Dans la vie des marques, comme dans la vie de tous les jours, surviennent des moments où il ne faut pas hésiter à secouer les choses et à se forcer à les ir autrement. C'est alors qu'il importe de remettre en cause l'existant, tordre le cou aux vieux clichés, créer des ruptures. Certaines marques nt jusqu'à adopter cette posture contestataire comme thème de leur communication. Il y a des convergences entre Shift, le slogan de Nissan, Impossible is Nothing, la devise d'Adidas, et Think Différent, la signature d'Apple.
Pour contrecarrer d'abord IBM puis Microsoft, Apple a dû penser différemment. Pour renverser la montagne qu'est devenue Nike, Adidas s'est convaincue que rien n'était impossible. Pour contester le
leadership de Toyota et le dynamisme de Honda, Nissan s'est obligée à adopter des positions en rupture.
Quand une nouvelle camne apparait sur les murs ou sur les écrans de télévision, les premiers à y prêter attention sont les employés de l'entreprise. Si elle sait jouer sur la bonne corde, la
publicité crée un mouvement à l'interne. La confiance des collaborateurs augmente, l'énergie d'une force de vente est décuplée.
L'employé de chez Apple, qui s'est toujours efforcé de penser autrement et qui it, placardées sur les murs de son entreprise, des affiches signées Think Différent, se réjouit de ir sa singularité valorisée. Le designer qui travaille à Herzogenaurach, le siège social d'Adidas en Allemagne, n'hésite pas à proposer les produits les plus innovants parce que la publicité lui rappelle chaque jour qu'Impossible is Nothing. L'ingénieur produit de chez Nissan s'interroge au moment de présenter son projet de nouveau modèle. Il se demande s'il est dans l'esprit Shift, s'il représente un changement suffisant par rapport à ce qui existe déjà.
« Think Différent »
Nous ans le bonheur d'air pour
client un chef d'entreprise visionnaire, doué d'un talent inable pour imaginer le futur. Steve Jobs aura été l'initiateur de trois rélutions : l'ordinateur personnel avec le Macintosh, la musique en ligne avec l'iPod et le cinéma d'animation en 3D avec Pixar, lequel a distancé Disney. Non pas une invention, ni deux, mais trois. Plus rien ou presque ne peut surprendre, venant de Steve Jobs. D a façonné une culture d'entreprise qui permet à des gens de talent de conceir des produits uniques et d'inventer des technologies qui changent la vie quotidienne.
Pour donner toute leur ampleur à ces changements, pour en prendre la pleine mesure, il a fallu préparer le public grace à la publicité. Chaque fois, Apple a réussi. À chacun de ces tournants, le produit était différent, parfois même radicalement, par exemple quand Apple est passé de l'informatique à la musique. Chaque fois, l'entreprise se trouvait confrontée à un nouvel environnement. Et, chaque fois, les
moyens d'éveiller l'intérêt du public et de forger un mouvement culturel se renouvelaient. En 2001 avec l'iPod comme en 1997 avec l'iMac ou en 1984 avec le Macintosh, il en résulta des ruptures, que nous préférons appeler des disruptions.
Treize longues années se sont écoulées entre la rélution de 1984 et la seconde. Treize ans qui ont vu l'entreprise se séparer de Steve Jobs, licencié à trente ans par le président qu'il avait lui-même choisi, avant de péricliter à force d'erreurs stratégiques et de produits décevants.
Au moment où Steve Jobs en reprenait les rênes, le noyau dur de sa clientèle se demandait si la
marque n'allait pas disparaitre du paysage. Il était vital de convaincre ces fidèles de garder la foi, il fallait à tout prix qu'ils croient à nouveau en l'avenir d'Apple. Bref, il était temps de leur rappeler ce que représentait la marque.
