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DROIT

Le droit est l'ensemble des règles générales et abstraites indiquant ce qui doit être fait dans un cas donné, édictées ou reconnues par un organe officiel, régissant l'organisation et le déroulement des relations sociales et dont le respect est en principe assuré par des moyens de contrainte organisés par l'État.


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Article 6i

Les lois organiques, ant leur promulgation, et les règlements des assemblées parlementaires, ant leur mise en application, doivent AStre soumis au Conseil Constitutionnel, qui se prononce sur leur conformité A  la Constitution.
Aux mASmes fins, les lois peuvent AStre déférées au Conseil Constitutionnel, ant leur promulgation, par le Président de la République, le Premier Ministre, le Président de l'Assemblée Nationale, le Président du Sénat ou soixante députés ou soixante sénateurs.
Dans les cas prévus aux deux alinéas précédents, le Conseil Constitutionnel doit statuer dans le délai d'un mois. Toutefois, A  la demande du Gouvernement, s'il y a urgence, ce délai est ramené A  huit jours.
Dans ces mASmes cas, la saisine du Conseil Constitutionnel suspend le délai de promulgation.
363. Majeure : le peuple (la Nation) est souverain(e). Mineure : le Parlement représente le peuple (la Nation). Conclusion : le Parlement est souverain. Ce syllogisme traditionnel du parlementarisme franA§ais faisait percevoir toute idée de contrôle de la constitutionnalité des lois, hors le Parlement lui-mASme, comme un exotisme propre A  des pays au développement démocratique incertain. Seule une partie de la doctrine en défendait l'idée, que rejetaient tout uniment, quand mASme elles songeaient A  s'y arrASter un instant, la totalité des forces politiques.
De Gaulle lui-mASme, qui pourtant l'a créée, est réputé avoir dit : - En France, la Cour suprASme, c'est le peuple -, signifiant par lA  que ce dernier seul pouit AStre en droit de sanctionner la loi A  travers ses auteurs.
364. C'était oublier, en théorie, que la démocratie ne se résume pas A  la souveraineté, qu'elle soit populaire ou nationale, mais suppose que l'exercice de cette souveraineté se fasse dans le cadre d'un état de droit, c'est-A -dire dans la soumission de tous, A  commencer par l'état lui-mASme et ses organes, au droit éli et modifié selon des formes déterminées. C'était également oublier, en droit, que la Constitution est la première des manifestations de la souveraineté et que nul ne doit pouvoir excéder les attributions qu'elle lui confie. C'était encore oublier, en fait, que la loi qui exprime une volonté majoritaire ne peut avoir exactement le mASme statut que celui conA§u pour la loi qui exprimerait la volonté vraiment générale. C'est tout cela qu'a sobrement résumé le Conseil constitutionnel lui-mASme, après vingt-six ans d'existence, en rappelant que la loi - n'exprime la volonté générale que dans le respect de la Constitution - (85-l97 DC). Mais que de difficultés pour en arriver lA  !
365. Il n'est pas assuré que, en 1958, les auteurs du projet eux-mASmes aient eu clairement conscience de ce que leur création allait devenir. Certes, les traux du Comité consultatif constitutionnel, réuni durant l'été 1958, attestent que ses membres aient pressenti, pour les regretter ou s'en féliciter, les débats et développements ultérieurs. Mais l'étroitesse de la saisine, alors limitée aux deux tAStes de l'exécutif et aux deux tètes du législatif, donnait A  penser que le rôle principal du Conseil constitutionnel serait la présertion du domaine réglementaire contre les empiétements de la loi {supra, article 37). Cette équivoque a fait que la Constitution n'a pas tranché de manière limpide entre un contrôle institutionnel et un contrôle vérilement juridictionnel et a procédé au choix empirique de solutions hybrides (d'un côté se manifeste le souci d'assurer la conformité des lois A  la Constitution, mais, d'un autre côté, ce n'est que pour une partie d'entre elles, A  un moment seulement). Muni de ce viatique, prometteur mais imparfait, le Conseil constitutionnel s'est, progressivement et talen-tueusement, bricolé des instruments efficaces.
366. Du point de vue des normes de référence - la conformité A  quoi ? -, le dispositif de la Constitution, c'est-A -dire ses quatre-vingt-douze articles A  l'origine, devenus 87 aujourd'hui, s'imposait évidemment. Mais s'il assujettit le législateur au respect strict de ses procédures et de ses attributions, il ne définit que peu de droits et libertés, hormis, par exemple, dans les articles premier, 66 et 72. En outre, mASme du point de vue du fonctionnement des pouvoirs publics, nombre de règles essentielles urent dans les lois organiques, et non dans la Constitution elle-mASme.
