Lorsque je traillais chez Coca-Cola, la première fois, Pat Garner était le chef de produit de Sprite. Pat Garner était un type formidable, mais il ne cessait de me dire que la seule façon d'augmenter le taux de pénétration de la marque, qui était de 15 %, consistait à conincre tous ceux qui ne buient pas du Sprite de le faire. Cela paraissait assez logique, je suppose, mais c'était en fait totalement faux. La vérité, c'est que la plupart de ceux qui ne boivent pas de Sprite n'aiment tout simplement pas le goût du citron. Mais cela n'empêchait pas Pat Garner, comme des centaines de milliers d'autres chefs de produit de par le monde, de rechercher
le marketing réciproque en courant derrière les parts de
marché qu'il ne détenait pas (qui, dans le cas de Sprite, étaient de 85 %) au lieu de se concentrer sur la part de marché qu'ils aient déjà.
Il est certain que si vous étiez en mesure de convertir tous les non-utilisateurs du marché à votre produit, vous seriez riche. Mais cette
stratégie ne marchera jamais. Les hommes politiques passent leur temps à fantasmer et croire qu'ils peuvent conincre ceux du parti adverse de se ranger à ses côtés. Alors qu'ils devraient plutôt s'assurer que le noyau dur de
leurs électeurs ne pas quitter le bateau et essayer de se gagner les indécis. Il en de même pour les produits et services : péchez dans les eaux poissonneuses et vous aurez bien plus de succès que si vous péchez dans le désert. Vous devez procéder en trois étapes :
1. Trouver où se trouvent ceux qui achètent déjà vos produits et les conincre d'en acheter plus.
2. Passer plus de temps à donner aux indécis des raisons d'acheter.
3. Oublier tous les autres.
Si vous aviez déjà l'age de raison en 1963, vous devez encore vous souvenir où vous étiez et ce que vous faisiez lorsque le président Kennedy a été tué. Vous vous souvenez probablement aussi où vous étiez et ce que vous faisiez en 1986 lorsque vous avez appris que Challenger ait explosé ou lorsque les tours du World Trade Center ont été attaquées. Mais vous souvenez-vous où vous étiez lors de la chute du mur de Berlin ? Probablement pas. Eh bien, moi, je m'en souviens. Non pas parce que j'aime la politique mais par le tout nouveau discours que tenaient les hommes d'affaires commençaient à dire lorsque les premiers marteaux-piqueurs se sont mis en marche :
« Rendez-vous compte ! Tous ces Européens de l'Est, des centaines de millions de nouveaux consommateurs ! »
C'était là un superbe exemple de paresse dans le marketing et l'activité. La théorie voulait que si nous allions dans ces pays et que nous étendions notre assise, nous développerions notre activité. C'était aussi simple que cela. Et ils disaient à voix basse : « Et par la même occasion, nous n'aurons plus à nous soucier de développer notre activité dans tous ces marchés difficiles où nous sommes déjà. »
Incroyable. Aussi ont-ils dépensé des sommes astronomiques et, très peu de temps après, ont-ils dû appeler au secours pour passer en pertes les mauis investissements qu'ils y aient faits. Des centaines de magnifiques usines en Russie et des milliers de camions flambant neufs dans certains pays derrière le rideau de fer ont été balayés sous le tapis parce que les entreprises qui les possédaient ne s'étaient pas suffisamment intéressées aux consommateurs. Et c'était ces mêmes entreprises qui clamaient haut et fort : « Pensez globalement, mais agissez localement. »
Quelle idiotie ! Ce genre de commentaire (que l'on a également entendu lorsque la Chine s'est ouverte au monde) illustre parfaitement deux des principaux problèmes du marketing. Tout d'abord, le credo selon lequel l'important, ce sont les nouveaux consommateurs, et le second, la croyance selon laquelle tous les consommateurs, les nouveaux
clients et les clients acquis, sont égaux et peuvent être abordés de la même façon. En réalité, toutefois, vous ne pouvez pas vous contenter de rassembler quelques gues spots chaleureux en espérant que tout ira bien.
