L'avantage technologique
L'avantage et l'avance technologiques ne suffisent plus. D'une manière générale, le produit rélutionnaire est de plus en plus difficile A trouver. Les morceaux de technologie sont souvent disponibles et accessibles. Beaucoup de concurrents sont capables de développer le mASme type de produit avec des fonctionnalités proches dans un laps de temps A peu près identique.
Lorsque, néanmoins, il y a un saut technologique, il faut le constater, il est très rare que cela soit la mASme
entreprise qui garde le leadership technologique d'une génération A une autre. Nous ans déjA vu lors des chapitres précédents pourquoi des leaders refusent culturellement d'assumer leur position de
leader et laissent A d'autres le soin de mener l'élution technologique. A. Ries donne l'exemple significatif A cet égard de l'histoire de l'aspirine et des divers autres médicaments qui lui ont succédé, le tylenol, l'advilet, l'aleve. ! Il re
marque qu'A chaque fois, l'entreprise innovatrice a changé : BAYER, JOHNSON & JOHNSON, American Home Products, Procter & Gamble. Il est vrai que les éléments de technologie sont maintenant plus disponibles et que la
concurrence peut venir de partout, mASme des horizons les plus inattendus : nous ans déjA mentionné les exemples de CANON sur le
marché de la photocopie alors que XEROX était plus aux aguets de ce que pouvaient faire KODAK et IBM, ou alors la menace que fait peser actuellement SONY sur Intel et Microsoft. La concurrence peut AStre tellement inattendue qu'elle est parfois presque anonyme. Le logiciel Linux a pris 20 % de parts de
marché des logiciels de serveurs, principalement au détriment de MICROSOFT, mais qui est le concurrent de MICROSOFT ? Ce logiciel a ses sources disponibles sur le réseau internet et est en constante élution. Les concurrents sont-ils des sociétés comme Redhat qui ont bati une offre de services autour de ce logiciel ou des sociétés comme IBM ou Intel qui préconisent et facilitent l'utilisation de Linux, tout particulièrement dans l'environnement porteur des services internet ?
Les processus d'ingénierie inversée, de benchmarking sont lA aussi pour réduire l'
avantage concurrentiel que peut prendre une société sur le de la technologie, soit sous l'angle des fonctionnalités qu'elle procure, soit sous l'angle de ses coûts d'acquisition et d'utilisation. Beaucoup de sociétés batissent les alliances, les partenariats, les - joint ventures - qui leur sont nécessaires pour acquérir les éléments technologiques stratégiques qui leur font défaut. Dans le but d'AStre le premier sur le marché des imprimantes A laser de bureau, HP n'a pas hésité A se procurer cet élément essentiel de l'imprimante qu'est son moteur auprès de Canon.
Bien sûr, AStre A la pointe de la technologie est un atout indispensable dans beaucoup d'industries, où celui qui est relégué sur ce A un rôle de suiveur a peu de chances d'assurer A terme sa profiilité, mais il serait également très dangereux de ne compter que sur cet avantage en se reposant, en quelle que sorte sur ses lauriers.
AMD, laminé par l'avance technologique cI'Intel pendant des années et apparaissant comme le suiveur ayant toujours au moins une technologie de retard sur le leader, a quand mASme mis un point d'honneur A AStre la première société A annoncer la disponibilité d'un microprocesseur dépassant la barre symbolique des 1 000 mgh. Dans le mASme temps, une de ces nombreuses et ingénieuses sociétés de la Silicon Valley, Transmeta, a présenté un nouveau microprocesseur, baptisé - Crusoe - pour les ordinateurs porles. Elle présente ce microprocesseur comme capable de transformer les logiciels écrits pour les produits concurrents, dont ceux d'iNTEL et AMD, et de les exploiter de faA§on plus
économique grace A une moindre consommation d'énergie. Il y a toujours une faA§on de contourner l'obstacle de la propriété intellectuelle. Pour ne pas AStre en reste, IBM vient d'annoncer une nouvelle technologie qui permettra de franchir un pas de plus en matière de miniaturisation des microprocesseurs et qui permettra de construire des puces pour équiper les terminaux d'accès A internet. La société déclare détenir ainsi une avance d'un an sur ses concurrents. Dans le marché des télécommunications, c'est huit mois d'avance que vise Nokia.