Dans le même temps, il se révélait urgent de restaurer en interne la culture de départ, de ressusciter l'esprit pionnier. C'était le passage obligé si l'on ulait donner naissance à une nouvelle vague de produits rélutionnaires. Ces produits n'étaient pas encore prêts au moment où la camne s'apprêtait à démarrer. En réalité, l'une des fonctions de celle-ci consistait à gagner du temps. Jusque-la, tous les films pour Apple avaient annoncé l'arrivée imminente du futur. En 1997, le futur était toujours en chantier, mais il se profilait à l'horizon, et Apple ulait lui préparer le terrain. « Pour cela, a expliqué Lee Clow, le patron de la création de notre réseau et son grand inspira-teur. il fallait remonter le temps et retrouver l'ame de l'entreprise. »
Au cours de son histoire, Apple a attiré les consommateurs qui avançaient à contre-courant des autres. Cela ne représentait peut-être pas une clientèle énorme, mais en tout cas une clientèle constituée de gens influents. Un club d'iconoclastes, d'intellectuels originaux, de gens qui faisaient bouger les choses. Pour eux, l'ordinateur n'était pas tant une machine qu'un prolongement de leur personne. Il leur permettait de faire, de créer, d'oser. Il faisait découvrir à chacun qu'il était plus imaginatif qu'il ne le croyait. Apple valorisait l'homme en lui révélant son potentiel. En un mot, Apple ne fabriquait pas des machines, mais des outils pour les esprits créatifs. Nous ans alors décidé que la manière la plus sensée de faire passer cette idée était de célébrer la créativité elle-même.
Le film Think Différent est ce fameux documentaire en noir et blanc qui faisait apparaitre une galerie d'« empêcheurs de penser en rond », parmi lesquels Albert Einstein, Bob Dylan, Martin Luther King, Mohammed AH, Maria Callas, le Mahatma Gandhi, Alfred Hitchcock et Pablo Picasso. En ix off, l'acteur Richard Dreyfuss commentait :
Nous rendons hommage aux fous,
Aux marginaux,
Aux rebelles,
Aux agitateurs,
A ceux qui ne se sentent pas à leur place,
À ceux qui ient les choses différemment.
Ils n'aiment pas les règles et n'ont aucun respect pour
le statu quo. Vous pouvez les citer, les désapprouver, Les glorifier ou les dénigrer. Mais la seule chose que us ne pouvez pas faire, C'est de les ignorer. Parce qu'ils changent les choses, Ils font avancer la race humaine. Alors, tandis que certains les considèrent comme fous, Nous yons en eux du génie. Parce que les gens qui sont assez fous pour croire qu'ils nt changer le monde, Sont ceux qui le changent vraiment.
Du petit écran, la camne gagna l'extérieur : affichage traditionnel, murs peints et flancs de bus. S'y déclinaient les portraits de plusieurs des grandes ures du spot télévisé. Aucun commentaire ne les accomnait, aucune allusion au produit ou à la marque, juste deux mots signant chaque photo : Think Différent.
Dans les grandes villes américaines, il était impossible d'y échapper. Sur les immenses panneaux, les personnages célèbres paraissaient encore plus grands. La camne était dans toutes les discussions et les gens s'interrogeaient les uns les autres : « Tu as vu celle avec John et Yoko ? » Certains portraits alimentaient même le débat autour des personnages, comme le dalaï-lama, Gandhi, César Cha-vez. Ce n'était pas le genre de personnalités que l'on avait l'habitude de ir en publicité.
La France se souvient d'une photo de Picasso sur une affiche de quinze mètres de large, accrochée sur l'aile sud du musée du Louvre. Certains visages n'étaient pas forcément identifiables par tous. Les plus jeunes pouvaient se demander en yant Maria Callas à qui appartenait ce beau visage, mais ils savaient que cela valait la peine de chercher à le sair.
Think Différent a permis à Apple de retrouver sa place dans la culture populaire, avant même qu'un produit ait été lancé. De l'aveu de Steve Jobs, ce thème allait servir de cri de ralliement à l'entreprise. Voici quelques-uns des propos qu'il a tenus lors du lancement du film : « Bien des choses ont changé, mais les valeurs, les valeurs essentielles, ne doivent pas bouger. Ce à quoi Apple croyait à ses débuts, Apple souhaite l'incarner aujourd'hui plus que jamais. [] Le thème de la camne est Think Différent. Nous ans décidé de rendre hommage à ceux qui pensent autrement et qui font avancer le monde dans lequel nous vins. C'est aussi ce qu'Apple cherche à faire, et c'est pourquoi ce thème reflète l'ame de notre entreprise. »
Think Différent. Ces deux mots sont accrochés aux murs du siège de la société comme pour lancer aux troupes : « C'est ce que nous sommes, et c'est ce que nous faisons tous les jours chez Apple. » Dans le même temps, la camne a redonné confiance aux investisseurs et apaisé l'inquiétude des
clients qui se demandaient si Apple allait être à la hauteur de son discours. Le monde était prêt à accepter ce qu'Apple allait lui proposer. Cela tombait bien : le produit en question était extraordinaire. C'était l'iMac.
