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DROIT

Le droit est l'ensemble des règles générales et abstraites indiquant ce qui doit être fait dans un cas donné, édictées ou reconnues par un organe officiel, régissant l'organisation et le déroulement des relations sociales et dont le respect est en principe assuré par des moyens de contrainte organisés par l'État.


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Les tribunaux judiciaires et l'interprétation des traités

' MASme si le traité est, A  tort, assimilé A  la loi quant A  sa force exécutoire, son interprétation par le juge national pose des problèmes autrement plus difficiles. En effet, la loi nationale est le produit du seul législateur national ; il est relativement aisé d'en dégager le sens ; on peut se référer aux travaux parlementaires, aux déclarations du gouvernement, etc. En outre, il existe une Cour suprASme, la Cour de cassation, qui assurera l'interprétation uniforme de la loi votée par le Parlement.
Rien de tel, bien entendu, n'existe pour un traité. Il est élaboré entre plusieurs Etats, au sein d'une conférence ou de réunions diplomatiques rarement publiques. Ses conditions d'élaboration sont souvent peu aisées A  déterminer pour un observateur extérieur qui n'a pas participé A  tous les travaux ayant mené A  la signature du traité. En un mot, la portée de ses dispositions est plus difficile A  apprécier avec certitude et précision. Dès lors, le juge national est mal armé pour procéder A  cette opération intellectuelle d'interprétation des traités et engagements internationaux souscrits par l'Etat.
En outre, une interprétation donnée par un tribunal national est susceptible d'entrainer des difficultés diplomatiques pour son gouvernement, voir engager la responsabilité internationale de son Etat, au cas où cette interprétation ne serait pas conforme A  l'intention des parties contractantes.
Enfin, il faut noter que la Constitution de 1958 introduit une difficulté supplémentaire, l'article 55 prévoyant que les traités seront certes appliqués en France, mais sous une condition de - réciprocité -. Il est clair que le juge franA§ais saisi n'est pas bien placé pour apprécier cette réciprocité ; il lui est difficile de savoir si ses collègues dans les autres Etats contractants, appliquent bien cette obligation internationale et quel sens ils lui donnent.
Toutes ces considérations expliquent la spécificité de la matière qui peut s'ordonnancer autour de trois propositions générales.

1 ' Le recours par le juge A  la théorie de - l'acte clair -.

' Traditionnellement, les tribunaux judiciaires se sentent pleinement compétents pour appliquer une convention internationale dont le sens leur apparait - clair -, non ambigu. Il en a été ainsi décidé par la Cour de cassation dès le siècle dernier (Cas. crim. 26 juillet 1867, S. 1867,1, 409). Il appartient aux tribunaux judiciaires, disait la Cour, d'interpréter les traités - lorsque, comme dans le cas présent, leur sens ou leur portée ne présentent pas d'ambiguïté -.

' En revanche, lorsque le juge se trouve en présence d'une difficulté d'interprétation, il renverra au gouvernement franA§ais. Notons toutefois que si cette difficulté d'interprétation porte sur une règle du droit communautaire, il existe une procédure spécifique de renvoi devant ta Cour de justice des Communautés européennes pour interprétation finale, et ceci en vertu de l'article 177 du Traité de Rome. Les tribunaux franA§ais n'utilisent que modérément cette procédure, beaucoup moins en tout cas que les autorités judiciaires allemandes, belges ou hollandaises ; c'est enron une dizaine de fois par an que les juridictions franA§aises ' essentiellement judiciaires ' saisissent la Cour de Justice des Communautés Européennes en vertu de l'article 177 (voir la question écrite nA° 98/84 du 13 avril 1984, in J.O.C.E., nA° C 194 du 23 juillet 1984 reproduite également in R.T.D.E. 1985.206).

2 ' La pleine compétence des tribunaux de l'ordre judiciaire pour interpréter les traités internationaux ayant - pour objet des intérASts privés -.

' Cette formule traditionnelle remonte A  un arrASt de la Chambre cile de la Cour de Cassation du 24 juin 1839 dans l'affaire de la succession du duc de Richemond (D. 1839.1.257, S. 1839.1.577). Pour la Cour, l'autorité judiciaire peut interpréter les traités - toutes les fois que les contestations qui donnent lieu A  cette interprétation ont pour objet des intérASts privés -. Avec des formulations extrASmement diverses, cette idée demeure, aujourd'hui encore (voir le rapport Blondeau, p. 50-52).

' La position de la Cour SuprASme a été vement critiquée, A  tort selon nous. Sans doute la frontière est-elle peu aisée A  tracer avec précision entre les litiges d'intérASt privé et ceux qui ne le sont pas. Deux raisons militent pourtant en faveur du maintien de la solution adoptée par la Cour de Cassation : dans la constitution de 1958, - l'autorité judiciaire - est qualifiée de - gardienne de la liberté indiduelle - (art. 66, al. 2). Dès lors, il semble normal que les tribunaux de l'ordre judiciaire exercent pleinement leur rôle lorsque des - intérASts privés - sont mis en jeu par l'ordre international ; en outre, dans ces matières, aucun différend international n'est A  craindre qui risquerait-d'embarrasser le gouvernement et de mettre éventuellement en jeu la responsabilité internationale de la France.

