Notion. Il s'agit de représenter ce mécanisme dans ce qu'il a de plus schématique.
Appliquer une règle, c'est transposer sur un cas particulier et concret la décision incluse dans la règle abstraite. Le juge pénal qui condamne un escroc applique A un coupable la règle qui punit l'escroquerie. Le fonctionnaire fédéral qui refuse une décoration étrangère applique A soi-mASme l'art. 12 de la Constitution fédérale. Lorsque la Suisse a interné A l'intérieur du pays les troupes belligérantes qui se sont réfugiées sur son territoire, elle a appliqué l'art. 11 de la Conntion de La Haye du 18 octobre 1907 concernant les droits et les devoirs des puissances et des personnes neutres en cas de guerre sur terre.
Cette application comporte donc un passage de l'abstrait au concret, du général au particulier, bref une déduction. Son instrument est le syllogisme. Par adaptation de l'allemand, on donne aussi le nom de subsomplion A cette opération qui place le concret sous l'empire de la règle.
Le syllogisme juridique. Tous les traités de logique exposent qu'un syllogisme est formé d'abord de deux propositions, la majeure et la mineure; chacune se compose de deux termes : un mASme terme se retrou dans la majeure et la mineure. Puis une troisième proposition tire la conclusion. L'exemple classique est celui-ci : Tous les hommes sont mortels. ' Paul est un homme. ' Donc Paul est mortel.
Le syllogisme
juridique peut apparaitre ac la mASme simplicité. Exemple : aux termes de l'art. 457 C.C.S., - les héritiers les plus proches sont les descendants - (du défunt).
' Paul et Jean sont les descendants du défunt. ' Donc Paul et Jean sont les héritiers.
Syllogisme A faits Juridiques multiples. Toutefois l'opération est sount plus complexe. Il faut se reporter ici A ce que nous avons expliqué au A§ 19 concernant les éléments de la règle de droit, spécialement A la division de celle-ci en faits juridiques et dispositif (conditions d'application et conséquences). La majeure du syllogisme comporte l'énoncé de la règle ; les deux termes ' parfois ramifiés ' en sont les faits juridiques (Tatbestand) et le dispositif. La mineure constate l'identité des faits concrets et des faits juridiques-La conclusion transporte sur les faits concrets les conséquences énoncées par le dispositif.
Empruntons un exemple A la jurisprudence. L'art. 371 CCS dispose : - Sera pourvu d'un tuteur tout majeur condamné pour un an ou plus A une peine privati de la liberté.
- L'autorité chargée de l'exécution des jugements est tenue d'informer sans délai l'autorité compétente que le condamné a commencé sa peine. -
Pour que cet article puisse AStre appliqué, il faut :
a) que la personne A pourvoir d'un tuteur soit majeure
' sinon il faudrait appliquer les dispositions relatis A la tutelle des mineurs;
b) que cette personne ait été condamnée et non pas seulement incarcérée en détention prénti;
c) que la condamnation comporte une peine privati de la liberté (emprisonnement, réclusion, etc.);
d) que la durée de cette peine atteigne ou dépasse un an;
e) que le condamné ait commencé A subir sa peine. L'énoncé de ces cinq faits juridiques forme la majeure
du syllogisme. L'autorité tutélaire qui doit nommer le tuteur s'assure que, dans le cas du condamné X, ils sont réalisés;
dans l'affirmati, elle formule la mineure du syllogisme. A titre de conclusion, elle déclare qu'il y a lieu de pourvoir X d'un tuteur.
Si une seule de ces cinq conditions d'application fait défaut, par exemple s'il s'agit d'un accusé non encore jugé, l'art. 371 ne peut AStre appliqué, faute de réalisation des faits juridiques b et e.
