Les trois dernières décennies ont vu le déloppement d'activités terroristes dépassant les frontières nationales. Ce déloppement a entrainé des réactions dirses des Etats et conduit A une coopération internationale accrue, notamment dans le domaine juridique. De nombreuses conntions bilatérales ou multilatérales ont été signées A cet effet. Mais, face aux actions terroristes, les gournements ont sount été partagés entre la volonté de saur des victimes innocentes et celle de saisir les criminels et de les chatier. Ces hésitations ont parfois été A l'origine de tensions tant internes qu'internationales, comme le montre le cas du navire italien Achille Lauro détourné en Méditerranée en 1985 par un commando palestinien.
I. LES FAITS
A. Le détournement de l'Achille Lauro
L'Achille Lauro, paquebot italien de croisière ayant GASnes pour port d'attache, se rend, le lundi 7 octobre 1985, d'Alexandrie A Port-Saïd ac A bord 202 passagers de dirses nationalités et 344 membres d'équie. Alors que le navire se trou A environ 10 milles marins des côtes égyptiennes, quatre membres d'un commando se réclamant du Front de libération de la Palestine (une des factions de l'Organisation de libération de la Palestine) s'en emparent rs 1 heure de l'après-midi. Ils décident de séparer vingt ressortissants américains et britanniques du reste des passagers et de les isoler dans le grand salon du paquebot. Ils exigent en mASme temps qu'un message soit diffusé par radio, menaA§ant de tuer les passagers, en commenA§ant par les Américains, si le gournement israélien ne libère pas une cinquantaine de prisonniers palestiniens. Enfin, ils donnent ordre au capitaine d'appareiller pour le port syrien de Tartous.
Le mardi 8 octobre, A 11 heures du matin, l'Achille Lauro mouille au large de Tartous, A 7 milles du rivage, et les auteurs du détournement prennent contact par radio ac les autorités syriennes. Ils leurs demandent d'internir auprès des consuls américain et britannique pour que Washington et Londres fassent pression sur Tel Aviv en vue d'obtenir la libération des prisonniers palestiniens. Peut-AStre en vue de prénir une attaque par hélicoptère, les membres du commando font monter sur le pont supérieur dix-neuf des passagers américains et britanniques (le vingtième, un Juif américain, M. Klinghoffer, qui ne pouvait se déplacer qu'en chaise roulante, restant dans le salon). Les autorités syriennes se mettent en rapport ac les gournements intéressés. Ceux-ci leur font connaitre qu'ils n'entendent pas entrer dans une telle négociation. Damas refuse A l'Achille Lauro l'entrée du port de Tartous et condamne publiquement le détournement. C'est alors que, rs 3 heures de l'après-midi, l'un des membres du commando, réalisant ses menaces antérieures, exécute M. Klinghoffer. Le cadavre est jeté A la mer.
Puis le commando ramène au salon les autres passagers américains et britanniques, donne ordre au capitaine d'appareiller pour la Libye et fait passer par radio un message précisant que deux passagers ont déjA été exécutés et menaA§ant d'en tuer d'autres si satisfaction ne lui est pas donnée.
Dans l'intervalle, les gournements italien et américain ne sont pas restés inactifs. A la suite de démarches effectuées auprès de l'Organisation de libération de la Palestine, celle-ci condamne le détournement et, dès le 8 octobre au matin, le président Arafat offre ses bons offices. Un commando italien est par ailleurs expédié sur la base militaire britannique d'Akrotiri A Chypre et la flotte américaine de la Méditerrannée est mise en état d'alerte. Les Italiens penchent cependant pour la négociation, tandis que le président Reagan envisage une action de force, dans la nuit du 8 au 9 octobre.
B. La négociation du Caire
Les participants de la négociation l'emportent cependant. Aboul Abbas, chef du FLP, sous la pression, semble-t-il, du président Arafat, décide de se rendre au Caire. Il entre en contact ac le commando et celui-ci, le 8 au soir, donne ordre au capitairc de changer sa route et de gagner Port-Saïd. L'Achille Lauro arri en vue des côtes égyptiennes A l'aube du mercredi 9 et jette l'ancre A 15 milles de ces côtes.
