Introduction
Le propre du marketing - industriel - est qu'il s'applique A des biens et A des services destinés A l'entreprise, que celle-ci exerce une activité d'extraction, de transformation,
de distribution, de service et quelles qu'en soient la forme et la taille : la vente de 100 tonnes d'acier A un groupe métallurgiste, de i ooo microprocesseurs A une pmi fabriquant des jouets, d'un logiciel sur mesure A une société de distribution intégrée, d'un jeu de fraises A un dentiste, ou la vente de ioo sacs d'engrais A un agriculteur, relèvent du marketing - industriel -.
Dès lors, deux observations s'imposent et une question se pose :
1re observation : les transactions concernées ne touchent pas a priori le consommateur final; il s'agit en effet de transactions ayant lieu A des stades amont dans les filières de production et de service. Mais plus on est en aval dans ces filières, donc proche du consommateur final, et plus son influence se fait sentir.
Par ailleurs, on verra l'importance que peuvent air l'aptitude A contrôler le
marché final dans une stratégie de filière, et la prise en compte des systèmes de besoins finals (alimentation, habillement, transport, etc.) pour la prévision technologique et la prévision de marketing dans l'industrie1.
2e observation : un mASme produit peut relever A la fois du marketing industriel et du marketing de la grande consommation. Ainsi tel nettoyant de sols, tel outillage électrique ou A main, etc. Deux
stratégies distinctes sont alors A définir mais elles ne sont pas sans s'influencer mutuellement : les images - grande
consommation - et - industrie- de ces biens réagiront l'une sur l'autre.
Ces deux observations nous interrogent sur l'opportunité qu'il y a A faire du marketing industriel une discipline spécifique plutôt qu'une application pure et simple du marketing A des produits et services qui peuvent finalement, comme nous venons de l'équer, concerner le consommateur directement ou indirectement. Ce débat sur la spécificité du marketing industriel n'est pas nouveau2.
Pour notre part, nous considérons que
le marketing industriel procède de la mASme démarche que le marketing de la grande consommation, du mASme - état d'esprit -, mais qu'il présente des propriétés liées essentiellement A l'existence des filières industrielles, d'une part, et aux caractéristiques de l'acte d'achat, d'autre part.
A. Marketing industriel et filières de production
La notion de filière déborde les nomenclatures par branche ou par secteur et rend désuet le découe traditionnel de l'économie en primaire, secondaire et tertiaire. - Une filière industrielle est constituée de l'ensemble des stades du processus de production qui conduit des matières premières A
la satisfaction du besoin final du consommateur, que ce besoin final s'adresse A un bien matériel (alimentation, logement, etc.) ou A un service (transport, communications, santé, loisir) -.
a. Présentation d'une filière
Le silicium est la matière première électronique. C'est un marché annuel mondial de l'ordre d'un milliard de dollars. Dans la filière qui conduit du sable aux composants électroniques comme dans beaucoup de filières, il existe des goulets d'étranglement, des passages forcés susceptibles d'engendrer des zones de pouir dans la filière, dont les tenants peuvent régenter les marchés mondiaux.
Une dizaine de firmes dans le monde, dont aucune n'est franA§aise, se partage le marché du silicium raffiné, transformant le silicium polycristallin en monocristallin. L'enjeu de la maitrise de ce passage obligé est très important et les techniques de purification éluent sans cesse avec les efforts de recherche considérables de ces entreprises en situation d'oligopole. A terme, le silicium sera produit en continu, qu'il soit de qualité - solaire - ou de qualité - électronique -, et le coût des panneaux et des composants devrait baisser considérablement, modifiant en cela la structure des coûts des ensembles où ils s'intègrent et les facteurs de succès sur ces marchés.
Une entreprise dans cette filière, A quelque niveau qu'elle se trouve, doit donc tenir compte de toutes les mutations en cours et en évaluer les effets. Ainsi une entreprise qui se serait spécialisée dans la purification des - ratés - de la fabrication du silicium polycristallin pour en faire du silicium polycristallin de qualité - solaire - it son activité menacée par le
développement de fabrications A partir de produits fluorés et chlorés (tétrafluorure de silicium ou fluorosilicate de sodium).
b. La localisation du pouir dans la filière
L'intérASt de l'étude des filières provient de la constatation d'une hiérarchie des industries en fonction de leur situation relative de
client ou de fournisseur, et ainsi de proche en proche vers l'amont et vers l'aval.
1 / La capacité stratégique d'une entreprise dépend de son aptitude A contrôler le marché final de la filière A laquelle elle participe1. ' Par contrôle du marché final, il faut entendre le suivi et la compréhension des comportements des consommateurs et des distributeurs, mais surtout - la capacité A orienter l'utilisateur final vers de nouvelles exigences -; leur satisfaction devant passer par l'achat de produits ou de services intégrant la technologie de l'entreprise pouvant se situer très en amont dans la filière qui cherche A contrôler le marché final (mise en œuvre d'une stratégie de market-pull).
Les autres acteurs doivent alors faire éluer leur offre en fonction des décisions de leur partenaire dans la filière et des relations privilégiées qu'il aura su élir avec le marché final, et non pas en fonction de leurs intérASts techniques et économiques propres.
2 / Le second enseignement est que l'aptitude A contrôler le marché final varie selon le degré de maturité du ou des produits répondant A la demande finale. ' En règle générale, au fur et A mesure que celui-ci avance sur son cycle de vie (dont la forme et la durée ne sont pas prédéterminées mais dépendent de la stratégie des différents acteurs), l'aptitude A contrôler le marché final a tendance A se déplacer de l'amont vers l'aval de la filière.
Le leau synoptique (leau 19.1) en montre les implications stratégiques.
Trois phases de cycle de vie des produits finals y sont identifiées (développement, diffusion, maturité), et quatre niveaux dans les filières (fabrication de composants, sous-ensembles, ensembles et distribution).
Ce leau montre comment la localisation de l'effet de domination change et passe de l'amont vers l'aval, avec son corollaire le taux de profit maximum enregistré dans la filière. Il mentionne les différents choix qui peuvent AStre la caractéristique de l'effet de domination. Il fournit ainsi les
moyens d'analyse de l'état actuel ou futur d'une filière et notamment les moyens de prévision du niveau de sa domination future.
c. De l'étude de filière A la stratégie de marketing industriel
Dans l'étude de la (ou des) filière (s) où est présente l'entreprise, la question qui se pose est la suivante : - Est-ce que sa participation actuelle A cette filière conduit
' ou conduira ' A une plus grande dépendance A l'égard des autres facteurs, préjudiciable A son développement ? - Si la réponse est plutôt positive, il convient de redéfinir la stratégie, et notamment en termes de marketing, de l'entreprise industrielle.
Deux ies peuvent AStre suivies. La première consiste A accéder au niveau clé de la filière pour conserver ou accroitre son autonomie et son influence. La seconde consiste A tenter de déplacer le niveau clé au niveau où elle est elle-mASme située et cela, probablement, en agissant sur les cycles de vie des produits pour faire monter
' ou descendre ' vers elle l'effet de domination sur la filière.
