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MANAGEMENT

Le management ou la gestion est au premier chef : l'ensemble des techniques d'organisation des ressources mises en ouvre dans le cadre de l'administration d'une entité, dont l'art de diriger des hommes, afin d'obtenir une performance satisfaisante. Dans un souci d'optimisation, le périmètre de référence s'est constamment élargi. La problématique du management s'efforce - dans un souci d'optimisation et d'harmonisation- d'intègrer l'impact de dimensions nouvelles sur les prises de décision de gestion.


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La condition d'employé

Pouir et contre-pouir
Il existe une représentation implicite des rapports entre le responsable et ses collaborateurs, qui persiste indépendamment de toutes les résistances que peut offrir la réalité, indépendamment des éléments de l'observation et de l'expérience. Il faut donc regarder cette représentation en face une bonne fois, pour en ir le caractère fallacieux et accueillir en soi une représentation plus juste du réel. On s'imagine, en raison sans doute du tracé des organigrammes, que le responsable a autorité, pouir, droit (nous verrons au chapitre 7 que ces mots ne sont pas synonymes) sur ses collaborateurs, et on s'arrête à cette représentation incomplète. À la vérité, il faut dire que les collaborateurs individuellement et en groupes (et pas seulement en groupes syndiqués) ont du pouir sur leurs responsables. Ceci est dans la nature des choses, selon les lois de la physique où toute action engendre une réaction, ou selon la dialectique (ici les mots sont mal choisis) du maitre et de l'esclave. Tout pouir entraine un contre-pouir et le mot a beau être chargé de connotations péjoratives, la réalité ne l'est pas. La source de ce contre-pouir réside dans le fait que le responsable a besoin du travail de ses collaborateurs, et donc, dépend d'eux partiellement.


Résistance passive

Il est à noter que les collaborateurs n'ont même pas à exercer le contre-pouir constamment pour que le responsable inconsciemment en tienne compte. Il suffit qu'il soit là en puissance. Ce contre-pouir a deux points principaux d'application. D'abord, les collaborateurs peuvent faire ou défaire la réputation de leur responsable, soit directement dans les entreprises qui, sous une forme ou sous une autre, ont des procédures d'évaluation des responsables par les troupes, ou des enquêtes d'opinion sur le moral du personnel, soit indirectement en collaborant ou en freinant par une sorte de résistance passive, de façon à ce que le responsable atteigne, ou n'atteigne pas, ses objectifs. Crozier a montré jusqu'où pouvait aller le contre-pouir quand il se sent trop oublié : des spécialistes allaient dans un atelier, jusqu'à simuler des pannes pour mettre à jour leur caractère irremplaçable et ainsi, situer tout l'atelier, y compris leur responsable dans leur dépendance. Un autre point d'application de ce contre-pouir est la rétention par la base d'informations nécessaires au chef, que cette information soit technique, qu'elle concerne le marché extérieur (cas des vendeurs sur la route), qu'elle concerne les règles et les procédures. Les grèves du zèle qui consistent à appliquer les procédures à la lettre sans tenir compte de la tradition non écrite d'interprétation représentent une forme de pouir, dues à la parfaite connaissance des procédures.
Le management n'apparait donc pas comme une réalité à sens unique mais plutôt comme une variété de ce qu'on appelle l'échange social.
« Vous yez bien que c 'est donnant donnant, allez-us me dire : et pourquoi étiez-us si opposé au fait de uloir se rapprocher des collaborateurs comme us l'avez fait au chapitre 2 ? »
« Parce que précisément en se rapprochant, on n 'est plus dans une situation d'échange social, mais de Jus ion. Ce qu 'on leur donne alors, n 'est pas ce qu'ils attendent vraiment d'un responsable. Mais il est bien vrai que tout en étant à distance on doit donner à ses collaborateurs ».
À partir d'ici on peut envisager plusieurs questions :

