La technique se définit couramment comme l'ensemble des procédés méthodiques, fondés sur des connaissances scientifiques, qui sont employés pour produire une ouvre ou obtenir un résultat déterminé. La technique juridique est ainsi l'ensemble des moyens spécifiques qui président à l'agencement et à la réalisation du droit2. Elle regroupe des procédés tels que les présomptions ou les fictions, et des opérations comme l'assimilation ou la qualification.
Issue de la distinction que faisait Savigny, dans la législation, entre « éléments politiques » et « éléments techniques », la technique juridique a été définie ensuite par les auteurs allemands de la fin du XIXe siècle, par Ihering notamment, comme la compétence professionnelle et les moyens d'élaboration, d'adaptation et de modification du droit. Pour Gény, la technique juridique a pour objet « la construction juridique » et représente dans le droit positif « la forme opposée à la matière, et cette forme reste essentiellement une construction largement artificielle du donné »'. Pour lui, « dès que le concept excède la traduction adéquate de la réalité, il échappe à la sphère du donné » et ne peut plus valoir que comme « élément de construction », ce qui recèle des dangers, même si cela engendre des « solutions fécondes »2.
Plus précisément, la technique juridique regroupe l'ensemble des moyens par lesquels la politique juridique est traduite à l'état de règles pour atteindre le but recherché, et assimilée par le corps social. Autrement dit, elle permet l'application et la réalisation du droit grace à tout un ensemble de procédés et de moyens pratiques comme le formalisme, la publicité, les fictions, les sanctions, le langage juridique
Du fait qu'il s'agit de constructions intellectuelles des juristes et de leur technicité, ces procédés techniques sont peu accessibles aux profanes et sount ressentis comme des artifices dont abuseraient les juristes. Ils participent sount à une caricature du droit dans le public mal informé sur les exigences de sa cohérence et de sa praticabilité. On dénonce alors l'hermétisme du langage juridique en ignorant les impératifs de précision, de sécurité et de technicité qui s'y attachent3. Cette satire de « la langue de Bridoison » n'est pas isolée. C'est pourquoi on choisira ici d'illustrer la nécessité des procédés techniques du droit à trars deux outils indispensables à tous les systèmes juridiques de toutes les époques et qui polarisent indûment les critiques les plus acerbes des profanes : le formalisme et les fictions.