' L'Etat peut décider d'aliéner certaines de ses compétences. Ces aliénations sont susceptibles de revAStir des formes dirses, mais elles présentent toujours un point commun : elles supposent en effet l'accord formel ou tacite de l'Etat concerné qui va voir sa
compétence limitée. Il convient ici de rappeler ce principe fondamental qui avait été posé par la C.P.J.I. dans l'affaire sount citée du Lotus, selon lequel - des limitations A la souraineté des Etats ne se présumaient pas -. Ces aliénations peunt porter sur la compétence territoriale ou sur la compétence personnelle de l'Etat.
1 ' Les aliénations de compétence territoriale.
' On envisagera ici seulement les seuls cas d'aliénation partielle de certaines compétences territoriales. En effet, au-delA , il peut y avoir cession de territoire et, dans une telle hypothèse, il en résulte bien évidemment une extinction complète de la compétence de l'Etat cédant.
Certaines aliénations partielles de compétence territoriale sont fondées sur des règles coutumières, d'autres sur des principes conntionnels.
a) Des limites coutumières.
' Si l'on exclut les hypothèses - d'entrée en détresse - de navires ou d'aéronefs, il existe deux séries de cas où un Etat, par le biais de coutumes internationales, va voir sa compétence territoriale en partie aliénée (ou limitée). Il s'agit de la présence de navires étrangers dans ses ports ou de forces militaires étrangères sur son territoire.
I. ' La présence de navires étrangers dans les ports.
' Les navires étrangers vont bénéficier, en tant que tels, de certaines immunités, dans la mesure où, en fait, si ce n'est en droit, ils sont assimilés A une sorte de - territoire flottant - de l'Etat dont ils arborent le pavillon. L'Etat de mouillage va AStre amené A renoncer A exercer une partie de ses compétences A leur égard, mais d'une manière tout A fait inégale en fonction de la nature de ces navires.
S'il s'agit de navires de guerre étrangers, ils bénéficient d'une immunité de juridiction et d'exécution totale : l'Etat territorial les excluera de sa juridiction dans la mesure où ces navires de guerre sont l'une des marques officielles publiques de la souraineté de l'Etat étranger. En revanche, les navires marchands ne jouissent, eux, que d'immunités de juridiction et d'exécution relatis. Ils ne sauraient en bénéficier que dans la limite toutefois où ils ne troublent pas la tranquillité du port où ils sont ancrés.
Cela étant, bien entendu, si la présence de ces navires étrangers limite la compétence de l'Etat territorial, il faut noter que ce dernier a toujours l'entière liberté d'accepter ou de refuser la présence de ces batiments dans ses ports. Une fois qu'il a accepté leur présence, il est amené A voir l'exercice de sa compétence territoriale diminué, en rtu des règles coutumières précitées.
II. ' La présence de forces militaires étrangères.
' LA encore, la présence de forces militaires étrangères va limiter l'exercice par le sourain local de sa compétence territoriale. Ce principe coutumier fut reconnu par
la Cour permanente d'arbitrage, le 22 mai 1909, dans l'affaire dite des déserteurs de Casablanca, qui opposa la France A l'Allemagne (D.P. 1911, II, 177, note Gidel). Avant l'élissement du protectorat franA§ais, la France occupa militairement une partie du Maroc. Trois légionnaires allemands faisant partie des forces franA§aises essayèrent de s'échapper, mais ils furent repris par les troupes franA§aises. Le consulat allemand local protesta et prétendit exercer sa compétence personnelle au profit de ces légionnaires de nationalité allemande. La France, elle, estimait que l'Allemagne était dépourvue de compétence en l'espèce, sa compétence personnelle sur ses ressortissants étant primée par un acte de souraineté franA§ais effectué pour la mise en ouvre de son service public de la
défense nationale. La C.P.A. donna raison A la France dans ce conflit de compétences et s'exprima dans les termes suivants : - Un corps d'occupation exerce, en règle générale, une juridiction exclusi sur tous les hommes appartenant au dit corps d'occupation -.. Il s'agit lA d'un principe coutumier de l'ordre international. Mais, lA encore, on peut faire la mASme remarque que précédemment en ce sens que la présence de troupes étrangères sur le territoire d'un pays déterminé est limitée et conditionnée par le consentement du pays d'accueil. Le plus sount, d'ailleurs, le stationnement de forces militaires étrangères sur le territoire d'Etats tiers est réglé par des conntions internationales. C'est ainsi, par exemple, que des traités spécifiques en précisant le
régime juridique ont été conclus dans le cadre de pactes militaires comme celui de l'Atlantique de 1949 entre les - pays occidentaux - ou de Varsovie de 1955 entre les - pays de l'Est -. Il convient ici de rappeler que l'un des motifs invoqués par le général de Gaulle en 1966 lorsqu'il annonA§a sa décision du retrait de la France des forces militaires intégrées de l'O.T.A.N. et donc le départ des troupes alliées stationnées en territoire franA§ais, fut la préoccupation - de la France de recouvrer sur son territoire l'entier exercice de sa souraineté actuellement entamé par la présence permanente d'éléments militaires alliés - (voir le par. 3 de la lettre adressée par le général de Gaulle au Président Johnson en date du 7 mars 1966).
b) Des limites conntionnelles.
' Par conntion internationale, les Etats peunt accepter d'aliéner certains éléments de leur souraineté territoriale. Par exemple, ils peunt accepter de se placer sous le protectorat d'un pays étranger ; ils peunt céder des bases militaires ; ils peunt louer des terres, ainsi que cela est toujours le cas d'une partie de la colonie britannique de Hong-Kong. Ou encore les Etats peunt s'engager A respecter des - servitudes - internationales : c'est ainsi qu'ils peunt accepter de démilitariser certaines parties de leur territoire, voire certaines villes.
2 ' Les aliénations de compétence personnelle.
' Les aliénations de compétence personnelle peunt également pronir d'engagements de type conntionnel ou coutumier.
A titre conntionnel, l'exemple historique le plus célèbre porte sur le régime dit des - capitulations - que nous avons déjA signalé. Dans certains cas ' Chine, Turquie, Tunisie, Egypte ', l'Etat territorial voyait sa compétence sur les résidents étrangers céder devant la compétence personnelle des Etats tiers. Egalement, on peut citer les traités protégeant les - minorités - qui ont été conclus A la fin de la première guerre mondiale : lA encore le sourain territorial avait accepté d'apporter des limites A l'exercice de sa compétence, A raison du statut personnel institué au profit de certaines catégories de ressortissants étrangers.
Enfin, A titre coutumier, on rappellera les privilèges et les immunités diplomatiques et consulaires reconnus aux représentants des Etats étrangers. Pour l'essentiel, on le rappelle, ils ont été codifiés dans les Conntions de Vienne de 1961 et de 1963. Mais, pour les Etats non parties A ces Conntions, leurs obligations en la matière possèdent un fondement coutumier certain ' voire font partie des normes du - jus cogens - (voir aussi supra, nA° 6).
' En bref, on se trou ici en présence d'autant d'exemples où l'Etat territorial ne pourra pas imposer sa pleine juridiction (notamment dans lé domaine du statut des personnes et de leurs biens) A l'égard de certaines catégories de ressortissants étrangers, en raison de leur protection par un statut international coutumier ou conntionnel spécifique.