NAVIGATION RAPIDE : » Index » ECONOMIE » POLITIQUE éCONOMIQUE » La crise de l économie de croissance L'échec écologique de l'économie de croissance
Les conséquences écologiques de l'économie de croissance En dépit des efforts des - écoréalistes - pour peindre en rose l'économie de croissance6, on ne peut nier que les concentrations de dioxyde de carbone (cause principale de l'effet de serre), pratiquement sles depuis près d'un millénaire avant l'émergence de l'économie de marché, ont, depuis son apparition, pris leur envol et augmenté d'environ 30 %. Résultat : il est désormais largement admis que l'effet de serre, premier symptôme de la crise écologique aujourd'hui, a déjA des conséquences climatiques catastrophiques8. Mais, contrairement A ce que prétend la mythologie réformiste de la gauche et des Verts orthodoxes, ce n'est pas seulement la résistance d'une poignée d'intérASts économiques puissants qui interdit de prendre des mesures efficaces pour régler le problème. Pour agir efficacement contre l'effet de serre, il faudrait en réalité changer totalement de mode de vie. Le mode de vie actuel a été déterminé par la dynamique de l'économie de marché, et par la concentration du renu et de la richesse entre les pays et dans chacun d'eux, et la concentration urbaine qui en est résultée, ainsi que la culture de la consommation en général et de l'automobile en particulier. L'un des sous-produits de ce processus de concentration est l'agriculture industrielle, qui a déjA non seulement éliminé les petits exploitants et incité A industrialiser plus encore la production agricole par le génie génétique (prétendument nécessaire pour conjurer la menace de crise alimentaire due A la croissance démographique), mais aussi répandu des maladies comme celle de la - vache folle - (ac de possibles effets désastreux sur la vie humaine), l'épidémie de fièvre aphteuse, etc. Les effets environnementaux de la mondialisation renvoient clairement A des causes systémiques, liées A la concentration de pouvoir institutionnalisée dans l'économie de marché et la - démocratie - représentati, et non A de - mauvaises - politiques et méthodes économiques. La prise de conscience des effets de l'économie de croissance a conduit, en particulier depuis vingt-cinq ans, A l'élaboration de dirses théories - écologistes -. Une des faA§ons de les classer consiste A distinguer les approches écocentriques, qui considèrent les AStres humains comme une simple - composante du réseau de la vie - (par exemple l'écologie profonde*), et les approches anthropocentriques, qui voient en eux le - sommet de la vie - (tel l'éco-socialisme). Mais cette classification pose problème, car les deux catégories s'entrecroisent, par exemple dans l'écologie sociale. Je préfère donc ordonner les théories écologistes A l'aide d'un autre critère : tentent-elles ou non d'opérer une synthèse explicite entre l'analyse des conséquences écologiques de la croissance et les traditions classiques qui traitent de la dimension marchéisation de l'économie de marché - le libéralisme et le socialisme? Sur cette base, nous pouvons distinguer, d'une part, les approches suivantes : » Lenvironnementalisme libéral9, qui est en fait une synthèse de la théorie économique libérale et de l'analyse environnementale. » L'écosocialisme, qui souligne l'importance des rapports et des conditions de production dans l'analyse des problèmes environnementaux, et représente donc une synthèse de la théorie économique marxiste et de l'analyse environnementale. » L'écologie sociale", qui voit dans les structures hiérarchiques de domination et d'exploitation de la société capitaliste la cause de la crise écologique actuelle, et représente donc une tentati explicite de synthèse du socialisme libertaire ou de l'anarchisme et de l'analyse environnementale. D'autre part, il y a les théories qui ne cherchent pas, du moins explicitement, A opérer une synthèse ac d'autres traditions, et que nous pourrions qualifier de - purement - écologiques. Le meilleur exemple en est bien sûr l'- écologie profonde -, qui se focalise presque exclusiment sur les effets écologiques de l'économie de croissance, mASme si les théories du - déloppement approprié - et du - déloppement durable - pourraient aussi entrer dans cette catégorie12. Le rapport Brundtland est fondé sur trois principes