' En rtu des dispositions de la Charte de l'O.N.U., l'usage de la force armée est autorisée dans deux cas seulement : d'une part, s'il y a - légitime défense - et, d'autre part, lorsque l'O.N.U. elle-mASme, par l'intermédiaire du seul Conseil de sécurité, en a décidé ainsi au titre des dispositions du chapitre VIL Pour l'essentiel, on renrra au cours général de 1" année de - Relations internationales - et on se bornera A rappeler ici quelques grands principes fondamentaux.
1 ' Les mesures militaires décidées par le Conseil de sécurité des Nations Unies.
' Si le Conseil de Sécurité - constate l'existence d'une menace contre la paix, d'une rupture de la paix ou d'un acte d'agression- (art. 39 de la Charte), il peut décider toutes mesures d'ordre militaire qu'il jugerait nécessaires (art. 42 de la Charte).
Cela étant, la Charte s'abstient de définir les expressions cardinales qui se trount insérées dans l'article 39 : - menaces contre la paix -, < rupture de la paix - ou - acte d'agression -. Sans doute, dans toutes ces hypothèses, de tels actes constitueraient autant de violations majeures du droit international.
' On notera que le Conseil de Sécurité ne peut agir au titre du chapitre VII qu'ac l'accord des cinq puissances disposant du droit de to. L'abstention, nous l'avons vu, peut encore permettre au système de fonctionner. En revanche, le vote négatif le paralyse complètement et c'est en général ce qui s'est passé dans toute l'histoire des Nations Unies : ainsi jamais le Conseil de Sécurité n'a pu AStre amené A décider de sanctions militaires dans le cadre du chapitre VIL De plus, le Conseil de Sécurité peut autoriser ' sous son strict contrôle ' tel ou tel de ses membres A recourir A la force armée, pour répondre A une atteinte fondamentale au droit international. C'est ainsi, par exemple, que les Etats-Unis, au début de l'été 1980, envisagèrent de se faire - mandater - par le Conseil de Sécurité pour monter une opération militaire A rencontre de l'Iran A la suite de l'arrASt rendu par la C.IJ. le 24 mai 1980 et qui condamnait dans les termes les plus nets la prise en otage du personnel diplomatique américain A Téhéran. Cette exécution forcée d'une décision de
la Cour par le biais d'une opération militaire fut abandonnée après que des discussions entre les membres permanents du Conseil de Sécurité eussent montré la probabilité de l'échec de cette procédure en raison de l'opposition de l'U.R.S.S. qui y aurait mis son - to -.
2 - La légitime défense.
' Cette notion bien élie de l'ordre interne a connu une transposition dans l'ordre international. Ainsi, la violence privée peut s'avérer légitime, en réponse A un acte de violence privée et en l'absence d'action des autorités publiques. Il s'agit lA d'une circonstance extrASme où un individu doit faire face A une menace immédiate qui porte sur sa vie propre : cette - auto-défense - n'est pas ipso facto licite, sa - légitimité - étant sourainement appréciée par les juges. Une telle institution existe dans l'ordre international depuis toujours. Cette règle coutumière a vu son existence consacrée par la Charte de l'Organisation des Nations Unies. Toutefois, le droit international est moins strict que le droit interne dans son contrôle des conditions d'exercice de la légitime défense.
a) Une existence coutumière.