De son côté, le président Arafat envoie messages sur messages au Premier ministre italien Craxi et au président égyptien Moubarak. Il cherche A obtenir la libération des otages et des garanties en ce qui concerne le sort des auteurs du détournement. Jouant les médiateurs, les autorités égyptiennes proposent alors aux ambassadeurs d'Allemagne, des Etats-Unis, d'Italie et du Royaume-Uni de signer un accord selon lequel, en cas de libération des otages, leurs gournements s'engageraient A ne pas ouvrir d'action pénale A rencontre des membres du commando et A ne pas en demander l'extradition, étant entendu que les intéressés seraient remis A l'OLP A Tunis pour interrogatoire et procès éntuel. Cet accord de sauf-conduit est paraphé par les représentants de l'Egypte, de l'Allemagne et de l'Italie au Caire, le mercredi 9 octobre, A 3 heures de l'après-midi. Les ambassadeurs américain et britannique refusent de signer ce document.
A 3 h 30. une dette égyptienne vient chercher les auteurs du détournement et les ramène A terre. Deux représentants de l'OLP les prennent en charge. Le lendemain jeudi 20 octobre au soir, un Boeing 737 d'Egypt Air décolle du Caire pour Tunis, ac A bord les quatre membres du commando, deux représentants de l'OLP (l'un d'entre eux étant Aboul Abbas), quelques fonctionnaires égyptiens et dix gardes armés.
C. L'interntion américaine
L'avion égyptien n'arrira jamais A destination. Les autorités tunisiennes, puis grecques lui refusent en effet l'entrée de leur espace aérien et l'appareil fait demi-tour rs Le Caire. En cours de route, il est cependant intercepté, sur ordre du président Reagan, par quatre chasseurs ayant décollé du porte-avions Saratoga et il est contraint de se poser sur la base de Sigonella, A proximité de Catane en Sicile. Dans les minutes qui précèdent, les Italiens ont donné leur accord A l'atterrissage et, immédiatement après s'AStre immobilisé, l'appareil égyptien est entouré par des soldats italiens de la base. Deux transports de troupes américains C 414 atterrissent en mASme temps, une cinquantaine de soldats américains en sortent et encerclent A leur tour l'appareil. Ce commando américain, placé sous les ordres du général Sliner. a pour instructions - d'arrASter les terroristes - et de les ramener aux Etats-Unis. Au cours d'une conrsation
téléphonique nocturne, le Premier ministre Craxi fait cependant connaitre au président Reagan qu'il se refuse A laisser internir les forces armées américaines sur le sol italien.
Les discussions commencent alors entre Italiens, d'une part. Egyptiens et Palestiniens, de l'autre. Le ndredi 11 octobre, A 5 heures du matin, les Egyptiens acceptent de livrer A la police italienne les quatre auteurs du détournement, mais refusent de faire de mASme en ce qui concerne les représentants de l'OLP, et en particulier Aboul Abbas, soupA§onné d'avoir été l'instigateur de l'opération.
M. Craxi envoie alors un membre de son cabinet A Sigonella. Celui-ci peut s'entretenir A bord de l'avion ac Aboul Abbas et, quelques heures plus tard, l'appareil s'envole pour Rome (ac les deux Palestiniens et les Egyptiens), - en vue d'explorer la possibilité d'instigations complémentaires -. Immédiatement, un chasseur et un T 39 américains décollent pour l'escorter. Quatre chasseurs italiens décollent A leur tour de Bari pour -protéger l'avion égyptien pendant son vol -. Le Boeing atterrit A Ciampino le ndredi 11 octobre, A 11 heures du matin, suivi du T 39 (ac A bord le général Stiner).
Le 12 octobre, A 5 h 30 du matin, l'ambassadeur des Etats-Unis A Rome sollicite du ministre de la Justice italien l'arrestation provisoire d'Aboul Abbas en vue de son extradition ultérieure rs les Etats-Unis. Les autorités italiennes rejettent cette demande et n'estiment pas possible en l'état d'ouvrir elles-mASmes une action pénale contre l'intéressé. Aboul Abbas est autorisé A débarquer de l'avion d'Egypt Air et quitte l'Italie le 12 au soir, en empruntant un avion de ligne yougosla. L'appareil égyptien rejoint Le Caire. L Achille Lauro, demeuré entre-temps A Port Saïd, est autorisé A appareiller.
