L'attrait d'une unité de compte relativement sle
A€ l'inverse de l'écu officiel, organisé par les accords créant le SME, ce sont les pratiques des agents économiques, entreprises et institutions financières, qui sont A l'origine du
développement d'opérations pries en écus, et donc d'- écus pris - (Ruffini, 1989). Si les écus détenus par les
banques centrales au FECOM n'interfèrent en rien avec l'activité des agents économiques, en revanche, l'unité de compte écu a rapidement retenu l'attention des entreprises et des institutions financières, dans un contexte d'insilité monétaire. En effet, l'insilité des taux de change entre monnaies européennes - tenant non seulement aux fluctuations intra-marginales, mais aussi aux changements de parités et au flottement de certaines monnaies européennes - engendre des
risques de change contre lesquels l'unité de compte écu, moyenne pondérée des monnaies européennes, permet de se prémunir.
L'écu s'est développé comme unité de compte financière : les agents économiques, plutôt que de libeller créances et dettes dans une monnaie particulière ou bien dans un - cocktail de monnaies - constitué pour l'occasion et destiné A réduire les risques de change, se sont mis A réaliser des opérations financières libellées en écus, avec un taux d'intérASt plus faible que sur les monnaies faibles et plus fort que sur les monnaies fortes. C'est ainsi que, sur les
marchés financiers, les émissions de titres en écus, les obligations en particulier, ont enregistré un essor très vif et que les banques ont, elles aussi, développé leurs opérations en écus. De faA§on analogue, certaines entreprises se sont mises A utiliser l'écu comme monnaie de facturation pour leurs opérations commerciales, dans le but de réduire les risques liés aux variations de taux de change, qu'il s'agisse d'opérations internes A une
entreprise multinationale (Saint-Gobain) ou des relations entre entreprises.
La dynamique de l'écu et ses limites
On peut envisager, dans une présentation plus logique que rilement chronologique, que l'écu a connu plusieurs phases (. 42) : après une première phase au cours de laquelle l'écu est créé comme unité de compte et instrument de réserves des banques centrales, l'écu, dans une deuxième phase, pénètre les relations économiques et financières pries comme unité de compte. L'écu exerce ainsi une fonction de la monnaie : celle qui consiste A servir d'instrument de mesure, d'étalon, dans les échanges.
Toutefois, ce n'est qu'au cours d'une troisième phase que l'écu prend une dimension monétaire plus large, sous l'effet de trois innovations :
a/ l'écu acquiert, de faA§on progressive et inégale selon les pays, le statut d'une devise, qui peut AStre négociée et cotée sur les marchés des changes. Bien évidemment, le taux de change effectif de l'écu ne peut s'éloigner que faiblement de sa valeur calculée : un écart profond incite les opérateurs A jouer sur la différence, ce qui tend A la réduire ;
b/ l'écu acquiert, dans les opérations commerciales, un rôle plus complet, dans la mesure où il ne sert pas seulement A la compilisation de l'échange, mais aussi au règlement de l'échange; il endosse ainsi, A côté de la fonction d'instrument de facturation, la fonction d'instrument de règlement des échanges ;
c/ les avoirs bancaires en écus apparaissent. En effet, la monnaie est, de nos jours, une créance liquide sur les banques détenue par les agents économiques, et par voie de conséquence un passif pour les banques : la monnaie scripturale en écu voit le jour. Dès lors, se développent des opérations interbancaires en écus, qui prennent la forme de compensation et de crédits (Lelart, 1989).
Toutes ces évolutions aboutissent A ce que les différents marchés de capitaux comprennent un timent en écus : le
marché financier (obligations en écus), le marché monétaire (opérations courtes en écus), le marché des changes et le marché des crédits bancaires.
Une monnaie se fonde toujours simultanément sur le - prince - et le - marché - ; c'est, A la fois, la loi et la confiance qui sont A la base de l'utilisation d'une monnaie et de sa valeur. En 1978-l979, les - princes - définissent des contours très modestes A l'unité de compte européenne ; mais les agents économiques ont pris le relais, donnant un essor décisif A l'écu, qui a fait un saut qualitatif, passant de la simple unité de compte A l'avoir bancaire, utilisable dans les règlements. Au terme de cette évolution, on peut se demander si l'écu était, A la veille du passage A la monnaie unique, rilement une monnaie. L'écu est A la fois une unité de compte et une créance liquide sur les banques, et il endosse les trois grandes fonctions assignées traditionnellement A la monnaie : instrument de mesure des échanges, instrument de règlement des échanges et instrument de réserve. Toutefois, il est loin de constituer une rile monnaie : il n'en possède ni la matérialité, ni l'espace, ni les institutions, ni la valeur.
a) Si l'écu prend la forme de monnaie scripturale, il ne se présente pas, de faA§on autre que symbolique, sous la forme de monnaie divisionnaire et fiduciaire, ce qui limite son rôle dans les échanges, mais aussi l'importance qu'il peut avoir dans la réalité cue par les ménages et donc dans les représentations collectives, fondamentales pour tous les phénomènes monétaires.
b) L'écu est une monnaie qui se surajoute aux monnaies nationales ; en
concurrence avec celles-ci, il ne bénéficie pas d'un espace propre. Dès lors, son rôle monétaire est qualitativement complet, mais reste, du point de vue de son extension, marginal par rapport aux monnaies nationales.
c) Sans espace propre, l'écu ne bénéficie pas d'institutions spécifiques en mesure de jouer, en particulier, le rôle de prASteur en dernier ressort auprès des intermédiaires financiers.
d) L'écu monnaie-panier n'a pas de valeur autonome, puisqu'il reste une monnaie-panier dépendante des monnaies européennes qui le constituent. Le passage de l'écu A l'euro, rile monnaie, suppose des transformations institutionnelles profondes ; tel est l'objet de l'union monétaire.