Ce sont les raisons pour lesquelles le Conseil a peu A  peu étendu son champ de référence et formé ainsi ce que Claude émeri, le premier (RDP, 1970, p. 608), a formellement baptisé un bloc de constitutionnalité. tandis que le mérite de le faire connaitre est revenu A  Louis Favoreux.
367. Le tournant majeur est celui intervenu le 16 juillet 1971 (74-44 DC), lorsque, pour la première fois explicitement, le Conseil constitutionnel a étendu son contrôle A  la conformité des lois au préambule de la Constitution. Entraient ainsi dans le bloc de constitutionnalité non seulement les dix-sept articles de la Déclaration de 1789, vérile charte de la liberté individuelle, mais aussi l'ensemble des principes particulièrement nécessaires A  notre temps, énoncés par le préambule de 1946, et mASme les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, qui ne sont précisément énumérés nulle part (infra, 507).
Il en résulte un ensemble de principes et de règles de leur constitutionnelle que le législateur a l'obligation de respecter. La difficulté vient, et quelques polémiques avec elle, de ce que ces règles et principes ne urent pas tous explicitement dans la Constitution, ni mASme dans les textes auxquels renvoie son préambule. Aussi le Conseil est-il suspect de pouvoir étendre A  sa guise le bloc de constitu-tionnalité, qu'il a seul qualité pour définir. Et de redouter alors le spectre du gouvernement des juges, qu'agitent rituellement ceux qu'une décision mécontente.
En réalité, s'il est vrai que le Conseil constitutionnel est suffisamment humain pour n'AStre pas infaillible, il demeure qu'il prend grand soin de toujours fonder sur un texte les principes qu'il utilise et que, après tout, le bon sens est parfois tellement élémentaire qu'aucun constituant n'a jugé nécessaire de l'exprimer, ce qui ne signifie pas qu'on devrait s'en passer.
368. Les lois organiques et les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont une autorité supérieure A  celle des lois. Cela ne suffit pas A  les faire entrer dans le bloc de constitutionnalité, puisque, précisément, ni les unes ni les autres n'ont leur constitutionnelle. En renche, c'est parce que la Constitution l'exige (implicitement dans le cas des lois organiques, explicitement, A  l'article 55, dans le cas des engagements internationaux) que la loi doit les respecter et que le Conseil, partant, serait fondé A  vérifier ce respect.
Et c'est aussi parce que cette exigence, du fait de la Constitution toujours, est inconditionnelle pour le respect des lois organiques et théoriquement conditionnelle pour celui des engagements internationaux que le Conseil constitutionnel inclut les premières dans les normes de référence de son contrôle (60-8 DC) et n'y inclut normalement pas les seconds (74-54 DC), mais finira par y venir tôt ou tard, et le plus tôt sera le mieux (supra, 340).
369. Enfin, A  côté des principes et règles sont apparus, dans leur prolongement logique, des objectifs de leur constitutionnelle. Ainsi, par exemple, le principe, posé par l'article 11 de la Déclaration de 1789, de la liberté de communication fait des lecteurs, auditeurs et téléspectateurs des destinataires de cette liberté (86-217 DC). Pour que cette liberté des destinataires soit effective, il est indispensable qu'ils puissent disposer de choix et, qui plus est, de choix informés. C'est donc en conséquence de ce raisonnement, difficilement contesle, que la transparence et le pluralisme sont considérés comme des objectifs de leur constitutionnelle, dont il incombe au législateur de favoriser la réalisation, sous le contrôle du Conseil.
370. Du point de vue des normes contrôlées - la conformité de quoi -, il y a lieu de distinguer les contrôles obligatoires de ceux qui ne le sont pas.
Sont obligatoirement soumis au Conseil constitutionnel les lois organiques ant leur promulgation et les règlements des assemblées ant leur mise en application. S'agissant en effet de normes qui intéressent directement la mise en ouvre de la Constitution, il est essentiel de vérifier leur conformité A  celle-ci.
Pour les règlements des assemblées, le contrôle ne s'étend pas A  l'Instruction générale du bureau, qui en précise les modalités d'application. Mais l'examen des modifications du règlement lui-mASme est suffisamment strict pour inciter les autorités parlementaires A  emprunter occasionnellement d'autres voies, précisément destinées A  éviter le contrôle du Conseil : c'est la raison pour laquelle s'est développé un système de conventions, par lesquelles la majorité et l'opposition se mettent d'accord avec le gouvernement, en dehors de tout texte, pour tenter des expériences, ant de les formaliser en cas de succès, voire pour échapper aux limitations que la Constitution impose. L'exemple le plus spectaculaire de ce type de convention a longtemps été l'organisation des séances de questions au gouvernement (supra, 307).