Deux semaines plus tard, le parquet de Syracuse émet toutefois un mandat d'arrASt A rencontre d'Aboul Abbas; ce mandat ne pourra AStre exécuté. A l'issue du procès, les tribunaux italiens prononceront des peines d'emprisonnement A rencontre des membres du commando palestinien. En tant qu'organisateur de l'opération, Aboul Abbas sera condamné par contumace A la prison A vie. Cette peine ne sera pas exécutée.
Les actes de terrorisme ici rappelés et les réactions des dirs gournements intéressés face A ces actes soulènt de multiples questions de droit relatis, d'une part, A la capture mASme de l'Achille Lauro et aux conditions dans lesquelles il y a été mis fin, d'autre part, A l'interception de l'appareil d'Egypt Air et aux conséquences de cette interception.
II. LA CAPTURE DE l'ACHILLE LAURO
A la suite de la capture de l'Achille Lauro, les gournements intéressés se sont, comme d'ordinaire en pareille circonstance, interrogés sur la meilleure méthode pour obtenir A la fois la libération des passagers et le chatiment des auteurs du détournement. Comme d'ordinaire aussi, ils ont hésité entre l'action armée et la négociation. Cette dernière formule l'a finalement emporté, non sans mener A de nouaux rebondissements.
LE DROIT DE LA MER
Du xvi au xix siècle, le
droit international de la mer fut un droit coutumier né du concert européen. Il reposait sur la liberté des mers A laquelle n'étaient apportées que des restrictions peu nombreuses.
Ce régime va se modifier profondément dans la deuxième moitié du xxe siècle sous la pression des Etats nés de la décolonisation et compte tenu des possibilités croissantes d'exploitation des ressources minérales et halieutiques des océans.
Une première tentati de réforme sera opérée par quatre conntions signées A Genè, le 29 avril 1958. Elle n'aboutira pas et une seconde conntion sera préparée sous l'égide des Nations unies. Elle sera signée A Montego Bay le 10 décembre 1982 et entrera en vigueur A l'automne 1994.
Le nouau droit de la mer étend considérablement les compétences des Etats côtiers, qui, désormais, peunt élargir leurs mers
territoriales A 12 milles et créer des zones économiques exclusis allant jusqu'A 200 milles des côtes et des plateaux continentaux qui, dans certains cas, peunt mASme s'étendre au-delA . Il n'en garantit pas moins la liberté de navigation dans ces différents espaces.
Les ressources minérales se trouvant au-delA des zones ainsi définies constituent le patrimoine commun de l'humanité et leur exploitation relè d'une autorité internationale. Ce nouau régime n'a cependant pas été accepté par tous les pays industrialisés et il ne sera probablement pas mis en ouvre sous la forme initialement envisagée.
A. L'action armée
Une action armée sur le paquebot fut étudiée A la fois par les autorités italiennes et par le président Reagan. Encore que ces projets n'aient pas été exécutés, il n'est pas inutile de s'interroger sur leur licéité au regard du droit international.
1A° l'Achille Lauro était immatriculé en Italie. Il battait pavillon italien et possédait la nationalité italienne. L'Italie avait de ce fait incontestablement
compétence pour user de la force en haute mer pour mettre fin au détournement du navire, conformément au droit coutumier tel que codifié sur ce point / par la conntion de Genè sur la haute mer du 29 avril 1958, A laquelle tant l'Italie que les Etats-Unis sont parties. La compétence des autorités italiennes pour agir dans les eaux
territoriales syriennes ou égyptiennes eût cependant été beaucoup plus douteuse ; en revanche, les autorités de Damas ou du Caire auraient pu internir dans ces eaux selon les règles du droit coutumier qui, lA encore, ont trouvé leur traduction dans la conntion de Genè du 29 avril 1958 sur la mer territoriale (article 19) et dans celle de Montego Bay du 10 décembre 1982 (article 27).
2A° Les Etats-Unis auraient-ils de leur côté été en droit de se livrer A une telle interntion comme ils l'ont, semble-t-il, envisagé? A l'occasion de l'interception de l'avion égyptien, ils ont soutenu que le commando palestinien s'était rendu coupable de piraterie maritime et ils auraient pu songer A invoquer ce mASme concept A l'appui d'une action de force A rencontre de Y Achille Lauro.