Quelques années plus tard, au moment précis où Apple semblait air encore une fois rélutionné l'univers informatique, une nouvelle idée traversa l'esprit de ses dirigeants. En 2001, l'entreprise lança l'iPod, qui allait rapidement s'imposer comme la référence en matière de lecteur MP3. En lançant, en 2003, iTunes Music Store, qui permettait de télécharger, facilement, légalement et pour une somme modique, de la musique numérisée, Apple réinventait le monde musical.
Une nouvelle fois, comme en 1984, Apple défiait le système et changeait le monde. La rélution proposée par l'iPod s'annonçait cependant plus large. Elle portait plus loin. Si l'ordinateur est présent dans la vie de beaucoup de gens, la musique l'est dans celle de tous. Apple faisait l'objet d'un culte en tant que fabricant d'ordinateurs ; la musique allait lui permettre de devenir un club, et chacun serait invité à en devenir membre.
Les films iPod sont conçus à partir de l'idée que la danse est un langage commun à tous ceux qui aiment la musique. L'agence s'est mise en quête de bonnes chansons encore inconnues. Pari réussi : grace à la camne, des faces B devenaient des morceaux à succès du jour au lendemain, et leurs auteurs, inconnus jusque-là, connaissaient une célébrité internationale.
Le New York Times a pu observer : « Avec ses rythmes, cette camne a définitivement fait de l'iPod l'icône d'un nouveau mode de vie, dans lequel le numérique est roi. [] Sans qu'aucun mot soit prononcé, la publicité place le spectateur face à un choix : se déhancher lascivement et être dans le vent ou rester pitoyablement en dehors du coup. »
Suivront les films avec U2, Eminem, Bob Dylan, Wyn-ton Marsalis. Grace au film qui a été consacré à ce dernier, son album a pulvérisé les records de vente des plus grands succès de jazz des cinquante dernières années. Pour un autre film iTunes, l'agence a choisi un morceau d'un groupe de rock de Montpellier, Rinôçérôse. Quelques jours à peine après sa sortie, le groupe signait pour une tournée au Japon.
Quant à Bob Dylan, il a vu son dernier album propulsé à la première place au billboard américain. B n'avait pas connu un tel succès depuis la sortie de Désire, il y a trente ans. Le film dans lequel on le it interpréter un morceau de Modem Times a été décisif dans ce retour en grace commercial. Comme l'a souligné un journaliste d'Advertising Age, l'accord avec iTunes a été encore plus bénéfique à Dylan qu'à Apple.
Ce ne sont plus les marques qui se font parrainer par des célébrités, mais les célébrités qui font appel à des marques telles qu'Apple pour air accès à des publics qui les ignoraient jusqu'alors. La logique commerciale habituelle est inversée.
Les possibilités qui s'offrent à Apple semblent désormais illimitées. La rélution numérique empruntera certainement des chemins nouveaux et originaux. On a vu une femme s'élancer une masse à la main et faire exploser l'écran où s'exprimait Big Brother ; on a vu Picasso et Hitchcock réunis dans un même film ; on a vu des silhouettes danser sur des morceaux de Wynton Marsalis et de Bob Dylan ; bientôt nous verrons de nouveau des choses que nous n'ans jamais vues.
« Impossible is Nothing »
Il arrive qu'une marque soit célèbre sans qu'on la connaisse vraiment. On sait ce que la marque fait sans air conscience de ce qu'elle incarne. On it un label ou un logo, mais on ne sait pas forcément que, derrière ce symbole, se cachent une histoire, un héritage précieux et une passion intacte.