' Ce droit de légitime défense a été utilisé fréquemment, notamment A l'époque où le recours A la force armée, A la guerre, était licite. De nos jours, ce droit de légitime défense est encore invoqué depuis la mise hors la loi de la guerre en 1928 par le Pacte précité Briand-Kellogg. Ceci étant, la légitime défense a eu, historiquement, deux sens différents :
' Avant 1928, c'est-A -dire avant la signature du Pacte Briand-Kellogg, la légitime défense était utilisée par les Etats en réponse A des actes contraires au droit international. Us y recouraient si un pays tiers violait par exemple leur souraineté territoriale ou s'il portait atteinte aux biens ou A la vie de leurs ressortissants. Les exemples abondent. Particulièrement significati fut l'affaire dite de la Caroline qui opposa les Etats-Unis A la Grande-Bretagne en 1837 et qui se termina par un effort de codification de la matière (Moore international law, vol. II, 409, 1906). La - Caroline - était un bateau américain armé par des insurgés canadiens en lutte contre la domination britannique dans ce pays. Ce navire opérait dans la région des Grands Lacs et trouva refuge dans un port local des Etats-Unis. Des navires de guerre britanniques, au nom de la légitime défense, pénétrèrent dans les eaux
territoriales américaines, se saisirent de la - Caroline - et la détruisirent ; cette action militaire entraina non seulement la perte du bateau mais aussi de vies humaines. De longues discussions s'engagèrent entre les deux pays ' Etats-Unis et Grande-Bretagne ' pour se terminer en 1842 par un échange de lettres entre les ministres des Affaires étrangères respectifs de ces deux pays. Il confirmait les points suivants : tout d'abord, la Grande-Bretagne admettait avoir violé la souraineté territoriale des Etats-Unis et les deux ministres s'entendaient pour reconnaitre - le respect du caractère inviolable du territoire des Etats indépendants (comme) le fondement le plus essentiel de la civilisation -. Toutefois, A ce principe fondamental, ils introduisaient une exception possible, la légitime défense, ainsi que le soutenait la Grande-Bretagne. Mais les deux parties en limitèrent l'exercice A des conditions précises : - La nécessité de recourir A la légitime défense doit AStre, disaient-ils, immédiate, impérieuse, et ne laissant ni choix des
moyens ni délais pour délibérer -. Une telle formulation représente bien l'état du droit coutumier de la légitime défense.
' Après la conclusion en 1928 du Pacte Briand-Kellogg interdisant le recours A la guerre comme instrument de politique nationale, la légitime défense fut sount ' et abusiment ' invoquée comme une exception A l'illicéité de l'usage de la force armée. Il est loisible de citer un certain nombre d'exemples d'invocations abusis de légitime défense. C'est ainsi que dans des rapports de 1933 et 1937 préparés par des commissions ad hoc de la Société des Nations, les commissaires estimèrent que les attaques du Japon contre la Chine n'étaient en rien courtes par la légitime défense, comme le soutenait le premier pays. De mASme, lors du procès de certains criminels de guerre nazis A Nuremberg, le tribunal refusa de reconnaitre que les invasions du Danemark ou de la Norvège, par exemple, par les forces de l'Allemagne nazie étaient des actes de légitime défense, en l'espèce de type préntif. Le tribunal ne vit lA que des guerres d'agression.
b) Une reconnaissance conntionnelle.
' La légitime défense a été expressément reconnue comme constituant une exception au principe de l'interdiction du recours A la force armée dans l'ordre international. Toutefois, ses contours demeurent fort imprécis.
Le pacte Briand-Kellogg du 26 août 1928 portant - renonciation A la guerre comme instrument de politique nationale par les Etats - était muet sur la légitime défense. Toutefois, lors de son approbation par les Etats, il fut très généralement admis que la légitime défense n'était pas abrogée pour autant et qu'elle gardait sa valeur coutumière.
Plus tard, la Charte de VO.N.U. devait formellement consacrer l'existence au profit de tous ses membres du droit de légitime défense (art. 51). Ce droit ' et cette expression est unique dans le texte de la Charte ' est mASme formellement qualifié de - naturel - ; autrement dit, la légitime défense est une prérogati inhérente A la souraineté de l'Etat. Ce -
droit naturel- de la légitime défense joue ainsi comme une exception A l'article 2 paragraphe 4 de la Charte prohibant le recours A la force dans les relations internationales. Il peut s'exercer soit de faA§on individuelle, soit de faA§on collecti. Sous ce deuxième aspect, c'est reconnaitre la légitimité des pactes militaires régionaux, comme le Pacte de l'Atlantique de 1949 ou le Pacte de Varsovie de 1955 qui sont fondés sur la légitime défense collecti et l'institutionnalisent : toute attaque contre l'un des membres est assimilée A une attaque contre tous, entrainant ainsi la mise en ouvre de mesures militaires d'assistance mutuelle. L'article 51 de la Charte précise toutefois que les actions de légitime défense ne sont licites que pour répondre A une - agression armée -. La précision est d'importance, car elle interdit les usages passés de la légitime défense pour faire cesser tout manquement au droit international, ce qui avait donné lieu A des abus certains. Enfin, il est spécifié que ces actions entreprises au nom de la légitime défense doint AStre notifiées au Conseil de Sécurité et qu'elles ne modifient nullement son rôle qui est de iller au maintien de la paix et de la sécurité internationale en décidant au besoin de mesures coercitis au titre du chapitre VII de la Charte. Autrement dit, la légitime défense doit conserr un rôle subsidiaire dans l'ordre international.
