«Réalité omniprésente louée dans l'épineux el fondamental problème, quasi-mystique de l'emploi, dispensatrice de biens convoités et consommatrice adulée comme une courtisane chérie et parfois pleurée comme une mère, quelquefois honnie comme une maratre, l'
entreprise est au cœur des problèmes et des peines, des jouissances et des joies des Hommes de notre temps».
Parce que l'entreprise définit la nature des rapports économiques et sociaux, et parce que toutes les questions qui concernent l'homme au
travail renvoient finalement à sa représentation, on ne peut concevoir de gestion des
ressources humaines sans tenter de comprendre les principales tensions doctrinales qui la trarsent. Or, il y a sur ce sujet un étrange paradoxe entre d'un côté une production pléthorique d'articles et d'ouvrages sur le thème de l'entreprise, et de l'autre, une grande difficulté à cerner les contours théoriques. Au croisement du droit, de l'économie, de la sociologie et de la gestion, l'analyse de l'entreprise souffre d'un cloisonnement disciplinaire dont il n'est pas facile de se départir. Pourtant, cet exercice de clarification de l'entreprise nous semble une nécessité pour tous ceux qui ulent appréhender la gestion des ressources humaines.
D'une part, l'entreprise constitue le cadre support et le réfèrent de toute gestion des ressources humaines: c'est elle qui donne à cette discipline, raison d'être et légitimité. D'autre part, la manière dont on appréhende l'entreprise, dans sa finalité et son projet, aura des incidences directes sur la conception que l'on se fera des ressources humaines. Gestion des ressources humaines et entreprise forment donc un couple indissociable.
Comme tous les phénomènes économiques et sociaux. l'histoire de l'entreprise a évolué au cours des siècles. Suivant de très près, ou précédant, selon les cas, les noulles contraintes économiques qui apparaissent à certaines périodes clefs de l'histoire, le cadre
juridique de l'entreprise n'est pas une donnée intangible et immuable. Au contraire, un moument de balancier assez récurrent tend à faire osciller la conception de l'entreprise entre d'une part, une approche univoque, fondée d'un point de vue
économique sur la notion de firme, et d'un point de vue juridique, sur la notion de contrat (A) et d'autre part, une approche tendant à promouvoir une vision complexe de l'entreprise. Celle-ci mettrait l'accent sous l'angle économique, sur la notion d'organisation, et sous l'angle juridique, sur la notion d'institution (B). Le choix entre ces deux options n'est pas neutre pour la Gestion des Ressources Humaines. Il a des incidences directes sur la légitimité de certains outils, comme les techniques d'implication et de responsabilisation des salaries, qui n'ont de sens que rapportés à la vision de l'entreprise communauté d'hommes. La diffusion rapide de la question du gournement d'entreprise et l'apport récent de noulles conceptions de l'organisation, tendent à modifier en profondeur les enjeux du débat et à renouler les approches théoriques de l'entreprise. L'entreprise est à la croisée des chemins théoriques (C).
A - La conception univoque de l'entreprise
À certains moments clefs de l'histoire économique, on assiste à l'émergence de modèles dominants qui s'imposent et qui tiennent parfois lieu de dogme. C'est précisément ce qui s'est produit ac la théorie
économique classique pour laquelle l'entreprise est appréhendée principalement autour d'un schéma relatiment réducteur fondé sur la théorie de la firme (1).
Le même type de réflexion peut s'appliquer à la pensée juridique. Cette conception univoque, centrée sur un seul point de vue, est également largement partagée dans la communauté des juristes. L'entreprise, considérée sous l'angle du droit, n'est pas en soi une catégorie juridique. Étant tantôt réduite à la somme des contrats qui la composent, tantôt appréhendée sous l'angle de la société -société de personnes ou sociétés de capitaux - qui l'embrassent, la notion d'entreprise est sount appréhendée comme un objet juridique non identifié (2).
1) L'entreprise vue par l'approche économique
« Il fallut se rendre à l'évidence: la reine était nue (). Dans la tradition dominante de I économie, celle qui est imperturbablement enseignée dans nos écoles el sount même dans nos unirsités, on continuait en effet, la plupart du temps, à n 'avoir rien à dire, ou presque sur l'entreprise ».
