Tout au long des développements précédents est apparue comme un leitmotiv l'observation que la nature des problèmes A traiter et la praticabilité des diversesréponses dépendaient fortement de caractéristiques économiques, sociologiques, institutionnelles des pays. Ce pourrait AStre le contenu d'un livre entier que de présenter de faA§on ative ces caractéristiques et d'en dégager les conséquences ; le manque de place nous limitera ici A quelques indications dont le lecteur voudra bien excuser la brièveté.
Certaines différences sont liées A la dimension du pays ou au niveau de
développement ; on a donné les chiffres correspondants aux leaux 2-l. D'autres méritent d'AStre évoquées ici, en leur état (quantitatif) de 1990, donc susceptibles d'évoluer : on les regroupera autour de trois thèmes.
A / RéALISATIONS ET IMAGES DE MARQUE DES PAYS
Dans la mesure où les
marchés tiennent une place relative croissante dans le fonctionnement des économies occidentales, la faA§on dont les opérateurs situent les pays les uns par rapport aux autres exerce une influence grandissante sur leurs anticipations et donc leur comportement.
Cette image des pays repose largement sur des éléments objectifs, dont la pondération peut toutefois varier selon les acteurs et les moments. Les leaux 6-l et 8-l résument la faA§on dont les principaux pays européens ont atteint les quatre objectifs du quadrilatère magique depuis une trentaine d'années et intent aux commentaires suivants.
Si on e leur
croissance A celle de l'ensemble de la Communauté, les pays se différencient assez nettement :
' certains ont toujours dépassé la performance communautaire (ou l'ont A peu près réalisée), c'est le cas de la France, l'Allemagne, l'Italie, l'Esne ;
' un pays, le Royaume-Uni, a fait moins bien pendant ngt ans, mais s'est redressé pendant la dernière décennie ;
' des pays ont fait aussi bien ou mieux au début, mais ont baissé les dernières années, ce sont notamment la Grèce et les Pays-Bas, mais aussi la Belgique.
Pour le chômage, l'Allemagne a toujours fait mieux que les autres, l'Irlande et l'Italie toujours moins bien ; l'Esne a vu sa situation se dégrader fortement, les autres pays se situent autour de la moyenne.
Pour l'inflation, l'Allemagne fait toujours mieux (ou nettement mieux) non seulement que la moyenne des autres, mais que chacun des autres. L'Esne est dans la situation inverse, ainsi que la Grèce depuis ngt ans. L'Italie est médiocrement située. Quant A la France, ée A la moyenne de l'Europe, elle est honorable, mais ée A son grand partenaire, la RFA, elle a eu en permanence un différentiel d'inflation (surtout après 1973) qui n'a pratiquement disparu que depuis 1988.
Enfin, seuls l'Allemagne et les Pays-Bas (et le Luxembourg) ont en permanence en balance des opérations courantes positives, alors que la Grèce, l'Irlande, le Portugal, ont en permanence une balance négative.
Quand on récapitule l'ensemble de ces sions partielles, on comprend que l'Allemagne ait la réputation d'AStre le meilleur élève de la classe. On doit néanmoins remarquer que si la France a presque toujours fait moins bien en matière de prix et d'équilibre extérieur et un peu moins bien en matière de chômage, cela ne l'a pas empASché de faire mieux en matière de croissance globale (et un peu mieux en matière de croissance du pib par tASte puisque le rapport D/F est passé de 113 en 1960 A 104 en 1990). II y aurait lA matière A d'amples réflexions sur l'efficacité ée de politiques économiques différentes, aussi bien pendant la période d'euphorie des années 60 que pendant les difficultés des décennies suivantes.
B / LES MARGES DE JEU
Pour la mise en ouvre de politiques économiques de stimulation, deux éléments jouent, on l'a vu, un rôle crucial ; il s'agit du taux d'endettement public, qui limite le recours A un déficit croissant, et du solde de la balance des paiements courants, qui influence la contrainte extérieure.
A ces deux aunes, les situations sont très différentes entre pays. Donnons-en quelques exemples :
' la rfa avait début 1990 des marges de jeu sur les deux terrains ; c'est ce qui lui a permis de s'engager dans l'unification avec la rda, mais celle-ci va édemment dégrader la situation sur les deux terrains ;
' la Belgique est dans une situation dramatique en ce qui concerne les
finances publiques, puisque la dette représente 130 % du pib et la charge de la dette absorbe 40 % du budget central ;
' la France n'est pas en mauvaise situation pour la dette publique, mais voit toujours poindre très proche le spectre de la contrainte extérieure ;
' un pays comme l'Italie, A assez fort
chômage et A inflation encore appréciable, est bridé par son endettement public.
C / QUELQUES éLéMENTS STRUCTURELS
La structure du commerce extérieur par produit est un indicateur de la bonne adaptation du pays A l'évolution de la demande mondiale.
