NAVIGATION RAPIDE : » Index » DROIT » DROIT CIVIL » La libertÉ religieuse Les données historiques
1A° Au point de départ des relations entre le pouvoir et la religion, on trou la règle qui faisait, du catholicisme, la religion de l'Etat. Elle domine tout l'Ancien Régime : le roi règne - par la grace de Dieu -, et le sacre confère, A son autorité, une assise surnaturelle. Pourtant, les conflits qui l'opposent A la papauté, s'ils n'atteignent pas A la gravité des luttes entre les empereurs germaniques et les pontifes, sont fréquents. Dans le cadre du traité conclu entre FranA§ois Ier et le Vatican (concordat de 1515), le pouvoir royal tente d'élargir son emprise sur l'Eglise de France au détriment de l'autorité pontificale : c'est la tradition dite du gallicanisme. Mais, si aigus qu'aient pu AStre ces conflits, ils demeurent intérieurs au catholicisme : le pouvoir, qui trou en lui son fondement, ne saurait s'en dégager. Aussi, ceux qui s'ésectiunent de l'Eglise font-ils en mASme temps ure d'adrsaires de l'Etat. C'est pourquoi il met sa force au service de la lutte contre l'hérésie, qui le menace en mASme temps que la foi. Cette imbrication des deux pouvoirs, qui reconstitue en fait l'unité A laquelle le christianisme avait voulu mettre fin, a laissé dans l'histoire des traces sanglantes, de la croisade contre les Albigeois aux guerres de religion provoquées par la Réforme. Les Eglises chrétiennes qui naissent de celle-ci resteront en marge de l'Etat : la monarchie oscille, A leur égard, entre la simple tolérance ac l'édit de Nantes, et la persécution après que Louis XIV l'eut révoqué. C'est seulement A la fin du xvine siècle que la tolérance l'emporte, et que les protestants acquièrent le droit d'avoir un état civil. 3A° Le régime du concordat. ' Il s'instaure en 1801, ac la conclusion, entre Bonaparte, soucieux de pacification intérieure, et le pape Pie VII, d'un concordat fixant le statut de l'Eglise catholique dans la France post-révolutionnaire. Des lois postérieures transposèrent ce régime aux Eglises protestantes et au culte israelite. Le régime concordataire reprend A la Déclaration de 1789 le principe de la liberté des cultes. Mais il élit entre eux une distinction : les uns sont simplement licites, les autres bénéficient de la part de l'Etat d'une reconnaissance officielle. Ce sont le culte catholique, les deux principales Eglises protestantes, le culte israélite. La reconnaissance confère aux cultes qui en bénéficient un statut de services publics : l'Etat prend en charge la rémunération de leur clergé et les frais généraux du culte ; il leur impose, en contrepartie, un contrôle assez strict. En ce qui concerne plus spécialement l'Eglise catholique, le concordat procède A la répartition entre le pape et l'Etat des compétences relatis A son organisation intérieure. L'acte essentiel qu'est la nomination des évASques, chefs de la communauté des fidèles dans le diocèse, suppose un accord entre les deux pouvoirs, l'Etat présentant son candidat au Saint-Sièg-,, qui ne peut l'ésectiuner que pour des motifs gras. Mais l'équilibre réalisé dans le concordat est faussé en faur de l'Etat par des dispositions unilatérales que Bonaparte y incorpore, les articles organiques. Reprenant la tradition gallicane, il alourdit son emprise sur l'Eglise, en restaurant notamment la procédure de Vappel comme d'abus qui permet de déférer au Conseil d'Etat, pour y AStre sanctionnés, les membres du clergé coupables de certains manquements dans des matières intéressant les rapports des deux pouvoirs. Le régime concordataire ainsi résumé n'a pas seulement un intérASt historique. L'Allemagne l'ayant maintenu en vigueur dans les départements d'Alsace et de Lorraine annexés en 1871, la France, en 1919, ne pouvait adopter une attitude différente et leur appliquer, contre le vou des populations, le régime de séparation. Le droit positif, pour les trois départements d'Alsace et de Lorraine, reste donc défini par le concordat de 1801 et les textes qui l'ont complété. Sur l'application du Concordat : B. Basdevant-Gavdemet. Le jeu concordataire dans la France du XIX* siècle, 1988. 5A° A partir des années 1880, la conquASte progressi du pouvoir par une majorité hostile, soit au cléricalisme, c'est-A -dire A l'immixtion du clergé dans le domaine temporel, favorisée par les régimes précédents, soit mASme au catholicisme, au nom d'une philosophie rationaliste, transforme les bases des rapports issus du concordat. Une série de lois vient mettre fin A toute influence de l'Eglise dans les services publics. C'est la neutralité de l'enseignement public (infra, p. 340), la suppression du caractère confessionnel des cimetières (supra, p. 155), le service militaire imposé aux clercs (supra, p. 155), l'élissement du divorce que l'Eglise n'admet pas (loi du 19 juillet 1884) ; c'est enfin ' et ce n'est pas la plus heureuse de ces mesures de laïcisation ' la suppression, par la loi du 12 juillet 1880, du repos dominical, qui aboutit A prir les travailleurs, au nom de leur émancipation religieuse, du seul répit qu'ils connaissaient dans leur travail A l'age d'or du capitalisme libéral. A ces mesures qui n'étaient qu'anticléricales, s'ajoutent