1 ' La fréquence des clauses compromlssoires.
' L'insertion d'une clause compromissoire dans un contrat international entre un Etat ou l'une de ses subdivisions administratives ou une Organisation internationale et une personne privée étrangère est fréquente. On a mASme vu lA ' on le rappelle ' l'une des caractéristiques du
droit international des contrats internationaux, ou de l'internationalisation des contrats. Les clauses sent systématiquement présentes dans les contrats qui présentent une grande importance
économique et qui doivent se dérouler sur une longue période, comme les contrats relatifs A la construction de
travaux publics, d'usines, d'ingénierie, de transports, etc.. On notera cependant que le domaine financier international fait ici exception A la règle : on ne trouve pratiquement pas de clauses d'arbitrage dans les contrats de prASts entre les
banques commerciales et leurs emprunteurs publics (ou privés d'ailleurs) ; les banquiers demeurent traditionnellement réticents devant l'institution arbitrale et préfèrent recourir aux
juridictions étatiques des pays développés ayant un large
marché financier (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne ou Suisse par exemple). Dans le passé (ils ent maintenant virtuellement disparu de la scène internationale) les accords de concession entre Etats et sociétés étrangères préyaient toujours un recours A l'arbitrage international comme moyen de règlement des différends (ir, par exemple, les Accords de concessions entre la Libye et les comnies pétrolières étrangères qui ont donné lieu A plusieurs arbitrages célèbres dans les années 70, A commencer par la - sentence Dupuy - souvent citée).
' Mais, parfois, certains systèmes étatiques sont opposés A la validité de la clause compromissoire lorsque l'Etat ou l'une de ses subdivisions administratives ou une autre personne morale de
droit public sont parties contractantes. Telle était, d'ailleurs, la position première de la France. Mais un changement intervint sous l'influence des juges nationaux ; ceux-ci admirent, dès l'arrASt Galakis (Cass. civ. 2 mai 1966, Clunet 1966, 648, note Level) que la règle qui interdisait A l'Etat et A ses organes de compromettre, prévue aux articles 483 et 1009 du Code de procédure civile, n'avait été - édictée que pour des contrats internes - et était - inapplicable A un contrat international passé pour les besoins et dans les conditions conformes aux usages du commerce maritime -. Le législateur franA§ais se rangea ensuite au mASme avis ; c'est ainsi que l'art. 7 de la loi nA° 75-596 du 9 juillet 1975 (J.O. 15 juillet 1975, p. 7076) ajouta un deuxième paragraphe A l'article 2060 du Code civil, aux fins de permettre aux élissements publics A caractère industriel et commercial A compromettre, ceci après autorisation donnée par décret gouvernemental.
Plus récemment encore, afin de rendre plus aisée la convention entre l'Etat et les
collectivités publiques franA§aises avec la société américaine Walt Disney relative A la réalisation du parc d'attractions dit - Eurodisneyland -, le législateur franA§ais ajouta une nouvelle dérogation A cette disposition du code civil : désormais, les collectivités publiques franA§aises pourront souscrire des clauses compre-missoires dans les contrats passés avec des sociétés étrangères pour - la réalisation d'opération d'intérASt national - .
2 ' Des difficultés d'application.
' Les difficultés d'application de cette clause compromis-soire sont assez nombreuses. Certaines sont communes A la procédure d'arbitrage dans son ensemble, qu'elle s'applique seulement entre Etats ou entre Etats et
personnes privées. D'autres, en revanche, sont spécifiques aux arbitrages entre des sujets possédant un statut juridique différent.
a) Des difficultés communes.
' Ce sont des problèmes qui sont inhérents A toute procédure arbitrale quelles qu'en soient les parties ; c'est ainsi que le choix des arbitres peut se révéler difficile. Pour ce faire, il est fréquent que les parties aient recours A
la Cour d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI.).
Une difficulté particulière en matière de choix des arbitres se pose lorsqu'une partie ' surtout s'il s'agit de l'Etat ' s'abstient de désigner son arbitre et ainsi de participer A la procédure. On se souvient que telle fut l'hypothèse dans l'affaire Texaco Calasiatic contre Libye de 1977 où le professeur Dupuy se retrouva arbitre unique désigné par le Président de la C.I.J. Dans ce cas, il est fréquent que les parties puissent, d'après les termes du contrat, recourir aux offices du Président de la Cour internationale de justice ou du Secrétaire général de la CCI., afin de nommer l'arbitre, lorsqu'une d'entre elles refuse de le faire. Lorsque les deux parties nomment leurs arbitres, il reste toujours le problème du choix de sur-arbitre, au cas où les premiers arbitres ne pourraient arriver A se mettre d'accord sur un nom. Dans ce cas, les solutions précédentes qui consistent A faire appel au Président de la Cour internationale de justice sont assez fréquentes pour trancher ce type de difficulté.