Après avoir cessé de vendre en Inde, pendant quelque temps, Coca-Cola a été en mesure d'y entrer de nouveau. La première fois, le gouvernement indien ait exigé de connaitre la formule du produit et la comnie l'ait refusé à juste titre. Aussi nous a-t-on éjectés. Nous avons alors acheté le Groupe Parle, qui recouvrait des franchisés qui vendaient avec succès un certain nombre de marques populaires. Les huiles à Atlanta ont alors décidé qu'il leur fallait un Indien pour gérer l'activité en Inde. Ils en ont donc trouvé un aux États-Unis et l'ont envoyé là-bas. Malheureusement, il n'ait pas la moindre idée de la façon dont il fallait gérer un groupe de marques. Aussi a-t-il pensé appliquer à l'Inde ce qui ait bien marché aux Etats-Unis. Vous ne le croirez pas, mais c'est absolument vrai : le type a en fait recruté quelques jeunes enfants indiens dans tout le pays et leur a demandé de chanter une chanson, juchés sur une colline. Cela vous rappelle-t-il quelque chose ?
Ce qui ne voulait absolument rien dire pour l'auditoire local et la camne n'a même pas duré une semaine. Quel gachis !
Ce devrait être évident que les différents groupes de clientèle ont des besoins et des désirs différents et devraient être abordés de façon différente. Vous n'allez pas vendre des couches pour incontinents à un concert de rap. Et il devrait être assez logique d'essayer de satisfaire pleinement vos clients actuels ant de tenter d'en recruter d'autres. Mais vous seriez surpris d'apprendre à quel point les entreprises qui ont compris ces deux idées sont rares.
Le gros problème vient de ce que la plupart des entreprises ne savent pas qui sont leurs clients. Si c'est votre cas, vous allez assister à deux choses : vous aurez plus de mal à atteindre les consommateurs qui pourraient en fait acheter votre produit et vous dépenserez considérablement plus que nécessaire en publicité.
Alors, qui sont vos clients ? Nous devons commencer par savoir qui ils pourraient être, puis affiner graduellement jusqu'à parvenir à un chiffre raisonnable. Un de mes amis a une très bonne formule pour expliquer ce processus. Supposons que vous ayez décidé d'aller à la pêche à la ligne. La première chose que vous devez faire est de savoir où se trouvent les lacs. Puis, vous devez déterminer ceux qui sont poissonneux. Vous devez ensuite trouver quels sont les poissons qui vivent dans chacun des lacs poissonneux. Vous devez alors déterminer quels sont les lacs où vivent les genres de poissons que vous recherchez. Ce n'est qu'alors que vous pouvez lancer votre ligne.
En d'autres termes, pour faire plus simple, au regard de votre entreprise, le monde est divisé en deux groupes :
. ceux qui utilisent, pourraient utiliser, ou pourraient éventuellement utiliser un produit dans votre secteur ;
. ceux qui n'en utilisent pas et ne souhaitent pas le faire.
Débarrassez-vous de ceux qui ne souhaitent pas le faire et ce qui reste constitue votre marché potentiel. Si vous êtes un homme politique et que vous convoitez un poste au niveau du département, votre marché potentiel est constitué exclusivement des ressortissants qui vivent dans le département et qui sont enregistrés sur les listes électorales. Si vous commercialisez des steaks, vous n'allez pas en vendre beaucoup aux végétariens.
Mais, même en essayant de viser, lors d'une camne publicitaire, tous les ressortissants du département ou, dans l'autre cas, tout le monde sauf les végétariens, ce n'est pas beaucoup mieux que de viser tout le monde partout. Votre marché potentiel se compose de cinq catégories de consommateurs :
1. Les clients fidèles : non seulement ils aiment le steak en général, mais ils adorent votre steak en particulier. Ils ne font pas attention aux
publicités de vos concurrents, ils n'aiment pas essayer de nouveaux produits et ils sont disposés à faire la queue et à payer dantage pour votre steak.
2. Les clients occasionnels : ces consommateurs mangent du steak régulièrement et ils peuvent probablement acheter le vôtre, mais vous devez leur donner de bonnes raisons pour le faire.
3. Les indécis : c'est généralement le groupe le plus important et de loin le plus onéreux à atteindre. Les électeurs indécis passent d'un candidat à l'autre en fonction des dernières informations qu'ils ont entendues. Les consommateurs de steaks indécis ne voient aucune vérile différence entre votre viande et celle de vos concurrents. Ils achèteront la première qu'ils trouveront. En fait, ils pourraient même acheter un steak haché, s'ils en ont envie.
4. Les opposants apprivoisables : ces consommateurs n'aiment pas votre
marque et ne l'achèteront pas. Toutefois, si vous leur donnez une vraiment bonne raison de le faire, telle qu'une remise importante, ils peuvent le faire à titre d'essai.
5. Les opposants farouches : vous n'arriverez jamais à séduire quelqu'un qui a eu une intoxication alimentaire à cause de l'un de vos steaks ou qui a un ressentiment personnel contre votre parti. Aussi ne ut-il pas la peine d'essayer.