NAVIGATION RAPIDE : » Index » MARKETING » PUBLICITé » La vérité n est plus dans le produit L'avènement du virtuel !Tout au long de son œuvre, le philosophe Paul Virilio souligne le rôle de la vitesse: informations, déplacements immédiateté, temps réel Du fait de la vitesse, le monde semble trop petit. Il s'épuise, devient une prison de laquelle on ne peut s'échapper que par le virtuel. Et le philosophe de poursuivre : - Quand nous aurons toutes les interactivités que nous voulons, que nous irons A Tokyo en deux heures grace aux avions hypersoniques, il est évident que le sentiment de l'étroitesse du monde deviendra rapidement insupporle. Nous aurons perdu la grandeur de la nature. - Allant de pair ac la révolution des transports, la révolution des communications a contribué A étroitiser notre monde. Perte du monde, de notre conscience du monde : temps réel, immédiateté, instantanéité Il s'agit de la conquASte d'un nouau territoire, d'une autre réalité que celle du réel, dans un monde qui n'existe pas. C'est l'effacement de la présence physique au profit d'une présence immatérielle. Pas A pas, la logique du virtuel progresse, prend ses marques et s'intègre dans notre quotidien. Cette dynamique revASt plusieurs facettes. On connait d'une part l'importance croissante que prennent les jeux vidéos dans l'existence des jeunes. Sony a ndu 25 millions de Playstation 2 en deux ans. Microsoft a séduit 1,5 millions d'acheteurs en trois mois aux états-Unis. Le marché des jeux vidéos dépasse désormais l'industrie du cinéma. Consommateurs privilégiés d'une culture du virtuel, les jeunes se construisent en substituant les sensations réelles par des sensations technologiques. L'unirs de ï'entertainment a bien compris cette noulle culture et se met A multiplier les personnages virtuels, qui prennent une importance croissante dans notre vie quotidienne. Personnages de jeux vidéos, présentatrices TV, personnages de films, créatures artistiques ou médiatiques, ceux-ci se déloppent et envahissent notre quotidien. La consécration de Lara Croft au rang de première star virtuelle est un signe des temps. Lhéroïne du jeu vidéo Tomb Raider, immense succès mondial, tient désormais sa place dans le top 5 des stars de la culture jeune. Accédant A une notoriété mondiale, elle fait la courture des magazines, du journal anglais The Face A Libération en France. Le plus surprenant est que cette créature purement immatérielle réussit A créer des phénomènes d'identification de la part des jeunes, comme une vraie star du cinéma. Et que, pour la première fois, le réel pan d'un point de départ virtuel : les stylistes, musiciens et designers, s'emparent de cette créature d'image et en dérint des produits bien réels. Les technologies sont prAStes A peupler notre imaginaire de créatures semblables. Et, comme l'écrivait O. Séguret dans Libération, on peut se demander si Lara n'est pas - une sentinelle avancée d'un peuple virtuel encore A nos portes -. Il semble clair cependant qu'elle a fait des émules ! Dans un élan prométhéen, les personnages virtuels finissent par s'affranchir de leur destin et se déloppent en instissant de nouaux champs commerciaux ou industriels. On les retrou dans le monde de l'art : Ann Lee, héroïne virtuelle issue de l'unirs manga a été une des principales attractions de la Biennale de Venise 2001. Dans la musique : en sortant son premier tube au Japon, Kioko Date est denue la première chanteuse virtuelle A succès. A€ la télévision, où les présentatrices virtuelles se multiplient, suivant l'exemple d'Anacova, la star anglaise. Et mASme du côté des demandeurs d'emplois : E Solal a fait sensation en proposant sa candidature A nombre d'entreprises alors qu'elle n'existe pas (www.esolal.com). Capitalisant sur cette dynamique, le cinéma flirte ac l'unirs du jeu vidéo et conA§oit des films réalisés en images de synthèse, reconstituant la réalité dans ses moindres détails. Tout le