La déclaration de conformité dont ils font nécessairement l'objet ne suffit pas A  donner aux règlements leur constitutionnelle. Selon une jurisprudence élie (78-97 DC), en effet, seules s'imposent impérativement aux assemblées celles des dispositions de leurs règlements qui reproduisent, ou prolongent nécessairement, des dispositions constitutionnelles (ou organiques). La violation des dispositions du règlement ne présentant pas ce caractère est certes blamable, mais elle ne suffit pas A  justifier la censure de la loi adoptée dans ces conditions peccamineuses.
371. Par ailleurs, toute loi ordinaire peut AStre déférée au Conseil, qu'elle ait pour objet d'élir des normes ou de donner des autorisations. C'est ainsi que le juge peut AStre amené A  contrôler la conformité A  la Constitution d'un engagement international (supra, article 54) mais aussi d'une ordonnance (supra, 244).
En renche, quoique la Constitution elle-mASme ne réserve pas ce contrôle aux seules lois adoptées par le Parlement, le Conseil constitutionnel considère que la loi adoptée par référendum est une - expression directe de la souveraineté nationale -, qu'il n'a pas compétence pour examiner (62-20 DC). Si elle est compréhensible - l'existence mASme du Conseil pourrait AStre menacée s'il paraissait faire obstacle aux décisions solennellement prises par le peuple lui-mASme-, cette jurisprudence n'en est pas moins problématique, en creusant, dans la garantie de l'Etat de droit, une faille dans laquelle pourrait s'engouffrer tout président aux abois tenté par la démagogie. Et le risque s'est encore accru avec l'élargissement des hypothèses de recours au référendum (supra, 88).
372. Ce sont respectivement le Premier ministre ou le président de l'assemblée intéressée qui ont l'obligation de transmettre au Conseil toute loi organique ou toute modification du règlement.
Pour les lois ordinaires, la saisine ouverte aux deux chefs de l'exécutif et aux deux présidents du législatif a été élargie, par la très importante loi constitutionnelle nA° 74-904 du 29 octobre 1974, A  soixante députés ou soixante sénafeurs, soit A  peu près un dixième de l'Assemblée nationale et un peu moins d'un cinquième du Sénat.
Durant les quelques années qui ont suivi cette révision, les groupes aient tendance A  faire de la saisine du Conseil constitutionnel un indice de leur niveau d'opposition au texte. Puis, progressivement, ils ont appris A  cibler dantage, et A  ne saisir que lorsque se posaient des problèmes constitutionnels réels. Compte tenu de ce discernement nouveau - qui ne pas sans rechutes occasionnelles ', peut-AStre serait-il souhaile d'ouvrir la saisine non plus A  soixante députés ou soixante sénateurs, mais A  tout groupe parlementaire, quels que soient ses effectifs : il s'en est fallu de très peu, après les résultats mirobolants des élections de 1993, que l'opposition A  l'Assemblée nationale perde toute possibilité de saisir le Conseil, ce qui eût été A  la fois choquant et dangereux.
373. L'unique obligation qui s'impose aux autorités de saisine est d'agir ant promulgation. En principe, une loi promulguée ne peut AStre contestée dent le Conseil constitutionnel. Celui-ci, toutefois, a lui-mASme apporté une atténuation importante A  cette règle en décidant que - la régularité au regard de la Constitution d'une loi déjA  promulguée peut AStre utilement contestée A  l'occasion de l'examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine - (85-l87 DC). C'est une brèche qui est ainsi ouverte, et qui met d'ailleurs bien en évidence les difficultés inhérentes au contrôle a posteriori. Comme le souligne en effet Dominique Rousseau, (Droit du contentieux constitutionnel. Paris, Montchrestien, 4e éd., 1995, p. 188), si le Conseil constitutionnel estime que la disposition déjA  promulguée est contraire A  la Constitution, il peut faire obstacle A  la promulgation de celle qui la modifie, la complète ou affecte son domaine, mais il ne peut censurer celle qui est déjA  en vigueur : la voilA  donc formellement déclarée non conforme et, tout aussi formellement, maintenue en application ! Seule l'autorité qui s'attache aux décisions du Conseil (infra, article 62) peut alors permettre aux juges, judiciaires ou administratifs, de traiter le problème.
