NAVIGATION RAPIDE : » Index » DROIT » droit pénal L'applicabilité directe du droit international au sens formel du ternie : les modalités de l'application du droit international dans l'ordre interne
' En général, le droit international est muet quant A la manière dont ses règles s'incorporent au droit interne de l'Etat. En général également, les modalités d'application du droit international dans l'ordre interne sont laissées A la discrétion des Etats qui ont, sur ce point, adopté des solutions fort différentes. 1 ' Le silence du droit international sur les modalités de son application directe dans l'ordre interne. ' L'inexistence d'une telle règle peut paraitre choquante. Tout système juridique ne doit-il pas, en effet, prévoir la manière dont les normes vont s'appliquer A leurs destinataires naturels, les personnes privées ? Cette lacune du droit international montre, une nouvelle fois, son caractère incomplet et imparfait. Pourtant, ce silence du droit international s'explique par plusieurs raisons qui tiennent A son histoire, d'une part, A sa logique, de l'autre. Historiquement, tout d'abord, on s'en souent, le droit international était presque exclusivement constitué de règles non écrites, des coutumes essentiellement, des principes généraux du droit accessoirement. Or ces règles non écrites manquent, le plus souvent, de la précision suffisante pour AStre directement applicables. De plus, de telles règles portent sur le fond du droit applicable et non sur ses modalités d'application, ces dernières étant laissées A la discrétion des Etats. Sur le logique, ensuite, il était difficile, si ce n'est impossible, au droit international de jadis de - dicter - aux Etats une règle commune touchant A ses modalités d'application dans l'ordre interne. S'il en avait été ainsi, cela aurait constitué une limite très sérieuse A la souveraineté étatique. ' Dès lors, le droit international se contente d'affirmer sa supériorité A l'égard du droit interne et il laisse aux Etats le libre choix des moyens pour assurer la mise en ouvre concrète de ce principe cardinal : ainsi ce seront les Etats qui, en tant que souverains possédant une juridiction pleine et absolue (voir supra, nA° 835 et s.) auront la charge d'assurer concrètement dans leur ordre juridique propre, la suprématie du droit international. Dans ces conditions, si les Etats ne prennent pas les mesures nécessaires qui endraient A s'imposer pour assurer l'application du droit international dans leur ordre interne, il y aura lA matière A engager leur responsabilité internationale. Autrement dit, le droit international commande les deux extrémités de la chaine. D'une part, il impose sa suprématie et, de l'autre, il en sanctionne le non-respect. Entre les deux, c'est aux Etats d'assurer dans leur ordre juridique et selon les modalités de leur choix l'intégration éventuelle du droit international. Mutatis mutandis, cette position traditionnelle du droit international est reprise par le droit communautaire en ce qui concerne le régime juridique des directives qui s'imposent aux Etats quant au résultat A atteindre, mais qui leur laissé le libre choix des moyens pour y parvenir (voir l'article 189, al. 3 du traité C.E.E.). Il est d'ailleurs frappant de noter que la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, suive la mASme approche. Si, en effet, l'article 26 pose le principe du respect obligatoire des traités ' la règle - pacta sunt servanda - ' et si l'article 27 pose celui de la supériorité du droit international sur le droit interne, aucune disposition ne ent préciser les modalités d'application des traités dans l'ordre juridique national. De plus, les sanctions pour mauvaise ou non-application des traités dans l'ordre interne des Etats parties contractantes, n'y sont pas ensagées directement, cette matière étant renvoyée au titre de la responsabilité internationale des Etats. ' Ces considérations générales valables pour le droit des traités, le sont également, et pour les mASmes raisons, A propos des actes des Organisations internationales qui endraient A produire des - effets directs -. C'est encore aux Etats membres qu'il incombe de déterminer comment de tels effets directs se produiront dans leur ordre interne. De plus, en la matière, il existe une considération supplémentaire qui pousse dans le mASme sens, A savoir la - publicité - souvent insuffisante de ces actes qui laisse les justiciables dans l'ignorance de leurs droits et obligations éventuels. D'où ici une nécessité supplémentaire de - transcription - dans l'ordre interne de la norme juridique trouvant son origine dans un acte unilatéral d'une Organisation internationale. On notera que la sanction de ce non-respect par l'Etat de la supériorité