fondamentaux : » La croissance économique est la clé de la justice sociale parce qu'elle peut éliminer la pauvreté : je m'efforce de prour dans ce livre que cette idée est un fantasme. » La croissance est la clé de la protection de l'environnement : autre fantasme, fondé sur l'hypothèse d'un - capitalisme rt -, qui ignore que toute tentati d'imposer A l'économie de croissance le respect de normes qualitatis (hier la -justice sociale -, aujourd'hui la - durabilité -) contredit fondamentalement sa logique et sa dynamique. » La croissance pourrait AStre écologiquement durable si les pays industrialisés qui. - depuis quelques années, ont pu poursuivre leur croissance économique tout en utilisant moins d'énergie et de matières premières par unité produite^5 - continuaient dans cette voie : fantasme encore, au vu des problèmes écologiques centraux qui, de toute évidence, ne cessent de s'aggrar (effet de serre, pluies acides, salinité, trou de la couche d'ozone, destruction des forASts, désertification, érosion des sols, etc.16). Tout PDG de multinationale qui se respecte donne aujourd'hui des conférences sur le - déloppement durable -. Les institutions contrôlées par l'élite transnationale (Banque mondiale, bureaucratie de l'Union européenne, etc.) publient des rapports par dizaines, organisent des colloques, subntionnent la recherche sur le - déloppement durable - et la protection de la nature, tandis que les scientifiques postmodernes théorisent le rôle de la science postmoderne dans l'instauration d'un rapport ac la nature et les autres AStres humains qui ne serait plus d'exploitation - ce qu'ils appellent le - réenchantement du monde -. De plus, le - déloppement durable - est actiment promu par des responsables politiques rts et des organisations rtes (Greenpeace, les Amis de la Terre, etc.) directement ou indirectement parrainés par des firmes transnationales18. Comme les partis rts du courant central participent déjA au gournement dans plusieurs pays européens, il n'est guère surprenant que le - déloppement durable - soit denu un - paradigme social dominant -. Tout cela en dépit d'une évidence : au sein du système existant d'économie de marché internationalisée, un - déloppement durable - est une contradiction dans les termes. Ce que fait judicieusement obserr Serge Latouche : Le concept de - déloppement durable - n'est que la dernière tentati en date pour adoucir les - mauvais - côtés de la croissance économique. L'intégration d'éléments environnementaux au calcul économique ne modifie ni la nature de l'économie de marché ni la logique de la modernité19. Que conclure ? La théorie du - déloppement durable - ignore le phénomène de la concentration du pouvoir, elle ne ut pas voir que c'est la conséquence fondamentale et la condition préalable de la croissance, et cette attitude n'est pas sans rapport ac les solutions qu'elle préconise : davantage de croissance, davantage d'efforts, de meilleures politiques, lois et institutions, davantage d'efficacité dans l'utilisation de l'énergie et des ressources. Son objectif réel n'est donc pas de trour comment réaliser un - déloppement durable -, mais comment créer une économie de croissance et de marché - respectueuse de l'environnement -. Ce qui est une évidente contradiction dans les termes. La dimension écologique du déloppement Dans les années 1980, l'irruption de la crise écologique sur le devant de la scène a ajouté une noulle dimension au débat sur le déloppement - jusque-lA focalisé sur une seule question : pouvait-on reproduire dans le Sud l'économie de croissance du Nord ? Les conséquences écologiques du déloppement et, implicitement, la désirabilité de l'économie de croissance sont denues des enjeux cruciaux. Pour les économistes orthodoxes, le problème consiste A déterminer si c'est le déloppement ou l'absence de déloppement qui dégrade l'environnement. La Banque mondiale a décrété que certains problèmes étaient liés au manque de déloppement économique. Elle estime en particulier que l'insuffisance des installations sanitaires, le manque d'eau pole, l'air pollué dans les logements où l'on brûle de la biomasse et de nombreux types de dégradation des sols dans le Sud ont pour cause fondamentale la pauvreté. Mais la mASme institution soutient que - beaucoup d'autres problèmes sont amplifiés par la croissance de