Les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les territoires d'Outre-Mer. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi.
Ces collectivités s'administrent librement par des conseils élus et dans les conditions prévues par la loi.
Dans les
départements et les territoires, le délégué du Gournement a la charge des intérêts nationaux, du contrôle administratif et du respect des lois.
432. Que ces collectivités soient qualifiées locales {supra, article 34) ou territoriales, comme dans le présent article, les deux termes sont synonymes dans la Constitution. La France compte aujourd'hui :
- 36779 communes (36594 en métropole, 115 dans les DOM, 51 dans les TOM, 19 dans les collectivités à statut particulier) ;
- 100 départements (96 en métropole, 4 outre-mer) ;
- 25 régions (21 en métropole, 4 outre-mer) ;
- 1 collectivité métropolitaine à statut particulier (Corse) ;
- 1 territoire d'outre-mer à statut constitutionnel particulier (Noulle-Calédonie) ;
- 3 territoires d'outre-mer (Wallis-et-Futuna, Polynésie française, terres Australes et Antarctiques) ;
- 2 collectivités d'outre-mer à statut particulier (Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon) ;
- 3 provinces au sein d'un TOM (Noulle-Calédonie).
Hormis les communes, départements et territoires d'outremer prévus par la Constitution, toutes les autres collectivités ont été créées par des lois.
Compétente pour leur donner naissance, la loi l'est également pour déterminer les principes fondamentaux de leur libre administration, de leurs attributions et de leurs ressources (supra, article 34).
433. S'agissant de la création de collectivités territoriales, le législateur n'est tenu qu'au respect d'une seule prescription : que la collectivité soit administrée par un conseil élu.
Ainsi, prévues et organisées, selon les règles de la décentralisation, dès 1982, les régions n'ont vérilement accédé à leur statut de collectivités territoriales qu'au lendemain de la première élection de leur conseil au suffrage unirsel, en mars 1986.
En revanche, la loi n'est pas tenue de donner aux collectivités un statut identique. Ainsi des régions d'outre-mer peunt-elles ne couvrir qu'un seul département chacune, un territoire métropolitain peut-il n'avoir pas de région mais une collectivité particulière (Corse), un territoire d'outremer peut-il être divisé en provinces érigées elles-mêmes en collectivités territoriales (Noulle-Calédonie) et des collectivités avoir des statuts propres à chacune (Mayotte, Saint-Pierre-et-Miquelon)
S'agissant en effet de la gestion de particularismes, tenant à des situations insulaires ou ultra-marines spécifiques, les ennuis naquirent un jour de l'uniformité, et cette souplesse a permis de les diminuer.
Cela ne signifie pas pour autant que le législateur puisse aller au-delà de ce que la Constitution permet : ainsi doit-il respecter, par exemple, l'indivisibilité de la République ou l'unité du peuple français (91-290 DC). En outre, chaque catégorie de collectivité doit obéir à peu près aux mêmes règles (même si Paris, Lyon et Marseille présentent certaines particularités, ce sont néanmoins, pour l'essentiel, des communes comme les autres). Mais le législateur, si cela est justifié, peut créer un type de collectivité en un exemplaire unique. Sinon, il faut que ce soit le constituant lui-même qui s'en charge (infra, 449).
434. Le Conseil constitutionnel n'a pas manqué de rappeler que « si [] les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus, chacune d'elles le fait dans des conditions prévues par la loi» (92-316 DC). Aussi faut-il concilier la liberté d'administration des collectivités et le droit de réglementation du législateur, toujours, bien entendu, dans le respect, s'il y a lieu, d'autres principes de valeur constitutionnelle. Plusieurs conséquences en résultent.
Premièrement, la loi, même si elle encadre l'exercice de leurs compétences par les collectivités, ne doit pas prévoir des dispositions telles que finalement elles entrant la libre administration (90-277 DC). Elles doint, à cette fin, préserr une marge d'appréciation suffisante, et suffisamment effecti, pour que ne soit pas méconnu le principe (92-316 DC).
Deuxièmement, si leur libre administration n'interdit nullement au Parlement d'imposer des sujétions aux collectivités, c'est à condition que celles-ci soient précises (90-274 DC) et n'impliquent aucune sanction incompatible ac l'article 72 (83-l68 DC).
Troisièmement, la libre administration ne permet pas au législateur de créer un système qui pourrait conduire à ce que les conditions essentielles d'exercice d'une liberté publique puissent ne pas être les mêmes sur l'ensemble du territoire (84-l85 DC).
Quatrièmement, le pouvoir donné à la loi n'est donné qu'à elle seule. Le législateur ne peut donc rester en deçà de sa
compétence en abandonnant au pouvoir réglementaire le soin de prendre des décisions qui ne peunt reler que du Parlement (83-l68 DC).
