NAVIGATION RAPIDE : » Index » ECONOMIE » ECONOMIE GéNéRALE » La loi du gâteau : plus on le partage, plus il y en a Une réalité controverséeCette version élémentaire du bon sens libéral a quasiment tenu lieu de pensée économique officielle au XXe siècle, dans un contexte général de relative indifférence de la science économique dominante aux problèmes de répartition. Elle se trouvait confortée par les travaux empiriques de Simon Kuznets sur ce sujet dans les années 1950. En effet, la «courbe de Kuznets » (1955) décrit une évolution en U inversé de la relation entre degré d'inégalité des revenus et croissance économique. Il semblait ainsi éli que les inégalités commencent par augmenter avec la croissance économique, tandis qu'elles s'atténuent au-delà d'un certain seuil de développement. Au début des années 1990, le Japon, soucieux de faire valoir l'existence d'un modèle asiatique contrebalançant la domination du modèle anglo-saxon, finance des travaux de la Banque mondiale qui débouchent sur un célèbre rapport : The East Asian Miracle (1993). C'est un pavé iconoclaste dans la mare du « consensus de Washington » sur les vertus de la libéralisation : la volonté politique de limiter les inégalités y est présentée comme un facteur essentiel du développement économique. Pavé «maison» puisqu'il émerge au cour même des institutions incarnant le fameux « consensus ». Pavé « alibi » aussi qui aide la Banque mondiale à faire passer le noyau dur de ses politiques, qui restent très libérales. Quoi qu'il en soit, un nouveau regard est désormais porté sur cette question et un grand nombre d'études économétriques internationales ont depuis réexaminé les faits. Même si les problèmes de fiabilité des données et les difficultés techniques propres aux études transversales internationales justifient certaines réserves sur chaque étude prise isolément, il est frappant que la quasi-totalité de ces études élisse ce que nous appellerons « la loi du partage efficient » : il existe un effet positif et significatif de l'égalité de la distribution des revenus sur le taux de croissance à long terme41. Plusieurs auteurs contestent toutefois l'importance accordée au facteur égalité dans l'analyse du modèle de croissance asiatique. En effet, les travaux sur l'évaluation de la contribution des divers facteurs au taux de croissance des NPI d'Asie semblent valider le modèle néoclassique traditionnel qui ne prend en compte que les quantités de facteurs et un progrès technique exogène. En clair, contrairement au constat fait dans les pays occidentaux, le développement de la force de travail et l'investissement en capital expliquent la plus grande part de la croissance. Plus précisément encore, la vraie originalité asiatique tiendrait à un taux d'épargne anormalement élevé qui a autorisé des taux d'investissement records. Mais ce constat ne contredit en rien l'hypothèse d'un lien entre égalité et croissance. En effet, les pays concernés sont les seuls au monde à combiner deux records : d'une part, celui des taux d'investissement et de croissance et, d'autre part, celui du degré d'égalité dans la distribution des revenus ; et rien n'indique qu'il n'existe aucun lien entre les deux. Par exemple, on peut penser que le développement d'une épargne populaire est encouragé par une distribution plus égalitaire du pouvoir d'achat, ou encore que les parents sont incités à investir dans l'éducation de leurs enfants parce qu'ils constatent que cela autorise une réelle ascension sociale. Il se pourrait donc que leur participation à une société relativement moins inégalitaire que celle des autres PED explique en partie la propension des Asiatiques à consentir un effort d'investissement hors norme. C'est d'ailleurs ce que donnent à penser les nouvelles théories de la croissance [Lois n°14 et n°15] qui exposent par ailleurs de multiples canaux par lesquels la distribution des revenus est susceptible d'influencer l'accumulation et la productité du capital physique ou humain. |
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