Dans quel pays crée-t-on une entreprise en un jour ? Est-il possible d'être exonéré d'impôt sur les sociétés ? Où payer des charges sociales minimales ? Tour d'Europe.
Existe-t-il un paradis européen pour les créateurs d'entreprises ? Le Marché unique n'empêche pas les États de se livrer à une
concurrence exacerbée pour attirer les investisseurs ; les uns misant sur une fiscalité attrayante, les autres sur des subventions (en dépit des rappels à l'ordre de Bruxelles) ou encore un droit du
travail très souple. Que l'Irlande, la Grande-Bretagne et l'Esne composent le tiercé gagnant ne surprend guère. Mais, en quatrième position, la France tire mieux son épingle du jeu que certains ne l'auraient pensé si l'on tient compte des nouvelles mesures de la loi pour l'initiative économique. Revue de détails.
Quels sont les pays où l'on crée le plus d'entreprises ?
Tous les pays n'ont pas les mêmes critères pour décompter le nombre de créations d'entreprises. En
données brutes, l'Esne est le plus dynamique des Quinze. Il s'y crée chaque année 88 entreprises pour 10 000 habitants contre 65,8 au Royaume-Uni, (A en Italie, 50 en Irlande, 33 en France. Mais il convient de er ces chiffres au regard du nombre de défaillances. Selon l'OCDE, une entreprise européenne sur deux passe le cap des cinq ans. À cet égard, la Finlande sort du lot par ses performances : les start-up créées dans les parcs technologiques y ont un taux de survie de 80 à 95 %.
Où est-il le plus facile de constituer une société ?
Le Royaume-Uni et l'Irlande sont de vériles paradis administratifs. En un jour et pour environ 300 euros un créateur peut acheter une ready mode company auprès d'un soliciter ou d'un company regis-tration agent. Cette structure, déjà inscrite au registre des sociétés, porte le nom imagé de dormant company. Elle n'attend qu'un projet pour s'éveiller. Le créateur est inscrit comme dirigeant effectif de la société et peut aussitôt démarrer son activité. Autre avantage, le créateur peut, dans ces deux pays, constituer une Ltd avec un euro. Modèle dont la France s'est inspirée avec la SARL au capital librement fixé, inscrite dans la loi Dutreil.
Quel est le pays qui a la fiscalité la plus attrayante ?
En matière d'impôt sur les sociétés, l'Irlande est en tête avec un taux unique de 12,5 % depuis le 1" janvier 2003, quel que soit le secteur d'activité et le montant des bénéfices. L'Esne n'a pas non plus manqué le coche. En 2003, les sociétés nouvelles sous la forme de SLNE bénéficient d'un différé d'impôt sur les sociétés pendant deux ans et sont exonérées de l'IAE (équivalent de la taxe professionnelle), quelle que soit la
forme juridique. La France a un taux réduit de 15 % pour les petites entreprises, ce qui lui permet de devancer sur ce point l'Allemagne, le Luxembourg et les pays Scandinaves. En revanche, pour le taux normal de 33,33 %, l'Hexagone arrive en queue de peloton, avec la Grèce.
Qu'en est-il de l'imposition des particuliers ?
Avec un taux maximal de 42 %, le Royaume-Uni, le Portugal, le Luxembourg et l'Irlande l'emportent. Cependant, ce dernier pays se distingue : le barème de l'impôt sur le revenu ne comprend que deux tranches, l'une à 20 % qui est très avantageuse en raison de son plafond élevé, et l'autre à 42 %. Par ailleurs, il n'y existe pas d'impôt sur la fortune : une caractéristique que partage l'Irlande avec huit autres pays de l'Union.
Dans quels pays existe-t-il des mesures incitatives pour drainer la « love money » ?
La Love money, c'est l'argent que les proches (famille, amis, relations) investissent dans le capital d'une jeune société. Le champion incontesle est le Royaume-Uni. L'EIS {Enterprise Investment Schemè) permet une déduction de l'impôt sur le revenu correspondant à 20 % du montant investi, avec un plafond de 218 658 euros par personne et par an soit 43 731 euros. Il existe aussi en France une incitation fiscale analogue, mais avec des montants moindres bien que ceux-ci aient été relevés : réduction d'impôt correspondant à 25 % du montant investi dans la limite de 20 000 euros pour un célibataire et 40 000 euros pour un couple marié. Par ailleurs, les sociétés unipersonnelles d'investissement à risque (SUIR) bénéficieront dès 2004 d'un statut fiscal avantageux. Contrairement aux idées reçues, la France est un pays attractif en matière de capital-risque (derrière l'Angleterre, les Pays-Bas et l'Esne) même si des aménagements restent nécessaires.