En effet, selon la formule de Cicéron, les pirates sont - les ennemis du genre humain - et, par voie de conséquence, le droit international reconnait A tout Etat compétence pour saisir en haute mer un navire pirate, pour appréhender les délinquants et pour les traduire en justice. A la compétence nationale se substitue en pareil cas la compétence unirselle.
Mais cette compétence implique qu'aient été commis des actes de piraterie. Plusieurs thèses ont été défendues en ce qui concerne la définition de tels actes en droit coutumier, et certains ont voulu y inclure tout acte de violence conduisant A la prise de contrôle d'un navire en haute mer. Dans cette perspecti, la capture en 1961 d'un navire portugais, la Santa Maria, par des opposants au régime Salazar menés par le capitaine Galvao avait été qualifiée d'acte de piraterie par les autorités américaines, qui étaient alors internues sur la demande de Lisbonne.
Mais cette conception large de la piraterie a été contestée et, lors de l'élaboration des conntions sur le droit de la mer, une définition plus restreinte a été retenue. La conntion de Genè sur la haute mer du 29 avril 1958 et la conntion de Montego Bay précisent en effet que constitue la piraterie
tout acte illégitime de violence, de détention, ou toute déprédation commis pour des buts personnels par l'équie ou les passagers d'un navire privé et dirigés en haute mer contre un autre navire ou contre des personnes ou des biens A bord d'un tel navire.
On voit que cette définition est limitati A un double point de vue : d'une part, les actes de violence commis pour des fins non personnelles ne sont pas regardés comme des actes de piraterie ; d'autre part, ces actes doint AStre dirigés contre un autre navire. En d'autres termes, la mutinerie ne doit pas AStre confondue ac la piraterie. C'est seulement lorsque le navire qui a échappé A l'autorité légitime de son capitaine s'en prend A d'autres navires que les pirates deviennent les ennemis de tous et que la compétence unirselle se justifie.
En l'espèce, cette dernière condition s'imposait aux Etats-Unis en tant que partie A la conntion de Genè, A tout le moins dans ses rapports ac l'Italie, elle aussi partie A cette conntion. Elle n'était pas remplie. Une interntion militaire américaine en haute mer sur VAchille Lauro n'aurait donc pu se fonder sur le concept de piraterie.
Aurait-elle pu AStre présentée comme une interntion
humanitaire en faur des ressortissants américains menacés par le commando palestinien et trour une justification sur ce terrain ?
Le droit du xixc siècle reconnaissait aux Etats la possibilité, en certaines circonstances, d'assurer, mASme par la force, la protection de leurs nationaux A l'étranger et, selon Max Hubert, dans la sentence arbitrale du 25 octobre 1924 concernant les biens britanniques au Maroc esnol :Il est incontestable qu'A un certain point l'intérASt d'un Etat de pouvoir protéger ses ressortissants et leurs biens doit primer le respect de la souraineté territoriale, et cela mASme en l'absence d'obligations conntionnelles. Le droit d'interntion a été rendiqué par tous les Etats, ses limites seules peunt AStre discutées.
De nombreuses interntions de force ont été justifiées par des motifs de ce type mASme depuis la Seconde Guerre mondiale : Etats-Unis au Liban en 1958 ; Belgique au Congo en 1960; Etats-Unis A Saint-Domingue en 1965; IsraA«l en Ouganda en 1976 ; France et Belgique A Kolwezi en 1978 ; Etats-Unis en Iran en 1980. Face A ces interntions, les réactions de la communauté internationale ont été teintées de prudence. C'est ainsi qu'A la suite du détournement d'un aéronef d'Air France sur Entebbe en 1976 l'Organisation de l'Unité africaine avait condamné l'interntion israélienne comme portant atteinte A la souraineté de l'Ouganda, mais que le Conseil de Sécurité, saisi par les Etats africains, ne s'était pas prononcé. La Cour internationale de justice ne prit pas davantage parti dans l'affaire de as.
A supposer fondée la théorie de l'interntion A fin d'humanité, rien n'interdirait en principe de l'appliquer A des situations apparues en haute mer. Mais elle ne saurait en tout état de cause AStre utilisée sans que soit constatée la carence de l'Etat normalement responsable, c'est-A -dire celui d'immatriculation du navire. En d'autres termes, une action américaine eût impliqué en l'espèce que les autorités italiennes aient manqué au devoir de protection qui était le leur en ce qui concerne l'Achille Lauro. Elle aurait, par suite, supposé une appréciation, voire une critique, de l'attitude de ces autorités, soucieuses de protéger la vie des passagers, mais hésitantes A employer pour ce faire des méthodes de force. Tant au diplomatique qu'au juridique, une telle présentation n'eût pas été aisée.
