NAVIGATION RAPIDE : » Index » ECONOMIE » POLITIQUE éCONOMIQUE » Marché unique et systèmes nationaux de fixation des prix des médicaments La diversité des modes de régulation en europe, un obstacle a l'unification du marché ?
Klepper (1994) a mis en évidence le conflit potentiel entre les objectifs des politiques nationales et les principes concurrentiels défendus au niau européen : les intérASts des Etats souhaitant favoriser une industrie de recherche forte et défendant les intérASts de leurs industriels dirgent de ceux des pays qui ont peu d'industrie de recherche et privilégient le bien-AStre de leurs consommateurs et la maitrise de dépenses de santé. D'où une partition de l'Europe entre les pays A niau de prix traditionnellement élevé, l'Allemagne et le Royaume-Uni et plus globalement les pays du Nord, et ceux A prix faibles, les pays du Sud. En raison de sa position intermédiaire, la France est dans une situation inconforle (Jacobzone, 1997), qui confirme bien le rôle central joué par le prix dans la régulation du secteur pharmaceutique. En revanche, Waeidroeck-Rocha (op. cit.) estime que la politique de la concurrence, qui entraine une harmonisation des prix rs le bas, risque d'AStre en conflit ac la politique industrielle, en laminant les profits, donc la R&D. File montre par ailleurs que la cohérence temporelle des politiques communautaires n'est pas évidente non plus : la politique de la concurrence a des retombées sur les firmes pharmaceutiques qui réagissent A la baisse des prix par une spécialisation sur des niches où elles peunt bénéficier d'un avantage atif et atteindre un quasi-monopole générant une rente tant que le bret court. La tendance générale est A la réduction du nombre d'internants sur le marché, A la concentration croissante par des fusions et des acquisitions. Sur le secteur des médicaments en nte libre, une tendance est apparue aux Etats-Unis où plusieurs entreprises pharmaceutiques ont acquis des activités en aval, distributeurs ou gestionnaires de services de soins. La constitution de monopoles peut résulter de la politique de déloppement de la concurrence. A. L'évolution de la politique franA§aise, une atténuation de ses spécificités En première approche, pour décrire la situation franA§aise on peut lire par exemple dans les documents du Syndicat National de l'Industrie Pharmaceutique que la France fait partie des pays européens A prix administrés, au mASme titre que l'Esne, l'Italie, le Portugal ou la Belgique, alors que les prix sont libres aux Pays-Bas, au Royaume-Uni et en Allemagne (ainsi qu'aux Etats-Unis d'ailleurs). En réalité, cette image est trop fruste. S'il est exact que la France a une longue tradition interntionniste pour la production ' et la distribution des médicaments, le système franA§ais a évolué rs un assouplissement des règles tandis que les pays voisins étaient contraints A instaurer des mécanismes de régulation. Aujourd'hui, la question des prix est étroitement liée A celle du remboursement des produits, et c'est plutôt l'importance relati des spécialités remboursables qui détermine la tonalité administrée ou non du système. Partout, les prix des médicaments non remboursables sont libres. En France aussi, où il s'agit pour l'essentiel de ceux qui peunt faire l'objet d'une publicité directe auprès du public. Les fabricants bénéficient de cette liberté depuis le 1er juillet 1986, et cette catégorie de produits représentait 7,4 % du chiffre d'affaires France de l'industrie pharmaceutique en 1998 (SNIP, 1999). La première spécificité franA§aise tient A la faiblesse de ce segment de marché, corrélée A celle de l'automédication qui tend ici A régresser alors qu'elle progresse ailleurs. Partout dans l'Union, l'automédication ou les ntes libres (OTC, "Or The Counter") constituent une marge de manœuvre appréciable pour les industriels dont les stratégies de déloppement s'appuient entre autres sur ce segment. En outre, la France dispose depuis 1987 (loi du 30 juillet) d'un autre secteur pharmaceutique A prix libres, celui des ntes aux hôpitaux. Dans un contexte financier très contraint en particulier depuis la généralisation de la réforme de la dotation globale en 1984, ac des budgets pharmaceutiques représentant environ 4 % du total, les élissements ont reA§u la pleine responsabilité de leurs achats de médicaments. Dans le but que les médicaments accèdent simplement au marché hospitalier, une relation directe s'est instaurée entre l'hôpital-acheteur et l'industriel-fournisseur sans recours A des distributeurs. Conformément A la réglementation des marchés publics A laquelle il est soumis, l'hôpital dispose de services d'achats avisés et négocie, sount annuellement, les marchés. La concurrence entre industriels, sévère, amène les