NAVIGATION RAPIDE : » Index » ECONOMIE » POLITIQUE éCONOMIQUE » Dumping écologique et protectionnisme vert Les caractéristiques de la politique environnementale européenne : principes généraux et jeu des acteursExpliquer la manière dont s'organise la politique environnementale européenne présuppose de rappeler l'évolution des textes qui la régissent afin de souligner selon quelles modalités de mis en oeuvre des mécanismes de dumping écologique ou de protectionnisme, et d'indiquer le jeu des acteurs impliqués, en nous intéressant en particulier aux mécanismes de lobbying. A. Les principes généraux régissant la politique environnementale européenne La politique environnementale européenne peut AStre comprise au trars des grandes étapes qui caractérisent ses orientations, mais aussi des difficultés qu'elle s'est attachée A résoudre et des principes juridiques sur lesquels elle repose. 1. Les étapes de l'évolution de la politique environnementale européenne Construite au départ sans aucune référence explicite A la protection de l'environnement, la Communauté européenne n'a ensuite cessé d'intégrer la protection de l'environnement A son agenda de travail. C'est en 1967 que la première réglementation environnementale a vu le jour, au trars de la directi sur la classification, l'emballage et l'étiquetage des substances dangereuses. Depuis, au fur et A mesure de la succession des traités, les dispositifs de protection de l'environnement ont accomné les transformations de la Communauté, l'environnement s'affirmant comme une dimension prioritaire et prépondérante. Trois étapes méritent plus particulièrement d'AStre rappelées afin d'en délimiter les enjeux économiques. En premier lieu, l'Acte Unique européen (1987) marque une avancée considérable en matière d'environnement pour deux raisons principales. Premièrement, l'Acte Unique a permis d'orienter la construction européenne rs un déloppement respectueux des ressources naturelles en spécifiant, par voie législati, l'orientation générale de la politique environnementale. Le titre 7 de l'Acte Unique consacré A l'environnement élit (art. 130.R, 130.S et 130.T) les modalités de prise en compte de l'environnement par les Etats membres, les objectifs, les moyens el les ambitions de la politique environnementale (i.e. l'accélération de la prise en compte de la protection de l'environnement pour les pays présentant des lacunes législatis dans ce domaine). Deuxièmement, l'Acte Unique a contribué A définir les modalités juridiques de résolution des problèmes décisionnels issus des situations de blocage dues A la règle de vote A l'unanimité jusque lA nécessaire. La noulle procédure de la majorité qualifiée a permis de faire évoluer rapidement les cadres juridiques favorables A la protection de l'environnement, particulièrement lorsque ceux-ci peunt avoir un impact sur le processus concurrentiel entre les Etats. A titre d'exemple, rappelons que le Livre Blanc sur le marché unique, préalable A l'Acte Unique, n'envisageait pas moins de 280 projets de directis présentant une influence directe ou indirecte sur l'environnement (N. Robbins, 1992). En second lieu, le traité de Maastricht (1992), bien que consacré fondamentalement A la mise en place de la monnaie unique, a également eu pour finalité d'améliorer la protection de l'environnement. Cette orientation apparait dès l'article 2 du Traité, consacré A la protection de l'environnement. L'article 3 précise que la Communauté se doit de définir une politique dans en ce domaine. L'article I30.R a par ailleurs été révisé de telle manière que -les exigences en matière de protection de l'environnement puissent AStre intégrées dans la définition et la mise en ouvre des autres politiques de la communauté-. La protection de l'environnement est donc spécifiquement envisagée de manière transrsale au trars de l'élaboration de l'ensemble des politiques économiques. Ce principe d'intégration apparait comme d'autant plus important qu'il touche notamment les politiques industrielles et commerciales intra et extra communautaires. L'alignement des pays en cours d'adhésion constitue aujourd'hui une priorité majeure et un enjeu économique de première importance. L'article 138.13 offre, pour sa part, la co-initiati en matière de politique environnementale A la fois au Parlement et A la Commission ; l'article 130. T permet aux Etats membres d'adopter des mesures environnementales plus contraignantes que celles qui régissent la communauté sous réser d'AStre notifiées par la Commission. Nous rrons que le recours A l'article 130.T sert sount d'alibi pour favoriser, sous court de caractéristiques locales, la protection d'éco-industries nationales contre des industries étrangères plus polluantes. En troisième lieu, le traité d'Amsterdam (1997) a contribué A renforcer les dispositions précédentes sur la base de quatre réformes essentielles (M. WemaA«re, 1997) définissant l'orientation et les modalités d'application des politiques de protection de l'environnement : - Le déloppement durable constitue un objectif essentiel de l'Union Européenne comme en témoigne l'article B du préambule du traité. - Le renforcement de la prise de décision par extension de la procédure de coopération attribuant un rôle plus important au Parlement Européen, plus favorable A la protection de l'environnement que le Conseil des Ministres, notamment en raison de la