Syllogismes successifs. Lorsque les conditions d'application d'une règle comportent l'application préalable d'autres règles, le raisonnement se décompose en une série de syllogismes successifs. Pour reprendre l'exemple de l'acheteur A qui a été livrée une marchandise défectueuse (NA° 115), on peut constituer la chaine suivante:
a) La nte est un contrat par lequel le ndeur s'oblige A livrer la chose ndue A l'acheteur et A lui en transférer la propriété moyennant un prix que l'acheteur s'engage A lui payer (C.O. art. 184, C.C.Fr. art. 1582). ' X s'est obligé A livrer telle marchandise A Y et A lui en transférer la propriété moyennant un prix qu'Y s'engageait A lui payer. ' Donc X est ndeur et Y acheteur.
b) L'acheteur a l'obligation de vérifier la chose reA§ue aussitôt qu'il le peut; s'il découvre des défauts dont le ndeur est garant, il doit l'en aviser sans délai, sinon la chose est tenue pour acceptée (C.O. art. 201, C.C.Fr. art. 1648). ' Y a vérifié la marchandise sitôt reA§ue et a signalé immédiatement A X les défauts. ' Donc Y n'est pas réputé avoir accepté la marchandise.
c) Le ndeur est tenu de garantir l'acheteur tant en raison des qualités promises qu'en raison des défauts qui enlènt A la chose soit sa valeur, soit son utilité prévue (C.O. art. 197, C.C.Fr. art. 1641). ' Les défauts constatés et signalés par Y enlènt A la chose toute valeur. ' Donc X est garant de ces défauts enrs Y.
d) Dans les cas de garantie en raison des défauts de la chose, l'acheteur a le choix ou de faire résilier la nte ou de réclamer une réduction de prix (C.O. art. 205, C.C.Fr. art. 1644). ' Le ndeur X est garant enrs l'acheteur Y des défauts de la marchandise. ' Donc Y a le choix entre la résiliation de la nte et la réduction de prix.
Si l'on ut réunir, comme en un bouquet, les dirses conditions dont dépend la dernière des règles que nous nons d'appliquer, celle de l'art. 205, on dira :
1. si une nte a été conclue entre deux personnes (art. 184);
2. si la marchandise livrée par le ndeur est entachée de défauts qui lui enlènt une part importante de sa valeur (art. 197);
3. si l'acheteur a vérifié et signalé les défauts en temps utile (art. 210)
Avant de reconnaitre A l'acheteur le droit de résilier la nte ou de faire réduire le prix, il faudra donc examiner si ces conditions sont réunies dans le cas concret. Ainsi se manifeste dans l'application du droit l'enchainement des règles que nous avons expliqué au NA° 115.
Vérification des laits juridiques. De l'analyse A laquelle nous nons de nous livrer résulte qu'avant d'appliquer une règle, le juriste doit procéder A une confrontation entre les faits juridiques de cette règle et les éléments réels du cas concret : ce n'est que si l'abstrait - plaque - sur le concret que la règle est - applicable -.
Comme nous l'avons vu au NA° 113, cet examen peut comporter une simple étude des faits, ce qui n'implique pas nécessairement des faits matériels et peut mettre en cause des faits d'ordre psychologique tels que l'intention ou la bonne foi. fl peut aussi comporter la solution d'une question de droit (nature d'un contrat, validité d'un testament, existence d'un droit réel, applicabilité d'une loi aux parties *, qualification juridique d'un fait).
Application du dispositif. La constatation qui identifie le cas concret aux faits juridiques a pour conséquence l'application du dispositif de la règle. Celui-ci impose parfois une solution pure et simple, une décision toute faite : il en est ainsi lorsque la règle la formule catégoriquement et sans possibilité de choix : peine de mort pour l'assassinat suivant l'art. 302 du Code pénal franA§ais; acquisition par la femme du droit de cité de son mari lors de son mariage (Constitution fédérale, art. 54, al. 4). Mais sount doit internir encore une volonté déterminante : ce peut AStre la décision d'une personne en cause : c'est ainsi qu'en rtu d'un contrat bilatéral, lorsque le débiteur ne s'est pas exécuté, le créancier peut opter entre les solutions offertes par l'art. 107 C.O. Sount aussi c'est le juge qui doit prendre la décision : le juge pénal fixe la peine dont le cadre seul est indiqué par la règle; le juge civil fixe le mode de réparation morale en présence d'une gra atteinte aux intérASts personnels du demandeur (C.O. art. 49 al. 2) et détermine en d'innombrables circonstances le montant des dommages-intérASts. L'autorité administrati est aussi appelée A se prononcer : le pouvoir exécutif fixe la date des élections suivant les directis de la loi ou de la constitution.