3 ' Le renvoi A  l'interprétation gouvernementale pour les - questions de droit public international-.

' Traditionnellement encore, la Cour de cassation devait estimer que les tribunaux judiciaires devaient renvoyer A  l'interprétation gouvernementale lorsque l'interprétation d'un traité soulevait une question - d'ordre public international - (Cass. crim. 4 et 25 juillet 1867, S. 1867, I, 409).

' C'est d'ailleurs cette position qu'a adoptée la Chambre criminelle de la Cour suprASme. Au départ, cette Chambre montrait son attachement A  une conception très restrictive de l'interprétation judiciaire des traités internationaux, renvoyant systématiquement A  l'interprétation du gouvernement. La Chambre criminelle employait la formule classique suivante : - Les conventions internationales sont des actes de haute administration qui ne peuvent AStre interprétées, s'il y a lieu, que par les puissances entre lesquelles elles sont intervenues - (v. Cass. Crim. 4 décembre 1975, Gaz. Pal. 1976, I.286).
Or un très important rerement de jurisprudence se produisit en 1976 A  propos de l'affaire Touer mettant en cause la prescription des crimes contre l'humanité. La Chambre criminelle ayant noté des ambiguïtés dans la portée du droit conventionnel applicable A  la solution de cette affaire, devait conclure au renvoi en interprétation gouvernementale. Mais elle précisait aussi, et c'est en cela qu'il conent de la retenir : - L'interprétation des traités et conventions diplomatiques échappe A  l'autorité judiciaire lorsque cette interprétation soulève des questions d'ordre public international - (Cass. Crim. 30 juin 1976, Glaeser, Bull. Crim. 1976.620 et voir A.F.D.I. 1977, p. 969-971).
On notera cependant que la Chambre criminelle a gardé sa conception restrictive initiale en ce qui concerne une catégorie particulière de traité A  savoir les conventions d'extradition ; pour elle - les traités d'extradition sont des actes de haute administration intervenus entre deux puissances que seules celles-ci peuvent, de concert, expliquer ou interpréter (et) il n'appartient en aucune manière A  l'autorité judiciaire de s'immiscer dans ces explications ou interprétations - (Cass. Crim. 19 janer 1982, Clunet 1982.605).

' Quant A  la Chambre cile de la Cour de cassation, elle retient une autre formulation, moins imprécise que l'expression < ordre public international - et que l'on trouve dans l'affaire Moss (1a"¢ Ch. civ. 22 mars 1960, J.C.P. 1961.11936, note Aymond, avec le rapport du conseiller Ancel). La Cour s'exprime ainsi : - // appartient aux tribunaux de l'ordre judiciaire d'interpréter les traités diplomatiques, sauf lorsque les dispositions soumises A  leur interprétation mettent en jeu des questions de droit public international- (voir aussi pour d'autres exemples le rapport Blondeau, précité pp. 51-53). La formule ainsi retenue semble préférable A  la précédente, car moins floue. Il reste donc A  souhaiter que la Chambre criminelle se range A  la position des autres chambres de la Cour de cassation faisant maintenant référence aux - questions de droit international public -, mASme si cette expression n'entraine pas une adhésion sans réserve.
En bref, si l'on veut résumer la position des juges judiciaires franA§ais en la matière, on peut dire que la compétence d'interprétation des traités est la règle et que le renvoi A  l'interprétation gouvernementale constitue l'exception.

' Si le juge judiciaire s'estime incompétent pour interpréter un traité, -7 surseoit alors A  statuer jusqu'A  l'interprétation officielle donnée par le gouvernement. En pratique, c'est le ministère public, a le ministre de la justice, qui sollicite l'as du ministre des affaires étrangères, seul compétent en la matière (voir cependant pour une pratique contraire, c'est-A -dire un renvoi en interprétation devant un ministre technique (ici le ministre de la santé et de la sécurité sociale), l'arrASt Soc. 7 mai 1980, Caisse Prim. d'assu. maladie de Lyon, Bull. civ. 1980, V. 295).
On notera que l'interprétation donnée par le ministre des Affaires étrangères s'impose au juge et le lie. Autrement dit, cette interprétation ministérielle constitue un précédent obligatoire pour le juge franA§ais.
' Une telle solution a été critiquée, mais, selon nous, elle demeure très raisonnable. D'une part, elle assure l'unité d'interprétation d'un traité entre les diverses parties contractantes. D'autre part, elle reconnait la primauté de l'exécutif dans la conduite des relations internationales. Enfin, cette solution diminue les risques de voir la responsabilité internationale de la France engagée du fait des actités de l'autorité judiciaire.



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