NAVIGATION RAPIDE : » Index » MANAGEMENT » RESSOURCES HUMAINES » Ethique et responsabilité La notion de responsabilité revisitée par le management
Le processus de distorsion du couple, avoir des responsabilités et AStre responsable, peut AStre analysé A partir d'un double point de vue: sous l'angle opérationnel, A travers la culture du projet (A), et sous l'angle sociologique, avec la montée en puissance d'une société centrée sur l'indidu (B), ce qui pose, en conséquence, des questions inédites aux Directions des Ressources Humaines (C). A - La culture du projet Cette culture du projet qui s'est diffusée dans les entreprises depuis les années 1980 pour se généraliser aujourd'hui, a bouleversé en profondeur le système de compréhension de la notion de responsabilité. Les définitions données A la gestion par projet sont pléthoriques, A chaque auteur sa définition. Nous reprendrons la définition proposée par Xaer Baron, selon lequel l'organisation par projet -est la mise en ouvre non permanente, d'équipes pluridisciplinaires, structurées, dédiées en tout ou partie, A la réalisation d'actités temporaires finalisées sur un produit identifiable -27. De cette définition, plusieurs critères peuvent AStre dégagés pour qualifier la spécificité de la gestion par projet : - le critère de la singularité: le projet est unique; il est délimité dans le temps et dans l'espace. Il se présente comme une réponse singulière A un besoin exprimé par un client identifié ; - le critère de la temporalité : le projet est toujours inscrit dans une durée déterminée : il a un début et une fin ; - un critère de conception : le projet est phase, il est organisé selon une logique rythmée par différentes étapes (démarrage, spécification, prototypes, développement, etc.) ; - un critère d'organisation : la gestion par projet est relié directement au management des compétences. C'est une mise en commun temporaire d'intelligences, de ressources financières, techniques et humaines pour répondre A une commande précise. Le management par projet s'est substitué A la culture de serce qui avait dominé l'organisation de l'entreprise traditionnelle. L'organigramme de type disionnel s'imposait alors comme cadre de référence. L'impact de la diffusion de cette culture du projet s'est traduit dans l'adoption de nouvelles formes d'organisations qui ont préféré la mise en forme d'une logique matricielle entrainant, par-lA mASme, un aplatissement des lignes hiérarchiques. L'organisation pyramidale de l'entreprise taylo-rienne a laissé la place A une entreprise -poly-cellulaire- en réseaux-*. Les justifications théoriques et pratiques de cette nouvelle forme de management sont pléthoriques. Toutes font valoir, de manière positive, l'argument de la flexibilité, de la réactité aux attentes du client, et de manière plus négative, les dérives bureaucratiques qui avaient résulté d'un système organisé autour de serces fonctionnels qui défendaient chacun leur pré carré. Ce type de management offre bien une réponse aux exigences de la flexibilité. Il s'inscrit dans le processus -d'horizontalisation- et d'aplatissement des organisations, en réponse A la logique de compétence. Pourtant, les effets de ces nouvelles organisations impulsées par la -culture du projet- entrainent des conséquences qu'il nous semble utile de bien identifier, dans la mesure où ils tendent A modifier en profondeur les modes d'exercice du pouvoir dans l'entreprise"' : -le premier point concerne une représentation nouvelle du couple pouvoir/responsabilité qui s'inscrit désormais dans un nouveau rapport au temps. Ce qui fondait par le passé le sens des responsabilités, et donc l'autorité d'une personne, c'était une mission qui s'inscrivait dans la durée. L'émergence aujourd'hui du chef de projet A qui l'on confie la responsabilité de missions parfois très stratégiques pour l'avenir de l'entreprise, ne suppose pas l'exercice de cette fonction sur une longue période. Au contraire, on voit apparaitre une nouvelle catégorie de chef de projet qui exercent des responsabilités A temps partagé, c'est-A -dire le temps de e du projet. Et les directions des entreprises elles-mASmes ne sont pas épargnées par ce nouveau type de management. Les patrons des grands groupes publics ou privés sont appelés A la tASte d'une entreprise pour une durée très limitée, le temps d'une mission bien déterminée. -Nous sommes dans une culture où les patrons sont souvent appelés A faire des coups, puis repartent surfer sur une autre vague-30 ; - en second lieu, la légitimité de ce chef de projet qui lui confère un certain pouvoir dans l'organisation, est plus fondée sur une logique de compétence que sur une vérile logique de responsabilité. Cette montée en puissance des chefs de projet a télescopé de plein fouet une autre population, celle des cadres. Ces derniers étaient habitués par référence A un statut qui leur conférerait la légitimité, A exercer des responsabilités". Le recours A des consultants extérieurs qui peuvent éventuellement assumer la fonction de chef de projet contribue A brouiller encore davantage le repérage de la responsabilité. Cette désilisation de l'encadrement qui a perdu dans cette bataille son système de représentation, et souvent son identité, a modifié en profondeur le lien entre pouvoir et responsabilité. B - Sous l'angle sociologique Plusieurs données pointées par la sociologie doivent AStre mobilisées pour la compréhension de la relation nouvelle entre pouvoir et responsabilité dans les entreprises. La première concerne le phénomène de l'indidualisme (1), la seconde relève des incidences de l'éclatement du collectif de travail sur la manière de concevoir la responsabilité (2). 