Un an, huit mois, dans la vie économique d'aujourd'hui où tout élue très vite, c'est beaucoup. C'est néanmoins trop peu pour compter uniquement sur ce délai afin de batir son avantage concurrentiel. C'est pendant ces quelques mois que le leader technologique doit profiter de son avance grace A des marges bénéficiaires élevées. Pour cela, il lui faut un appareil de production extrASmement performant, capable d'inonder le marché dans un laps de temps très court. Surtout, il ne s'agit pas d'air cette avance une fois ; tout le modèle de renilité de la société lui impose de la conserver A chaque élution technologique. C'est donc un positionnement très risqué.
F. Olivier, le PDG de Sidel, répondant A une question lui demandant de résumer ce qui avait permis A sa société de devenir le leader incontesté de son marché en passant d'un chiffre d'affaire de quatre-vingt millions de francs, lors de la vente de sa première machine aux états-Unis, A plus de cinq milliards aujourd'hui, répondit : - Le fait d'air refusé de compter uniquement sur notre avantage technologique. -
L'avantage - services -
Conscientes de cet état de fait, beaucoup d'entreprises ont cherché dans la notion de services le moyen de se libérer de la menace technologique en s'attachant la fidélité de leurs
clients grace A une nouvelle source de valeur ajoutée. Elles y cherchent aussi un moyen sur le financier de restaurer des marges brutes que les nouvelles technologies ne permettent plus toujours de réaliser sur les produits eux-mASmes, tout en minimisant les actifs nécessaires. Enfin, le service implique une relation fréquente et répétitive avec le
client alors que la vente d'un produit ne peut engendrer le contact que lors de la décision d'investissement. Les entreprises ont donc fini par comprendre que le service n'était pas ce mal nécessaire qu'il convenait de gérer contre vents et marées pour obtenir l'affaire et conserver le client. Elles se sont aussi rendu compte que rendre un service nécessite un sair-faire, une organisation, un niveau de
connaissance de l'industrie et de son client qui le rendent beaucoup moins imile ou contournable que la technologie elle-mASme. Elles ont donc conA§u leurs produits de faA§on A permettre le
développement en aval de toute une ligne de services. Les exemples sont nombreux : us
vendez des articlés de bureaux, us conseillez tre client sur sa faA§on de gérer les actifs qu'ils représentent afin de - forger une relation stratégique dans laquelle tre rôle sera plus que simplement livrer des produits -. Vous vendez des systèmes informatiques, us proposez des services d'info-gérance. Vous vendez des biens d'équipement, us proposez des conseils en ingénierie. Dans l'industrie aéronautique Boeing propose des financements, un système d'approvisionnement de pièces détachées, le service de maintenance au sol des avions, l'entrainement des pilotes.
