C'est le plus ancien des régimes d'exception. Il était conçu initialement, comme son nom le rappelle, pour les lles investies par l'ennemi, dans lesquelles les nécessités de la défense primaient tout et s'imposaient à l'ensemble de la population, ce qui conduisait à militariser toute l'administration. Il conserve la
marque de cette origine : les situations auxquelles il peut s'appliquer impliquent encore une primauté des impératifs militaires. Le texte de base est la loi du 9 août 1849, modifiée notamment par celle du 3 avril 1875.
► La déclaration de l'êtat de siège
Elle est possible en cas de péril imminent résultant d'une guerre étrangère, d'une guerre cile ou d'une insurrection à main armée : ce sont donc bien les situations dans lesquelles les nécessités militaires s'imposent qui sont sées.
La décision est prise par décret en Conseil des ministres (Constitution de 1958, art. 36). Toutefois, le décret ne peut produire effet au-delà de douze jours si, dans ce délai, le Parlement n'est pas intervenu pour en autoriser la prorogation. Ainsi se trouvent conciliés le principe traditionnel de la compétence législative, et les impératifs de l'urgence.
La décision, selon l'étendue de la menace, peut porter sur tout ou partie du territoire.
► Effets de Vétat de siège
La déclaration de l'état de siège emporte trois séries de conséquences :
. L'autorité militaire est substituée à l'autorité cile dans l'exercice de la police du maintien de l'ordre. En pratique, un partage des compétences de police s'instaure entre elles : l'autorité militaire se réserve celles qui lui paraissent nécessaires pour faire face à ses responsabilités, et laisse le surplus aux autorités ciles.
. Les pouvoirs de police remis aux autorités militaires ont une étendue supérieure à la normale. L'extension porte sur quatre points :
- l'autorité militaire peut procéder à des perquisitions de jour et de nuit ;
- elle peut ordonner la remise des armes et munitions appartenant aux particuliers ;
- elle peut interdire les publications et les réunions susceptibles d'entrainer des désordres ;
- elle peut enfin éloigner les repris de justice et les personnes non domiciliées dans la zone en état de siège.
Il faut souligner le caractère limitatif de cette énumération : le droit commun subsiste pour le surplus.
. La déclaration de l'état de siège peut être accomnée de la mise en place par décret des tribunaux des forces armées que la loi du 21 juillet 1982 a supprimés en temps de paix (supra, p. 166) ; leur sont alors transférées certaines compétences exercées en temps normal par les
juridictions répressives ordinaires en matière de crimes et délits contre la sûreté de l'Etat.
Paradoxalement, ce régime témoigne du libéralisme du xrxe siècle. On a relevé le caractère limitatif des mesures qu'il entraine. Encore faut-il ajouter que certaines d'entre elles seraient aujourd'hui justifiées par la simple application de la jurisprudence normale : ainsi de l'interdiction des réunions mettant en danger l'ordre public (jurisprudence Benjamin, supra, p. 225) ou des saisies d'imprimés. De même, la possibilité d'éloigner des zones en état de siège les seuls repris de justice et les personnes non domiciliées apparait très limitée si on la e aux dispositions récentes autorisant de façon beaucoup plus large des assignations à résidence.
Le régime, d'autre part, se ressent encore de son origine, et de l'hypothèse, dépassée aujourd'hui, pour laquelle il a été d'abord instauré. Les transformations subies par la guerre et par la subversion ont accentué ce relatif archaïsme.
C'est en partie pour compenser cette inadaptation de l'état de siège à la guerre totale que la loi du 11 juillet 1938 sur l'organisation générale de la nation pour le temps de guerre avait prévu, en ce qui concerne l'emploi des ressources et des personnes, un ensemble de mesures qui permettaient d'aboutir, en fait, à la quasi-disparition des libertés économiques et professionnelles. Les textes qui régissent actuellement le serce national et la défense reprennent, en les adaptant, les mêmes dispositions (cf. notamment 0. du 7 janer 1959 portant organisation générale de la défense). Leur étude se confond avec celles du droit de réquisition, et des obligations inhérentes au serce national.