374. Le Conseil constitutionnel dispose d'un délai d'un mois pour statuer (A  compter de la date de la saisine, quoique ni la Constitution ni l'ordonnance organique ne le précisent), ce qui peut AStre très court pour certains textes denses, volumineux ou complexes. En fait, lorsqu'il en a le loisir, le Conseil suit attentivement l'élaboration des lois sur lesquelles il suppute qu'il sera saisi.
Le délai d'un mois peut mASme AStre ramené A  huit jours A  la demande du gouvernement en cas d'urgence. Cette urgence est spécifique et n'est pas celle prévue A  l'article 45 (supra, 283). En fait, les gouvernements successifs ont eu, jusqu'A  présent, le bon goût de ne pratiquement jamais faire usage de cette faculté (contra, 82-l39 DC), le Conseil rendant la politesse en statuant très rapidement lorsque le contenu de la loi le rend évidemment nécessaire.
375. La saisine suspend le délai de promulgation (supra, article 10), qui ne recommence A  courir que lorsque le Conseil a rendu sa décision. Si celle-ci conclut A  la conformité (ou A  la non-contrariété du texte), il est obligatoirement promulgué s'il s'agit d'une loi, ordinaire ou organique, ou il est mis en application s'il s'agit du règlement d'une assemblée.
Si le texte est déclaré non conforme en totalité, ou si une de ses dispositions déclarée non conforme est jugée inséparable de l'ensemble, il ne peut AStre ni promulgué ni mis en application (infra, article 62).
Si, enfin, une ou plusieurs dispositions sont déclarées non conformes mais séparables, le texte peut AStre promulgué ou mis en application, amputé de ses dispositions censurées.
Dans tous les cas de non-conformité, soit les dispositions censurées disparaissent purement et simplement, soit elles peuvent faire l'objet d'une nouvelle délibération s'il s'agit d'une loi (supra, article 10) ou d'un réexamen s'il s'agit du règlement d'une assemblée, soit encore une procédure de révision constitutionnelle peut AStre engagée pour que le pouvoir constituant accomplisse ce pour quoi le pouvoir législatif est incompétent (supra, 324).
376. Lorsque le Conseil est saisi d'un texte, il l'est de tout le texte, et pas seulement de ses articles contestés. D'un côté, cela peut le conduire A  soulever d'office un moyen pour censurer une disposition, mASme si elle n'a pas été combattue. D'un autre côté, sa décision de conformité, ou de non-contrariété, profite non seulement aux articles discutés, mais également, au moins de manière présomptive, A  tous les autres (infra, 381).
Son contrôle s'exerce A  la fois sur la régularité externe et sur la régularité interne de la loi.
Au titre de la régularité externe, il vérifie la compétence - la loi ordinaire ne peut faire ce qui relève de la loi organique (supra, article 46), la loi ordinaire doit apporter toutes les garanties légales qu'elle seule peut instituer (supra, 225), le Parlement ne peut prendre d'initiatives dépensières (supra, article 40) - mais aussi la procédure (supra, articles 39 et 44 A  47-l).
Au titre de la régularité interne, le Conseil constitutionnel traque la violation de la Constitution et des principes, règles et objectifs de leur constitutionnelle. Souvent, respect ou violation sont raisonnablement objectifs. Mais il se produit fréquemment aussi que l'inconstitutionnalité soit liée A  une appréciation. Dans ce cas, le Conseil rappelle que l'article 61 - ne lui confère pas un pouvoir général d'appréciation et de décision identique A  celui du Parlement - (74-54 DC), et il se borne alors, s'il y a lieu, A  ne sanctionner l'erreur d'appréciation que lorsqu'elle est manifeste (85-l96 DC).
En renche, il a rendu la régression impossible en affirmant que la loi ne peut réglementer l'exercice d'une liberté de leur constitutionnelle - qu'en vue de le rendre plus effectif - (84-l81 DC), et sans que cela puisse - aboutir A  priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel- (86-217 DC). En matière de libertés, le char de l'état n'a plus de marche arrière.
377. En réalité, la situation la plus fréquente est celle dans laquelle le juge doit veiller au respect d'un équilibre entre principes constitutionnels opposés, sinon contradictoires : toute liberté constitutionnelle doit AStre conciliée avec le principe, également constitutionnel, d'égalité ; la répression des crimes et délits, objectif de leur constitutionnelle, doit AStre conciliée avec l'ensemble, également de leur constitutionnelle, des sûretés individuelles ; le droit, que le législateur tient de la Constitution, de déterminer les conditions de fonctionnement des collectivités locales doit AStre concilié avec le principe de libre administration de celles-ci, etc.