Un chef doté de pouir
a. En premier lieu, qu'attendent en général les subordonnés de leur chef pour qu'ils lui donnent leur confiance et qu'ils ne jouent pas à miner sa réputation et ses objectifs ?
Paradoxalement, ils souhaitent qu'il ait du pouir, oh ! non pas sur eux, mais sur la ligne hiérarchique supérieure, et sur les lignes horizontales. Ceci n'est pas le souhait direct mais la conséquence d'un souhait profond. Ils veulent être défendus individuellement et collectivement dans la jungle de l'organisation ; ils veulent que quelqu'un songe à leur avancement, leur formation, leur carrière, que le groupe ait de la visibilité au sein de l'entreprise, et pour cela ils veulent un responsable écouté d'en haut et respecté par ses collègues.
Le pouir du manager a donc une double exigence. D'une part des collaborateurs attendent du chef qu'il les protège contre les demandes excessives de la hiérarchie supérieure, soit en obtenant des modifications de cette demande, soit en obtenant les moyens d'y faire face sans trop d'écrasement (moyens financiers, ressources humaines, etc.). D'autre part ils attendent du chef qu'il sache être leur ambassadeur auprès de la hiérarchie supérieure, dans le but de bien vendre ce service aux autorités.
Parallèlement à ce désir d'air un chef doué de pouir et sans mentionner une fois de plus la nécessité pour le chef de faire preuve de capacité technique certes, mais surtout organisationnelle, les collaborateurs veulent qu'il soit crédible et pour cela qu'il connaisse les règles du groupe. Cela ne signifie pas nécessairement qu'il doive les respecter, mais il faut au moins que sa transgression résulte d'un choix et non d'une ignorance. Le collaborateur ne s'exprime pas ainsi en général. Il percevra plutôt le problème à travers la métaphore de l'étranger : « II ne connait rien à la fonderie » « ce n 'est pas un commerçant » « On it bien qu 'il n 'est pas de la région ». Mais de toute façon cette situation est le lieu d'exercice de la distance juste dont il a été plusieurs fois question. Le responsable est du groupe ; il en connait les lois, les normes, les rites, etc. C'est ce qui le rend crédible. Et en même temps il n'en est pas car il ne se sent pas lié entièrement par ces données ; il garde sa liberté au nom de données plus générales ; c'est par là qu'il est responsable.
b. En seconde instance, on peut se demander comment perceir l'état des esprits, de montée du contrepouir, les forces d'adhésion ou de résistance, dont on vient de ir l'existence ? Les moyens ne manquent pas, et sont de maniement facile ; encore faut-il les mettre en pratique.


Une situation inversée

Certains responsables ne sont souvent si exigeants vers le bas que parce qu'ils ne sont pas crédibles et n'obtiennent jamais rien du haut ; leur tendance autoritaire est la rançon de leurs capitulations.
Le plus efficace est de développer les qualités d'écoute. Si us écoutez vraiment, les collaborateurs ne manqueront pas de us enyer des messages codés. Malheureusement ils seront codés, car il est rare qu'un collaborateur, légèrement mécontent à tre égard, us dise d'emblée exactement ce qui ne va pas. Le sait-il lui-même, d'ailleurs? Ecouter est un art qui ne s'apprend que lentement. Mon expérience m'oblige à dire que dans les groupes que je rencontre pas plus de 20 % des managers savent vraiment écouter, et encore en écrivant cela j'ai tendance à me taxer d'optimisme. Et cependant écouter est élémentaire. Il faut vraiment que des forces profondes luttent pour empêcher l'exercice de cette activité qu'on pourrait croire élémentaire : peur de perdre du temps ; peur de perdre son autorité ; confiance qu'on possède la vérité ; quasi-certitude que l'autre n'a rien à nous apporter, etc.


Se mettre au vert

Il est possible de tenter des procédures plus formelles. Dans plusieurs entreprises, j'ai été appelé pour animer des journées de contact et de communication. Les rencontres groupent le responsable et ses collaborateurs. Régulées par une personne extérieure, portant sur les problèmes de la cellule, elles sont l'occasion d'une écoute plus attentive, et éventuellement de décodages plus clairs de la part de l'animateur.
Quand un service s'est livré à un tel travail deux ou trois fois, il est parfaitement capable de le faire à intervalles réguliers, par exemple tous les six mois, sans la présence d'un intervenant extérieur. Toutes ces pratiques permettent au contre-pouir de s'articuler, et de se combiner avec le pouir pour parvenir à ses fins.
D'autres implications peuvent être tirées de cette considération sur le pouir des subordonnés, en particulier sur les attitudes que cela impose au manager face à sa propre hiérarchie. Mais cela sera traité au chapitre 5.



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