B. La négociation
Il fut cependant mis fin au détournement du navire, non par la force mais par la négociation. Dès lors s'est posée la question de la validité de cette négociation et de ses résultats au regard du droit international.
De nombreuses conntions internationales, conclues sous l'égide des Nations unies ou de leurs institutions spécialisées, ont tenté de prénir et de réprimer dirses infractions pénales fréquemment perpétrées par des terroristes : conntion de La Haye du 16 décembre 1970 sur la capture illicite d'aéronefs; conntion de Montréal du 23 septembre 1971 pour la répression d'actes illicites dirigés contre la sécurité de l'aviation civile ; conntion de New York du 14 décembre 1973 concernant les agents diplomatiques ; conntion de New York du 17 décembre 1979 contre la prise d'otages.
A l'époque des faits, aucun instrument international ne visait les navires, mais la conntion de 1979 relati A la prise d'otages couvrait le cas de
quiconque s'empare d'une personne ou la détient et menace de la tuer, de la blesser ou de continuer A la détenir afin de contraindre une tierce partie A accomplir un acte quelconque en tant que condition de la libération de l'otage.
L'Egypte, les Etats-Unis, la République fédérale d'Allemagne, le Royaume-Uni (mais non l'Italie) étaient parties A cette conntion. Celle-ci créait dirses obligations aux Etats sur le territoire duquel l'infraction était commise ou le délinquant trouvé. De ce fait, elle n'était pas applicable tant que l'Achille Lauro, navire italien, se trouvait en haute mer.
En revanche, elle pouvait trour A s'appliquer dès lors que les responsables de l'opération se trouvaient dans les eaux territoriales égyptiennes ou sur le sol égyptien.
Mais si la conntion de New York, comme toutes les conntions de ce type, comporte des dispositions précises concernant la préntion et la répression des infractions qu'elle définit, elle reste prudente en ce qui concerne les conditions dans lesquelles il peut AStre mis fin A ces infractions. Elle fait certes obligation A l'Etat intéressé de prendre - toutes mesures appropriées pour assurer la libération des otages - et d'assurer la détention des délinquants - s'il estime que les circonstances le justifient -. Mais de telles rédactions laissent A l'Etat une marge de liberté non négligeable dans l'hypothèse où ces deux objectifs apparaissent difficilement conciliables. A l'évidence, la négociation ac les auteurs de l'infraction n'est, aux termes de la conntion, ni obligatoire ni interdite.
Au cas particulier, cette négociation a cependant mené A un accord de sauf-conduit entre l'Egypte, l'Allemagne et l'Italie, selon lequel les membres du
groupe responsable de l'action menée contre le navire italien Achille Lauro devaient se rendre immédiatement sous deux conditions : a) aucune extradition ou demande tendant A leur extradition ou A leur punition ne serait faite ; et b) l'OLP les prendrait en charge.
La validité de ces engagements fut par la suite discutée. Les autorités italiennes soulignèrent tout d'abord qu'elles avaient signé ce texte dans l'ignorance où elles étaient du meurtre de M. Klinghoffer. L'accord aurait été conclu sous la condition implicite que la prise d'otages ne ferait aucune victime. Ayant appris qu'il n'en était rien, l'Italie s'estima déliée de ses engagements et, le jeudi 10 octobre, le Premier ministre Craxi annonA§a que l'Italie avait l'intention de demander A l'Egypte et, si nécessaire, A l'OLP que les quatre auteurs de l'attentat lui soient remis.
Cette argumentation n'était pas sans faiblesse. Certes, la situation au moment de la signature de l'accord de sauf-conduit n'était pas des plus claires. Les auteurs du commando avaient fait annoncer par radio, dès le 8 octobre, l'exécution de deux passagers, mais, selon dirs documents italiens, les autorités égyptiennes auraient fait connaitre, A deux reprises, A leurs interlocuteurs italiens, les 8 et 9 octobre, qu'il n'en était rien. Quant au capitaine de l'Achille Lauro, il semble n'avoir fait part aux autorités de Rome du décès de M. Klinghoffer que le 9 octobre rs 18 heures, lors d'une conrsation qu'il eut alors ac le Premier ministre Craxi. Le doute étant permis avant cette communication, on aurait pu s'attendre A ce que l'accord de sauf-conduit comporte une réser pour le cas où le détournement se serait accomné de mort d'homme. Mais il n'en était rien.
