Fonction - historique - et fonction téléologique
En effet, l'appréciation de l'utihté des fictions relè sount de la volonté de satisfaire une idéologie particulière, de promouvoir un certain ordre social, de favoriser certains intérASts ou d'atteindre des fins considérées comme justes, mais dont la détermination dépend des convictions de chacun.
De telles fictions ont manifestement une certaine autonomie en ce sens qu'elles existent par elles-mASmes et non pas seulement en tant que
moyens de coordination interne entre des éléments du système juridique. Elles ne sont pas purement instrumentales mais au service d'une finalité qui leur est propre.
Ces fictions sont toutes créatrices de droit. Mais elles peunt ne constituer qu'une extension des conditions ou de la portée d'éléments préexistants de l'ordre juridique. Ce sont alors des procédés de saugarde et d'extension du droit existant, en mASme temps que les véhicules de finalités bien définies. Cela correspond A la fonction historique mise en lumière par Ihering. Les fictions-finalités se caractérisent aussi, indépendamment de l'environnement
juridique auquel elles se rattachent, par le but qu'elles poursuint, si bien qu'elles ont alors une fonction téléologique.
La fonction - historique -
La fonction - historique - des fictions caractérise des fictions créatrices de droit nouau, en ce sens qu'elles affectent le contenu mASme des règles dont elles consacrent l'extension, sans boulerser l'ordre juridique existant. Cela permet d'allier une
politique juridique novatrice et évoluti dans des domaines particuliers et une politique conservatrice du système éli : ainsi, - le droit change sans en avoir l'air-l.
Les fictions permettent alors - d'introduire dans la vie sociale des règles de droit noulles - en classant sous des concepts préalablement élis les situations dont les progrès de la vie sociale exigent le règlement. Pour ce faire, on altère la réalité des choses pour faire entrer les relations sociales que l'on ut régir dans les formes, les catégories, les concepts ou les normes existantes2.
Les
fictions juridiques sont, dans ce cas, le véhicule de l'adaptation du droit A l'évolution de la vie sociale par la continuité de ses instruments : plutôt que de rompre les cadres d'un système juridique éli, on en étend les composantes au-delA de leurs limites antérieures et naturelles.
Ainsi, l'adoption, cette institution par laquelle - le droit ut singer la nature -, comme disait Napoléon, semble installée dans le droit comme une extension spécifique de la filiation. Les immeubles par destination consacrent aussi l'extension du sort des immeubles A des meubles que leur destination rattache étroitement A des immeubles par nature et saugardent ainsi l'unité
économique ou physique de l'accessoire et du principal. La personne morale, malgré son originalité, apparait également comme une extension des notions de personnes physiques et de sujet de droit.
Certaines fictions s'attachent, A cet effet, aux conditions d'application des règles ou des concepts. Elles supposent la présence de conditions qui n'existent pas en réalité, pour étendre artificiellement l'application d'une qualification ou d'une règle juridique, ou, inrsement, elles considèrent comme inexistantes des conditions réalisées. C'est ce que l'on a appelé - le procédé des conditions feintes -'.
Par le vieux principe infans conceptus pro nato habetur, issu du droit classique romain, on considère par anticipation l'enfant comme né alors qu'il n'est encore que conA§u et n'a pas encore de vie distincte. Cela permet de le traiter comme un sujet de droit depuis l'époque de sa conception et de déroger ainsi A la règle selon laquelle la personnalité ne s'acquiert que par la naissance et A la naissance. Inrsement, pour assurer la protection de certaines personnes ou de certains intérASts, le droit contemporain, qu'envahit les textes impératifs, fourmille d'hypothèses dans lesquelles le législateur - répute - - non écrites - toutes clauses contraires A ces textes.
D'autres fictions s'attachent aux effets des règles de droit dont elles étendent la portée et les conséquences.
La continuation de la personne du défunt par l'héritier, fiction héritée du droit romain, fait survivre le défunt dans la personne de ses héritiers et légataires unirsels pour assurer la transmission ipso jure du patrimoine du défunt A leur profit au moment du décès et fonder leur obligation ultra vires aux dettes de la succession.
L'impact des fictions créatrices sur l'étendue des concepts et des règles juridiques est tel que leur consécration devrait, semble-t-il, ne reler que de la
compétence du législateur. La modification du domaine et de la portée de la loi tend A créer du droit contra legem et non pas seulement praeter legem.
Pourtant, le prASteur, jadis, et maintenant le juge et la doctrine, ont toujours utilisé des fictions pour accomplir leur ouvre créatrice.
Selon une fiction fondamentale, en droit anglais, la Common Law est théoriquement fondée sur la coutume générale immémoriale du royaume.