Les services financiers représentent une catégorie très particulière des services associés A la vente du produit. Ils permettent au fournisseur de déplacer le sujet de discussion comme le montre l'exemple de General Electric et de sa division - Plastics -. Le mot d'ordre au sein de cette division est de vendre non pas un produit, mais de la productivité. Un des clients de cette division raconte cette histoire ' : il fut amené A rencontrer trois fournisseurs différents. Le premier était d'un grand professionnalisme et connaissait les fonctionnalités de ses produits dans le détail. Son argumentaire était destiné A convaincre que son produit était le meilleur. C'était un très bon produit, sans nul doute, mais était-il vraiment meilleur que ceux de la concurrence ? Le second était également un grand expert technique projetant son interlocuteur dans l'avenir en lui annonA§ant toute une série de nouveaux programmes A valeur ajoutée. Rendez-us fut donc pris dans le futur. Le troisième était GE Plastics. Dans le premier entretien, il ne dit rien sur le produit et se contenta de poser des questions, en particulier sur la gestion financière et le
capital que requièrent ces types d'équipement. Comme souvent, quand us devez répondre A de telles questions, cela us permet de mieux conceptualiser et exprimer les problèmes que us avez A résoudre. Votre interlocuteur us place en situation de découverte, de progrès et us l'associez A tre démarche. Une équipe de techniciens de GE plastics regarda avec le client comment optimiser le processus de
travail tout en réduisant la charge financière et gagna en conséquence l'affaire. Le gASnerai
manager de cette division, J. Immelt déclarait alors : - My notion is thatselling is dead. Thèse days account managers have to be customer-productivity experts. -
Il est aisé de comprendre que, dans un monde où les produits ont de moins en moins différenciés, où leur durée de vie evient de plus en plus courte, où les temps de développement e nouveaux produits ont été eux-mASmes divisés par deux ou arfois plus, il est important que les sociétés cherchent A se ettre A l'abri de tous les aléas concurrentiels de la technologie our batir avec leurs clients un type de relation reposant sur 'autres fondements, plus sles dans le temps et moins imiles sur le court terme. Tout revient de nouveau A cette fameuse question du mot que je dois installer dans l'esprit
du client et de la perception qu'il créera. Si ce mot ne peut pas AStre celui d'une technologie, il peut AStre celui d'un service. Pour GE PLASTICS, le client conservera certainement l'empreinte indélébile d'une société synonyme pour lui d'expert en solutions globales d'où le produit est finalement absent. Il sera dur pour un concurrent de déloger GE PLASTICS de l'esprit du client. Pour reprendre le terme du chapitre précédent, GE PLASTICS est devenu un leader conceptuel grace A la notion de service global. Au niveau de l'ensemble de General Electric, l'activité des services financiers représente 41 % des bénéfices totaux du groupe.
Ceci étant, il ne faudrait pas tomber dans le piège et l'arrogance du leader pensant air trouvé dans les services l'avantage
concurrentiel ultime. Le service offre le mASme risque que la technologie. Il est visible, il est concret. Il est donc soit imile, soit contournable. Le
marketing ne se prive d'ailleurs pas de rendre la tache aisée aux concurrents : brochures, plaquettes, publicité, - newsletters - articles de presse, tout ceci concourt A donner les recettes du succès A d'autres entreprises. Il est vrai qu'il s'agit lA de la première mission du
marketing promotionnel : faire connaitre. Mais, ainsi, le service, qui au début n'est qu'une prestation et a donc un degré de visibilité très réduit, se transforme en un vérile produit. C'est en tout cas lui qu'en de maintes occasions le client achète, comme c'est le cas pour la pizza vendue A domicile où on achète plus le délai de livraison garanti que la pizza elle-mASme. Les bibles tarifaires le décrivent et, pour chacune de ses fonctionnalités, un prix est mentionné. Il est devenu décorticable, analysable et de fait vulnérabilise l'entreprise. Le service devient un élément
concurrentiel comme un autre. Il peut AStre A certains moments porteur d'une différendation et, en d'autres cas, il peut devenir le point d'attaque de la concurrence.