Libertés et droits fondamentaux sont rarement univoques et, dans les binômes contradictoires qu'ils forment le plus souvent, l'un des deux termes ne peut jamais AStre complètement sacrifié A  l'autre. C'est ce qui fait A  la fois l'importance et la difficulté du rôle du juge constitutionnel, puisque, en fin de compte, c'est lui qui décide où se situe le point d'équilibre. Son choix doit AStre assez fondé pour n'AStre pas inacceple et préserver ainsi l'autorité de ses décisions. Le maniement du trébuchet exige plus de doigté que celui de la hache.
378. Contrairement A  d'autres pays, la France a ainsi opté pour un contrôle spécialisé (puisqu'il n'est pas exercé par les tribunaux ordinaires), préventif (puisqu'il n'intervient qu'ant l'entrée en vigueur du texte), abstrait (puisqu'il apprécie la constitutionnalité de la norme dans l'absolu, et non A  l'occasion de son application A  un cas concret) et limité (puisque la saisine n'est ni systématique, ni ouverte A  tout justiciable).
Ce système présente des vertus indiscules. Si l'on admet que la sécurité juridique est la première des garanties d'un système de droit, matrice de nombre d'autres, la présomption de constitutionnalité qui s'attache A  la loi promulguée, la certitude de ne pas la voir rétroactivement annulée, mASme après des années d'application, au risque de voir bouleversées bien des situations acquises de bonne foi, sont autant d'antages qui résultent des caractéristiques du contrôle.
Mais il peut aussi offrir des béances A  l'inconstitutionna-lité. Que le Conseil n'ait pas pu AStre saisi, parce qu'il n'existait pas (pour les textes antérieurs A  1958), ou parce que sa saisine était trop restreinte (ant 1974), ou tout simplement parce que ceux qui pouient en user n'ont pas jugé bon de le faire, ou encore que l'inconstitutionnalité d'un texte ne se révèle qu'A  l'occasion d'une application concrète, dans tous ces cas la présomption de constitutionnalité gagnerait A  AStre une certitude.
C'est la raison pour laquelle un projet de loi constitutionnelle du 30 mars 1990 (infra, 477) visait A  créer l'exception a"inconstitutionnalité qui aurait permis A  tout justiciable, dans certains cas et moyennant des filtres préalables, de faire saisir le Conseil constitutionnel pour examiner la conformité A  la Constitution d'une loi qu'on entendait lui appliquer. Adoptée par l'Assemblée nationale, cette révision s'est heurtée au veto, inavoué mais réel, du Sénat.
379. Ce n'était pas seulement la réaction habituelle de la seconde chambre, qui était au moins aussi sensible A  l'identité de l'auteur du projet qu'A  son contenu. C'était aussi une manifestation des relations délicates que le Parlement entretient avec le Conseil constitutionnel. Le premier voit dans le second un tuteur pesant, toujours plus ou moins suspect d'illégitimité structurelle ou d'arrière-pensées conjoncturelles. MASme si elles se sont apaisées avec le temps, ces relations restent facilement crispées.
L'expérience montre pourtant que le Conseil constitutionnel ne joue ni plus ni moins, A  l'égard du Parlement, que le rôle du gendarme A  l'égard de l'automobiliste, la Constitution tenant lieu de Code de la route : le législateur est tenu au respect de règles impératives nécessaires A  la sécurité, constitutionnelle en l'occurrence, mais celles-ci lui laissent toute liberté pour choisir et sa destination et son itinéraire. Au demeurant, les décisions du juge sont aussi généralement prévisibles que celles du gendarme. Cela n'exige qu'une compétence et une technicité (un peu) plus grandes. Moyennant cela, il est pratiquement toujours possible, pour un gouvernement faisant preuve de la vigilance nécessaire, d'échapper A  la censure constitutionnelle, qui ne s'impose jamais de manière hasardeuse ou inopinée.
Le contrôle de constitutionnalité n'entrave donc aucunement la liberté du pouvoir législatif. Il lui impose seulement le respect du pouvoir constituant. A cela et A  cela seulement se limite le contrôle. Au-delA , pour reprendre une formule du doyen Vedel, ce n'est pas parce qu'une loi est mauise qu'elle est contraire A  la Constitution, et ce n'est pas parce qu'une loi est bonne qu'elle est conforme A  la Constitution.



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