laboratoires A consentir sount des ristournes sur les prix "catalogue" (Buisson, Giorgi, 1997). Cette liberté des prix se traduit donc globalement par des prix faibles. Reste qu'en 1998, plus des trois-quarts du chiffre d'affaires France de l'industrie pharmaceutique (77,3 %) étaient réalisés ac des médicaments remboursables, dont les prix ne sont pas libres. Cependant, autant il était légitime de qualifier ces prix d'administrés jusqu'au début des années quatre-vingt-dix lorsqu'ils étaient fixés par les ministres concernés (Santé, Affaires sociales, Economie et Finances, Industrie) de faA§on autoritaire, en rtu de critères peu explicites, autant il serait plus juste aujourd'hui de parler de prix conntionnels. Ils sont proposés aux ministres par le Comité économique du médicament, après avis de la Commission de la Transparence. Cette dernière a évalué l'amélioration du service médical rendu par ce médicament, tandis que le Comité estime le rapport coût/bénéfice pour négocier le prix ac l'industriel. La signature de l'accord cadre en janvier 1994 entre l'industrie pharmaceutique et les pouvoirs publics a introduit la régulation concertée et a défini les grandes lignes d'une politique globale du médicament, en donnant plus de souplesse de gestion aux laboratoires par une meilleure lisibilité de moyen terme (SNIP, 1999). Il ouvre la possibilité de meilleures marges pour les entreprises grace A une revalorisation des prix des produits anciens efficaces et bien tolérés et A un alignement sur les niaux de prix européens pour les produits innovants, en contrepartie d'un engagement de modération des volumes ''. Appliqué de faA§on augle, cet accord aurait pu conduire A un déloppement de l'emprise de l'Etat. Mais sa mise en ouvre montre le souci d'éviter cet écueil : le Comité économique du médicament négocie des objectifs différenciés ac chaque laboratoire, la loi du 28 mai 1996 ayant prévu que les prix seraient fixés en mASme temps que les volumes des ntes des produits noullement introduits. Cette démarche conntionnelle, qui engage une "vérile renégociation globale du portefeuille de produits" ac chaque laboratoire (Jacobzone, op. cit.), tend A rapprocher les prix des produits nouaux du niau européen, mASme si la référence aux produits existants sur le marché franA§ais n'a pas disparu. Le Comité économique du médicament essaie de reproduire dans ses conntions ce qui résulterait du fonctionnement d'un marché sans asymétries d'information, en s'inspirant de la situation internationale. Pour Stéphane Jacobzone, il s'agit d'une tentati de création d'un quasi-marché. L'évolution de la politique franA§aise est confirmée par l'accord sectoriel signé le 19 juillet 1999 (courant jusqu'au 31 décembre 2002) entre le Comité économique du médicament et l'industrie pharmaceutique, visant A améliorer le partage d'information entre les deux parties et A engager une réforme structurelie, ac la réévaluation des médicaments, l'accroissement de la concurrence par le déloppement des génériques et de l'automédication, la recherche du meilleur usage du médicament, et ce afin de recentrer les ressources rs la recherche et le déloppement de produits nouaux : il organise et prépare le financement des innovations thérapeutiques sans recourir A un financement additionnel (SNIP, 1999 b). B. Une typologie des modes de régulation en Europe : remboursement des coûts (cost-plus) ou barèmes forfaitaires de prix plafonnés (priée cap) On pourrait évoquer la dirsité des systèmes européens A partir de l'antagonisme évoqué plus haut entre les pays A prix administrés et ceux A prix libres, classification dont on a dit les limites mais qui offre l'avantage de la commodité. Dans cet esprit, on peut compléter la présentation qui vient d'AStre faite du mode franA§ais de régulation par celle des systèmes britannique et allemand qui ont en commun la liberté de fixation des prix. Le Royaume-Uni dispose depuis 1948 d'un service national de santé, le National Health Service (NHS), qui s'ouvre progressiment A la concurrence, en particulier grace A la réforme phare des Fundholders, des médecins généralistes qui choisissent de denir gestionnaires d'un budget lié A la taille de leur clientèle pour laquelle ils deviennent acheteurs de l'ensemble des services de santé dont elle a besoin (y compris les médicaments) et font jouer la concurrence. La logique libérale prévaut dans le domaine du médicament, pour différentes raisons ; les ntes libres (OTC) sont importantes s, parce qu'en plus des médicaments pouvant AStre fournis en officine sans ordonnance il n'y a pas de monopole de la distribution pour ces officines et qu'une partie des produits peut AStre ndue dans des grandes surfaces commerciales, ce qui incite A l'automédication. De plus, le nombre