British Airways est connue pour air effectué un redressement spectaculaire en développant une qualité de service sans égale A l'exception peut-AStre de celle de Syngapour Airlines. Tout particulièrement BA s'est concentrée sur le segment porteur et profile de la -
business class -. Cette société, connue auparavant de tous les usagers sous le sobriquet de - bloody awful - offrit des prestations A la clientèle d'affaires au-delA des normes de l'époque : espace disponible, largeur des sièges, qualité des menus, accueil du personnel. La société put alors, sans risque d'AStre contredite, se définir comme - The world's faurite airline -. British Airways fut alors un cas isolé de succès dans un marché où peu de sociétés se montraient profiles. Mais cette qualité fut mise en place dans un environnement où la concurrence se faisait uniquement sur
les prix, où tout service sortant de la simple réservation de la place était payant, où les passagers apprenaient par la lecture du magazine interne la suppression de la feuille de salade garnissant le - plat - du déjeuner sous prétexte que personne n'était prASt A payer pour cela ! 1 II n'est donc pas surprenant que, dans un monde où les passagers avaient presque abandonné toute prétention A un service meilleur, l'introduction de la politique de British Airways ait été un vrai succès en permettant de leur faire redécouvrir ce qu'ils ne croyaient plus possible. Mais les temps changent, le succès a fait des envieux et des émules, et la distinction concurrentielle a disparu avec le temps. L'introduction de lits lants en première classe n'est plus un élément de différenciation. Virgin Atlantic de son côté a bati sa réputation sur une première classe offerte au prix de la - business class - et, finalement, cette égalisation dans la qualité des services offerts en classe affaires ne permet plus d'assurer sa singularité dans un monde
marqué par la surcapacité de l'offre. Pour British Airways, d'autres problèmes se sont ajoutés, provenant soit de l'environnement défarable (vigueur de la livre, hausse du prix du carburant), soit de contraintes telles que la saturation du - hub - d'Heathrow. Après une décroissance régulière des profits depuis quatre ans, l'exercice 1999 s'est terminé sur une perte de un milliard de livres sterling.
Le service est donc certainement un élément de différenciation redoule, mais en lui assurant sa notoriété, on réduit sa durabilité.
L'ame de l'entreprise
On est ainsi amené A se poser la question suivante : Existe-t-il dans l'échelle des avantages concurrentiels des éléments qui ne seraient pas ou difficilement copiables ?
Certains ient dans la personnalisation du service un moyen d'y arriver : c'est le service - one to one -. Cependant si l'élissement de cette relation personnalisée n'est qu'un fait de technologie (c'est l'ordinateur qui conserve la mémoire du client), ce pas peut AStre franchi par de nombreuses entreprises.
En matière d'avantages non copiables, j'en is finalement deux A chaque extrémité de l'échelle :
» d'un côté, il y a le nom de l'entreprise ou de la marque - nous ans vu le pouir qu'il a s'il est bien perA§u par un segment donné du marché, s'il est solidement attaché A un concept d'achat ; ce qui protège le nom, c'est son caractère très formel, il est déposé, sa protection est légale (- Intel Inside - est probablement la meilleure protection actuelle dlNTEL contre les attaques technologiques de ses challengers) ;
» A l'autre extrémité, on se doit de chercher ce qui n'est pas imile pour des raisons opposées : un élément au caractère immatériel, non palpable, difficilement définissable, mais qui trouve dans ces propriétés, ce qui fait sa force, sa pérennité. C'est l'ame de l'entreprise.
On pourrait A ce stade parodier la célèbre phrase de Lamartine : - Entreprises inanimées, avez-us donc une ame ? -
Pour reprendre le propos de E Olivier cité plus haut dans ce chapitre, il ajoutait : - Notre avantage est venu de notre décision de ne pas nous reposer sur notre avantage technologique. Nous ans insufflé un esprit de marketing dans un monde où nos concurrents étaient dominés par la technique. -
Une technologie se copie ou it ses avantages annulés au fil du temps par d'autres technologies. Les services gravitant autour sont A portée de main de la plupart des concurrents. En revanche, quand on a depuis des années, peut-AStre depuis l'origine, la culture d'une entreprise industrielle, il est bien difficile de répondre A un concurrent qui vient avec sa culture marketing et bouscule ainsi les traditions du marché en inventant un nouveau style, une nouvelle faA§on d'interagir avec les clients, en donnant A l'interlocuteur commercial un poids de décision face au client que ses concurrents n'ont pas et en lui subordonnant les autres forces de l'entreprise.