monde a été frappé par la perfection technique des personnages de Final Fantasy. Le moindre battement de cil ou moument de cheux d'Aki Ross, l'héroïne, semblait plus réel que la réalité. Les échanges de personnages jeux vidéos/cinéma semblent particulièrement bien fonctionner. Tomb Raider et Final Fantasy, Résident Evil sont issus d'un jeu vidéo, quand Shrek, sera A son tour adapté en jeu vidéo. Nous n'en sommes qu'aux prémisses, mais il semble que notre imaginaire collectif commence A se peupler de créatures virtuelles. Les prévisions inquiétantes du film Truman Show, où un pauvre individu se voyait denir A son insu l'objet d'un jeu vidéo, se concrétisent. Où se situe la frontière entre réel et virtuel dans les personnages de Loft Story ? De faA§on plus diffuse, moins spectaculaire que cette invasion de personnages virtuels, nous côtoyons tous quotidiennement un monde d'images ac lesquelles nous entretenons une relation plus ou moins intime. Les médias, la publicité, le cinéma construisent un monde virtuel, qui évolue en parallèle du nôtre. Chacun d'entre nous vit dans la réalité quotidienne et en mASme temps a une vie d'images. Ce n'est pas seulement au cinéma que l'identification ac des gens idéaux se passe. La publicité dépasse largement le cadre de la publicité. Elle rejoint le cinéma dans le rôle de fournir une réalité virtuelle A tout le monde. Elle crée des personnages idéaux, dans lesquels, mASme inconsciemment, nous ne pouvons nous empAScher de nous projeter, de nous identifier. Rimbaud avait raison : - Je est un autre - ! Notre identité se dilue dans les unirs virtuels qu'elle fréquente. Internet, les jeux vidéos, la projection au cinéma autant d'unirs ou nous recréons des personnages. Sur les chat rooms anonymes du net, où la règle est l'utilisation d'un pseudonyme, on devient quelqu'un d'autre. Dans le feu de l'action d'un jeu vidéo de combat, on n'est plus tout A fait nous-mASme, on devient mentalement un autre Dans cette noulle bulle personnelle, l'espace réel s'efface au profit du temps réel. Toute la société de l'image est construite sur le principe de la double identité, et les plaisirs qu'elle peut procurer. MASme si certains critiquent le pouvoir croissant des images dans les sociétés occidentales (triomphe des apparences sur l'essence, perte de substance), force est de constater que ce rôle se déloppe. Mais le phénomène ne concerne pas que le futur, il prétend nous offrir une révision virtuelle de l'histoire. Certains faits ou personnages historiques se détachent progressiment de leurs racines réelles et de leur contexte pour denir de simples images. Lhistoire de Che Guevara est ainsi revisitée. La mode revival du Che célébrant le 20e annirsaire de sa mort a illustré la mécanique de - déréalisation - de l'histoire. Le personnage a été mythifié par les médias comme incarnant une certaine image du romantisme (vivre vite et mourir jeune), A l'égal de Rimbaud ou James Dean. Le marché s'est vite emparé du mythe et les documentaires, les CD, le merchandising se sont déloppés, véhiculant une image soft de l'ancien leader castriste. Pas moins de deux interprètes ont diffusé des rsions différentes de la fameuse chanson engagée Hasta Siempre. Un hit imparable en a résulté. Et il suffit de voir le clip pour comprendre que les idéaux révolutionnaires de la chanson se sont vite effacés devant le glamour de la chanteuse. Les tee-shirts A l'efie du Che ont été largement diffuses. Ils ont mASme été, ac le fameux béret, la dotation d'un jeu dans certains magazines féminins. Gagnez la casquette du Che pour tout abonnement souscrit ! De mASme qu'on pouvait se procurer aux concerts de Renaud le tee-shirt A l'efie du Che, ac le visage de Renaud A la place de celui du héros. Le phénomène de déréalisation de l'histoire apparait ici dans toute son ampleur. Il ne faut pas oublier que le Che représentait l'aile gauche du gournement castriste. Il a fini par AStre