Il va de soi que, dans un cas comme dans l'autre, l'entreprise doit air les moyens de sa politique, et doit air su apprécier les
risques pris; car soit les droits d'entrée A un niveau de la filière où sont localisés les effets de la domination, dans un cas, soit les coûts de lancement d'une innovation qui déplacerait vers le niveau de l'entreprise la localisation de la domination dans l'autre cas, sont souvent très élevés mais aussi très risqués ; en effet, les autres acteurs de la filière ne resteront pas inactifs face A la stratégie de domination mise en œuvre par l'entreprise.
1 / L'intervention dans le cycle de vie des produits
Cette décision stratégique prise par une entreprise industrielle au sein d'une filière est probablement la moins risquée des deux options.
Ses effets dépendent de la sensibilité des marchés en aval aux modifications touchant A la technologie (place de la technique dans les critères de choix des clients intermédiaires et des consommateurs finals).
Prenons les deux cas extrASmes, celui où l'effet de domination est en amont ' produits de haute performance A technologie très élutive ' et celui où l'effet de domination est en aval ' produits banalisés et très largement diffusés.
1.1 / Cas de la domination en amont. ' Une entreprise de production ou de distribution qui se trouve en aval du niveau de domination de la filière caractérisé par la maitrise d'une technologie particulière X n'a d'autres ressources que de - diluer -, pour ses marchés en aval et notamment pour le marché final, tel attribut fonctionnel, fondé sur la technologie X, dans un ensemble d'autres attributs fonctionnels et non fonctionnels et d'atténuer ainsi la perception de la qualité des produits fondée exclusivement sur la technologie X non maitrisée. Elle peut aussi rechercher des applications nouvelles A cette technologie, par exemple participer A un élargissement de son marché potentiel, ce qui farisera sa banalisation.
Dans le domaine de l'informatique, par exemple, les constructeurs de matériels périphériques et les concepteurs de logiciels ont ainsi atténué l'effet de domination
d'IBM.
Une stratégie qui conduit A un élargissement des applications de la technologie de pointe considérée, et A une diffusion progressive des produits correspondants, est souvent gagnante A moyen et long terme.
L'entreprise en aval dans la filière aura pu en effet - différencier - très tôt les produits finals, en leur apportant sa propre technologie, et se forger ainsi une image qui, lorsque les produits seront en phase de maturité, sera un point d'ancrage essentiel de sa stratégie de marketing et de communication et partant, de sa domination sur la filière.
1.2 / Cas de la domination en aval. ' A l'inverse une entreprise spécialisée dans des productions en amont de la filière peut rechercher A faire remonter A son niveau un effet de domination que la banalisation de sa technologie et la large diffusion des produits qui l'intègrent auraient fait glisser vers l'aval de la filière.
La stratégie dans ce cas est celle du renouvellement, c'est-A -dire du lancement de - générations - successives de technologies, fondé sur une politique lontariste de l'innovation technique, donc sur la mise en œuvre d'importants moyens de recherche-développement; les exemples de ce type de stratégie sont innombrables. Une remarque s'impose ici : la localisation de la domination peut remonter en amont de la filière sous l'effet de l'arrivée d'un nouveau fournisseur de technologie et non pas des fournisseurs traditionnels de la filière : les producteurs et fileurs de coton et de laine auraient rencontré, il y a quelques années, bien des difficultés A faire remonter vers eux l'effet de domination de la filière textile face A l'arrivée des producteurs de fils synthétiques et artificiels qui ont dominé longtemps cette filière.
2 / L'intégration verticale dans la filière
Les exemples ne manquent pas de cas d'entreprises franA§aises qui, bien que paraissant en bonne situation sur le marché intérieur, se sont trouvées en difficulté lorsque des modifications sont intervenues en aval de la filière, qui correspondaient A l'entrée des produits en phase de maturité.
A contrario, la maitrise du niveau aval d'une filière ne peut AStre un gage de succès quand l'apparition de nouvelles technologies rappelle vers l'amont l'effet de domination.
Pour une entreprise industrielle, - la décision de s'intégrer vers l'amont ou l'aval sur la base de l'analyse des effets de domination ne relève pas de la logique classique de la sécurité des approvisionnements ou du marché captif. Elle traduit au contraire le déplacement du centre de gravité
économique de l'ensemble de la filière. Une telle décision suppose que soit menée une très difficile analyse de l'origine de la capacité compétitive de l'entreprise : fort potentiel d'innovation, aptitude A la gestion d'ensembles industriels, capacité commerciale -l. Si un tel diagnostic peut AStre fait pour le présent mais aussi pour l'avenir A moyen terme, l'entreprise peut alors envisager, si sa capacité compétitive l'y autorise, de concentrer ses moyens sur les niveaux de filières dont il apparait urgent de prendre le contrôle.
B. L'acte d'achat en milieu industriel
La seconde caractéristique spécifique du marketing industriel, qui a un effet direct sur sa politique, est la complexité de l'acte d'achat en milieu industriel.
La différence essentielle entre l'acheteur industriel et l'acheteur individuel ne réside pas, comme on le croit trop souvent, dans la plus grande rationalité économique du premier.
Les différences fondamentales proviennent en fait :
1. de la complexité et de la longueur du processus qui mène A l'achat;
2. du fait que plusieurs personnes, constituant le - centre d'achat-, exercent de faA§on plus ou moins formelle leur influence sur la décision d'achat;
3. de ce que les individus qui participent A l'achat obéissent A la fois A des motivations personnelles et A des motivations liées A leur position dans l'organisation. Certaines décisions paraissent inexplicables si l'on ignore les rapports entre les différents membres de l'entreprise et les luttes intestines qui s'y livrent.
a. Le processus d'achat industriel
La décision finale d'achat intervient au terme d'un processus parfois très long, et il n'est pas rare qu'une
négociation de vente n'aboutisse que plusieurs années après air été entamée.
Dans ce processus, on peut distinguer schématiquement les phases suivantes :
» l'identification du besoin A satisfaire; la détermination des spécifications du produit et des quantités nécessaires; la recherche de fournisseurs; l'analyse et l'évaluation des propositions faites par ces fournisseurs; le choix du ou des fournisseurs; le contrôle et l'évaluation de la fourniture.
En fait, ce processus n'est pas toujours suivi. Cela dépend :
' de l'importance financière de l'achat, car on ne lancera pas un appel d'offres pour acheter une centaine de crayons;
' de la rigueur avec laquelle les achats sont gérés; lorsque la part des fournitures dans le prix de vente est faible la politique d'achat risque d'AStre un peu laxiste ;
' et surtout de l'expérience acquise dans ce type d'achat.
On peut distinguer trois situations d'achat :
» Le nouvel achat pour lequel l'entreprise n'a pas encore acquis d'expérience et doit donc suivre l'intégralité du processus décrit.
» L'achat de routine pour lequel l'entreprise se contente souvent de donner des ordres de réapprovisionnement aux fournisseurs habituels et de contrôler la fourniture.