L'ame de l'entreprise est ce qui la vivifie et l'anime. C'est ce qui lui donne son identité et qui fait qu elle est unique. Dans un groupe diversifié, on cherchera lA ce qui peut donner vie A l'ensemble.
C'est l'exemple de Virgin qu'illustre cette remarque de son président, R. Branson 1 : - My vision for Virgin was ultimately summed up best by Peter Gabriel, who once said to me on a ski lift : "it's outrageous Virgin is becoming everything. You wake up in the morning to Virgin Radio ; you put on your Virgin jeans; you go to the Virgin megastore; you drink Virgin cola ; you fly to America on Virgin Altlantic. Soon you'll be offering Virgin births, Virgin marriages, Virgin fanerais. I think you should rename Virgin the In and Out Company. Virgin will be there at the beginning and there at the end. " - 2
La stratégie de Virgin est d'aller sur les
marchés où la concurrence n'est pas en éveil et alerte, où il y a un angle d'attaque possible et où il y a possibilité de prendre du plaisir A diriger une société, pour reprendre les termes de R. Branson 3.
Celui-ci donne aussi l'explication du nom : c'était au début pour signifier sa totale ignorance du monde des affaires. Par la suite, bien que ce n'était pas l'intention, le nom symbolisa la lonté de pénétrer de nouveaux territoires en y challen-geant les attitudes où le contentement de soi farise le statu quo. Virgin est donc une fédération de différentes activités ayant peu de choses de commun entre elles. Mais il existe une ame Virgin qui lui assure son succès et une faA§on de faire qui ne peut AStre imitée. Cette ame la fait vivre et penser d'une manière qui reflète en interne sa faA§on de travailler avec ses clients. Virgin veut AStre innovateur, original, audacieux et rapide ? Virgin veut AStre non-conformiste sur son marché ? Il doit AStre non-conformiste en interne. Il n'y a pas réellement de siège social - groupe -, pratiquement pas de hiérarchie, et la bureaucratie a été régulièrement chassée et éliminée. L'audace des idées n'est refrénée par aucun comité. Chacun considère que c'est son propre business qu'il manage et c'est ce qui fera son succès ou son échec. Lors d'un nouveau projet, aucune hypothèse n'est prise au départ pour garantie. Tout est soumis au jugement des hommes et femmes de Virgin. Ceux-ci peuvent AStre appelés de toutes les parties du groupe afin d'apporter de nouvelles idées, mASme si pour cela ils doivent AStre enfermés dans une pièce jusqu'A ce qu'ils accouchent de l'idée.
L'ame de Virgin se reflète dans la perception que le nom transporte dans l'esprit des clients. Ceux-ci attendent de l'entreprise des choses extraordinaires, au sens premier du terme, leur offrant des perspectives nouvelles. R. Branson cite lontiers un sondage montrant qu'il y avait plus d'Anglais prASts A confier leur épargne A Virgin qu'A la banque d'Angleterre ! 1 Le positionnement de Virgin laisse perplexe de nombreux analystes, et nombreux sont ceux qui doutent de la valeur créée par ce groupe, ce qui est difficile A juger du fait que Virgin n'est pas une société cotée. R. Branson précise d'ailleurs A ce sujet : - We're in business for fan : we offer customers something better; we need to make money; are we going to enjoy doing so ? many com-panies just make money-they develop the most efficient model for doing so and run it to death. We aim for our approach to be spécial and différent. -
LA aussi il doit y air concordance entre la faA§on dont vit l'entreprise et ce qu'elle propose aux clients : la notion de plaisir doit AStre prioritaire des deux côtés. Comment offrir au client une relation amicale, décontractée si les employés en interne ne vivent pas de cette faA§on. ? Donc, la réelle valeur du groupe Virgin reste une énigme, mais ce qui ressort clairement, et qui ne saurait AStre nié, est que ce groupe a mis en harmonie sa manière de fonctionner interne avec son approche clientèle. Il y a un - parfum - Virgin impossible A imiter et qui constitue son principal atout concurrentiel.