Il y a quelque chose d'assez perturbant pour celui qui pénètre pour la première fois dans les arcanes de la pensée économique de réaliser, que finalement et tout compte fait, l'entreprise tient une place tout à fait marginale. Paradoxalement, seule l'analyse économique néoclassique consacre des déloppements conséquents à l'entreprise. Mais c'est finalement pour en réduire immédiatement la portée (a). Il en est de même des théoriciens de l'approche contractuelle (b).
a) Le théorie de la firme, dans l'analyse économique néo-classique
« Il n 'y n pas dans le modèle néoclassique de vérile théorie de la firme
ayant un objet propre et spécifique »*''.
L'entreprise, qui prend dans le cadre de cette analyse néoclassique le nom de firme n'est qu'une composante de la théorie
des prix, et du principe de l'allocation des ressources, ou même simplement, un simple calcul d'opportunité contractuelle. Ceci est particulièrement vrai dans le modèle de Walras qui en fait une catégorie tout à fait résiduelle. L'entreprise n'est qu'un acteur passif qui réagit, sans aucune autonomie, aux contraintes de l'équilibre imposées par le marché. La firme dans la conception néo-classique doit remplir deux fonctions:
-la première consiste à transformer les facteurs en produits;
-la seconde consiste à choisir les valeurs optimales lui permettant d'améliorer au maximum la combinaison producti.
Dans cette approche centrée sur le marché, et dans un contexte dominé par la rationalité des acteurs, qui est l'hypothèse centrale du modèle Walrassien, la firme ne dispose que d'une marge très étroite d'autonomie. «.La firme n 'a rien d'autre à faire que d'appliquer mécaniquement les règles du
calcul économique : la firme point se comporte comme un automate, programmé une fois pour toutes». Cette conception de l'entreprise, telle que la pensée néo-classique l'a théorisée, a encore beaucoup d'adeptes aujourd'hui, notamment parmi les auteurs qui s'inscrint dans l'approche libérale. Tous font valoir le poids du système de contraintes maximales imposées par l'environnement externe et les contraintes du
marché qui dictent aux décideurs leurs stratégies d'actions.
b) Les différentes approches contractuelles de l'entreprise
Elles sont issues principalement de modèles anglo-saxons. Elles ont toutes pour point commun de focaliser l'observation de l'entreprise sur l'axe fondateur du marché, relié à la problématique du contrat. Pour simplifier, on peut distinguer la théorie des coûts de transaction, la théorie de l'agence qui s'inscrit dans le prolongement direct des coûts de transaction et enfin la théorie conntionaliste.
•Pour la théorie des coûts de transaction, impulsée par Coase et Williamsonm, mais largement reprise depuis, l'entreprise n'est qu'une fiction juridique fondée sur les droits de propriété. L'entreprise trou son origine, non dans les nécessités de la division du travail, mais dans l'
économie réalisée par sa substitution, à une série de contrats ponctuels d'échange, conclus sur le marché. Dans ce cadre théorique, la firme est appréhendée «comme une structure de gournance de contrats dont l'origine doit être recherchée dans les caractéristiques des transactions: fréquence, spécificité et complexité».
L'impact de la théorie des coûts de transaction dans la gestion des entreprises a été considérable dans les choix de gestion opérés ces dernières années. Cette dernière a permis de justifier notamment les pratiques d'exlernalisation, les stratégies d'alliances et la notion d'entreprise virtuelle. L'arbitrage entre le modèle de l'entreprise et la référence au
marché est actuellement remis en cause. Les arguments qui avaient poussé, à une certaine époque, à préférer l'entreprise intégrée au marché, peunt, selon cette théorie, être inrsés. L'évaluation des coûts de transaction joue désormais en faur du marché et justifie donc les pratiques d'externalisation.
• Pour les représentants de la théorie de l'Agence, l'entreprise est une fiction légale qui sert de lieu de réalisation d'un processus complexe d'équilibre entre les objectifs conflictuels d'individus à l'intérieur d'un cadre contractuel. Les modes d'organisation en interne dans les firmes et en externe entre les Firmes sont commandés par la volonté de minimiser les coûts d'agence qui sont essentiellement des coûts de surillance.