de l'acte unilatéral obligatoire d'une Organisation internationale est la mASme, A savoir la mise en ouvre éventuelle de la responsabilité internationale de l'Etat fautif. ' Ces principes généraux ' avec quelques différences noles ' sont applicables mASme dans le cadre très particulier du droit communautaire du moins tel qu'il est prévu par le texte du Traité de Rome. Celui-ci, en effet, n'est guère plus précis que le droit international général en ce qui concerne les - moyens - par lesquels le droit communautaire sera - directement - appliqué dans l'ordre interne des pays membres. Sans doute le jeu combiné des articles 189, al. 2 et 191 du Traité de Rome permet d'arriver A la conclusion, au moins pour, les règlements, que leur simple publication au Journal Officiel des Communautés européennes suffit pour les rendre directement applicables dans l'ordre juridique interne des pays membres. ' S'il en allait autrement, c'est-A -dire si le droit international imposait lui-mASme aux Etats les modalités de son application dans l'ordre interne, on se retrouverait alors, A l'édence, dans un système de type fédéral. Telle est, par exemple, la situation aux Etats-Unis en vertu de la fameuse clause dite de suprématie, contenue A l'article 6 de la Constitution fédérale de 1787. Celle-ci prévoit, en effet, A la fois la supériorité et l'applicabilité directe des lois fédérales sur tout le territoire de l'Union, lois fédérales que tous les juges fédéraux sont tenus d'appliquer dès leur publication. 2 ' Le libre choix des moyens par les Etats : les solutions nationales. ' Globalement, les Etats peuvent se ranger dans deux grandes catégories : ceux, tout d'abord, qui acceptent - directement - les règles du droit international dans leur ordre interne ; ceux, ensuite, qui ne les acceptent que d'une manière - indirecte -, c'est-A -dire qui exigent une - réception - de la norme internationale dans l'ordre interne, en général par une loi, afin que celle-ci possède pleine valeur juridique dans le droit positif local. Toutefois, la réalité est plus complexe et il conent d'apprécier cette question en fonction des diverses normes du droit international, selon qu'on se trouve en présence d'une règle coutumière ou conventionnelle ou du droit dérivé des Organisations internationales. a) L'applicabilité directe du droit international coutumier. ' On est ici en présence du domaine le plus compliqué pour apprécier cette application du droit international dans l'ordre interne. Cette complexité est due, bien entendu, au caractère propre de la coutume. Il s'agit, on le rappelle, d'une règle non écrite dont le contenu est souvent peu précis et qui, contrairement aux traités, n'est jamais - reA§ue - dans l'ordre interne par un acte spécifique. Il n'existe pas de lois de ratification ou de législation spéciales, appliquant comme obligatoire dans l'ordre interne une coutume de l'ordre international. Dans ces conditions, la matière n'est que très rarement et peu précisément abordée par le droit écrit interne et elle est, en général, laissée A l'appréciation des juges. I. ' Des références constitutionnelles vagues. ' Les Constitutions internes, lorsqu'elles abordent ce problème, le font le plus souvent dans les termes les plus imprécis. A titre d'exemple, on peut citer le Préambule de la Constitution franA§aise du 27 octobre 1946. Celui-ci disposait : - La République franA§aise, fidèle A ses traditions, se conforme aux règles du droit public international -. On rappellera que la Constitution de 1958, dans son Préambule également, marque son - attachement - aux principes sés par le constituant en 1946. Dans la mASme veine d'imprécision, il est loisible de citer l'article 10 de la Constitution italienne du 27 décembre 1947 qui dispose : - L'ordre juridique italien se conforme aux règles du droit international généralement reconnues -. La maxime bien connue dans les pays de Common law, énoncée par Blackstone dans ses - Commentaires - de 1765 - International law is part of the law of the land - va également dans le mASme sens. ' Parfois, certaines dispositions constitutionnelles se révèlent moins ellyptiques, mais le degré de précision demeure encore tout relatif. C'est ainsi que l'article 25 de la loi fondamentale de 1949 de lay République fédérale allemande dispose : - Les règles générales du droit international font partie intégrante du droit fédéral et elles priment les lois et font naitre directement des droits et des obligations pour les habitants du territoire fédéral -. Cette disposition est précisée par l'article 100, A§ 2, 3A°, où il est dit : - Le juge interne peut refuser l'application de règles contraires au droit international commun -. Egalement, l'article 7 de la Constitution