L'accord prévoyait par ailleurs que l'OLP prendrait en charge les auteurs du détournement. Une telle disposition n'allait pas sans poser problème au regard de la conntion de New York, selon laquelle l'Etat sur le territoire duquel les auteurs de l'infraction sont décourts est dans l'obligation soit de les extrader, soit de soumettre l'affaire A ses autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale. Certes, l'Italie n'était pas partie A cette conntion et l'Allemagne pouvait, en signant l'accord de sauf-conduit, renoncer A son bénéfice en ce qui la concerne. Mais les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, parties A la conntion et non signataires de l'accord de sauf-conduit, pouvaient continuer A s'en réclamer, soit pour solliciter l'extradition des intéressés, soit pour exiger qu'ils soient poursuivis en Egypte. Si une telle demande avait été présentée. Le Caire eût été dans une situation délicate.
Au total, la préoccupation première des négociateurs du sauf-conduit a certainement été de mettre fin au détournement de l'Achille Lauro et de libérer ainsi les otages. Ceci explique A la fois les réticences des autorités américaines et britanniques hostiles A toute concession risquant de laisser l'infraction impunie et l'attitude des autorités égyptiennes et italiennes, soucieuses d'aboutir A un compromis sans doute plus aisé A atteindre si la prise d'otages n'avait été accomnée d'aucune exécution sommaire.
III. L'INTERCEPTION DU BOEING éGYPTIEN ET SES SUITES
L'action de force ne fut cependant pas menée contre l'Achille Lauro, mais contre le Boeing 737 d'Egypt Air qui devait transporter A Tunis Aboul Abbas et les membres du commando. Quant aux problèmes d'arrestation et d'extradition, ils n'opposèrent pas l'Egypte aux Etats-Unis ou A l'Italie, mais ces deux derniers pays l'un A l'autre.
A. L'interception
L'interception du Boeing civil égyptien par la chasse américaine soulevait un sérieux problème de droit. En effet, dans l'espace aérien international surplombant la haute mer, les aéronefs civils, comme les aéronefs d'Etat, relènt exclusiment de la juridiction de l'Etat d'immatriculation et un Etat tiers n'a aucun droit A les intercepter.
Les Etats-Unis tentèrent de justifier leur action en qualifiant de - pirates - les responsables du détournement de l'Achille Lauro et en soulignant que tous les Etats ont compétence pour réagir face A la piraterie. Une telle argumentation se heurte cependant A deux difficultés. D'une part, et ainsi qu'il a déjA été souligné, l'action menée par les intéressés ne remplissait pas les conditions requises par le droit conntionnel pour pouvoir AStre regardée comme un acte de piraterie. D'autre part, et mASme si l'on supposait que l'Achille Lauro était denu A un certain moment - navire pirate-, le Boeing égyptien transportant les délinquants ne pouvait AStre qualifié - d'aéronef pirate -. Dès lors, le droit de la piraterie n'autorisait nullement son interception.
Les autorités américaines auraient pu songer par ailleurs A justifier leur action en invoquant le droit de légitime défense consacré par l'article 51 de la Charte des Nations unies, droit dont IsraA«l s'est prévalu dans deux circonstances ables, lors de l'interception par Tsahal d'un avion libanais des Middle East Airlines (MEA) affrété par l'Irak en 1973 et d'un avion privé libyen en 1983. Mais la légitime défense, selon l'article 51, répond A une - attaque armée - d'un Etat contre un autre Etat. Or, si les Etats-Unis auraient pu éntuellement se plaindre du non-respect par l'Egypte de la conntion de New York sur la prise d'otages, il paraissait difficile de voir dans cette méconnaissance une - attaque armée - au sens de l'article 51.
Ce problème de droit international public n'a cependant pas été soulevé devant les
juridictions pénales italiennes. L'aurait-il été que le ministère public se serait probablement prévalu de l'adage maie captus, bene judicatus, qui, du duc d'Enghien A Eichmann ou au colonel Argoult, a été fréquemment invoqué en pareille hypothèse.