• L'approche par les conntions: le grand apport de l'économie des conntions sur la conception de l'entreprise est de réintroduire le rôle de l'entrepreneur. L'existence de la firme repose principalement sur la force de conviction de l'entrepreneur qui peut impulser une vision et un projet «L'entrepreneur est celui qui sait convaincre pour que les acteurs nécessaires adhèrent au registre conntionnel qu 'il propose ».
2) L'entreprise, un objet juridique non identifié
Pour comprendre ce qu'est l'entreprise sur un juridique, il y a deux manières de
procéder :
-soit on part de la théorie du Droit pour y faire entrer l'entreprise: le but de
cette démarche, très prisée par la communauté des juristes, étant de rechercher la
nature juridique de l'entreprise, au regard des catégories juridiques existantes ;
- soit on part de la réalité socio-économique pour appréhender l'entreprise. On rra dans cette perspecti comment cette organisation s'est constituée, autour de quel projet économique, ac quelle finalité, et ac quelles contraintes.
La première chose qui frappe quand on est à la recherche d'une définition juridique de l'entreprise, c'est que nulle part dans le droit, on ne trou de définition juridique de l'entreprise. Ni dans le Code civil, ni dans le Code du commerce, on ne trou un Statut juridique de l'entreprise.
La question qui se pose alors, est de tenter de qualifier juridiquement l'entreprise pour déterminer la catégorie dans laquelle on peut la classer. Les juristes utilisent fréquemment un raisonnement binaire fondé sur l'opposition entre le sujet et l'objet: au regard de cette distinction, la question se résume dans le fait de savoir si l'entreprise est un sujet de droit ou un objet de droit?
a) L'entreprise, est-elle un objet de droit?
Si l'on considère l'entreprise comme un objet de droit, on dira que l'entreprise est un bien que l'on exploite. L'existence d'un bien suppose l'existence d'un ou de plusieurs propriétaires. La relation étroite entre l'exercice du droit de propriété el celui du pouvoir constitue l'une des caractéristiques fondamentales des sociétés libérales industrielles. Elle permet de susciter à la fois des initiatis individuelles et collectis, tout en adaptant les conditions de la prise du risque. Ce double critère de la propriété et du pouvoir permet de distinguer sur le juridique : -les entreprises individuelles; -les entreprises sociétaires; -les entreprises coopératis ou associatis.
L'exploitation individuelle est celle d'une personne physique, qui est propriétaire des actifs de l'entreprise. L'exploitation à plusieurs suppose la
constitution d'un groupement, juridiquement organisé. La société est l'expression de cette organisation juridique, en tant qu'elle détient l'attribut de la personnalité morale. C'est en réalité, la société, personne morale, qui est propriétaire des actifs de l'entreprise. Cette définition résulte de la loi de 1978, qui énonce «.que la société est un contrat par lequel deux, ou plusieurs personnes, conviennent de mettre en commun des biens ou leur industrie, en vue de partager ou de profiter de l'économie qui pourra en résulter» (article 1832 du Code civil).
Cette conception de l'entreprise, objet de droit, va avoir un grand succès auprès des juristes; elle est encore aujourd'hui largement partagée par tous ceux qui défendent l'intérêt des actionnaires, qui sont les seuls propriétaires de l'entreprise. Il en résulte pour le droit des sociétés une conséquence claire: l'entreprise n'a pas la personnalité morale. Seule la société, sous forme de société de personnes ou de société de capitaux, dispose de la personnalité morale. L'entreprise se confond ac sa structure sociétale.
Cette conception est cependant très réductrice de la réalité. On le pressent bien, l'entreprise ne peut être réduite «à un ensemble d'actifs» La complexité des activités de production fait que l'entreprise considérée comme un espace de recherche, de création de richesses en vue d'un but économique commun, devient de plus en plus indépendante des cadres juridiques formels. Cela signifie que l'enloppe juridique n'épuise pas, loin s'en faut, son contenu.
Par ailleurs, cette vision patrimoniale ne permet pas d'intégrer la dimension du personnel et l'ensemble des ressources liées au processus de production, qui pourtant sont une donnée essentielle de la vie de l'entreprise. C'est précisément la prise en compte de l'existence du personnel dans l'entreprise, qui a conduit à élargir la définition de l'entreprise.
b) L'entreprise est-elle un sujet de droit ?