présence de députés écologistes en son sein. Alors que l'Acte Unique imposait une procédure d'adoption juridique au niau du Conseil des Ministres en matière d'environnement reposant sur le principe de l'unanimité', le Parlement étant seulement consulté, le nouau traité légitime ce dernier comme participant A part entière au processus décisionnel. Le Parlement devient une instance co-décisionnelle possédant le mASme pouvoir que le Conseil des Ministres. - La modification de l'article 100.A du Traité préconise que les mesures d'harmonisation adoptées dans le cadre de la réalisation du marché intérieur devront aller dans le sens de la recherche d'un -haut niau- de protection de l'environnement. L'harmonisation européenne a ainsi permis de passer d'une logique d'exigences minimales A celle de la mise en ouvre de mesures élevées et directes. Parallèlement A ces évolutions politiques, l'action de l'Union s'est articulée autour de programmes d'encadrement d'action définissant les orientations destinées A garantir une cohérence suffisante et des règles plus souples. Cinq programmes ont été conduits depuis 1973, le dernier étant arrivé A échéance en 2000. 2. Les principes généraux d'action et de réglementation des politiques environnementales européennes De manière générale, on distingue six principes fondamentaux régissant la politique environnementale européenne (S. Faucheux et J.F. NoA«l 1995, J. Dutheil de la Roc-hère 1998, F, Bonnieux et B, Desaigues 1999) : le principe du pollueur-payeur. le principe de préntion, le principe d'équité, le principe d'efficacité, le principe de précaution et le principe de subsidiarité. Le principe du pollueur-payeur, ne nous parait pas AStre A l'origine de distorsions en matière de concurrence interne A l'Union Européenne. Le principe d'efficacité suppose que les Etats membres choisissent le mode de régulation le moins coûteux pour réaliser leurs objectifs environnementaux en particulier en séleclionnant les instrumente économiques les plus efficaces pour intcrnaliser au mieux les cxtemali-lés. En tant que principe permettant le choix d'un mode de régulation, il n'intervient pas de manière directe dans l'élaboration des politiques envisagées ici. Egalement non impliqué de faA§on directe dans ces politiques, le principe de préntion a pour finalité de limiter les effets néfastes irrérsibles, par voie de persuasion, afin d'éviter la mise en ouvre de modalités curatis des pollutions plus coûteuses. En revanche, les trois autres principes peunt servir de base, sous prétexte de politiques environnementales, A l'élaboration de politiques industrielles ou commerciales relevant soit des principes du dumping écologique ou de ceux du protectionnisme rt et renvoyant A autant de mécanismes concurrentiels détournés permettant d'acquérir un avantage atif. A cet égard, le principe d'équité a pour objet de justifier les transferts de renus des zones les plus riches rs les zones les plus défavorisées ou des catégories sociales les plus favorisées rs les plus pauvres. A l'évidence, il peut AStre utilisé A des lins de politiques de dumping ou de protectionnisme écologique. Plus spécifique de notre problématique, le principe de subsidiarité suppose que l'Union n'engage une action que si cette voie d'interntion s'avère plus efficace que celles des Etats s'ils oeuvraient de manière indépendante notamment en raison de l'existence d'effets de taille. Pour Caudal-Sizaret (1999), -mASme si la protection de l'environnement est de mieux en mieux intégrée aux objectifs et actions de la Communauté, celle-ci ne peut internir que dans les limites des compétences qui lui ont été attribuées en respectant les principes de subsidiarité et de proportionnaiilé- (art 3.B du TCE, art. 5 du TCliMTA). La subsidiarité présente l'intérASt de mieux tenir compte des spécificités locales mais l'inconvénient d'introduire des conflits d'intérASts dus aux difficultés de partage des responsabilités et des compétences entre les entités politiques aptes A définir une politique, notamment environnementale. Les instances européennes ne sont en effet considérées aptes A édicter des normes environnementales ou A se prémunir contre les pollutions que lorsqu'il s'agit de traiter de problèmes A caractères transnationaux ou lorsque ces normes impliquent une harmonisation entre les Etats, puisque la définition, l'orientation ainsi que les modalités de mise en ouvre des normes environnementales reviennent A la plus petite instance politique géographiquement concernée'. Des conflits d'intérASts économiques peunt donc apparaitre entre dirses régions ou Etats, par dirgence d'interprétation entre l'article 3A du traité de l'UE et ce principe de subsidiarité. B. Politiques environnementales européennes : modalités tl"exercice et jeu des acteurs L'accomplissement du marché unique européen a rendu nécessaire l'harmonisation des normes environnementales afin que la libre-eirculalion des marchandises puisse AStre effecti et ne se heurte pas A un protectionnisme déguisé. Cette tache s'est avérée ardue en raison de l'hétérogénéité des législations nationales ou du blocage aisé des institutions européennes, mais également A cause du lobbying actif émanant des groupes d'intérASts industriels ou écologistes. Ainsi, les normes européennes reflètent un équilibre fragile entre des coalitions de pays plus ou moins favorables A une protection élevée de l'environnement, contre des Etats moins favorables A sa protection et des groupes d'intérASts représentatifs d'industries déjA engagées dans des processus d'innovation, indépendants les uns des autres. Nous nous proposons de présenter ces enjeux en montrant en quoi les réformes institutionnelles nécessaires A l'élissement du marché unique ont été favorables A une législation, apparemment plus stricte en matière d'environnement, mais au final reflet des intérASts industriels ou marchands. 