B. Les arrestations et le refus d'extradition
L'interception ainsi menée dans des conditions d'une régularité douteuse devait cependant conduire A un double bras de fer entre l'Italie et les Etats-Unis en ce qui concerne, d'une part, l'arrestation des membres du commando, d'autre part, le sort d'Aboul Abbas.
Une fois le Boeing égyptien immobilisé sur l'aéroport de Sigonella, seules les autorités italiennes avaient compétence pour procéder A l'arrestation des responsables de la prise d'otages. Les forces américaines ne pouvaient procéder A une telle arrestation sans l'accord de Rome, qui fut refusé. Les Etats-Unis s'inclinèrent sur le moment, puis firent suivre le Boeing par deux avions militaires de Sigonella A Rome, dans des conditions qui conduisirent le gournement italien A protester contre cette violation de sa souraineté.
A ce stade, le
débat juridique se déplace cependant pour porter non sur l'attitude des autorités américaines, mais sur celle des autorités italiennes. Celles-ci obtinrent de l'Egypte la remise des quatre membres du commando et consentirent A ce qu'Aboul Abbas quitte librement le territoire italien. Que doit-on penser en droit de cette solution ?
La première décision aurait pu entrainer des protestations de la part de l'OLP et des intéressés, qui auraient pu soutenir qu'en procédant de la sorte les gournements italien et égyptien avaient méconnu l'accord de sauf-conduit du 9 octobre. Cette contestation aurait pu A son tour déboucher sur une discussion concernant les conditions dans lesquelles cet accord était internu, dans l'ignorance éntuelle du meurtre de M. Klinghoffer.
Aucune controrse publique ne se déloppa toutefois sur ce point. En revanche, les Etats-Unis protestèrent viment contre le rejet par l'Italie de la demande d'arrestation provisoire d'Aboul Abbas présentée par Washington dans la nuit du 11 au 12 octobre.
Le gournement italien avanA§a trois motifs A l'appui de ce refus. Il soutint en premier lieu que l'avion d'Egypt Air était - en mission spéciale pour le compte du gournement égyptien - et que la police italienne ne pouvait internir de force A son bord sans l'accord du capitaine. Il rappela en deuxième lieu qu'Aboul Abbas était titulaire d'un passeport diplomatique irakien lui conférant l'immunité d'arrestation. Il exposa en troisième lieu que les preus avancées par les Etats-Unis étaient insuffisantes pour justifier une arrestation.
Apprécier la valeur du premier argument n'est pas aisé. Le droit coutumier de la mer reconnait certes aux navires d'Etat certaines immunités dans les eaux intérieures et l'on peut soutenir par analogie que les aéronefs d'Etat jouissent d'immunités analogues. Mais la pratique est fort rare en ce qui concerne ces aéronefs. Elle est encore plus rare pour ce qui est non des aéronefs militaires, mais des aéronefs civils - en mission spéciale -.
Le deuxième argument était, quant A lui, sans aucune valeur. Aboul Abbas était certes titulaire d'un passeport diplomatique irakien, mais il n'était, semble-t-il, accrédité auprès d'aucun Etat ou organisation internationale. Dès lors, il ne jouissait d'aucune immunité diplomatique ou consulaire en rtu des conntions de Vienne relatis A ces immunités.
Le troisième argument touchait A l'interprétation de la conntion d'extradition italo-américaine de 1983. Celle-ci précise, en son article 12 :
En cas d'urgence, chacune des parties contractantes peut demander l'arrestation provisoire de toute personne poursuivie ou condamnée pour une infraction susceptible d'extradition.
Une telle demande doit contenir un certain nombre d'informations, dont
un bref exposé des faits de la cause comprenant, si possible, le lieu et le moment de l'infraction et les preus disponibles.
Dès réception de la demande, la partie requise prend les mesures appropriées pour assurer l'arrestation de la personne recherchée.
Celle-ci peut AStre détenue pendant quarante-cinq jours. Elle est libérée si, dans ce délai, la partie requise n'a pas reA§u une demande formelle d'extradition.
Au cas particulier, les Etats-Unis avaient soumis une demande d'arrestation provisoire accomnée d'une copie du mandat d'arrASt émis par une juge fédéral américain contre Aboul Abbas pour prise d'otages, piraterie et association de malfaiteurs (conspiracy), ac l'indication des peines encourues.