Dans les systèmes d'inspiration romano-germanique, les cours et tribunaux, instis du devoir de juger A peine de déni de justice, sont tenus d'appliquer et de vivifier tous les éléments du
droit positif, sans pouvoir, théoriquement, se substituer au législateur. Mais, pour répondre aux besoins de la vie sociale, ils sont conduits, lorsque la loi fait défaut ou est inadaptée, A - ruser - ac la réalité pour la rattacher A des concepts et des règles connus et susceptibles de permettre des solutions adéquates. Des analogies, voire des assimilations ou des renvois permettent alors l'extension du droit existant A des situations noulles. L'admission de certaines obligations considérées comme implicites dans certains contrats, telles les obligations de renseignement, de conseil ou de sécurité, sur lesquelles la jurisprudence fonde la responsabilité de certains professionnels, montre l'usage que l'on fait de ces fictions.
La fonction téléologique
Il se peut aussi que le législateur élisse ex nihilo de noulles fictions, pour des raisons de politique juridique, afin d'atteindre un but qu'il juge utile ou nécessaire.
Certaines fictions ont ainsi une fonction téléologique, en ce sens qu'elles ont pour objet direct d'assurer la protection de certaines personnes, de certaines valeurs ou de certains intérASts qui, A tort ou A raison, semblent devoir AStre garantis. Ces fictions se caractérisent et se justifient par leur finalité propre.
Elles consistent en dispositions de fond, constituant pour la loi - une fin en soi -, - se suffisant A elles-mASmes - et trouvant leur - justification immédiate dans certaines raisons, bonnes ou mauvaises, de politique juridique -'.
Ces fictions-buts sont très dirses. Ainsi, la légitimation des enfants naturels permet de placer un enfant naturel dans la situation d'un enfant légitime comme si ses parents avaient été mariés entre eux lors de sa conception ou, au moins, de sa naissance. La fiction y est évidente. Elle est spécialement flagrante dans la légitimation par autorité de justice puisque, mASme après coup, les parents de l'enfant ne se marient pas entre eux. Elle réside en une assimilation factice d'enfants naturels A des enfants légitimes pour leur conférer le mASme statut familial, social et juridique que s'ils étaient légitimes. De mASme, l'adoption, spécialement l'adoption plénière, permet de conférer A un enfant une filiation artificielle A la place de sa filiation d'origine et de lui reconnaitre, dans la famille de l'adoptant, les mASmes droits et les mASmes obligations qu'A un enfant par le sang.
La - naturalisation -, consistant pour les autorités d'un état A octroyer A un étranger qui le demande la nationalité de cet état, permet d'assimiler des étrangers aux ressortissants d'un pays.
Le - mariage putatif- a pour effet de faire produire certains effets A un mariage nul, presque comme s'il était valable. L'admission du - mariage posthume - fournit encore une autre illustration particulièrement topique de ce type de fictions.
Ces dirses institutions consistent donc en assimilations artificielles, faisant fi de la réalité concrète afin de fournir A certaines personnes une situation jugée plus favorable que leur sort naturel, au nom d'une certaine politique de la famille ou de la nationalité.
En matière patrimoniale, il semble que les fictions destinées A assurer la protection de certains intérASts constituent moins nettement des institutions autonomes et s'apparentent davantage A des instruments techniques d'extension de réalités existantes. Leur finalité de politique juridique n'en est pas moins certaine.
La pratique législati selon laquelle les clauses stipulées dans des
actes juridiques qui sont contraires A des textes impératifs sont - réputées non écrites - permettent de saugarder les
relations juridiques élies, tout en préservant un intérASt général impérieux pour la société, pour la protection de certaines catégories de personnes ou pour celle de l'ordre public ou des fondements d'une institution.
La prohibition de certaines stipulations conntionnelles au nom de la protection des consommateurs en fournit un bon exemple A propos des clauses abusis, en France : la nullité des clauses abusis - ne s'étend pas A l'ensemble du contrat dont les autres dispositions demeurent, en principe, valables - ; c'est pourquoi le texte comporte l'expression - non écrite -.
Inrsement, la pratique législati mais surtout jurisprudentielle selon laquelle certains contrats sont réputés comporter implicitement certaines obligations de sécurité, de conseil, de renseignement, de réalisation de prestations et de normes minimales ont directement pour objet d'améliorer la qualité des prestations promises, d'assurer la sécurité des usagers, de moraliser l'activité des professionnels et de promouvoir les garanties liées A leur interntion.
Consistant selon les cas A ignorer des clauses existantes ou A imaginer des clauses inexistantes, ces fictions sont destinées A réaliser une politique juridique déterminée.