esnole de 1931 prévoyait : - L'Etat esnol observera les normes universelles du droit international en les incorporant dans son droit national -. ' Enfin, on peut citer comme exemple de disposition - para-constitutionnelle - plus précise reconnaissant le caractère obligatoire du droit international général et coutumier, une décision du Président de la République franA§aise du 14 avril 1959, agissant en tant que Président de la Communauté, disposant : - Conformément A la Constitution, les traités et accords internationaux, ainsi que les obligations relevant de principes généraux du droit des gens, s'imposent aux Etats de la Communauté qui doivent prendre les mesures nécessaires A leur application - (J.O. 19 avril 1959). II. ' Une grande marge d'appréciation des juges nationaux. ' En réalité, c'est au cas par cas que les juges nationaux feront ou ne feront pas application de la règle coutumière ou, plus généralement, de la règle internationale non écrite, dont l'existence et le caractère obligatoire sont invoqués par une partie au cours d'une instance judiciaire. Les juges anglais, par exemple, acceptent fréquemment l'application de la coutume internationale pour étayer ou motiver leurs décisions. Les juges judiciaires franA§ais également. Le juge adminisratif franA§ais, en revanche, ne le fait jamais (voir l'article précité de L. Dubouis). b) L'applicabilité directe du droit conventionnel. ' C'est dans ce domaine précis que l'on rencontre les deux . systèmes mentionnés précédemment dans l'introduction de cette section. En effet, soit une réception spéciale du traité dans l'ordre interne est nécessaire pour qu'il reA§oive valeur de droit positif ; soit la simple formalité de la ratification suie d'une publication dans le journal officiel local suffit. I. ' La nécessité d'une - réception - du traité dans l'ordre interne. ' Telle est ici la pratique suie par un grand nombre de pays pour lesquels un traité international ne saurait produire d'effet interne direct. Pour ce faire, il doit toujours AStre - transformé -, reA§u par une législation nationale appropriée. Un tel système est celui de la Grande-Bretagne, par exemple, où la seule source de droit positif interne consiste dans les lois votées par le Parlement de Westminster. Avec des différences sans doute, d'autres pays comme les Etats-Unis, l'Irlande ou l'Italie ont sui ce modèle : un traité ne produit d'effet dans l'ordre interne que s'il est transformé, reA§u par une réglementation nationale (en général une loi), en reprenant les termes ou prévoyant son applicabilité dans l'ordre interne. II. ' Le caractère suffisant de la ratification et de la publication du traité. ' Dans un très grand nombre de pays, sans doute la vaste majorité d'entre eux, la ratification du traité selon la procédure sée par la Constitution, suie de sa publication dans le Journal officiel local, suffit A - l'incorporer - au droit interne et donc A lui donner valeur de droit positif lui permettant alors de produire éventuellement des effets directs, si telle est bien la portée du contenu de ce traité (voir infra, A§ 2). Telle est, par exemple, la méthode suie par la Constitution de 1946 en France (voir les articles 26 et 28) qui reprenait d'ailleurs la solution coutumière dégagée par les tribunaux franA§ais sous l'empire des lois constitutionnelles de 1875 qui, elles, étaient muettes sur ce sujet. Tel est encore le système repris par l'article 55 de la Constitution de la Ve République ; celui-ci dispose en effet que les traités, qui sont régulièrement ratifiés et approuvés, ont, dès leur publication, une autorité supérieure A celle des lois nationales. Tel est également le système de la Constitution yougoslave de 1963 (art. 153) ou de la loi fondamentale de la République fédérale d'Allemagne (voir l'article 25 précité tel qu'il a été interprété par les tribunaux allemands). c) L'applicabilité directe du - droit dérivé - des Organisations internationales. ' Il conent de noter la très grande incertitude qui règne dans ce domaine. La matière n'est, en général, pas réglée par le droit constitutionnel local, car ce phénomène du caractère obligatoire des actes des Organisations internationales apparait comme très nouveau. Elle n'est pas appréhendée non plus par les Chartes constitutives des Organisations internationales, sauf en de rares cas, A commencer par l'exception notoire et nole de la Communauté économique européenne. On se bornera ici A examiner la solution franA§aise et la solution communautaire. I. ' La solution franA§aise. ' La Constitution de 1958 est muette quant A l'application directe éventuelle des actes des Organisations internationales dans l'ordre juridique interne franA§ais. Il faut donc se référer au décret du 14 mars 1953 (3.0. 