1) La montée de l'indidualisme La montée de l'indidualisme que beaucoup de sociologues ont décrit comme le phénomène majeur de la fin du xx' siècle'2, a également des incidences tout A fait édentes dans la distorsion du couple avoir des responsabilités/AStre responsable. Ce qui semble de plus en plus émerger comme valeur dominante de la société post-industrielle, c'est que la personne se sente beaucoup plus responsable d'elle-mASme, de son développement personnel, de son employabilité que du collectif de personnes dont elle a la charge. -Chacun est producteur de lui-mASme, est responsable de son corps, de son image, de son succès, de son destin"-. La crise des engagements responsables dans les collectifs de travail, crise du syndicalisme, baisse de l'engagement associatif inscrit dans la durée mais en revanche présence d'une militance intermittente très active sur des actions ponctuelles, vont de pair. Ce phénomène d'indidualisme et de crise de l'engagement collectif, sont indissociables de la culture du réseau, du nouveau rapport au temps et de la nouvelle représentation de l'épanouissement personnel. Il a également partie liée au processus de dilution de la distinction claire entre l'espace de la e professionnelle, comme lieu d'exercice de la responsabilité, et l'espace de la e privée. 2) L'éclatement du collectif de travail C'est encore aux travaux de Max Weber qu'il faut se référer si l'on veut bien comprendre la nature de la révolution qui s'est produite dans l'univers du travail. -L'esprit du capitalisme- tel qu'il l'avait formalisé, reposait sur une distinction croissante entre l'univers du travail et l'univers de la e privée. La société indus-(rielle correspondant A l'esprit du capitalisme traditionnel, répondait A une cohérence imposée par les règles du théatre classique : unité de temps, unité de lieu, unité d'action, selon la formule de Zarifian14. Cela signifiait clairement qu'un groupe de salariés qui constituait un collectif de travail se trouvait en mASme temps sur le mASme lieu, pour effectuer une mASme actité. Cette convergence d'intérASts sur un mASme lieu de travail, régulé par un mASme tempo, avait favorisé l'émergence de ce sentiment d'appartenance, propice A la notion d'engagement et d'exercice de la responsabilité collective dans la communauté de travail. -Le nouvel esprit du capitalisme- marque une rupture très significative avec ce modèle évoqué". Les nouvelles formes d'organisation imposées par la flexibilité du temps et du territoire et par les NTIC, prennent le pas sur le collectif de travail. Dans ce nouveau contexte, la séparation entre e professionnelle et e privée tend A perdre de sa lisibilité, du fait de la diffusion très rapide des porles, de l'usage d'Internet et du courrier électronique. 3) Les conséquences de la mutation de la conception de l'emploi La notion d'actité prend le pas progressivement sur la notion d'emploi sle, occupé A plein temps par un salarié, dans une entreprise donnée, A un lieu donné. Par ailleurs, le contenu du travail, spécifié de manière précise dans la description de poste, a laissé la place A une représentation A la fois plus floue, mais plus exigeante, du contenu de l'actité dans le cadre de la gestion de la compétence. Désormais, la partition n'est plus totalement écrite. Une part d'improsation, comme dans le théatre contemporain, est laissée A la créatité du professionnel. C'est lui qui jugera en situation, au regard de son implication et de son niveau d'adhésion au projet d'entreprise, de la manière d'interpréter le rôle qui lui a été confié. D'une responsabilité professionnelle clairement identifiée dans un espace professionnel formalisé par des descriptions de postes, on évolue dans un univers désormais plus souple, dans lequel chacun est renvoyé A sa propre compétence et A sa propre conception de la responsabilité. On comprend pourquoi l'éthique deent une donnée centrale du pilotage des entreprises, parce qu'elle renvoie A la hiérarchie des valeurs qui président A un exercice de la responsabilité, qui deent de fait, de plus en plus une affaire personnelle. Cette nouvelle manière de concevoir cette forme de responsabilité indiduelle pose aux responsables des ressources humaines des questions inédites.
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