» L'achat répété avec modification, situation intermédiaire dans laquelle l'acheteur a des habitudes qu'il souhaite mettre en question; il cherche donc A sair s'il peut modifier les spécifications et trouver de nouveaux fournisseurs.
En fait, la maitrise du processus d'achat par l'entreprise est rarement aussi étroite que le laisse supposer le processus présenté, et dans de très nombreux cas les fournisseurs interviennent A différents niveaux pour influencer les décisions :
1 / L'identification du besoin peut se manifester au sein mASme de l'entreprise qui découvre un problème particulier, mais bien souvent cette découverte a été suggérée par un fournisseur potentiel A travers une
publicité (pour un photocopieur, un miniordinateur ou une machine de traitement de texte), ou par la visite d'un représentant.
2 / La détermination des spécifications consiste A décrire précisément les caractéristiques du produit qu'on veut acheter. Par exemple, si on veut acheter des candélabres pour l'éclairage extérieur, on va spécifier la hauteur souhaitée, la section, le matériau (bois, béton, fer) ; dans le cas d'un poteau métallique, le type de protection contre la corrosion (peinture, galvanisation A chaud, etc.).
Lorsque l'achat porte sur une technique que l'entreprise connait bien, elle est en mesure d'élir elle-mASme ces spécifications. Dans le cas contraire, elle doit faire appel A des bureaux d'études extérieurs ou aux fournisseurs eux-mASmes.
Une participation active d'un de ceux-ci A cette phase, directement auprès de l'entreprise acheteuse ou par l'intermédiaire des bureaux d'études, peut lui permettre de faire spécifier le produit ou le service de telle sorte qu'il soit en position de monopole alors qu'une spécification moins précise l'aurait mis en
concurrence avec un ou plusieurs autres fournisseurs potentiels. En matière de recherche de fournisseurs, certaines entreprises ont un comportement plutôt passif, estimant que c'est A eux de se manifester et non A elles de venir les chercher. Elles se tournent donc le plus souvent vers leurs fournisseurs habituels ou vers les fournisseurs réputés; lA encore, une politique active de communication des fournisseurs peut leur permettre d'AStre consultés.
3 / Le choix des fournisseurs. ' Pour AStre choisi, le fournisseur doit sélectionner les arguments auxquels le client industriel est le plus sensible. On croit souvent que l'acheteur industriel a un comportement essentiellement économique par opposition au comportement plus affectif des consommateurs.
Le prix est effectivement le critère primordial lorsque les produits achetés sont des substituts presque parfaits (matières premières, pièce parfaitement spécifiée). Par contre, lorsqu'il s'agit de produits différenciés, la fidélité aux fournisseurs habituels ou l'assurance que le fournisseur respectera les spécifications demandées et qu'il pourra livrer au moment désiré l'emportent généralement sur le prix. Une proposition trop bon marché entraine mASme souvent une réaction de défiance de l'acheteur qui craint d'AStre mal servi.
b. Le centre d'achat
MASme lorsqu'une entreprise est dotée d'un service des achats comprenant des acheteurs spécialisés, il est rare qu'ils conduisent seuls l'ensemble du processus.
Le nombre de personnes qui influencent le processus et la décision d'achat, et qui constituent le centre d'achat, varie en fonction de l'entreprise, du produit acheté et de la situation d'achat. Il est évident que l'achat d'un gros matériel, nouveau pour l'entreprise, impliquera un plus grand nombre de personnes qu'un rappro-visionnement en petit matériel de bureau. Le centre d'achat n'est pas un groupe formel comprenant des personnes choisies pour leur fonction ou leur
compétence comme peut AStre un comité de direction ou un comité de marketing, mais un groupe informel de personnes qui, A divers titres, parfois sans en AStre réellement conscientes, jouent un rôle dans la décision d'achat. On en distingue généralement six :
' Les utilisateurs peuvent AStre les ingénieurs de production s'il s'agit d'un outillage, le personnel administratif dans le cas de matériel de bureau ou encore les responsables du marketing, de la vente ou de l'après-vente si le produit acheté est revendu ou intégré dans les produits vendus par l'entreprise. Les utilisateurs ont une influence particulièrement importante dans l'identification des besoins et dans l'évaluation des performances des produits achetés.
' Les prescripteurs sont ceux qui définissent la nature des biens achetés. Ils peuvent se situer A l'intérieur de l'entreprise qui achète (bureau d'études) ou A l'extérieur (société d'ingénierie, experts).
' Les conseillers influencent le processus et la décision d'achat par leurs suggestions. Leur rôle est généralement tout A fait informel et il est difficile de les identifier.
' Les acheteurs sont chargés de faA§on formelle de définir les conditions d'achat et de sélectionner les fournisseurs. Leur rôle est parfois réduit A la dimension administrative des achats (consultation, contacts, contrats, etc.) car les utilisateurs, qui bénéficient souvent d'un statut plus élevé que le leur, imposent leur choix en définissant des spécifications si précises qu'elles désignent en fait un seul fournisseur.
' Les décideurs ont le pouir de décision sur le choix final du fournisseur; ils sont généralement d'un niveau hiérarchique élevé lorsque les sommes en jeu sont importantes.
' Les filtres exercent un pouir de contrôle sur les communications avec l'extérieur; une secrétaire qui décide de jeter un publi-postage ou de refuser un rendez-us A un représentant joue un rôle de filtre.
Le leau 19.2 résume l'influence exercée par les différents rôles suivant les phases du processus d'achat.
c. Les motivations de l'acheteur industriel
Les membres du centre d'achat obéissent A des motivations multiples, chacun se comportant A la fois comme :
» un individu;
» un membre du centre d'achat;
» un membre de l'entreprise.
1 / En tant qu'individu, l'acheteur vise des objectifs personnels. Sans parler des motivations financières ' qui peuvent conduire certains A accepter des - pots-devin - ', il a des objectifs de carrière ou d'acquisition de statut au sein de l'organisation. Pour cela, il adopte généralement une stratégie de réduction des risques qui peut consister :
' A rester fidèle aux fournisseurs avec lesquels il n'y a pas de problèmes (mASme s'ils sont chers) ;
' A choisir un fournisseur très réputé pour ne pas AStre accusé, en cas de difficulté, d'air ulu faire le malin en choisissant un petit fournisseur : l'acheteur qui aura choisi un matériel informatique ibm pourra toujours répondre, lors des inéviles difficultés de mise en place, que de toutes les faA§ons on ne pouvait pas faire mieux; par contre, s'il choisit un matériel aussi performant et moins cher mais moins connu, il risque d'AStre dans une position difficile;
' A filtrer les informations venant de l'extérieur et susceptibles de mettre en cause les fournisseurs habituels;
' A partager la responsabilité de la décision d'achat avec les autres membres du centre d'achat ou avec ses supérieurs hiérarchiques;
' A répartir les commandes entre plusieurs sources d'approvisionnement; cette forme de diversification des sources est particulièrement importante dans les secteurs (ou pays) où les risques de grève sont élevés, ou lorsqu'on traite avec des entreprises fragiles sur le financier.