écarté car il avait publiquement pris des positions beaucoup trop radicales face A l'URSS de Khrouchtchev. La brouille entre les deux états qui aurait pu en résulter eût été désastreuse pour les Cubains qui tiraient une grande partie de leurs ressources économiques de l'aide de l'Union soviétique. Aussi Che Guevara a-t-il été invité A disparaitre et a-t-il décidé d'aller proer des focos de révolution dans d'autres pays d'Amérique latine, et notamment en Bolivie où il a trouvé la mort. La séduction exercée par le monde de l'image touche tous les champs. Celui du star System et de l'entertainment s'est rapidement conrti A la noulle culture. Les dettes elles-mASmes perdent progressiment leur ancrage dans la réalité pour denir des icônes abstraites. Cantona est-il hyper-réel? On peut se poser la question. La réalité de joueur de foot du personnage s'est effacée devant le mythe qu'il s'est créé. Cantona, c'est désormais une image. Image de révolte, de masculinité, de virilité, savamment dosée ac un petit côté poète et rASur. Chacune des apparitions médiatiques de Cantona installe A sa faA§on cette image. Sa composition dans Le Bonheur est dans le pré, ses pubs Bic, LlPTON, comme ses multiples prestations pour Nike exploitent ce - territoire -. On soulignera notamment l'un des premiers films de Nike utilisant Cantona. Gelui-pi était filmé en s serrés, cadrés sur son visage'. Il avouait tous ses forfaits (avoir cogné sur un supporter, craché sur un arbitre) avant de se demander s'il allait pouvoir trour un sponsor. Signé : - Nike. - Ou bien le film Légionnaire où il proclamait le code d'honneur de la Légion. Rôle qui connait parfaitement A son profil. Quand Nike utilise A nouau Cantona, désormais arbitre, dans la camne de la Coupe du monde 2002, c'est toujours ces valeurs qu'il s'agit d'exploiter. MASme les actes - réels - qu'il a pu accomplir sont ensuite repris et - idéalisés - par les images. Ainsi du fameux épisode où la star en colère avait frappé un supporter dans un stade. Cantona s'était contenté de déclarer aux journalistes : - Les mouettes suint le chalutier dans l'espoir de trour quelques sardines -, puis avait quitté la salle. Sharp a construit un infomercial sur le sujet. Celui-ci était une merille d'humour : Cantona y multipliait les références A cette fameuse conférence de presse, restée dans les annales. L'infomercial reprend la citation et va jusqu'A centrer le scénario sur cette phrase. Et voilA un film publicitaire construit sur une déclaration médiatique. On est loin de sa réalité d'ex-star du foot. Cantona s'est créé un personnage, au fur et A mesure de ses apparitions médiatiques. C'est désormais une image dans l'esprit du public. Il véhicule des valeurs et peut les mettre au service de ceux qui sauront le convaincre. Ces exemples témoignent d'une - dématérialisation - de notre culture. Après Alcatel, qui a fermé ou ndu ses usines, Levi Strauss vient d'annoncer la ferrneture de six usines aux états-Unis. La production est désormais sous-traitée et délocalisée. La firme déclare vouloir denir - une organisation concentrée sur le marke ting et la conception de produits plus qu'un fabricant -. Il n'y plus aujourd'hui que deux usines Levi STRAUSS aux états-Unis Ce phéno mène est analysé par Jeremy Rifkin dans L'A€ge de l'accès (aux éditions la Décourte). Les évolutions des communications engendrent une mutation sans précédent : aux marchés se substituent les réseaux, aux biens, les services la propriété, A laquelle s'est longtemps identifié le capitalisme, fait place A la notion - d'expérience personnelle - vécue par un consommateur. Il est maintenant plus important de jouir d'un bien et de multiplier les - expériences - de consommation, mASme pour un temps limité, que de posséder un bien. Au point qu'une noulle discipline unirsitaire, le - marketing expérien-tiel - est en train d'émerger. |
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