1. Les canaux nationaux et transnationaux du Lobbying européen Les industriels européens disposent de deux canaux A partir desquels ils peunt exercer un lobbying efficace: d'une part, une voie sectorielle transnationale, d'autre part, une voie nationale relayée par le gournement de leur pays. La première voie permet aux groupes d'intérASt d'influencer directement les travaux des instances de décisions européennes, en l'occurrence la Commission et le Parlement européen. Les industriels font, en général, face A des organisations non gournementales proenvironnementales ou A des lobbies écologistes. La seconde voie, interne A chaque Etat, permet aux industriels de faire connaitre leurs préoccupations A leurs gournements afin que leur ministre de tutelle défende leurs intérASts lors des tractations entre Etats européens. Ce dernier mécanisme conduit sount A obserr des coalitions de pays élies en fonction de leurs sensibilités écologiques : une coalition des pays du "nord" (Danemark, Suède, Allemagne Luxembourg et Pays-Bas), assez fréquemment opposés aux pays du sud (Esne, Italie, Grèce et Portugal) auxquels se trount quelquefois associées la France et la Belgique (Johnson et Corcella, 1995 et Sbragia, 1996). 2. La réforme des institutions européennes : les conséquences du passage de la règle d'unanimité A la règle de la majorité La législation européenne de 1966 prévoyait la possibilité pour chaque Etat d'opposer son to A tout règlement ou disposition. Celte procédure de -coopération- A l'unanimité a assez sount conduit au blocage de nombreuses négociations. L'une des avancées les plus importantes de l'Acte unique a consisté A adopter une noulle procédure décisionnelle : l'article 100.A introduit une procédure de coopération où les décisions sont prises A la majorité qualifiée lors des réunions ministérielles et non plus A l'unanimité. Chaque pays dispose d'un nombre de voix défini en fonction de son poids économique. Dans son ensemble la noulle procédure a renforcé les pouvoirs du Parlement européen et a inrsement affaibli la capacité des Etats A bloquer les procédures d'élaboration des règlements. A cet égard, l'article 100.A introduit la l'idée que toute disposition noulle en matière de protection de l'environnement doit conduire A élir un niau de protection élevé. Toutefois l'utilisation de cet article ne peut AStre envisagée que pour les questions relevant du fonctionnement du marché interne. En revanche, l'Acte Unique prévoit la possibilité de légiférer en matière de santé publique et d'environnement A la condition (art. I30.S), que les décisions soient prises A l'unanimité. En outre, l'article I30.T autorise les pays désireux de renforcer leurs législations en matière de protection de l'environnement A s'engager dans cette voie au-delA des mesures prises au niau de la communauté A condition que les textes adaptés par chaque Etat n'entrant pas la libre circulation des marchandises. Décider d'adopter une directi européenne en matière d'environnement en s'appuyant soit sur l'article 100, soit sur l'article 130.S peut conduire A d'importantes distorsions quant A l'influence du Parlement européen ou aux pouvoirs que pourrait exercer un Etat afin de bloquer, par to dans le premier cas, ou en créant une coalition suffisante dans le second cas, la décision d'élaboration d'un texte en la matière. En 1998, le dispositif environnemental européen comptait 75 directis et 21 règlements communautaires. De ces 96 instruments juridiques, 47 se fondaient sur l'article 100.A parce qu'ils imposent des contraintes techniques pour la production de certains biens et 49 étaient pris sur la base de l'article 130 relatif A la politique environnementale. La doctrine retenue consiste A adopter une directi au titre de l'article 100 ou au titre de l'article 130 en fonction du centre de gravité de la mesure. Le seul fait que le marché intérieur puisse AStre concerné ne suffit pas pour que l'article 100.A soit appliqué. En mASme temps, l'article 130.S ne peut concerner toutes les mesures louchant de près ou de loin A l'environnement. Par exemple, dans l'affaire relati A la directi concernant les déchets de dioxyde de titane6, la Cour de Justice de la Communauté Européenne a exclu l'hypothèse que celle-ci relè d'une double base juridique ce qui a abouti A se référer exclusiment A l'article 100.A. Par ailleurs, dans l'affaire du 17 mars I9937 relati A la gestion des déchets, la Cour a renrsé une décision relati A la gestion des déchets qui relevait de l'article 100. A, et elle a conclu que la base juridique appropriée devait AStre l'article 130.S puisqu'elle touche A la défense de la flore, de la faune et de l'environnement en général. Le choix de la base juridique n'est pas sans conséquence sur la procédure d'adoption d'une directi et donc sur les modalités d'interntion des lobbies. |
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