15 mars 1953, p. 2436) relatif A la ratification et A la publication des engagements internationaux souscrits par la France. Ce décret mentionne, A côté des conventions, accords et protocoles, - les règlements internationaux par lesquels la France se trouve engagée -. Ces règlements doivent AStre publiés au Journal officiel de la République franA§aise s'ils affectent les droits et obligations des personnes privées. Il n'en va différemment que s'ils sont publiés au bulletin officiel de l'Organisation internationale concernée et si cette publication suffit A les rendre applicables aux particuliers (art. 3, A§ 3). Cette dernière disposition sait A l'édence les actes de la première institution communautaire, la C.E.CA. mise sur pied par le Traité de Paris du 18 avril 1951. ' Or, dans les rares instances où les tribunaux franA§ais ont été saisis de l'application directe éventuelle d'actes d'Organisations internationales autres que ceux émanant des Communautés européennes, les solutions auxquelles ils ont abouti n'ont guère été satisfaisantes. C'est ainsi, par exemple, que les tribunaux franA§ais ont reconnu en France l'applicabilité immédiate directe des annexes de la Convention de Chicago de 1944 sur l'O.A.C.I., qui n'avaient pourtant jamais été officiellement publiées (voir l'arrASt de la Cour d'appel de Dakar du 15 mai 1957, R.F.D.A. 1957, p. 355 ; confirmation par la Cour de cassation, Cass. crim. 8 novembre 1963, Trésor Public c. Buttel, Bull. crim. p. 666, D. 1964, somm. p. 38). En revanche, ces mASmes tribunaux ont refusé de reconnaitre l'application directe en France du règlement sanitaire international de PO.M.S. de 1951 qui, pourtant lui, était de plein droit applicable en vertu de l'article 22 de la Charte constitutive de l'O.M.S., et qui avait été de plus régulièrement publié (sur cette affaire, voir la décision de la Cour de Paris, 18 novembre 1967, Ep. Pivert + A.F.D.I. 1968, p. 866, Clunet 1968, p. 728, note Ph. Kahn, R.C.D.I.P. 1968.442, note M.S.D.). ' Toutefois, on notera que certains actes internes d'Organisations internationales, par exemple ceux interprétant officiellement telle ou telle disposition de leur Charte constitutive, ont été reconnus par des tribunaux franA§ais ; ceux-ci les ont ainsi directement appliqués pour trancher les litiges qui leur étaient soumis. On citera, par exemple, l'interprétation officielle de 1949 faite par le Fonds monétaire international (F.M.I.) de l'article VIII, Section II, b. de ses statuts, relatif aux contrats de change mettant en cause la monnaie d'un pays membre, qui seraient contraires aux réglementations des changes de cet Etat et sanctionnés par leur non-exécution dans l'ordre interne des pays membres. Lorsque les tribunaux franA§ais ont eu plusieurs fois A appliquer ces dispositions de l'article VIII, Section II, b. des statuts du F.M.I., ils l'ont fait en se référant expressément A l'interprétation officielle de 1949; une telle référence a semblé aux juges franA§ais comme - allant de soi - et ne posant pas de problème juridique particulier, alors mASme que cette interprétation du Fonds Monétaire n'avait jamais été publiée en France ou en franA§ais ' du moins officiellement ' (voir D. Carreau, T. Flory, P. Juillard, Droit international économique, op. cit., pp. 116-l18 avec les références citées). De cette pratique franA§aise, le moins que l'on puisse dire est qu'elle est fluctuante et mal élie. II. ' La solution communautaire. ' Nous avons vu précédemment que le Traité de Rome de 1957 n'était pas d'une clarté totale en ce qui concernait les modalités de son application directe dans l'ordre interne des pays membres. C'est ainsi que certains pays ont - profité - de cette imprécision. Par exemple, l'Italie, toujours attachée A la doctrine - dualiste - d'Anzi-lotti, devait systématiquement - recevoir - dans son ordre juridique interne les dispositions du droit communautaire dérivé directement applicables. Il est d'ailleurs A noter que la Cour de justice des Communautés européennes devait sanctionner, dans les termes les plus nets, cette pratique italienne. Pour elle, les dispositions communautaires directement applicables - pénètrent dans l'ordre juridique interne sans le secours d'aucune mesure nationale - (3 avril 1968, Firma Molkerei, aff. 28-67, Rec. 1968, 211, p. 228). Il s'agit lA d'une jurisprudence constante qui a été réaffirmée encore récemment dans l'affaire Simmenthal (voir R.T.D.E. 1978, p. 381 et s. avec notre commentaire). On notera que cette solution communautaire ' pour souhaile qu'elle soit ' ne proent pas des termes du Traité lui-mASme, mais d'une construction de celui-ci réalisée par la Cour de Luxembourg. |
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