C'est le cas d'une marque avec laquelle beaucoup ont grandi : Adidas. Des athlètes de légende, comme Mohammed AH ou Jesse Owens, ont porté ses chaussures et ses vêtements de sport. Les années soixante furent ses années de gloire. Puis, peu à peu, au rytihme des changements fréquents d'actionnaires, la marque s'enlisa et perdit de son lustre. Il était temps de ranimer son esprit de conquête, de retrouver cet état d'esprit qui lui avait fait tenter ce que personne n'avait osé auparavant.
Ce fut sans doute au début des années cinquante que le fondateur de la marque, Adi Dassler, fut le plus inspiré pour réaliser l'« impossible ». Il inventa alors une chaussure à crampons dévissables, qui permettait aux footballeurs de ne pas glisser sur les terrains mouillés. Elle avait été conçue pour l'équipe allemande de football, dont Adi Dassler était un ardent supporter. En finale de Coupe du monde, l'Allemagne s'était retrouvée face à une équipe hongroise largement farite, avec, à sa tête, Puskas et Kocsis, les champions de l'époque. La chaussure se révéla l'arme secrète de la Mannschaft. Sur un terrain détrempé et ultra-glissant, l'équipe allemande devint championne du monde, apportant une lueur d'espoir à une nation qui se débattait avec elle-même depuis la fin de la guerre.
Par la suite, le nom d'Adidas resta associé à de nombreux autres champions et légendes du sport en quête d'« impossible ». Ce fut avec des Adidas aux pieds que Mohammed Ali s'imposa et devint le champion vénéré que l'on connait. Ce fut habillée par Adidas que Nadia Comaneci atteignit l'Olympe de la gymnastique féminine. Ce fut en Adidas que Pete Maravich et Kareem Abdul-Jabbar rélutionnèrent le basket.
La marque entama son tournant au début des années quatre-vingt-dix. Nike venait de prendre son élan et d'imposer ses règles de marketing, faisant du spectacle sportif un divertissement très coûteux. Du jour au lendemain, Nike avait imprimé son rythme. Le marketing sportif se mit à glorifier une minorité, les grands du sport devinrent des stars.
Adidas possédait une culture différente. Au contraire de Nike, elle soutenait tous les athlètes, à tous les niveaux. Les chaussures aux trois bandes trainaient sur les cendrées des stades de banlieue. Adidas refusa la logique du jour, consistant à choisir deux ou trois sports, ceux qui paraissaient les plus attractifs sur le commercial, et continua à s'impliquer dans des sports de toutes sortes. Ses collaborateurs avaient en commun d'aimer le sport sans réserve. Un épaulé-jeté les passionnait tout autant qu'un coup franc brossé ou une passe croisée.
En dépit de son passé glorieux et de la richesse de son héritage, Adidas n'en était pas moins confrontée à un écueil, et non des moindres : l'histoire du sport ne passionnait pas forcément les jeunes. Le défi consistait dès lors à transporter l'esprit de la marque dans le monde d'aujourd'hui, à relier le passé au présent, ire au futur.
Ce qui a servi de pont entre hier et aujourd'hui a été l'idée d'« impossible ». Chercher à réussir l'impossible a toujours été un stimulant. N'est-ce pas le désir de réussir ce qui n'a jamais été accompli qui, au fond d'eux-mêmes, motive les athlètes ? Si us retirez les primes et les contrats publicitaires, il restera toujours quelqu'un pour essayer de sauter plus haut, de courir plus vite, de lancer plus loin ou de marquer plus de points. Un vérile sportif ne peut se laisser décourager par l'impossible. Au contraire, l'impossible l'attire comme un défi.
En présence de Mohammed Ali et de sa fille Laila, vingt-huit ans, championne du monde de boxe féminine dans la catégorie mi-lourds, nous ans lancé, à Harlem, le manifeste suivant : « Impossible n'est qu'un grand mot lancé à tout va par des gens de peu d'envergure, pour qui il est plus facile de vivre dans le monde qui leur a été donné que d'exploiter leur capacité à le faire bouger. Impossible n'est pas un fait. C'est une opinion. Impossible est virtuel. Impossible est temporaire. Impossible n'est rien. »
Ce texte était reproduit sur une affiche de cinq mètres de haut, encadré de grandes photos des deux athlètes, au coin de la 121e Rue et de Malcolm X Avenue. Nous ans créé de nombreux films à partir de ce point de départ, à commencer par celui mettant en scène Ali et sa fille.