Ce sont les juristes spécialistes du droit du travail qui ont contribué à élargir la vision traditionnelle de l'entreprise. L'existence juridique de l'entreprise est apparue de manière progressi :
- d'abord, par l'article 23, alinéa 7 de la loi du 29juillet 1928, denu depuis l'article L. 122-l2 Code du travail dispose dans sa dernière rsion, que «s'il survient une modification dans la situation juridique, de l'employeur, notamment par succession, nte fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification, subsistent entre le noul employeur et le personnel de l'entreprise». Ce qui signifie clairement, que la notion d'entreprise ne se réduit pas à la personnalité de son propriétaire ;
-on peut ensuite faire référence à l'ordonnance du 22février 1945 qui a crée le comité d'entreprise. En tant qu'organe doté de la personnalité morale, il est censé représenter les intérêts des salariés qui éntuellement ne sont pas conrgents ac ceux des propriétaires ;
-il faut mentionner enfin l'influence du droit pénal, notamment du droit de la responsabilité qui pose le principe de la responsabilité pénale des personnes morales et qui, de ce fait, contribue à institutionnaliser le concept d'entreprise. Il s'agit d'une brèche importante dans la conception de l'entreprise telle qu'elle est préconisée par un certain nombre de spécialistes du droit des sociétés. De là à en déduire que l'entreprise doit être dotée de la personnalité morale, c'est un débat qui s'est amorcé depuis un certain nombre d'années, mais qui est loin d'être tranché. Pour les juristes, l'entreprise est avant tout une notion économique même si le législateur y fait de plus en plus référence, sans pour autant aller jusqu'à la définir ac précision.
Ce vide juridique autour de la notion d'entreprise occasionne aujourd'hui un certain nombre de problèmes, tant sur le juridique que sous l'angle de la gestion des ressources humaines. L'actualité a remis au centre des débats, cette question brûlante. Le statut juridique de l'entreprise pose la question de sa raison d'être, notamment quand apparait un conflit d'intérêts entre les actionnaires et les salariés. Ce qui caractérise aujourd'hui la vision des juristes sur l'entreprise, c'est en fait une conception schi/.ophrénique. Les intérêts des actionnaires sont appréhendés dans le droit des sociétés, à trars les notions de contrat et d'actifs, alors que ceux des salariés sont pris en charge par le droit du travail, qui lui s'appuie sur le concept d'entreprise. On le voit bien, cette opposition entre la société et l'entreprise, n'est plus adaptée à la réalité et aux nouaux enjeux qui pèsent sur le monde économique. L'entreprise est une notion trop complexe pour se laisser enfermer dans ce schéma réducteur. Il est important de pouvoir contrebalancer le pouvoir des actionnaires qui exercent leur pouvoir à trars la société de capitaux, en dotant l'entreprise d'une vérile struc-lure de gournance.
Cette vision univoque de l'entreprise qui domine encore la pensée économique et juridique doil être complétée d'une vision plus enrichie qui intègre la complexité de l'organisation. Cette conception portée depuis longtemps par la sociologie des organisations, mais aussi par la théorie de l'entreprise-institution est une piste très sérieuse pour donner du sens à l'entreprise.
B - L'entreprise : une organisation complexe
Dire que l'entreprise est une organisation complexe, présuppose un a priori théorique qui sous-tend tout l'effort de formalisation qui pourra être entrepris. (Ala suppose en premier lieu, de prendre en considération les multiples paramètres qui structurent la vie l'organisation. Cette réalité intègre des phénomènes très dirsifiés, tels que:
-le projet fondateur de l'entreprise;
-l'institutionnalisation de la structure;
-l'organisation du pouvoir, la formalisation des taches et des activités
-la clarification des enjeux et des finalités.
Cela renvoie, en second lieu, à une vision de l'entreprise étroitement reliée à la réalité socio-économique. Les adeptes de cette vision de l'entreprise ont le souci permanent d'intégrer les
données liées à l'environnement externe dans lequel évolue l'entreprise.
