La notion de serce public est, A la fois, l'une des plus importantes et l'une des plus controversées du
droit administratif. Notion importante, car elle contient l'idée de finalité sociale, de satisfaction des besoins collectifs et peut donc AStre appréhendée comme -pivot du rôle de l'état-. C'est ce qu'a expliqué Léon Duguil' pour qui le pouvoir de l'état n'est justifié qu'en tant qu'il réalise des serces pour la collectité. L'idée de serce public s'oppose dans cette conception A celle de puissance publique qui ne peut avoir de valeur en soi sans autre finalité. Cependant, si Jèze, Bonnard, de Laubadère, et, plus généralement l'ensemble des disciples de Duguit (-l'école du serce public- ou -école de Bordeaux-) ont pu perfectionner cette théorie centrale du droit administratif, ils ont été confrontés A un paradoxe souvent dénoncé par leurs adversaires ou leurs critiques : le serce public confère une légitimité A l'action de_ l'état et donc A ses pouvoirs; if confirme et renforce la puissance publique en mASme temps qu'il ne peut s'en passer puisque celle-ci est un faisceau de prérogatives qui sont les
moyens d'assurer l'organisation et le fonctionnement des serces. Notion controversée donc, des l'origine, dans cette dialectique -serce-puissance-, justement mise A jour par Maurice Hauriou2. Mais cette controverse au niveau de la
philosophie de l'état s'est prolongée et amplifiée en raison de l'ambition trop large de la théorie. En effet, d'un point de vue strictement juridique, la notion était pensée comme le critère unique de tout droit administratif (
travaux publics, domaine public, responsabilité, contrats, agents publics, etc.). En d'autres termes, le serce public fonde la spécificité des règles de droit administratif pour Duguit et pour les juristes proches de sa pensée, par opposition au
droit commun (le droit privé, droit des particuliers). Par voie de conséquence, la
compétence des juridictions administratives s'explique par le serce public et se mesure A son aune. Or cette construction n'a en fait jamais correspondu pleinement A la réalité administrative. La gestion des serces publics a toujours appelé, nt serait-ce que de faA§on minime au XIXe siècle, l'utilisation de règles de droit privé. Et la pratique comme la jurisprudence permettent difficilement d'élir une définition purement organique du serce public. La définition fonctionnelle est prioritaire : un serce public est d'abord une actité, répondant A un but d'intérASt général et distincte en cela des autres actités collectives. En fonction de sa nature, les modalités de son exécution peuvent s'ésectiuner plus ou moins du
droit public. Romieu distinguait déjA une gestion publique et une gestion privée des serces publics3.
De toute édence, A l'époque contemporaine, le régime des serces publics forme un ensemble composite de règles spéciales de droit public et de règles de droit privé. L'analyse des structures de gestion et des règles de fonctionnement montre combien la frontière entre les deux sortes de droit est floue et ambiguA«. Cela a conduit de nombreux juristes A dénier toute
valeur juridique propre A la notion de serce public. Toutefois ces critiques ne sont pas pleinement satisfaisantes car, se plaA§ant au niveau du problème contentieux (la compétence du juge administratif), elles masquent ou oublient la réalité administrative; de ce point de vue, le serce public demeure la fonction clé de l'Administration. D'ailleurs le juge lui-mASme, en dépit de son ouvre en contradiction avec le projet unitaire de l'école du serce public, a toujours fait plus ou moins référence A cette notion fondamentale, mASme s'il refuse d'en faire un critère global d'application du droit administratif.
La présentation des actités de serce public, de leur gestion ainsi que des éléments essentiels de leur
régime juridique montre la complexification du rôle, de l'architecture et du droit de l'Administration.