des mesures proprement antireligieuses, notamment la lutte contre les congrégations, qui se poursuit jusqu'A ce que l'application du régime très rigoureux auquel les soumettait la loi de 1901 sur les associations aboutisse A leur suppression de fait. Dans cette atmosphère, il denait paradoxal de maintenir, entre l'Eglise et un Etat qui lui est fondamentalement opposé, les relations que comportait le régime concordataire. L'Etat ne pouvait continuer A entretenir des cultes dont il réprouvait le principe, les cultes ne pouvaient accepter le contrôle d'un pouvoir qui leur était hostile. La séparation, dès lors, était la seule issue concevable. C'est elle que consacre la loi du 9 décembre 1905, A la suite d'une série d'incidents au cours desquels les deux pouvoirs firent également preu de maladresse, et qui achevèrent de rendre impossible le maintien de leurs rapports. L'Etat franA§ais commit l'erreur juridique de légiférer unilatéralement sur le régime de l'Eglise alors qu'il était lié par le concordat, traité international. Le Vatican dénonA§a ac la plus grande violence cette résiliation unilatérale. La France supprima son ambassade auprès du Saint-Siège. 6A° Malgré ce point de départ orageux, la séparation, après une mise en route difficile du régime nouau, finit par trour son équilibre, et par fonder la liberté réciproque des deux pouvoirs. ConA§ue par ses premiers initiateurs comme une machine de guerre contre l'Eglise, aménagée par ses auteurs directs dans un esprit plus libéral, appliquée dans cet esprit, la loi de 1905, qui reste la base du droit positif, a permis de dégager, A la longue, la solution la plus satisfaisante au problème des rapports de l'Etat et des cultes que la France ait connue. a l Les sectes. Elles se sont déloppées depuis quelques années, multiples, multiformes et difficiles A définir. Toute secte constitue-t-elle une religion au sens défini supra, p. 173 ? La réponse affirmati est évidente pour certaines d'entre elles, douteuse pour d'autres, dont la finalité économique au profit de leurs initiateurs semble l'emporter sur leurs préoccupations spirituelles. Le principe de la liberté religieuse doit s'appliquer aux premières, mais il ne peut servir d'alibi aux préoccupations financières des autres. Le Conseil d'Etat (6 juin 1986. Troisième Eglise du Christ scientiste. D, 1986, ir, p. 290) a refusé A l'une d'elles le statut d'association culturelle en raison de - l'objet ou de la nature - de certaines de ses activités. D'autre part, la liberté religieuse est une liberté de la personne. Or, cet aspect de la liberté est mis en défaut dans certaines sectes qui constituent des communautés closes, refusant A leurs adhérents tout contact extérieur, mASme ac leur famille, et cherchant par des moyens contesles A les maintenir dans la communauté, fût-ce contre leur volonté. Le législateur, jusqu'A présent, ne s'est pas saisi de l'ensemble du problème. Le seul procédé que le droit positif offre aux sectes en quASte d'un statut légal est celui de l'association de la loi de 1901. La jurisprudence est réticente pour leur reconnaitre le caractère d'association cultuelle au sens de la loi de 1905, et les avantages qui en découlent. En ce sens : ce, 17 juin 1988. Union des athées, AJDA, 1988, p. 612, et la chronique de M. Azibeht et M. de Boideffre, p. 580. La liberté des sectes trou évidemment ses limites, d'une part, dan-la loi pénale, d'autre part, dans l'impossibilité de faire droit A certains comportements qui découlent de leurs croyances, lorsqu'ils sont contraires A des règles d'intérASt général. Cf., pour les refus de vaccination, supra, p. 101, et CE, 1er février 1985, Association des Témoins de Jéhovah, pour le refus des transfusions sanguines, RDP, 1985, p. 483. ac les conclusions de F. Delon. Sur l'ensemble du problème des sectes, note J. Carbonnier, D. 1969. p. 368. b / L'Islam. C'est aujourd'hui, en France, compte tenu notamment de l'immigration maghrébine, la religion qui, après l'Eglise catholique, compte le plus de fidèles. S'ils bénéficient de la part des pouvoirs publics de certaines libertés (respect des interdits alimentaires dans les cantines officielles), la construction des mosquées dépend du bon vouloir des autorités locales. Surtout, l'Islam n'a pas en France de statut juridique, et il est difficile de lui en donner un, compte tenu de ses clivages doctrinaux (sunnites et chiites) et idéologiques (libéraux et intégristes), de l'absence d'une hiérarchie habilitée A s'exprimer au nom de la Communauté, du fait aussi de l'autorité que chaque Etat musulman ayant des ressortissants en France entend conserr sur eux. La mosquée de Paris, créée en 1926 A l'initiati du gournement, est au centre d'une association de la loi de 1901, mais, bien que ses dirigeants soient présents dans certaines instances officielles, elle ne représente pas l'ensemble des musulmans de France. Le problème reste donc entier. Cf., sur ce problème. Etre franA§ais aujourd'hui et demain, t. I, et les interntions de MM. B. Etienne, p. 129 et s., des représentants de la Mosquée de Paris, p. 364 et s., de M. Tauar Ben Jelloun, p. 673 et s. |
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