l'activité économique : pollution (locale et mondiale) d'origine industrielle et énergétique, déboisement dû A une surexploitation commerciale des forASts et utilisation abusi de l'eau20 -. Mais, outre qu'il n'y a aucun moyen de fixer une valeur - objecti - A la plupart des éléments qui constituent l'environnement (puisqu'ils touchent A un facteur éminemment subjectif, la qualité de la vie), la solution suggérée implique en fait d'étendre le processus de marchéisation A l'environnement. Non seulement la Banque mondiale ignore fort commodément que le problème, c'est le mécanisme de marché lui-mASme, qui, en intégrant une importante composante de l'environnement - la terre -, a impulsé le processus de dégradation écologique, mais elle recommande de mar-chéiser aussi les autres composantes (l'air, l'eau, etc.) ! Il est facile de prédire les effets d'une telle démarche : l'environnement passera sous le contrôle soit des élites économiques qui dominent l'économie de marché (si l'on peut lui assigner une vérile valeur de marché), soit de l'état (si seule une valeur estimée est envisageable). Dans les deux cas, non seulement l'arrASt des dégats écologiques est pour le moins douteux, mais on perpétue le contrôle de la nature par des élites qui cherchent A la dominer - A l'aide, cette fois, de prescriptions - rtes -. La Banque mondiale ignore les chiffres suggérant ac force que c'est surtout la pauvreté-déloppement ' la pauvreté que crée le déloppement - qui provoque la dégradation de l'environnement, et non la pauvreté-sous-déloppement. C'est encore plus vrai si nous ajoutons cette autre vérité : ce sont les modes de vie consuméristes des riches qui dégradent l'environnement, et non ceux des pauvres. Les pays A hauts renus où vit 15 % de la population de la ète ont été A l'origine de 40 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone en 1990 et de plus de 50% en 19972I. Néanmoins, la Banque mondiale ne voit rien A redire au style de vie des riches et écrit : Pour des ressources naturelles qui ne sont pas renoulables, toute augmentation de la consommation implique nécessairement une diminution du stock disponible. Rien n'est toutefois nu confirmer l'hypothèse selon laquelle des ressources non renoulables commercialisées, comme les métaux, les minerais et l'énergie, se font de plus en plus rares au sens économique du terme. Ceci tient au fait que les pénuries potentielles ou réelles se traduisent par une augmentation des prix qui engendre A son tour de noulles décourtes, des gains d'efficacité, des possibilités de substitution et des innovations techniques. Il est clair que la Banque mondiale adopte implicitement l'hypothèse que nous faisions au chapitre 2 : la concentration n'est pas seulement une conséquence mais aussi une condition préalable fondamentale de la reproduction de l'économie de croissance. Dans la période de transition, la - hausse des prix de marché - fonctionne comme un dispositif de rationnement pur et simple, au bénéfice des catégories sociales privilégiées. Et mASme si elle est suivie d'innovations technologiques, etc., il est fort douteux, pour ne pas dire plus, que les catégories sociales non privilégiées seront en position de les exploiter. La Banque mondiale célèbre simplement l'- allocation par l'argent - des ressources mondiales qui se raréfient A cause de la croissance. En outre, aucun chiffre ne prou que les noulles technologies - induites par la hausse des prix - conduisent A une - croissance durable -. Peut-AStre est-ce exactement le contraire. La FAO (Food and Agriculture Organiza-tion, Organisation pour l'alimentation et l'agriculture des Nations unies) écrit par exemple : La production A faible niau d'engrais est probablement le système le plus respectueux de l'environnement, et on l'emploie depuis un temps immémorial. Néanmoins, au cours du processus de déloppement, tous les pays ont abandonné cette pratique, en raison de sa faible productivité et de son incapacité A répondre aux besoins alimentaires d'une population toujours croissante23. En renonA§ant A ces méthodes, les agriculteurs sont inévilement denus dépendants des firmes chimiques et des cultures d'exportation pour financer leurs achats de produits chimiques, généralement fabriqués par des firmes transnationales. |
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