de spécialités prises en charge a diminué ac l'instauration d'une liste limitati de 1985 v. Pour les médicaments pris en charge par le NHS, deux cas se présentent. Les génériques, qui représentaient en 1995 40 % des lignes d'ordonnance, ont des prix fixés par le ministère de la Santé et sortent de ce cadre général libéral. Les prix des autres produits ne sont pas décidés par voie administrati mais sont fixés depuis 1977 par la procédure Price Pharmaceutical Régulation Scheme (PPRS). En dépit de son nom, elle ne régule pas les prix mais les profils réalisés : le taux de bénéfice autorise est régulièrement négocié entre le gournement et les représentants de l'industrie, calculé pour chaque entreprise sur le chiffre d'affaires des produits de marque ndus au NUS. Si une entreprise le dépasse, elle doit rembourser le dépassement au NHS ou baisser ses prix (Lecomte, Paris, 1998). Le système allemand diffère totalement, fondé sur un système d'assurances sociales créé par Bismarck A la fin du XIXe siècle. La liberté des prix présente quelques similitudes seulement ac l'exemple précédent, en particulier parce qu'il existe lA aussi une liste imposante de produits non remboursables depuis 1983. Le ticket modérateur est forfaitaire en fonction de la taille du conditionnement (ac des cas d'exonération importants). Les prix A la production sont fixés librement par les industriels selon des critères définis par le gournement fédéral. En appliquant le taux de marge des grossistes, on détermine le prix public, qui doit AStre inférieur A un plafond fixé réglementairement. Ce système correspond cette fois A une régulation par les prix, le price-cap, malgré la liberté de ceux-ci. En revanche, il se distingue fortement du mode franA§ais de régulation (un autre exemple de price-cap) depuis la réforme Blum de 1989 par la mise en place des prix de référence pour des groupes homogènes de produits (Feslbetrag), afin de surmonter l'hétérogénéité de ceux-ci. Les produits sont regroupés en trois classes selon leur degré de similarité (médicaments comprenant un mASme principe actif dans le classe 1 - médicaments comprenant des principes actifs similaires en classe 2 - combinaison de principes actifs A activité thérapeutique able en classe 3). Chaque médicament d'un groupe thérapeutique est rattaché A l'une de ces trois classes. Ce système introduit le plafonnement des dépenses de médicament prises en charge en définissant un forfait fixe de prise en charge pour chaque groupe de produits : si un médicament est ndu A un prix supérieur au prix de référence de la classe A laquelle il appartient, la différence entre les deux reste A la charge du patient. La concurrence ainsi introduite dans le système a abaissé le prix d'un certain nombre de produits au niau du prix de référence (Lecomte, Paris, op. cit.). Il faut dire que, tandis que les Pays-Bas ont choisi de se référer A la moyenne pondérée des prix de la classe, l'Allemagne prend pour référence un niau inférieur A la moyenne (Buisson, Giorgi, op. cit.). Mais tous les médicaments ne sont pas concernés par ce système de prix de référence. Par nature, les produits pour lesquels on ne pourrait trour au mieux qu'une faible similarité ac d'autres produits ne peunt AStre inclus dans le champ de cette régulation, c'est-A -dire les médicaments protégés par un bret et les produits novateurs. Ac le recul, ce mode de régulation a abouti A un résultat able au cas franA§ais en incitant A la prescription des médicaments les plus jeunes ou innovants A la place des médicaments A prix de référence. Au total, la liberté des prix ne doit plus AStre entendue aujourd'hui comme une absence d'interntion publique. Une régulation des conditions économiques de l'offre de médicaments portant soit sur les prix eux-mASmes soit sur les profits et les coûts est bel et bien en place, mais elle demeure nationale. Pour autant, des lignes de force communes apparaissent, qui suggèrent une conrgence des politiques nationales appliquées A des systèmes institutionnels distincts mais soumis au mASme environnement international " : - la mise en place de dispositifs de maitrise médicalisée des dépenses de santé, qui se traduit pour le médicament par un encadrement financier global de secteur ac la définition d'enloppes ; - la sélection de plus en plus sévère des médicaments remboursables ; - un assouplissement d'un certain nombre de politiques de prix administrés, concomitant A l'introduction de contrepoids puissants dans les systèmes A prix libres. Le rôle du financeur (public ou privé) évolue d'un modèle administratif classique A des modalités plus souples de relations ac les industriels, ac un nouau rôle de quasi-acheteur pour le financeur. |
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