La C.IJ. dans son arrASt du 27 juin 1986 dans l'affaire des activités militaires et paramilitaires au Nicaragua devait reconnaitre le caractère coutumier de la légitime défense tant individuelle que collecti (par. 193), mais elle précisa que la seule riposte armée licite était celle destinée A faire face A des actes constitutifs d'agression elle-mASme - armée - (par. 211).
' Or, force est de noter que la légitime défense, mASme depuis l'entrée en vigueur de la Charte de l'O.N.U., a été invoquée sount de faA§on abusi.
Tout d'abord, elle n'a pas été seulement utilisée comme riposte A une - agression armée -. Ainsi lorsqu'il arriva A la France, lors de la guerre d'Algérie, de saisir des navires en haute mer, elle invoqua la légitime défense. De mASme, lorsque l'administration américaine institua un blocus partiel de Cuba en 1962, la légitime défense A la fois des Etats-Unis et du reste du continent latino-américain fut invoquée A titre justificatif, alors qu'il n'y avait eu aucune agression armée de la part de Cuba. Plus récemment, cet argument fut invoqué dans l'incident du Mayaguez qui eut son heure de célébrité en 1975. Le 12 mai 1975, des forces cambodgiennes saisirent ce navire marchand américain et le conduisirent de force dans un port local. Une solution amiable par des négociations diplomatiques ayant échoué, le président des Etats-Unis ordonna dès le 14 mai l'emploi de la force armée pour obtenir la libération de l'équie. Cette action fut justifiée du côté américain comme constituant une mesure d'autodéfense en réponse A un acte illégal du gournement cambodgien, l'arraisonnement d'un navire de commerce dans les eaux internationales (voir A.J.I.L. 1975, 875 et s.).
Le meilleur exemple, sur le théorique cela s'entend, d'une utilisation claire et nette de la légitime défense par un Etat nous a été fourni par la - guerre des Falklands/Malouines - du Printemps 1982 entre l'Argentine et la Grande-Bretagne : A l'invasion militaire de ces ilôts par le premier pays devait répondre une opération aéronavale, de grande enrgure (voir RJ. Dupuy, Les Malouines entre l'O.N.U. et l'O.U.A : l'impossible agression, A.F.D.I. 1982, 337 et surtout les pp. 345-349).
Ensuite cette extension de la notion de légitime défense a été également manifeste lorsque des Etats ont prétendu ' comme par le passé ' y recourir pour faire face A l'imminence d'une agression armée d'un pays tiers: dans cette hypothèse, on se trou en présence de la légitime défense - prénti -. Des discussions passionnées n'ont jamais cessé sur le point de savoir si la menace de l'emploi imminent de la force armée par un pays justifierait une action militaire prénti de l'Etat - menacé - au nom de la légitime défense. En théorie sans doute, il n'y a rien lA qui soit insoutenable ; toutefois, dans la pratique, la plus grande prudence s'impose afin d'éviter les abus. Comment évaluer ac précision et objectivité par exemple, la - menace d'une agression armée imminente ? -. Ainsi, IsraA«l justifia - la guerre des six jours - de juin 1967 par l'imminence d'une attaque armée égyptienne et par la fermeture du détroit de Tiran ; cette argumentation fut loin d'entrainer la conviction générale. En bref, la frontière est bien ténue entre la -guerre d'agression- et la -légitime défense prénti-.