Entrée dans les lois et dans les faits A partir de 1880, confirmée par l'article 2 de la Constitution de 1958 qui en fait un des caractères de la République, la laïcité de l'Etat est la base idéologique du régime de la liberté religieuse.
La notion de laïcité a fait l'objet de maintes controverses sur le terrain proprement philosophique. Mais sur le terrain juridique, son contenu ne prASte pas A équique : il découle, pour l'essentiel, des deux articles par lesquels s'ouvre la loi du 9 décembre 1905.
D'après l'article 2, qu'on cite en premier, parce qu'il est celui qui, rompant avec la tradition, a le plus frappé les contemporains la République ne reconnait, ne salarie, ni ne subventionne aucun culte -. C'est l'aspect négatif du principe de laïcité.
Mais d'après l'article 1er, - la République assure la liberté de conscience. Elle garantit le libre exercice des cultes, sous les seules restrictions édictées dans l'intérASt de l'ordre public -. C'est l'aspect positif, ronfirmé par l'article 2 de la Constitution de 1958 : < La France est une République laïque. Elle respecte toutes les croyances. -
A) L'aspect négatif
La formule précitée de l'article 2 de la loi de 1905 ne prend son sens que par référence au régime auquel elle met fin. En affirmant que la République - ne reconnait aucun culte -, la loi n'a pas entendu dire que la République se refusait A en connaitre l'existence : tout le texte, qui a précisément pour objet d'aménager l'exercice des cultes, infirme cette interprétation. La notion de non-reconnaissance ne s'explique que par rapport au régime concordataire, qui impliquait pour les cultes deux statuts différents selon qu'ils étaient ou non - reconnus -. L'article 2 fait disparaitre la catégorie juridique des cultes reconnus.
Elle se caractérisait par l'intégration de ces cultes A l'Etat, et par leur soumission A un régime de
droit public. C'est A cette situation que l'article 2 met fin, et c'est l'aspect négatif de la laïcité : désormais, le fait religieux devient extérieur A l'Etat. U ne constitue plus que l'exercice d'une liberté reconnue aux citoyens. Tout élément de droit public disparait de son régime.
L'Etat laïque est donc celui qui se situe en dehors de toute obédience religieuse, et qui laisse dans le secteur privé les activités confessionnelles.
Mais, puisque les religions sont désormais affaires privées, l'Etat laïque n'a aucune raison de les ignorer systématiquement, alors qu'il est en relations avec toutes les autres formes ' culturelles, sociales, économiques ' de l'activité privée. Bien plus, il y aurait, dans cette ignorance, une discrimination A l'encontre des seules activités religieuses, qui irait contre la logique du système : en les ignorant, l'Etat leur ferait un statut A part, différent de celui qu'il applique A toutes les activités privées. Par cet aspect déjA , la laïcité apparait en étroite relation avec la liberté de conscience. La reconnaissance de certains cultes, en facilitant leur exercice, et en leur confiant une sorte d'investiture officielle, pouvait apparaitre comme une pression exercée en leur faveur. C'est cette pression que l'Etat laïque, respectueux de la liberté des options dans le domaine religieux, se refuse désormais A exercer.
B) L'aspect positif
La relation qu'on vient de marquer entre la liberté de conscience et la laïcité s'affirme plus directe encore avec l'aspect positif de celle-ci.
L'article 1er de la loi de 1905, en effet, réaffirme expressément la liberté de conscience. Laïque, l'Etat assure cette liberté, c'est-A -dire la liberté personnelle de croire ou de ne pas croire. Il prend A son égard un engagement : non seulement celui de la respecter lui-mASme, mais encore de l'assurer, c'est-A -dire d'en prévenir les violations.
L'engagement est plus formel encore en ce qui concerne l'exercice collectif des activités religieuses, c'est-A -dire la liberté des cultes : l'Etat lui donne sa garantie, c'est-A -dire qu'il se reconnait l'obligation de rendre possible l'exercice des cultes, sous la seule réserve, formulée A l'article 2, de ne pas en assumer le financement.
La laïcité, ainsi entendue, ne pouvait, au institutionnel, receir d'autre traduction que la séparation de l'Etat et des cultes.
Sur le principe de la laïcité, cf. la bibliographie citée, supra, p. 151.