Dans une gigantesque salle, on découvre Ali à l'époque du célèbre combat qui l'opposa à Foreman, en 1974, à Kinshasa. La ix off commence au moment où il monte sur le ring. On aperçoit alors son adversaire, la capuche de son peignoir relevée, si bien qu'on ne distingue pas son visage. On découvre quelques instants plus tard qu'il s'agit de la propre fille d'Ali.
Le gong retentit, et le combat débute. Comme en 1974, Ali père esquive les coups. Après plusieurs essais infructueux, sa fille parvient à le toucher au visage. Ali est déséquilibré et un peu sonné. Il adresse un sourire un peu grimaçant à Laila. À la fin du round, une fois retournés chacun dans leur coin, elle lui lance un sourire complice auquel il répond par un clin d'oeil.
La ix off est cette fois celle de Laila :
Impossible n'est pas un fait. C'est une opinion.
Ils disaient que c'était impossible de battre Sonny Liston.
Trop puissant, trop d'expérience.
Ils disaient aussi : laisse tomber ce combat au Zaïre,
Il est trop jeune, trop fort, il va détruire Ali.
Alors quand j'ai vu mon père défier l'impossible,
Le battre, encore et encore,
Et quand j'entends dire qu'une femme ne devrait pas boxer
A tre avis, je fais quoi ? Bats-toi, ma grande, bats-toi !
Un gigantesque basketteur se promène dans les rues de San Francisco. Alors qu'il attend à un feu, il invite un passant à monter sur ses épaules, puis un deuxième, un troisième, etc. S'ensuit une course effrénée de personnes en tout genre qui se jettent même du haut des toits pour grimper sur ce qui est maintenant devenu une « montagne humaine ». Le basketteur, lui, continue de marcher sans difficulté, une paire d'Adidas aux pieds. Il sourit. Il porte le monde sur ses épaules.
Le film s'ouvre sur le visage d'un jeune garçon de type sud-américain. Il scrute le ciel et attrape au l un sac en plastique. Suivent différentes scénettes durant lesquelles on comprend qu'il s'agit d'un enfant qui s'affaire à récupérer le plus possible de sacs plastique, allant jusqu'à fouiller dans les poubelles ou à « ler » un SDF. Il entre dans un terrain vague, s'assied par terre et commence à assembler les sacs entre eux. On se rend compte que ce que l'on prenait pour un « petit boulot » - ramasser des sacs pour les revendre - était en fait destiné à fabriquer le ballon de football avec lequel il commence à jongler adroitement. Peut-être deviendra-t-il une star du ballon rond, qui, comme ses idoles, aura commencé dans les quartiers défarisés de son pays d'origine.
Chacun de ces films, comme les dizaines d'autres que nous ans produits, souligne à sa façon le thème de la camne. Impossible is Nothing parle à tous ceux qui, indépendamment de leur age ou de leur niveau, considèrent le sport non comme un moyen de gagner de l'argent, mais comme un défi personnel, une passion, une compétition avec soi-même.
Voici ce qu'en a dit Eric Stamminger, le président de la marque Adidas, dans une adresse aux cadres de l'entreprise : « Pour tous ceux qui appartiennent à la famille Adidas, Impossible is Nothing. Cette
philosophie fait désormais partie intégrante de notre quotidien et de notre langage. L'impossible ne fait pas partie de l'histoire de notre marque et n'en fera jamais partie. C'est à la fois notre héritage, notre mission et le défi que nous dens relever. »
Impossible is Nothing a contribué à remonter le moral de l'entreprise. Il a redonné confiance dans la marque et exhorté les employés à y croire toujours plus. Aujourd'hui, le représentant qui se bat aux États-Unis contre Nike a de nouveau la foi. Les designers n'hésitent pas à faire appel à Stella McCartney pour lancer une collection époustoufiante. Les concepteurs de chaussures sortent de nouveaux modèles aux technologies rélutionnaires.