2 / En tant que membre du centre d'achat, l'acheteur se trouve confronté A un groupe d'individus visant des buts différents, éventuellement conflictuels.
Le conflit peut se résoudre en choisissant une solution acceple pour chacun, mASme si personne ne la trouve réellement bonne.
Prenons l'exemple simplifié d'une entreprise qui cherche A s'équiper en matériel de photocopie. Trois solutions sont proposées : la première consiste en un petit duplicateur A chaque étage; la deuxième dans la mise en place d'un atelier de reproduction au sous-sol, et la troisième A installer un duplicateur de taille moyenne un étage sur trois.
Les utilisateurs préfèrent la première solution et les services administratifs se prononcent en faveur de la deuxième.
Finalement la troisième solution, que personne ne juge bonne, sera retenue.
La résolution partielle du conflit d'intérASt entre les membres du centre d'achat peut prendre d'autres formes. Une des parties peut céder sur un projet d'achat A la condition implicite que l'autre partie cède A son tour sur un autre projet en discussion.
Le conflit peut également se résoudre en faveur de l'individu qui a le plus de pouir dans l'entreprise. Dans cette éventualité, il est indispensable que le vendeur apprécie correctement les rapports de force entre les différents membres de l'entreprise; il est souvent inutile et parfois dangereux de convaincre un individu sans pouir.
3 / En tant que membre de l'organisation, l'acheteur adaptera son comportement A la perception qu'il a des objectifs de l'entreprise. La place du service des achats dans l'organisation peut influencer cette perception et affecter son comportement. On a pu constater par exemple que, dans des organisations où l'achat était centralisé au siège, la recherche du bas prix était fortement présente A l'esprit des acheteurs. Par contre, dans des organisations où l'achat était décentralisé au niveau des usines les objectifs de qualité et de respect des délais de livraison prédominaient en raison de la proximité des utilisateurs.
C. L'étude de marché en milieu industriel
L'étude de marché en milieu industriel est un exercice particulièrement difficile, surtout quand elle concerne un produit nouveau. En effet, l'analyse d'un marché d'un produit existant, sur les s quantitatif et qualitatif, est proche de la démarche mise en œuvre dans le monde de la grande consommation, dès lors que des statistiques de flux d'échanges sont disponibles et que des segments de marché sont identifiables.
Par contre, lorsqu'il s'agit d'un produit nouveau destiné A l'industrie il n'y a, par définition, pas de statistiques disponibles ' mASme si le produit nouveau peut AStre intégré A une classe de produits dont il se démarque du fait de sa nouveauté ' et pas de
segmentation pertinente a priori. Mais surtout l'existence des filières de production et la complexité du processus d'achat nt compliquer considérablement la démarche.
Les cabinets spécialisés dans l'étude des marchés industriels ont développé des méthodes propres qu'ils adaptent aux caractéristiques du nouveau produit, A la filière (ou aux filières) auxquelles il s'intègre, A la taille et au degré d'atomisation du marché visé.
Nous présentons ici deux approches : la première est une démarche très structurée qui permet d'évaluer l'importance du marché A conquérir et la stratégie A mettre en œuvre; la seconde est une approche plus générale, plus qualitative, qui conduit plutôt A la définition d'un positionnement et A l'identification des clients cibles A atteindre dans un premier temps. Les deux démarches ne sont pas exclusives l'une de l'autre et, par exemple, les questions formulées dans la liste de contrôle de la seconde peuvent AStre utilisées dans la mise en œuvre de la première.
a. Une approche stratégique
Cette approche se décompose en trois temps forts pour un nouveau produit industriel :
' déterminer la taille du marché potentiel que peut air le produit A un terme donné (cinq ans par exemple);
' évaluer les points forts et les points faibles de la firme sur ce marché et pour ce nouveau produit;
' définir et évaluer différentes options stratégiques possibles.
Le - marché technique - est le marché maximal possible du produit si toutes les entreprises en mesure, sur le technique, d'adopter ce produit le faisaient en substitution des produits actuellement utilisés. Le marché technique est en principe de taille supérieure A la somme des marchés des produits substitués puisque ses avantages devraient conduire des clients nouveaux A l'acheter.
Le - marché économique - est composé des entreprises qui seraient susceptibles, sur la base de critères économiques (importance de l'investissement, délais de retour sur investissement, structure du bilan et/ou du compte d'exploitation générale, imtation géographique, etc.), d'adopter le nouveau produit.
Le - marché potentiel - est déduit du marché économique en introduisant des éléments qualitatifs de comportement : les besoins plus ou moins bien satisfaits avec les produits existants, les attentes, les habitudes technologiques, les comportements plus ou moins innovateurs des entreprises clientes, sont intégrés ici pour évaluer la taille du marché potentiel A un terme donné. La stratégie des entreprises concurrentes, l'image de l'entreprise lanA§ant le nouveau produit, ses points forts et faibles permettent d'évaluer une - part de marché - pouvant AStre raisonnablement atteinte. Mais cela ne peut se faire qu'A l'issue de la seconde phase de l'étude.
La première phase a permis de mettre en évidence au cours des études économiques et des études qualitatives les facteurs qui détermineraient le succès ou l'échec du nouveau produit.
2 / La seconde phase permet d'apprécier la position concurrentielle de l'entreprise face A sa concurrence potentielle directe ou indirecte.
Sur certains de ces facteurs, le fournisseur peut air une emprise. Sur d'autres, il peut n'air aucune influence; ce sont alors des variables exogènes non maitrisées, sur lesquelles il peut faire des hypothèses et construire des scénarii.
Au contraire, les facteurs endogènes de succès sont par définition les caractéristiques que l'entreprise doit présenter pour réussir sur le marché (flexibilité de l'outil de production, niveau des coûts de production, niveau technologique, qualité du réseau de vente et de distribution, image de la firme, etc.).
Ces caractéristiques varient d'un secteur industriel A l'autre, d'un marché A un autre.
C'est sur ces points que la seconde phase va porter : comment se place l'entreprise par rapport aux concurrents potentiels ?
Cette évaluation se fait sur la base d'enquAStes en amont et en aval de la firme, chez les prescripteurs (sociétés d'ingénierie par exemple), chez les fournisseurs de biens et services complémentaires, et A partir de l'étude des documents financiers, de la structure de la firme et de ses concurrents (structure et répartition du capital, étude de l'imtation industrielle et commerciale, résultats financiers, endettement, etc.).
3 / La troisième phase. ' La position concurrentielle est un élément fondamental pour évaluer la part de marché que peut raisonnablement atteindre l'entreprise. Les résultats des deux premières phases de cette démarche permettent la mise en œuvre de la troisième qui est la définition d'alternatives pour le lancement du nouveau produit. Ici, la question posée est : comment et avec quel résultat escompté lancer l'innovation, quand, sur quel segment du marché, en collaboration avec qui, avec quel mix (variables stratégiques). Cela est fonction des valeurs prises par les variables exogènes non maitrisées et des hypothèses que l'on formule A leur propos (variables hypothétiques). Supposons que les deux premières phases aient permis d'identifier pour un produit nouveau donné, sur un ou des segments particuliers, que les variables stratégiques pour réussir sont :
S1 : la différence de prix par rapport A un produit traditionnel de l'entreprise; S2 : le partenaire, industriel, spécialiste d'une technique intégrée au nouveau produit; S3 : l'importance de la force de vente;
S4 : l'intensité de l'effort publicitaire au moment du lancement et dans l'année qui le suit.