Où la main-d'ouvre est-elle la moins chère ?
En tête, le Portugal, suivi de l'Esne. Ces deux pays possèdent l'équivalent de notre SMIC mais son montant est sans commune mesure avec celui de la France : 350 euros par mois pour le premier et 451 euros par mois pour le second. Le coût de la main-d'ouvre est un critère important lorsqu'il s'agit de créer une activité dans le secteur de l'industrie. Mais, plus encore, c'est le paramètre de la
productivité qui doit retenir l'attention. Sur ce , le Portugal vit mal la concurrence que lui font d'ores et déjà des pays comme la Hongrie, la Pologne et la République tchèque.
Où paye-t-on le moins de charges sociales ?
L'Irlande, avec un taux de 18,5 % est particulièrement bien placée. Derrière, arrive le Royaume-Uni avec un taux de 22,2 %. En revanche, les charges sociales (hors contrats de travail aidés) sont dissuasives en France (60 à 75 %), aux Pays-Bas (54 %), en Belgique (45,5 %), en Italie (43 %), en Allemagne (42 %).
Où la législation en matière de licenciement est-elle la plus flexible ?
Elle varie fortement d'un pays à l'autre : très contraignante en Italie, en Suède et en France, beaucoup plus souple au Royaume-Uni, en Irlande, en Esne et en Belgique. Mais attention ! Les procès pour licenciement abusif sont de plus en plus nombreux et ce sont, le plus souvent, les salariés qui les gagnent.
Quels sont les pays les plus généreux en matière d'incitations financières à la création d'entreprises ?
Il est difficile de s'y retrouver dans le maquis des
aides à la création d'entreprises. Celles-ci sont nombreuses en France, mais elles sont très sélectives : personnes en difficulté, entreprises innovantes, zones prioritaires ou sensibles. En Finlande, on cherche à attirer les sociétés innovantes, tandis qu'aux Pays-Bas, on s'intéresse essentiellement aux entreprises ayant un fort potentiel de croissance. Dans les pays du Sud, comme l'Italie, l'Esne, la Grèce, la politique d'aide vise certains publics (les chômeurs, les jeunes, les femmes) ou les régions en difficulté.
Existe-t-il des créneaux économiques porteurs ?
Juste derrière les NTIC, on constate qu'il y a une forte demande pour les biotechonologies, notamment en Irlande et en Finlande. Les produits français haut de gamme (alimentation, mode, décoration) sont également recherchés. Mais attention au choix du pays. Par exemple, on a plus d'opportunités en Suède qu'au Danemark, un pays entré plus tôt dans l'Union européenne et déjà saturé par l'offre de certains produits de luxe. Des niches sont à occuper dans le domaine des soins à domicile en France, des produits bio en Allemagne, des articles de sport en Autriche, des jeux vidéo en Italie Dans tous les cas, une étude de
marché sur place est indispensable. Les Quinze ont un point commun : les marchés éluent très vite !
Quels sont les réseaux d'accomnement les plus performants ?
Inconteslement, le Royaume-Uni est un modèle. Il existe un seul numéro de téléphone pour les candidats à la création d'entreprise. Et toute personne qui appelle est aussitôt basculée sur l'un des 45 Business Link correspondant à sa localisation. Au sein de l'organisme, il trouve des conseils et un accomnement pour lancer son activité. La France aussi dispose de bons réseaux : Entreprendre en France, plates-formes d'initiative locale, boutiques de gestion Mais l'offre reste toutefois diluée.
Doit-on en conclure que le modèle libéral anglo-saxon est celui qui dynamise le plus l'esprit d'entreprise ?
Une fiscalité et des charges sociales faibles ne suffisent pas pour dynamiser la création d'entreprise. L'esprit d'entreprise est inscrit dans la tradition d'un pays. Les Esnols sont très attachés à leur liberté tandis que beaucoup de Français aspirent à la sécurité. En Irlande, en Grande-Bretagne ou en Finlande, la culture entrepre-neuriale est un élément moteur. Elle incite les porteurs de projet à se lancer et contribue à créer un environnement farable. Alors, au-delà d'un contexte législatif plus souple, que faire en France ? Pas besoin de supprimer l'ENA ! Il faut communiquer davantage dans les écoles et à la télévision afin de promouir une nouvelle image de la réussite : celle du chef d'entreprise. Air une belle maison, c'est bien. Créer son entreprise, c'est encore mieux