Comme le souligne Ulrich Becker, responsable international de
la communication d'Adidas : « Nous cherchions un moyen d'exprimer notre attitude vis-à-vis de la marque qui soit vraiment entrainant et qui sache susciter de l'émotion. C'est exactement ce qu'Impossible is Nothing accomplit pour nous. »
« Shift »
Yokohama, septembre 2004. Carlos Ghosn s'avance d'un pas décidé vers la tribune. Le Japon a les yeux rivés sur lui. Ces dernières années, ses succès à la tête de la célèbre marque automobile japonaise Nissan, au bord du gouffre à son arrivée, lui ont permis de s'imposer dans son nouveau pays d'adoption comme le héros d'une culture nouvelle. La
presse a acclamé ses résultats étonnants. En trois ans, les ventes ont fait un bond de près d'un million de véhicules. En cette année 2004, Nissan a affiché la plus forte renilité du secteur, sa dette a fondu et sa capitalisation boursière a été multipliée par cinq.
Cette extraordinaire résurrection allait au-delà d'une simple réussite commerciale. Carlos Ghosn avait bousculé avec audace une institution locale vénérée, défiant détracteurs et traditionalistes, qui l'avaient averti qu'il marchait sur des oufs. Cet homme ouvert aux idées et aux influences du monde entier, conscient du fait qu'il était parfois tout aussi important de braver les conventions que de maintenir la tradition, a été le précurseur d'une nouvelle ère de l'économie et de la culture japonaises.
Depuis son arrivée en 1999, Carlos Ghosn avait avancé à grands pas. Mais tout semblait indiquer que ce n'était qu'un début. Le 2 septembre 2004, date choisie par Nissan pour la présentation d'une nouvelle gamme, tout le monde se demandait quelle allait être la prochaine étape sur son agenda.
L'agitation qui régnait à l'Ohsanbashi Hall, à Yokohama, où se déroulait l'événement, se proea jusqu'à Tokyo. La salle était comble, remplie de journalistes et d'observateurs. Des écrans géants avaient été installés dans neuf grandes villes du Japon afin de permettre au public de suivre de l'extérieur l'intervention du grand patron de Nissan. Ils furent des milliers à le regarder une nouvelle fois secouer les habitudes.
Il présenta ce jour-là six nouveaux modèles d'un seul coup, du jamais-vu chez un constructeur japonais. Cette initiative s'accomna d'un discours inattendu, dont le premier mot frappa les esprits : « Shift. Ce simple mot exprime la passion et l'engagement qui ont permis à Nissan de renaitre. Il sera désormais notre mot d'ordre. »
Que signifie cette notion de Shift chez Nissan ? Voici ce qu'en a dit Carlos Ghosn :
En changeant notre manière de penser, nous changeons le regard que nous portons sur les choses, la façon dont nous agissons, la façon dont nous réagissons à ce qui se passe autour de nous. Cette élution dans les valeurs qui sont les nôtres touche tout ce qui fait de Nissan ce qu'elle est. Elle implique que nous fassions éluer les produits, les services, la technologie, les comportements, les performances.
Shift, c'est à la fois notre identité et notre manière de fonctionner. C'est un défi lancé à chaque employé, chaque fournisseur, pour qu'il réfléchisse à sa façon de travailler et à la manière dont il peut accroitre notre valeur aux yeux de nos clients.
Le choix du mot Shift remontait à quelques années. Nous nous étions réunis pour discuter de l'image de la marque et du temps qu'il nous faudrait pour la modifier. Nous savions que, dans le secteur automobile, l'image des modèles pouvait progresser rapidement, mais que l'image d'une marque, qui résulte de l'accumulation des images des modèles, mettrait plus de temps à s'améliorer. Un client se montre ravi d'acheter une Maxima, mais ne se sent pas encore fier de posséder une Nissan. La distance entre le produit et la marque est plus grande que dans d'autres secteurs. Il y a beaucoup plus d'inertie.