Enfin, le point commun entre tous les auteurs qui ont
marqué de leur empreinte cette vision enrichie de l'entreprise, est d'avoir d'emblée, fait le pari de la pluridisciplina-rité. On ne sera donc pas surpris de constater que les différents promoteurs de cette approche complexe de l'entreprise soient eux-mêmes situés à la marge de leur propre discipline. C'est le cas de Schumpeter considéré comme un économiste hétérodoxe, qui formalise le projet de l'entrepreneur autour de la dynamique de l'innovation ( 1 ). C'est le cas également des défenseurs de la théorie institutionnelle de l'entreprise (2). C'est enfin le cas des théoriciens de l'école de la régulation (3).
1) La décourte de l'entrepreneur : Schumpeter
Schumpeter, économiste autrichien"5 exilé aux États-Unis, a joué un grand rôle dans la formalisation du concept d'entreprise, comme organisation. Pour lui l'entrepreneur est la clef de voûte du système. C'est lui qui impulse la dynamique entrepreneuriale à partir d'une innovation qu'il porte en lui. L'entrepreneur incarne également l'esprit de l'entreprise qui doit assurer la
croissance et le déloppement par une recherche continue du profit".
L'innovation ne se réduit pas au progrès technique. Schumpeter a formalisé cinq
aspects dans le processus d'innovation ;
-la fabrication d'un produit nouau;
-l'introduction d'une méthode de production noulle;
-l'ourture d'un nouau débouché;
-la conquête de noulles sources de matières premières ;
-la mise en œuvre d'une noulle méthode d'organisation de la production.
2) L'émergence du concept d'entreprise-institution
• La théorie de l'institution apparait en France sous l'influence de juristes publicistes. notamment celle de Maurice Hauriou. Plusieurs éléments directement transposables à l'entreprise peunt être dégagés de son œuvre*7. Pour lui l'institution juridique est «un composé de règles de droit se pénétrant les unes les autres, au point de constituer un tout organique».
• Deux critères caractérisent le fait institutionnel.
-En premier lieu, il insiste sur l'idée «d'œuvre à accomplir», qui commande le processus instituant et qui organise le fonctionnement de l'institution. Cette dimension de l'œuvre créatrice n'est pas sans rappeler les propos de Schumpeter qui place l'initiati créatrice au cœur du processus d'innovation. Celle-ci précède et accomne la démarche de l'entrepreneur.
- En second lieu, Hauriou met en exergue, les manifestations de communion qui doint exister entre les membres du groupe social, intéressés à la réalisation de l'idée, pour donner à l'institution sa légitimité et lui conférer sa pérennité.
•Cette approche institutionnelle a eu des prolongements dirsifiés dans la théorie économique ac l'apport très significatif de François Perroux, et dans l'approche socio-historique de l'entreprise ac la conception déloppée par Chandler. La volonté de placer l'institution-entreprise au coeur de la dynamique économique revient à l'économiste F. Perroux*8. Il qualifie l'entreprise «d'institution cardinale»du Capitalisme. Pour lui. l'entreprise doit être considérée comme un ensemble sle et organisé d'éléments et de relations, formé en vue d'accomplir une œuvre de production. Il insiste également sur le fait que «l'entreprise ne peut être réduite à un faisceau de contrats spontanément noués».
• Chandi.er, quant à lui, a proposé une lecture historique de l'entreprise"9. Pour lui, la firme est une institution complexe. Loin de la firme «point», «ellepeut être définie comme une institution économique regroupant un ensemble intégré d'unités fonctionnelles et opérationnelles, et administrée par une hiérarchie managériale à plusieurs niaux. » L'entreprise est le produit de la division du travail fonctionnelle et hiérarchique et de l'importance croissante prise par l'appareil managérial assurant des taches de gestion et de direction.
Cette vision de l'entreprise est fondamentalement noulle. Loin des stéréotypes de l'OST qui avait une vision trop réductrice de l'entreprise, tournée exclusiment sur elle-même, elle ouvre la perspecti de façon beaucoup plus riche : elle suppose une compréhension qui renvoie aux transformations des structures productis imposées par l'histoire économique et l'évolution des marchés qui la façonne.