Le lieu de l'arbitrage pose aussi parfois des problèmes. Souvent l'Etat cocontractant va imposer que celui-ci se déroule sur son propre territoire. Telle est la position des pays latino-américains lorsqu'ils acceptent l'arbitrage (ce qu'ils font d'ailleurs rarement). Telle était la position ' mais qui est en train de changer ' des pays socialistes.
Le droit applicable constitue souvent l'une des difficultés les plus épineuses. L'Etat aura naturellement tendance A demander que l'on applique son propre droit national : cela est imposé systématiquement, par exemple, par les pays latino-américains ainsi que par de nombreux pays en ie de développement. Mais, souvent, il est prévu, dans les termes mASmes du contrat, que si le droit du pays hôte s'applique, il devra AStre complété éventuellement par les principes généraux du droit, ou qu'il ne s'appliquera que pour autant que ses solutions seront conformes A celles du droit international.
Enfin, il convient de noter que la sentence arbitrale ne se suffit pas A elle-mASme et qu'elle aura besoin de tout le support du droit national afin d'AStre en mesure de produire pleinement ses effets. Ne possédant pas par elles-mASmes la qualité de titre exécutoire ' sauf celles rendues par le CI.R.D.I. ' les sentences arbitrales devront AStre soumises A la procédure de reconnaissance et d'exequatur organisée par le droit interne. De mASme, toujours sous le contrôle du juge, interne, la sentence arbitrale c internationale - devra emprunter les ,ies d'exécution forcée instituées par l'ordre interne si la partie condamnée se montre récalcitrante. En bref, la procédure arbitrale risque de n'AStre que la première phase d'un long contentieux.
b) Des difficultés spécifiques.
' Lorsque l'on est en présence d'un arbitrage entre un Etat et une personne privée étrangère, la personne privée étrangère doit se plier A un certain nombre de formalités et éventuellement faire face A certaines difficultés qui ne sont pas présentes lorsqu'il s'agit d'un arbitrage interératique. On rappellera que la personne privée doit d'abord se retourner vers les tribunaux nationaux de l'Etat qui est son cocontractant et utiliser tous les
moyens de recours fournis par le droit national. C'est l'application, que nous ans vue fréquemment, du principe de l'épuisement des recours internes. Une telle exigence, pour classique qu'elle soit, rend la procédure longue et coûteuse pour la partie privée. Il peut cependant y AStre dérogé et tel est fréquemment le cas dans la pratique.
L'immunité dé juridiction et d'exécution de l'Etat constitue également un problème très difficile A résoudre pour les parties privées lorsque l'Etat condamné par la sentence arbitrale A payer une indemnité soulève ce motif devant les tribunaux du pays où l'on cherche A obtenir l'exécution judiciaire de la sentence. On rappelle que la Convention B.I.R.D. n'a pas tranché ce problème et que, dans beaucoup d'Etats, il est actuellement impossible de procéder A une exécution forcée contre les biens de l'Etat étranger (ir supra, nA° 936 et s.). (Pour des exemples récents de ce type de difficultés, ir les affaires Ipitrade et L.I.A.M.C.O. dont le tribunal de Grande Instance de Paris a eu A connaitre en référé. Voir Clunet, 1979, 857, avec une note Oppetit).
Mais mASme si l'Etat a renoncé A ses immunités dans un contrat international avec une personne privée étrangère, cette renonciation sera-t-elle reconnue pleinement valide par les tribunaux nationaux saisis A qui il sera demandé l'exécution de la sentence arbitrale - internationale - ?
Si l'Etat refuse de se soumettre A l'arbitrage qui était prévu au titre d'une disposition insérée dans un contrat avec une personne privée étrangère ou si l'Etat, ayant accepté l'arbitrage refuse d'exécuter la sentence, alors la partie privée disposera toujours d'un dernier recours : elle pourra en effet demander A son Etat national d'exercer sa protection diplomatique et ainsi de procéder A la mise en jeu de la responsabilité internationale de l'Etat auteur de l'acte international illicite. Dès lors, le différend n'opposera plus un Etat et une personne privée étrangère mais, ayant été élevé, deviendra de type interétatique (ir supra, nA° 1114 et s.).