Supposons que les variables hypot-hétiques exogènes qui conditionnent le succès du nouveau produit sont :
H1 : le niveau des
aides des pouirs publics aux entreprises clientes; H2 : la stratégie des concurrents;
H3 : le risque géo-politique dans telle région du monde où est produite la matière première du produit.
On peut envisager A partir de cela plusieurs options stratégiques en plusieurs scénarii.
Les réponses A ces questions ne sont jamais faciles A donner. Il faut les considérer comme un moyen d'évaluer les risques inhérents au lancement de tout nouveau produit, comme une aide au décideur qui devra retenir une option stratégique.
b. Une approche centrée sur le mix
Cette seconde approche de l'étude de marché d'un nouveau produit industriel est beaucoup plus orientée vers la
connaissance des comportements des acteurs, leur perception des technologies et des produits concurrents, l'analyse de la concurrence et la conception d'un mix cohérent. Nous lui donnons la forme d'une liste de contrôle détaillée où chaque question a sa justification1; on peut noter que cette liste d'items peut AStre utilisée dans un ordre différent, pour la première approche d'étude de marché industriel décrite plus haut.
1 / La connaissance du produit
Quel est le besoin couvert par le produit ? ' Il s'agit ici d'oublier les aspects techniques du produit pour se placer au point de vue de l'utilisateur. Quelle sera la - fonction d'usage - du produit ? C'est-A -dire : A quoi sert le produit ?
Il est utile d'interroger l'utilisateur potentiel sur l'ensemble des produits qui remplissent, de son point de vue, la mASme fonction; cela permettra de mieux connaitre l'univers concurrentiel dans lequel entre le nouveau produit.
' Le besoin couvert est-il spécifique d'un type d'utilisateur particulier ou se retrouve-t-il chez d'autres ? Le concepteur pense souvent A un type d'utilisateur particulier en arrAStant les spécifications techniques du produit ou du procédé, et découvre plus tard l'existence de nouveaux usages ou d'utilisateurs auxquels il n'avait pas pensé. C'est pourquoi cette question doit AStre traitée très tôt en profondeur et avec un esprit imaginatif.
' Comment ce besoin est-il couvert actuellement ? Existe-t-il d'autres produits ou d'autres solutions techniques qui remplissent la mASme fonction ? Un produit ou procédé nouveau est appelé A remplir une fonction qui, en règle générale, n'est pas fondamentalement nouvelle. Le produit peut AStre nouveau mais sa fonction seulement améliorée ou modifiée par rapport aux produits existants. Ainsi, lorsque plusieurs solutions techniques répondent A un mASme besoin ou remplissent une mASme fonction, il convient de se demander :
' Quels sont les produits correspondants qui sont susceptibles d'AStre substitués ?
' Quelles sont les contraintes majeures que ces solutions rencontrent ? Quelles contraintes le produit envisage permet-il de lever ?
' Existe-t-il des normes, professionnelles ou réglementaires, permettant de er les différentes solutions techniques entre elles?
' Quels sont les produits complémentaires du produit en question ? En considérant l'utilisation du nouveau produit, on en découvre d'autres qui concourent eux aussi A la réalisation de la fonction d'usage.
L'extension aux produits complémentaires est importante car elle facilite la prévision de la demande lorsque ces produits existent déjA . Elle permet d'identifier les entreprises qui sont susceptibles de réagir A l'introduction du nouveau produit mASme si ces entreprises ne sont pas directement concurrentes.
2 / L'analyse de la demande
La liste de questions A étudier comprend trois parties :
' la structure et l'élution de la demande;
' la segmentation du marché;
' les acteurs et l'acte d'achat.
2.1 / La structure et l'élution de la demande :
' Le produit envisagé s'adresse-t-il au marchéfranA§ais ou A un ou plusieurs marchés étrangers ? Si le produit est par nature destiné A un marché étranger, les questions suivantes se placent dans le contexte du ou des pays concernés; certains produits ou procédés nouveaux ne peuvent se conceir en dehors du Contexte mondial.
Si le produit s'adresse en priorité au marché franA§ais, les aspects internationaux ne doivent cependant pas AStre ignorés. Les mASmes questions doivent AStre reprises pour chaque pays ou groupe de pays potentiellement intéressants et les disparités majeures entre la France et l'étranger doivent AStre relevées.
' La demande est-elle concentrée ? Pour les produits industriels, la demande peut AStre concentrée dans certaines branches, ire dans une seule (service pour le secteur para-pétrolier, matière active pour la pharmacie) ou au contraire AStre dispersée sur de très nombreuses branches (lubrifiants, systèmes d'économie d'énergie, accumulateurs). Selon que la demande est concentrée ou diffuse, le problème de la segmentation, et donc du choix du positionnement du produit, se pose de manière très différente. Dans le cas d'une demande diffuse, la sélection d'un point d'entrée (premier segment visé) est souvent déterminante pour le succès ou l'échec du produit en question. Dans tous les cas, il faudra adapter les moyens d'investigation sur le marché et les méthodes de promotion et de commercialisation au niveau de concentration de la demande.
' Quelle est l'élution récente de l'activité dans les branches ou pour les utilisateurs concernés par l'introduction du nouveau produit ? Au-delA de l'appréciation générale portée précédemment en termes de maturité, il s'agit ici de recueillir des éléments quantifiés sur l'activité (production, ventes, investissements, prix) dans les branches d'activité visées par le produit.
' Quels sont les facteurs déterminants de celte élution? Pour les produits industriels ces facteurs peuvent AStre la sensibilité A la conjoncture, le prix des produits et des consommations intermédiaires, les cycles pluri-annuels liés A l'investissement, le contexte international, etc.
Une analyse des cinq dernières années doit AStre complétée par une étude des tendances sur les deux prochaines, pour lesquelles les instituts de conjoncture (tels que le bipe) peuvent donner des renseignements utiles.
' Quelle prévision peut AStre faite de l'élution future de la demande A un terme proche ? A partir des facteurs d'élution identifiés précédemment, il faut chercher des indicateurs A partir desquels élir une prévision de la demande A moyen terme (cinq ans).
L'extrapolation des tendances passées doit AStre très prudente. Quelques scénarii peuvent AStre construits A partir d'enquAStes auprès d'utilisateurs et d'interviews d'experts. On cherche généralement A formuler deux hypothèses (haute et basse) sur l'élution probable de la demande en lume et A répondre aux questions :
» l'élution future sera-t-elle radicalement différente de l'élution passée ? pour quelles raisons ?
» existe-t-il des facteurs d'accélération ou de ralentissement des tendances observées ?