A cet égard, le cas allemand se détache des autres, avec une forte concentration sur les biens d'équipements.
Le taux d'investissement est édemment un élément décisif. On note ici de grandes différences :
' pour les pays moins développés, entre l'Esne et le Portugal, A taux élevés permettant un rattrae, et la Grèce et l'Irlande, A taux inférieurs A la moyenne communautaire;
' pour les pays plus développés, entre la RFA et la France d'un côté, le Royaume-Uni et le Danemark de l'autre, A taux nettement plus bas.
L'effort consacré A la recherche est un indicateur A marner avec beaucoup de précaution, car les
connaissances peuvent s'acheter A l'extérieur et la recherche n'est économiquement intéressante que si elle débouche sur l'innovation (pour laquelle on n'a pas d'indicateur statistique direct). Il est toutefois intéressant de noter que, tant en ce qui concerne l'effort global que l'intensité (dbrd/pib) de la recherche, la RFA, la France, le Royaume-Uni, les Pays-Bas se détachent nettement, suis par l'Italie et la Belgique ; mais l'Esne fait un net effort de rattrae.
L'effort consacré par le pays A la formation de sa population est un élément décisif tant pour la préparation du prochain millénaire que pour aider A la résorption du chômage. Les aisons sont délicates et biaisées, pour le montant des dépenses A cause des écarts dans les niveaux de rémunération et l'efficacité de leur emploi, pour le nombre de scolarisés et d'étudiants, A cause de la variété des systèmes de formation. (Les chiffres sont néanmoins tellement différents qu'ils doivent bien refléter des disparités).
Il serait édemment intéressant de pouvoir effectuer des aisons des organisations institutionnelles et des attitudes sociologiques, qu'il s'agisse des modalités de détermination des salaires, de l'intensité de la politique de
concurrence interne, de la mobilité psychologique de la main-d'ouvre, de l'attitude s-A -s de la fiscalité ou de l'inégalité des revenus, etc. Tous ces domaines sont tellement complexes que nous ne nous y aventurons pas.
RéSUMé
a-s 1. Pour AStre efficace, la
politique économique doit assurer une cohérence entre ses diverses composantes : dans la mesure où divers objectifs ne sont pas pleinement compatibles, il faut définir préalablement leur hiérarchie ; dans la mesure où les divers instruments peuvent avoir des impacts favorables sur certains objectifs et pervers sur d'autres, un dosage est A faire (policy-mix) qui, dans sa formulation concrète pour un espace économique donné, ne peut découler que de l'analyse de cet espace A l'aide d'un modèle économétrique. Mais certaines grandes règles de cohérence peuvent néanmoins AStre formulées.
a-s 2. Une cohérence fondamentale est A assurer entre les divers horizons, entre le court terme et le long terme. 11 faut notamment éter, pour résoudre des problèmes immédiats, de mettre en ouvre des actions qui hypothèquent la croissance ou créent des handicaps pour un futur un peu éloigné. Il faut d'autre part se préoccuper A temps d'engager les actions nécessaires pour AStre en mesure de traiter correctement les problèmes, économiques ou sociaux, qui se poseront ultérieurement.
a-s 3. MASme si on n'en connait pas bien les mécanismes, il est certain que l'emploi des fruits de la croissance (la répartition des didendes du progrès) n'est pas sans effet sur le dynamisme de l'économie : par l'épargne et l'investissement, bien sûr, mais aussi par une influence sur le comportement des acteurs. Cette répartition a également une influence sur l'efficacité de la lutte contre l'inflation. Les aspects de répartition sont donc A examiner dans cette sion large.
a-s 4. La complexité des mécanismes économiques doit conduire A se méfier des réponses tranchées A des grandes options : ainsi les politiques d'offre et de demande paraissent beaucoup plus complémentaires qu'antinomiques, pourvu que le recours aux deux soit correctement dosé en fonction des problèmes et des situations réelles du lieu et du moment où elles sont appliquées. Il en va de mASme pour l'opposition entre continuité ou discontinuité de la politique économique, encore que de nombreux arguments amènent A pencher en faveur d'une assez forte continuité (sauf en cas de réponse A d'importants chocs imprévus). De mASme l'opposition entre marché et intervention publique est largement artificielle : les marchés sont imparfaits, les gouvernements sont imparfaits, on a besoin des deux.
a-s 5. Plus le futur est incertain, plus il est nécessaire de se préparer A l'avance A réagir au mieux lorsque se matérialisera l'un des multiples scénarios qui paraissent ensageables aujourd'hui. C'est le rôle d'une programmation stratégique A moyen terme que de définir le noyau des actions A lancer aujourd'hui pour préparer cette adaptation (actions en termes de réalisations concrètes, en termes de réorganisation des règles de fonctionnement de l'économie, enfin en termes de formation).