C'est A dessein que j'ai utilisé le mot parfum car il me permet de faire une liaison avec les théories bien connues de marketing sensoriel dans le - consumer's business -.
Ce serait une erreur de penser que dans le - business - interentreprises (le - business to business -), les décisions sont prises en fonction de critères purement rationnels ayant trait A l'analyse ative des fonctionnalités des produits offerts. Il faut le faire croire, pour sauver les apparences, mais dans ce domaine aussi, le choix final, A la marge, entre les différents concurrents se fera souvent sur la base d'un - je ne sais quoi - qui fait que tel fournisseur sera choisi et non pas tel autre. Ce - je ne sais quoi - est souvent ce qui reste du partage d'expériences passées. Il n'est souvent pas parfaitement exprimé, conceptualisé. C'est parfois plus une impression qu'une analyse mais il reflète la marque qu'aura imprimé l'entreprise dans l'esprit du client. Dans ce sens, ce qui compte avant tout est la faA§on dont l'entreprise se comporte en dehors de l'acte d'achat lui-mASme. C'est en effet au moment où il n'y a pas d'enjeu immédiat qu'elle révélera A ses clients sa vérile nature. La fréquence des contacts qu'elle saura susciter, l'attention et l'écoute qu'elle saura air, les
aides qu'elle saura procurer, tout ceci fait qu'elle déilera son ame ou son absence d'ame. C'est l'ame d'une entreprise qui créera avec ses clients un lot de sensations qui font que, toutes choses étant égales par ailleurs, on choisira finalement cette entreprise-lA . C'est la sensation que VIRGIN va AStre innovant pour mieux défendre ses intérASts qui fait qu'on lui confierait plus facilement ses économies qu'A la banque d'Angleterre. Je suis sûr qu'une aison objective de l'offre des deux sociétés nuancerait grandement ce résultat ! La force du positionnement concurrentiel de Virgin vient de sa capacité A créer avec ses clients ce lien indéfinissable.
Très peu d'entreprises construisent leur avantage concurrentiel sur ces bases. L'entreprise Doublet que j'ai déjA citée est de celles-lA . Comme nous l'ans vu, cette société veut batir son positionnement concurrentiel sur sa capacité A raisonner en analogie, A sair dire - oui - au client. Sur le interne, elle a mis en place une faA§on tout A fait originale de fonctionner de faA§on A promouir les méthodes de travail en transversal, avec donc une absence d'organigramme, avec des relations fonctionnelles qui s'élissent en fonction de la gestion des connaissances. Il n'y a pas de comité pour débattre des idées mais celles-ci sont échangées, discutées, tous les jours de faA§on informelle.
On peut aussi placer dans cette catégorie les adeptes de l'entreprise apprenante. A€ ce propos J. Welch n'hésitait pas A écrire dans le rapport annuel de General Electric : - Notre conduite nous est dictée par une intime conviction : le désir et la capacité de l'entreprise A apprendre continuellement de n'importe quelle source et de rapidement traduire cet apprentissage en action constituent l'avantage concurrentiel décisif. - 1
Décisif parce qu'une entreprise n'arrive pas A ce stade en peu de temps. Que cela soit l'entreprise originale non-conformiste, du style Virgin, l'entreprise transversale du style Doublet, l'entreprise apprenante du style General Electric, l'entreprise - marketing - dans un univers industriel, style SlDEL, que cela soit des entreprises de grande taille, multinationales et diversifiées, que cela soit des entreprises de taille moyenne, développant un leadership dans des niches spécialisées, dans chacun des cas l'entreprise n'a pu arriver A ce résultat qu'A l'issue d'un très long processus mettant en jeu les comportements sociaux et les pratiques managériales. Il y a en effet une relation étroite, mais souvent mal perA§ue, entre les formes de pouir internes existant au sein de l'entreprise et la nature et la force de son positionnement concurrentiel.