Cinquièmement, la décentralisation, quoique n'ayant pas été opérée par la Constitution, est denue non seulement un fait acquis, mais encore un droit acquis. Il en va en effet du principe de libre administration des collectivités locales comme de toutes les autres libertés : leur régime peut stagner, mieux encore progresser, il ne peut pas reculer, sauf à «prir de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel » (92-316 DC).
435. La Constitution ne prévoit la présence d'un délégué du gournement que dans les départements et territoires, ce qui, théoriquement, pourrait en dispenser à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, mais la loi y a naturellement pourvu.
Si la Constitution fait référence aux intérêts nationaux, au contrôle administratif et au respect des lois, elle se garde bien de les définir. Et c'est heureux, puisque c'est ce qui a permis, en 1982, de procéder à la
décentralisation sans avoir besoin d'une révision constitutionnelle préalable. Il a suffi de considérer que le contrôle administratif et le respect des lois, assurés jusqu'alors de manière prénti, ac la tutelle préfectorale, se feraient désormais de manière répressi, sur initiati préfectorale notamment, mais par décision juridictionnelle, le contrôle de légalité se substituant ainsi au contrôle d'opportunité.
En contrepartie, les prérogatis que l'Etat détient en application directe du troisième alinéa de l'article 72 ne sauraient être ni restreintes, ni privées d'effets, même temporairement (82-l37 DC).
436. Il est frappant de constater que la réforme qui, durant les trente dernières années, a le plus profondément boulersé le fonctionnement des pouvoirs publics en France s'est faite par une loi ordinaire. Cela rappelle le caractère ourt de la Constitution, qui s'applique indifféremment à un État hautement centralisé et à un système sérieusement décentralisé.
Après les premiers moments d'euphorie, cette décentralisation a suscité bien des critiques : empilage des niaux, imprécision des compétences, dilution des responsabilités, tendances mégalomaniaques ou pharaoniques des élus
Tout cela est en partie vrai. Mais, faisant suite à plusieurs siècles de centralisme, la décentralisation est justement dans son age ingrat. Ses maladies infantiles méritent quelque indulgence. Il n'en est qu'une qui, si elle reste chronique, deviendra de plus en plus gra : c'est celle qui, par les effets du cumul, fait que près de 100 % des sénateurs, ce qui n'est pas choquant, mais aussi 95 % des députés, ce qui est indéfendable, sont des élus locaux. Comment s'étonner alors que, face à cette coalition puissante, soudée par une communauté d'intérêts qui l'emporte sur les clivages politiques, ceux qu'on appelle les « technocrates » aient le sentiment qu'ils sont seuls à incarner l'intérêt de la Nation, si sount délaissé par ceux-là mêmes qui sont ses représentants authentifiés ?
437. Enfin, si l'on admet que la
démocratie moderne suppose la réunion de trois conditions (supra, introduction), force est de constater qu'on ne les trouvait présentes qu'au niau communal. Dans les régions, les administrés ne choisissaient pas effectiment les administrateurs (car les modes de scrutin en vigueur ne le permettaient pas vérilement). Dans les départements et les régions, les administrateurs n'ont pas toujours effectiment les
moyens d'administrer (car les modes de scrutin ne donnent pas nécessairement des majorités claires), et les administrateurs ne sont pas effectiment responsables devant les administrés (parce que, du fait des deux éléments précédents, les chefs d'exécutif départementaux et régionaux sont peu connus, leur action peu perçue, leur mise en cause presque incongrue).
C'est pourquoi une réforme des modalités du recrutement s'imposait, s'inspirant du mode de scrutin municipal, qui a fait ses preus, et commençant par faire élire les conseillers régionaux au niau de la région plutôt qu'à celui, absurde, du département. A cela on objectait généralement que, s'ils étaient ainsi issus du suffrage unirsel quasi direct, les présidents des conseils régionaux ou généraux deviendraient des sortes de nouaux féodaux. Objection irrecevable : ils sont actuellement très puissants et très peu responsables, c'est cela qui définit la féodalité, tandis qu'une réforme ne leur ferait que très peu gagner en puissance, mais beaucoup en responsabilité, et c'est cela qui définit, en partie, la démocratie. La réforme a été opérée en 1999 pour les régions. A son actif, la région est enfin denue la circonscription, et la prime d'un quart des sièges attribuée à la liste arrivée en tête lui permettra de la gourner. A son passif, en permettant à tous ceux qui auront obtenu 5 % des exprimés de se maintenir au second tour, elle fait la part horriblement belle à l'extrême droite, et fait peser sur la droite républicaine un handicap dangereusement injuste. Quant au département, la réforme, comme depuis plus d'un siècle, se fait encore attendre.