Deux ans auparavant, nous avions conçu pour Nissan États-Unis un film institutionnel mettant en scène tous les nouveaux modèles. La ix off disait en conclusion : « Un simple shift peut transformer une personne, une vie, le monde, ou il peut simplement transformer la façon dont us le traversez. » Et Shift est devenu notre slogan. Tous les lancements de itures à venir ont été signés avec lui : la Murano avec Shift Convention, la Maxima avec Shift Exhilaration, le Pathfinder avec Shift Adventure
Avec le temps, nous ans réalisé que Shift était bien plus qu'une signature. Carlos Ghosn l'avait spectaculaire-ment démontré dans un discours qu'il avait prononcé à Détroit, en février 2004, six mois avant l'allocution de Yokohama. Deux phrases, en particulier, devaient rester fameuses : « Tout ce que nous touchons, nous le changeons (shift). Et tout ce que nous changeons, nous essayons de le rendre meilleur. » Shift introduisait l'idée d'une entreprise cherchant à ir les choses différemment, sous un autre angle, suivant une perspective nouvelle.
La traduction d'une langue dans une autre aurait fait perdre à la formule une part de son attrait et de sa force. C'est pourquoi, dans la quasi-totalité des pays, le mot Shift est resté en anglais, y compris au Japon. Il en va de même pour Think Différent et Impossible is Nothing.
Shift est ainsi devenu le mot d'ordre de la comnie, et Nissan Tokyo, la maison mère, l'a fait sien. Le concept est à présent mondial, ce qui représente une première dans l'histoire de l'automobile. C'est une invitation à ouvrir son esprit à la nouveauté, à réévaluer tout ce qui parait trop familier, à remettre en question les certitudes. Le constructeur propose au monde de changer son regard sur la marque, tandis qu'il se fixe à lui-même l'objectif de modifier radicalement sa façon de conceir et de commercialiser ses automobiles. Comme le dit Carlos Ghosn : « Shift est à la fois notre identité et notre manière de fonctionner. Portez un regard différent sur la réalité, et us verrez que tout peut arriver. C'est cela l'esprit Nissan, the Nissan Shift. »
Le mot Shift contient ce que Nissan a incarné durant la période faste de son histoire. À plusieurs reprises depuis la création de la société, en 1916, des collaborateurs de la marque ont changé le cours des choses en ponctuant l'histoire de l'industrie automobile japonaise d'innovations marquantes. Il est intéressant de noter que le terme même de shift apparaissait dans certains documents diffusés à l'époque par le constructeur, même si l'agence ne s'en était pas rendu compte tout de suite. Appliqué à ce qu'était devenue l'entreprise ces dernières années, depuis que Carlos Ghosn, avec sa lonté de tout remettre en question, en avait pris les commandes, le mot prenait soudain une tout autre résonance.
Il condensait les idées que Nissan ulait faire passer auprès des gens qui travaillaient pour ou avec lui. Dans un ouvrage publié en 2004 aux États-Unis, dont le titre était précisément Shift, Carlos Ghosn relatait son expérience mais expliquait qu'il était loin de se satisfaire des résultats de Nissan : « Je suis fier de ce que nous ans fait, mais je ne suis pas heureux de là où nous en sommes. » La philosophie nouvelle de Nissan interdisait toute autosatisfaction. Plus jamais elle ne se contenterait du statu quo.
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Quand les présidents des sociétés clientes de l'agence reprennent à leur compte nos slogans publicitaires et en font un point saillant de leurs allocutions, nous sans que nous travaillons utilement. Steve Jobs a discuté de Think Différent avec ses clients, des distributeurs de produits informatiques. Erich Stamminger a lancé Impossible is Nothing à un parterre de collaborateurs enthousiastes. Carlos Ghosn se réfère à Shift au cours de ses présentations dans les salons automobiles, à Tokyo comme à Détroit.
H se crée ainsi un effet de réciprocité entre la marque et la publicité. Quand cette dernière innove vraiment, elle peut air un effet retour sur la marque elle-même. L'idéal représenté par la communication projette sur l'entreprise une image embellie et il l'encourage à s'en rapprocher. En s'efforçant d'être en ligne avec l'image qu'elle s'est créée, l'entreprise change un tant soit peu qualitativement, et cette amélioration renforce à son tour la prégnance de l'idéal. Se crée ainsi un cercle vertueux qualitatif.
L'annonceur se sert alors de la publicité pour montrer au monde comment il it son entreprise.