximative, et si elle peut servir de guide jusqu'A un certain point, elle doit AStre améliorée A l'aide de l'expérimentation constante en magasin de la performance des articles.
b. Le linéaire
1 / L'assortiment. ' Le choix de l'assortiment doit AStre combiné avec la répartition des articles dans l'espace de vente, et pour commencer par l'agencement des rayons eux-mASmes (leau 16.1) : disposition de l'entrée, des caisses, des rayons d'appel, sens de circulation A l'intérieur du magasin, etc.1.
La répartition des articles et des références sur les étagères d'exposition a pour but de reniliser l'espace de vente, c'est-A -dire la longueur de linéaire accordée A chaque article. Plusieurs facteurs et contraintes entrent en jeu :
» La renilité est le produit du nombre d'articles vendus par la marge dégagée dans une période donnée; mais si le taux de rotation le plus rapide doit AStre recherché, il se trouve que les articles A plus forte marge ont le taux le plus faible et vice versa il faut donc en équilibrer le choix.
» MASme si des articles ont un très faible taux de rotation, il faut qu'ils soient présents pour donner une impression de riété.
» En raison de la concurrence entre distributeurs ou de la puissance du producteur, des articles A très faible marge doivent néanmoins urer dans l'assortiment en quantité suffisante s'ils sont demandés par la clientèle
» Une longueur minimale de linéaire1 doit AStre attribuée par article, sous peine qu'il passe inaperA§u dans la masse qui l'entoure.
En dehors du choix de l'assortiment, c'est la disposition des produits dans les rayons et la longueur de linéaire dont ils disposent qui conditionnent leur succès.
2 / La disposition générale. ' De nombreux facteurs favorisent la vente des articles :
» Un bon emplacement dans la surface de vente, différent selon qu'il s'agit de produits d'achat prémédité, ifié, réfléchi, de nécessité courante ou d'impulsion.
» Un bon éclairage.
» Une circulation aisée.
» Un effet de masse, de vrac, pour certains articles (fruits), etc.
» Une bonne présentation : la vente de fromage et de charcuterie augmente quand il existe un stand - A la coupe -.
3 / La hauteur sur les étagères. ' Les niveaux sont différemment vendeurs : ils vont du plus vendeur (yeux) au moins vendeur (sol) en passant par celui des mains.
On placera donc les produits pondéreux, de nécessité, d'appel au niveau du sol, puisqu'on ira les chercher de toute faA§on, et les produits A forte marge et faible rotation au niveau des yeux, pour favoriser l'achat d'impulsion2.
4 / La longueur de linéaire accordée. ' Si on constate que l'augmentation de linéaire entraine dans certains cas l'augmentation des ventes, on ne peut pas généraliser le phénomène, car il faut tenir compte de la classe de produit dont il s'agit. Deux chercheurs8 proposent une typologie et les courbes correspondantes (. 16.2).
» Articles d'achat ifié (sel, sucre, huile), ainsi qu'articles très spécialisés (biscottes sans sel) inélastiques A la riation de linéaire; si on ne les voit pas bien on les cherche, si on en voit en grandes quantités on n'en achète pas plus : ils sont insensibles A la quantité de linéaire.
» Produits d'usage généralisé, d'achat courant non prémédité ou ifié, pour lesquels - les effets du linéaire sont probablement assez forts pour une certaine augmentation de l'espace, mais le point de rendement décroissant assez vite atteint-l : conserves de légumes et de fruits, produits pour Je petit déjeuner (aux Etats-Unis), biscuits.
» Produits anomaux dont l'achat est peu fréquent et occasionnel et qu'un facing trop réduit ne met pas assez en leur et n'incite pas particulièrement A acheter : graines salées pour l'apéritif, crabe en boite; mais si on augmente progressivement l'espace qui leur est accordé, la courbe représentant la réaction d'achat est logistique : les ventes ne démarrent vraiment qu'A partir d'un seuil minimal de facing, s'accélèrent puis décroissent A partir d'un deuxième seuil, préludant A - l'asymptote de saturation - (. 16.3). C'est ce qu'on appelle l'élasticité des achats A l'augmentation du linéaire.
Reniliser le point de vente passe donc par la prise en compte d'un très grand nombre de riables, dont les plus importantes sont la marge dégagée, le taux de rotation, le coût de stockage et le coût d'approvisionnement
Divers modèles informatisés sont ainsi utilisés par les groupes de distribution, comme slim1 et ses dérivés Profit2, Gesmot3 et Easy4, pour minimiser le niveau des stocks permettant la vente entre deux réapprovisionnements sans risquer la rupture de stock, réduire les frais de personnel, reniliser au maximum l'espace de vente, en accordant moins d'espace aux articles peu renles comme A ceux de très forte vente, et plus d'espace aux articles très renles ainsi qu'aux marques de distribution.
Les marques de distribution
Le lancement des - produits libres - par Carrefour le Ier avril 1976 a réveillé l'intérASt des consommateurs pour les produits vendus non plus sous la
marque du fabricant, mais sous celle du distributeur. La chose n'était pas nouvelle, puisque de nombreux groupes de distribution commercialisent depuis cinquante ans des produits A leur marque : alimentaires (Casino, Coop) et non alimentaires (Miss Helen et Sipratic, Prisunic et Monoprix; Nogamatic, Nouvelles Galeries).
La nouveauté résidait dans la manière, considérée par les producteurs comme très agressive, de présenter la chose Carrefour, qui vendait pourtant des marques, disait A ses clients : achetez des produits libres de toute marque mais aussi bons, et payez-les 20 % moins cher. Des études de
marché l'ont aidé A prendre la décision : - Un nombre croissant de consommateurs doute qu'il soit raisonnable de payer un produit 20 % plus cher simplement parce que la publicité lui a conféré une leur ajoutée imaginaire -6.
Il fallait aussi des fabricants livrant des produits de qualité équilente : il y eut de petits producteurs peu connus, il y eut Jacques Vabre, France-Farine, Lotus et Rivoire & Carré-Apres la levée de boucliers générale qui suit souvent les innotions dérangeantes d'un concurrent, Euromarché lanA§a les produits - orange -, Mammouth les produits - familiaux -, et Continent, Cora, etc., chacun les leurs. Qu'on les appelle libres, drapeaux, ou génériques, les produits sous marque de distribution ' sans empAScher les consommateurs fidèles aux marques des fabricants de continuer A les acheter ' ont gagné des parts de marché très appréciables : de 30 A 60 % et 5 % du A§a. Depuis 1988 (source Secodip), les marques de distributeurs continuent A progresser dans le secteur alimentaire et sont sles dans le lage, l'entretien ménager et la parfumerie.
Les produits génériques sont un facteur non négligeable de la compétition entre producteurs et distributeurs.