2.2 / La segmentation
' Faut-il segmenter le marché ? La segmentation n'a de sens que lorsque le nombre d'acheteurs potentiels est important. Si le produit s'adresse A un nombre restreint (quelques dizaines) d'acheteurs, la politique de marketing doit AStre adaptée cas par cas (bien d'équipement A très forte valeur unitaire, procédé industriel spécifique d'une industrie).
Un équilibre doit AStre trouvé entre le degré de précision de la segmentation et son utilité. Des segments très étroits sont rarement utiles : le coût de l'adaptation d'une politique de marketing A chaque cas est plus élevé que le gain en efficacité. A l'opposé, des segments très larges peuvent regrouper des utilisateurs trop différents pour qu'une mASme politique soit mise en œuvre.
Dans le cas d'un produit radicalement nouveau, la segmentation est une analyse très utile, mais les moyens disponibles pour le marketing sont alors généralement limités. Dans l'attente d'une perception plus complète la question est : quelle première porte d'entrée sur le marché choisir ? Le bon choix d'un terrain de test du marché est souvent déterminant pour le succès ou l'échec final du nouveau produit. La segmentation permet alors de faciliter le choix de ce point d'entrée et de mieux définir les efforts de marketing qui devront s'y concentrer.
' Quels sont les critères pertinents de segmentation ? La base de la segmentation doit toujours viser le comportement d'achat. Les critères A retenir sont donc les variables qui influent sur ce comportement et déterminent la motivation de l'acheteur. Il s'agit ici de définir des segments qui soient :
' suffisamment larges pour l'entreprise;
' utilisables pour la politique de marketing.
Les critères doivent AStre mesurables de faA§on opérationnelle et les informations correspondantes obtenues A un coût raisonnable.
Les critères les plus fréquemment utilisés pour les produits industriels, pour les biens intermédiaires ou biens d'équipement pour l'industrie, et pour les procédés industriels sont les suivants :
' secteur d'activité de l'entreprise;
' taille de l'entreprise (effectifs, chiffre d'affaires);
' localisation géographique;
' nature du processus technologique de production (type de consommateurs intermédiaires, niveau d'intégration dans la filière de production);
' nature des investissements, niveau et rythme de renouvellement;
' performance économique (profit, taux de croissance);
' Quelles sont les caractéristiques de chaque segment ? Une bonne segmentation doit permettre d'apprécier l'intérASt économique de chaque segment pour l'entreprise (profit, gain en part du marché global, image) et de préparer une stratégie où les spécificités de chaque segment seront prises en compte.
Pour chaque segment, il faut donc déterminer :
' le nombre d'acheteurs potentiels;
' l'importance moyenne de l'achat;
' le degré de concurrence sur ce segment;
' les stratégies de marketing qui conviennent A ce segment.
d'entrée sur le marché choisir ? Le bon choix d'un terrain de test du marché est souvent déterminant pour le succès ou l'échec final du nouveau produit. La segmentation permet alors de faciliter le choix de ce point d'entrée et de mieux définir les efforts de marketing qui devront s'y concentrer.
' Quels sont les critères pertinents de segmentation ? La base de la segmentation doit toujours viser le comportement d'achat. Les critères A retenir sont donc les variables qui influent sur ce comportement et déterminent la motivation de l'acheteur. Il s'agit ici de définir des segments qui soient :
' suffisamment larges pour l'entreprise;
' utilisables pour la politique de marketing.
Les critères doivent AStre mesurables de faA§on opérationnelle et les informations correspondantes obtenues A un coût raisonnable.
Les critères les plus fréquemment utilisés pour les produits industriels, pour les biens intermédiaires ou biens d'équipement pour l'industrie, et pour les procédés industriels sont les suivants :
' secteur d'activité de l'entreprise;
' taille de l'entreprise (effectifs, chiffre d'affaires);
' localisation géographique;
' nature du processus technologique de production (type de consommateurs intermédiaires, niveau d'intégration dans la filière de production);
' nature des investissements, niveau et rythme de renouvellement;
' performance économique (profit, taux de croissance);
' Quelles sont les caractéristiques de chaque segment ? Une bonne segmentation doit permettre d'apprécier l'intérASt économique de chaque segment pour l'entreprise (profit, gain en part du marché global, image) et de préparer une stratégie où les spécificités de chaque segment seront prises en compte.
Pour chaque segment, il faut donc déterminer :
' le nombre d'acheteurs potentiels;
' l'importance moyenne de l'achat;
' le degré de concurrence sur ce segment;
' les stratégies de marketing qui conviennent A ce segment.
2.3 / Les acteurs et l'acte d'achat. ' En milieu industriel, l'acte d'achat est influencé par de nombreux acteurs, tant A l'intérieur qu'A l'extérieur de l'entreprise. Il s'agit alors d'identifier les intervenants, leur marge de manoeuvre, leurs critères de choix ou de prescription, et leur pouir sur la décision finale (ir ci-dessus B. b).
' Sur quels critères sont effectués les choix des intervenants dans l'acte d'achat ? Chacun réagit en fonction des problèmes et des contraintes auxquels il est confronté, de son expérience, de ses connaissances, de son système de valeurs. Il est important de connaitre les attentes et la sensibilité des intervenants A différents critères, ne serait-ce que pour présenter le nouveau produit sous son jour le plus farable et développer les argumentaires correspondants.
3 / L'analyse de l'offre
Quel est le domaine économique dans lequel s'insère l'activité envisagée ? Comment déterminer la place que l'entreprise peut prendre par rapport A ses concurrents potentiels ? Quels seront les facteurs clés de réussite dans ce secteur ? L'analyse de la concurrence est indispensable pour choisir la stratégie A suivre au moment du lancement et tout au long du développement commercial du produit.
' Quelles sont les entreprises susceptibles de mettre sur le marché un produit similaire ou de réagir A l'introduction du nouveau produit ? La concurrence provient rarement d'une entreprise située dans un domaine d'activité qui n'est pas, d'une manière ou d'une autre, connexe au produit considéré. Le plus souvent, la concurrence provient :
' d'entreprises réagissant A l'introduction du produit parce qu'il peut en remplacer un qu'elles proposent déjA ;
' d'entreprises productrices de produits intermédiaires entrant dans la fabrication du produit en question et qui ient dans le nouveau produit une possibilité de valorisation en aval;
' d'entreprises productrices de produits complémentaires, qui connaissent donc déjA les utilisateurs potentiels et qui ient dans le nouveau produit une possibilité de diversification A partir de leur clientèle actuelle.
Il s'agit ici d'identifier ces entreprises en France, et le cas échéant A l'étranger; mais retrouver l'information sur ces entreprises est toujours une tache délicate lorsqu'elles font partie de groupes industriels complexes.
' L'offre de produits substitués est-elle concentrée ? Un indicateur de concentration utilisé couramment est la part des ventes totales de la branche réalisée par les trois ou quatre premières entreprises. Si cet indicateur dépasse 80 %, la branche est fortement concentrée; en dessous de 20 %, elle est très atomisée.