3) L'école de la régulation
Les théoriciens de la régulation sont des économistes français'™, qui étudient les principes de fonctionnement de l'économie dans une perspecti historique. Inspirés à la fois par Marx et par Keynes, ils ont souligné notamment les dangers d'une croissance monopolistique qui s'est déloppée après la seconde guerre mondiale et qui constitue une des clefs explicatis de la
crise majeure des 30 dernières années. L'apport principal des théoriciens de la régulation dans la manière d'appréhender l'entreprise, repose sur une conception renoulée du rapport salarial. Ils insistent sur la nécessaire collaboration entre les salariés et l'entreprise, de même qu'ils préconisent l'institutionnalisation d'un mode de régulation à l'échelle mondiale pour limiter les déris des marchés financiers.
À partir de cette noulle représentation de l'entreprise, plusieurs caractéristiques peunt être dégagées: l'entreprise est une organisation complexe, reliée à un environnement complexe qui produit un ensemble de signaux qui interagissent. La firme est un lieu de pouvoirs, de coalitions et de groupes d'intérêts. La firme est le lieu de processus de prises de décisions et d'apprentissages collectifs. L'entreprise est une communauté d'Hommes. Parce qu'elle se structure autour d'un projet collectif qui définit une manière de produire, un type de
compétence et un niau de savoir-faire, mais aussi parce qu'elle s'inscrit implicitement ou explicitement dans une certaine éthique, les professionnels des ressources humaines ne peunt qu'être naturellement sensibles à cette conception qui valorise cette approche institutionnelle de l'entreprise. Pourtant, cette conception ne semble pas dominante, loin s'en faut. Le modèle de l'entreprise anglo-saxonne, tout entière tournée sur la recherche de la valeur tend à diffuser très rapidement le standard de Y entreprise-contrat, par essence flexible et réacti aux exigences du marché. Dans le même temps, de nombreuses voies s'élènt pour dénoncer les abus de la
mondialisation et les déris des marchés financiers. Une prise de conscience émerge pour prendre la mesure des dégats sociaux que peunt occasionner des choix à court terme, commandés uniquement par la recherche du profit. Assurer la compétitivité sans exclusion, ni dommage pour l'environnement, promouvoir la réussite pour tous sans fracture, entrer dans la modernité sans renoncer à un héritage culturel et social, telles sont les grandes lignes d'une politique qui voudrait réconcilier l'homme ac son unirs de travail. L'entreprise aujourd'hui est sous les feux de la scène politique et médiatique : elle est à la croisée des chemins théoriques. Il y a urgence à oser penser l'entreprise «comme une affaire de société».
C - L'entreprise : À la croisée des choix théoriques
« La vraie richesse de I entreprise réside de plus en plus dans sa capacité à produire, parmi d'autres organisations, un certain type de lien social»92.
Il est impossible en réalité de séparer les deux approches, l'approche univoque de l'entreprise, largement dépendante de la logique contractuelle et la définition plus complexe reliée à la théorie institutionnelle. L'une et l'autre ont quelque chose à dire sur l'entreprise. Elles sont tout à fait complémentaires. Force cependant est de constater que cette réalité d'entreprise, éminemment complexe, bouscule les repères théoriques traditionnels, qui ont voulu, plus ou moins, enfermer l'entreprise dans des modèles relatiment stéréotypés.
Promouvoir une
vision globale de l'entreprise est un défi urgent à reler dans nos sociétés actuellement ésectiunelées entre des visons irréconciliables. Ce défi s'impose d'autant plus que cette recherche de cohérence va de pair ac une vocation de l'entreprise qui fasse sens pour ses acteurs.
L'attribution de la personnalité morale de l'entreprise, pour reconnaitre en droit la réalité de la communauté humaine, qui constitue un élément clef du
capital immatériel de l'entreprise, doit s'imposer comme une priorité1". Les questions de fond sur la légitimité de l'entreprise, sa raison d'être dans une économie désormais mondialisée et taraudée par le risque, ne peunt plus être éludées. La question du sens ne peut plus être renvoyée à la périphérie de beaucoup de discours de managers en quête de bonne conscience.
Cette réflexion sur le sens constitue désormais le noyau dur de la réflexion de l'entreprise. Interrogeant de fait, la gestion des ressources humaines, elle s'articule autour de deux thèmes: le gournement d'entreprise évoqué plus haut et la question de sa responsabilité sociale. Ces deux points feront l'objet de plus amples déloppements dans le chapitre consacré à la responsabilité.