NAVIGATION RAPIDE : » Index » DROIT » LOI GéNéRALE » Le concept de droit Le concept de droitAucun philosophe cherchant à penser le concept de droit ne répugne à proposer comme point de départ cette idée à d'autres banale :il n'y a droit qu'en tant qu'il y a société. Idée simple en apparence mais essentielle quant au fond puisqu'elle nous oblige à réfléchir sur la place qu'occupe le droit dans l'institution de la société. Car avant même de penser positivement ce qu'apporte le droit au sein de l'ordre social, la raison s'interroge négativement sur la possibilité d'une société sans droit : en admettant même avec Aristote qu'il soit dans la nature de l'homme d'être social et que la société soit donc son cadre naturel, faut-il pour vivre socialement vivre juridiquement ? Question d'autant plus légitime que bien des sociétés primitives, dominées par des traditions et des coutumes orales semblent s'être dispensées d'une vérile législation. Au-delà de la question sociologique, c'est celle, philosophique, de l'essence de l'homme qui est posée : la nature morale de l'homme suffit-elle à garantir l'ordre social ou faut-il, pour ainsi dire, "doubler" cette bonne lonté morale par la fermeté du droit pour assurer la paix civile ? L'homme ne peut-il se contenter de la parole ou de la promesse de son semblable et lui faut-il toujours la présence de la loi au-dessus de sa tête pour que soient respectés les engagements ? Le sentiment de justice n'est-il si intimement présent dans son ame grace à sa conscience morale, qu'il n'ait besoin de l'appui du droit ? A moins de douter de la valeur morale de l'homme, à moins de croire au caractère inélucle de la faute, le droit est inutile. Mais alors pourquoi parler de droit naturel ? Et quel dessein poursuivaient les philosophes qui, pendant des siècles, ont usé d'une telle expression alors même qu'ils savaient le caractère conventionnel du droit ? Le droit naturel ne saurait être compris comme une réalité juridique émanant de la nature elle-même et antérieure à toute institution sociale. Le droit naturel, c'est l'idée même du droit, son essence, sa nature. C'est la ure de pensée que se donne la raison pour tenter de conceir le droit de façon pure et inconditionnée, c'est à dire paradoxalement sans que rien de la nature ne vienne interférer dans cette définition. Le droit, loin d'être dans le prolongement de la nature, est le moment où l'homme invente l'humanité : rompant avec l'ordre qu'il subissait jusque là, il se donne la liberté en s'imposant la contrainte. Le Souverain n'est pas seulement la ure politique sous laquelle la philosophie cherche à penser la puissance c'est à dire l'autorité et la force au sein du corps social ou contre lui ; sans doute est-on toujours tenté de urer de façon objective cette idée sous les traits de l'Empereur, du Pape ou du Prince. Mais au-delà de ces fonctions qui la représentent, c'est l'idée de souveraineté que les philosophes du droit veulent définir parce qu'elle permet de penser l'articulation du juridique et du politique, et que si le droit n'a de sens qu'au sein d'un État, l'État n'existe que fondé sur le droit. Et lorsque Hegel pensera le droit comme le point de départ du mouvement qui conduit la Raison et les peuples vers l'État, il ne se contentera pas de réinventer de manière idéale l'histoire universelle d'une humanité qui aurait dû se réaliser ainsi, il décrira le mouvement réel et rationnel qu'a suivi l'histoire jusqu'à la création de l'État moderne. Mais s'il n'y a pas d'État sans droit, si le droit fournit à l'État plus que sa légitimité, sa raison (que l'on ne saurait confondre avec la "raison d'État", masque derrière lequel se dissimule en réalité une violation du droit), tous les États ne se valent pas parce que le pouir politique n'est pas partout le même : la législation et les institutions, ces formes dans lesquelles le droit se donne au sein de l'État et qu'il lui donne sous l'idée même de Constitution, varient et de cette variation dépend le niveau de liberté des peuples. Utile rappel à l'ordre de la pratique : le concept de droit n'est pas un engagement vis à vis de la vérité (il n'y a pas de droit plus vrai qu'un autre) mais il l'est du point de vue de la liberté. D'où la difficulté de délimiter l'ordre du droit proprement dit et celui de la politique : puisque le droit n'est pas un ordre ou un système en soi, mais qu'il est tout à la fois la condition de l'ordre social et l'instrument de la réalisation de la liberté, il est, par essence, politique. A condition de ne pas laisser entendre par là que le droit, c'est-à-dire les lois, le législateur et les juges sont soumis à l'autorité du pouir politique mais qu'ils en constituent, au contraire, les fondements en déterminant a priori les conditions de son exercice. Le droit est affaire de raison. Il n'est évidemment pas recherche de la plus grande rationalité, c'est-à-dire qu'il ne se veut pas scientifique, du moins pas au sens où l'entendent les sciences exactes. C'est par le même abus analogique de langage que l'on parle de science politique comme de science juridique : il peut, sans doute, y air une science du droit, c'est-à-dire une connaissance des différents systèmes, mais le droit en lui-même ne saurait être une science. Entre la raison et l'expérience, entre la théorie et la pratique, entre la liberté et la contrainte, c'est cette contradiction entre l'idéal rationnel dont il est issu et la nécessaire empiricité de son domaine qui fait tout l'intérêt de l'étude du concept de droit. |
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