' Les entreprises fournissant le produit substitué sont-elles spécialisées dans ce produit ? L'indicateur de spécialisation retenu le plus souvent est la part du chiffre d'affaires / ca total de chaque entreprise réalisé sur le produit en question. Au-delA de 50 % des ventes réalisées sur ce produit, l'entreprise est très spécialisée.
En règle générale, une prédominance d'entreprises spécialisées indique un marché difficile A pénétrer.
' Quelles sont les réactions possibles des entreprises directement concurrentes ? Le niveau de concentration de l'offre sur le produit substitué et la spécialisation des entreprises concernées permettent de rapprocher l'univers concurrentiel dans lequel entre le nouveau produit de l'un des quatre types.
' Les entreprises fournissant dans la filière des produits intermédiaires jouissent-elles d'une position privilégiée pour pénétrer sur le nouveau marché ? Plus la part relative des produits intermédiaires (matières premières, composants) incorporés dans le produit en question est importante, plus la valeur ajoutée est faible par définition. Si cette part est importante, il est indispensable d'analyser la place que détiennent les entreprises fournissant ces produits :
' Existe-t-il un produit intermédiaire dont la fourniture est essentielle ? Quelles sont les entreprises de la filière qui contrôlent ce produit ? L'offre de ce produit est-elle concentrée ?
' Quelles sont les réactions possibles de ces entreprises ? Si elles se cantonnent dans un rôle de fournisseur, quelle est leur liberté d'action sur le prix du produit ? Peuvent-elles lancer un produit similaire en profitant de leur maitrise d'un produit intermédiaire essentiel ?
' Quelle est la place des entreprises fournissant des produits complémentaires ? Lorsque le produit envisagé s'intègre dans un ensemble plus complexe de produits ou de services vis-A -vis d'un mASme utilisateur final, il est indispensable de connaitre la place que détiennent d'autres personnes auprès de cette mASme clientèle pour des besoins similaires ou isins.
' Quelles sont les performances économiques potentiellement conA§ut rentes ? Il s'agit ici d'évaluer sur le financier les capacités de réaction des entreprises concurrentes ou potentiellement concurrentes, c'est-A -dire d'analyser leur performance économique et d'apprécier leur capacité financière.
4 / Distribution et communication
Un très bon produit peut connaitre un échec commercial. Ce sera le cas si les méthodes de distribution et de communication ne sont pas adaptées, d'une part aux spécificités du produit et d'autre part aux caractéristiques du marché visé. C'est pourquoi l'étude du marché doit aussi porter sur ces deux points.
' Quelles sont les méthodes de distribution possibles sur ce marché ? Il s'agit d'examiner, de faA§on très complète, les méthodes de distribution et de vente existant dans ce secteur pour des produits similaires, et le cas échéant de s'interroger sur la possibilité d'introduire de nouvelles méthodes.
Pour les marchés industriels et professionnels, les plus fréquentes sont : force de vente traditionnelle (vrp, ingénieurs technico-commerciaux) ; le cash and carry; la vente par correspondance; la vente par téléphone.
' Ces méthodes sont-elles adaptées au produit, au marché, aux moyens et A l'image de l'entreprise? Le système de vente et de distribution choisi doit AStre adapté :
' aux caractéristiques du produit : conditions de stockage et de conservation, lume et fréquence des achats, degré d'innovation, services nécessaires avant et après la vente, etc.;
' aux caractéristiques du marché : concentration géographique, degré de diversité des acheteurs dans leurs attentes et dans leur comportement d'achat, etc. ;
' aux ressources financières et humaines de l'entreprise et A son image.
' L'image des vendeurs et des distributeurs traditionnels de l'entreprise est-elle adaptée aux caractéristiques du produit et du marché ? L'échec d'un produit, bon sur le technique et bien adapté aux besoins du marché, peut s'expliquer par le choix d'une solution de facilité en matière de distribution : l'habitude.
' Quelles sont les méthodes de distribution retenues par les entreprises directement ou indirectement concurrentes? On cherchera l'organisation générale, la répartition géographique et par branche industrielle des systèmes de distribution et de vente utilisés par les concurrents; l'efficacité et le coût de ces méthodes seront abordés dans l'étude de cette organisation générale.
' Quels sont les critères de choix et les intentions d'approvisionnement des intermédiaires ? Comme l'analyse de l'acte d'achat l'a montré, les intermédiaires peuvent AStre des relais, des amplificateurs, ou au contraire des obstacles au développement d'une politique commerciale.
Il est indispensable de connaitre leur attitude face au nouveau produit, surtout s'il est susceptible de déplacer une demande qu'ils traitent déjA . Un échantillon représentatif de distributeurs doit AStre constitué pour connaitre leurs attentes, leurs critères de choix et évaluer l'accueil qu'ils feront au nouveau produit.
' Quelles sont les méthodes de communication possibles pour atteindre le marché? La démarche est isine de celle adoptée pour l'étude de la distribution. Les formes de communication les plus fréquentes sont : la publicité rédactionnelle; la publicité dans la
presse professionnelle; les catalogues et dépliants, le publi-postage; les opérations de démonstration; les foires et expositions; les relations publiques; la force de vente, etc.
' Ces méthodes sont-elles adaptées au produit, au marché, aux moyens et A l'image de l'entreprise? Le degré de nouveauté et de technicité du produit, le niveau de maturité du marché face A la technologie utilisée, la structure du marché (côté offre et côté demande), la pénétration et l'efficacité des différents moyens de communication, l'effort que l'entreprise peut consentir dans ce domaine, l'adéquation des images de la firme et du produit (image actuelle et celle que l'on veut faire passer) A ces moyens de communication sont autant d'éléments A prendre en compte pour répondre A cette question.
' Quelles stratégies ont été adoptées dans ce domaine pour les produits concurrents ? Il s'agit de ir ici les promesses et les justifications des entreprises proposant des solutions concurrentes ou des produits similaires, l'effort de communication et de publicité qu'elles ont consenti, le choix des moyens qu'elles ont fait. Une analyse, mASme sommaire, des actions concurrentes dans ce domaine (recueil de publicité, articles de presse dans différents pays) est souvent très riche d'enseignements et peut AStre menée pour un coût très faible. L'impact de ces actions est A évaluer par des contacts directs (entretiens ou sondages téléphoniques) auprès des utilisateurs et des intermédiaires.
5 / Le prix d'accepilité
Le prix est-il un élément clé dans le choix des clients ? Par prix, il faut entendre non seulement le prix d'achat mais aussi le coût du
financement éventuel, les coûts de fonctionnement, d'entretien, de services annexes, etc. La question est difficile car le client dispose rarement de toutes les informations pour er exactement chacune des options qui se présentent A lui Le prix étudié ici est calculé indépendamment des coûts de production et de commercialisation, c'est le prix acceple par le marché. Ce prix sera ensuite é aux coûts, fixes et variables, et les mesures correctives découlant de l'analyse de la marge seront alors envisagées.
La connaissance du prix d'accepilité suppose des investigations assez complexes puisqu'il faut intégrer A la fois :
' les contraintes levées par le nouveau produit et les contraintes nouvelles qu'il crée;
' les avantages perA§us par rapport aux solutions concurrentes et le prix de ces solutions;
' les coûts annexes d'acquisition qui peuvent AStre différents d'un segment de marché A l'autre;
' le cas échéant, pour des biens d'équipement durables ou semi-durables, la rapidité avec laquelle les clients souhaitent amortir leurs dépenses compte tenu des incertitudes de l'environnement.
Si la question est difficile, il est clair qu'elle est très importante car la réponse déterminera la marge qu'il sera possible de faire sur ce produit.
' Quels sont les coûts annexes d'acquisition du produit ? Il s'agit ici de cerner toutes les dépenses que devra faire le client, outre le prix d'achat, pour utiliser le produit :
' coût de financement ;
' coût de l'installation et de la mise en œuvre;
' coût de l'entretien;
' coût de la formation du personnel;
' coût de fonctionnement.
' Quel est le délai d'amortissement du produit ? Dans le cas des produits qui nécessitent un investissement, le prix d'accepilité et le délai d'amortissement souhaité par le client ne sont pas sans relation.
Le délai d'amortissement (ou délai de récupération de l'investissement) souhaité est fonction du niveau d'incertitude sur le marché et sur l'environnement général (social, politique, économique, réglementaire, etc.) : dans un environnement insle, par exemple, la tendance générale sera A des délais d'amortissement assez courts.
' Quels sont
les prix des solutions techniques concurrentes ou des produits similaires directement concurrents ? Si cette information est disponible, on examinera les prix de vente pratiqués ou envisagés par les entreprises concurrentes et on tiendra compte de tous les coûts annexes que devront supporter les clients.
' Quel est le prix d'accepilité du produit ? Le prix d'accepilité est le résultat de la aison des avantages et des inconvénients du nouveau produit, pour chacun des segments du marché.
Pour apprécier le prix d'accepilité, on a recours en général A la
constitution de groupes de clients potentiels, et pour les marchés où les intermédiaires jouent un rôle déterminant, A des groupes d'intermédiaires et de distributeurs potentiels.
D. La gestion des appels d'offres
Cet aspect des transactions entre organisations constitue l'une des spécificités du marketing industriel.
Ici la demande s'exprime avant que l'offre propose un produit, un procédé ou un service en réponse au besoin formulé, et la transaction a souvent lieu avant que les produits existent. Ces produits ' au sens large ' sont en général A haut risque et représentent un investissement important pour l'acheteur; ils ont par conséquent un caractère stratégique et ne font donc pas l'objet d'achats répétitifs.
La démarche que l'acheteur va mettre en oeuvre a pour objectif de réduire les risques au minimum.
Temps fort de cette démarche : l'émission d'un appel d'offres (ao), précédé d'une phase de préparation dans l'organisation émettrice d'autant plus longue et impliquant d'autant plus d'échelons hiérarchiques que le produit attendu conditionne la production et le développement de celle-ci.
Il est suivi d'une phase de dépouillement et de choix tenant compte de plusieurs critères dont le prix, qui n'est pas le seul ni nécessairement le premier d'entre eux.
Dans l'entreprise qui répond A I'ao, celui-ci n'est en général qu'un parmi plusieurs traités simultanément. A chacun correspond une - affaire - dont un ingénieur d'affaires a la charge. Chaque - affaire - passe par différentes phases, depuis la réception de I'ao jusqu'A la livraison et la mise en œuvre du produit, procédé ou service, et au suivi après la vente.
Nous verrons successivement le processus des affaires et la sélection des appels d'offres.
a. Le processus des affaires
Le métier de l'ingénieur d'affaires n'est pas simple. Réaliser une affaire, c'est vendre un produit - sur mesure - qui n'existe pas encore, ou n'est mASme pas parfois au stade de prototype (produit) ou de pilote (procédé). Il doit maitriser l'affaire dans toutes ses dimensions : il faut donc qu'il soit un vendeur efficace, mais aussi un technicien et un gestionnaire A mASme de suivre jusqu'au bout la réalisation et la mise en oeuvre de la solution proposée au client. Il faut aussi qu'il sache prendre de la hauteur par rapport A - son- affaire, avant, pendant et après la réalisation du produit ou procédé. Avant, il doit intégrer A sa réflexion les solutions techniques que son entreprise a déjA proposées dans d'autres affaires afin de ne pas - réinventer - ce qui y existe déjA . Pendant, il doit rechercher des solutions techniques modulaires qui permettront d'adapter le produit A un besoin élutif ou A d'autres besoins exprimés dans de nouveaux ao.
Après, il doit faire connaitre A l'intérieur de l'entreprise, notamment aux autres ingénieurs d'affaires, les spécifications techniques du produit qu'il a réalisé et les solutions qu'il a retenues.
Le cycle d'une affaire peut débuter avec l'arrivée d'un ao, mais il est préférable qu'il commence par une activité de prospection, car dans le cas de l'eni discrétionnaire d'une offre, l'entreprise doit AStre connue et sa technologie bien identifiée pour qu'elle en soit destinataire. De plus, l'ingénieur d'affaires peut participer A la préparation, ire A la rédaction de I'ao.
b. Les appels d'offres
Parmi les transactions portant sur des biens ou services dits- industriels-, la pratique des appels d'offres mérite, compte tenu de son importance économique, un développement particulier. Cette pratique est courante non seulement pour l'achat ou la réalisation - sur mesure - de biens d'équipements ou pour les opérations d'ingénierie mais pour l'achat de biens de consommation courante en grande quantité, ou pour une longue période, par de grandes entreprises ou des administrations.
L'intérASt de l'appel d'offres pour l'émetteur est de mettre en compétition plusieurs fournisseurs de produits, de services ou de technologie, de pouir er leurs performances et leurs prix et ainsi réduire les risques inhérents A tout achat important.
Le point de départ du processus est la rédaction d'un cahier des charges.
Le cahier des charges est un document décrivant avec le plus de précision et de détails les prestations auxquelles doivent s'engager les fournisseurs. Il doit AStre en principe formulé plutôt en termes de besoins A satisfaire et de résultats escomptés qu'en termes de moyens encore que beaucoup de cahiers des charges ne respectent pas cette règle. Il doit en principe exprimer ce que le bien ou le système ou le service doit produire, et non comment on l'élabore. En d'autres termes, il énonce les problèmes A résoudre et non les spécifications techniques et caractéristiques précises des matériels1.
Il faut souligner que la rédaction du cahier des charges est une opération capitale, car il est A la base du contrat qui va lier le fournisseur et le client. Sa valeur est autant juridique que technique.
Le cahier des charges est enyé aux fournisseurs potentiels et aux entreprises souhaitant soumissionner après une éventuelle annonce dans une publication professionnelle spécialisée.
Les réponses sont scrupuleusement étudiées et les choix se font selon des critères objectifs, en général :
' le respect du cahier des charges; le sérieux du fournisseur; la
qualité du service après vente proposé et son coût; le prix; le caractère adaptatif (ou modulaire) de la réponse qui permettrait, le cas échéant, de satisfaire un besoin en élution.
PlaA§ons-nous