Du fait de leur variété, les entreprises reprises sont considérées comme hétérogènes ; il n'existe, par conséquent, pas une voie unique pour reprendre une entité, car tout dépend de l'enronnement qui entoure la société A reprendre.
La modalité de reprise dépend de la
nature juridique de l'entreprise reprendre, ainsi que de son état. Si l'entreprise n'a pas de consistance réelle, le rachat d'actifs ou du fonds de commerce sera prilégié ; en revanche, si la reprise concerne l'ensemble d'une société, les titres seront acquis. Le rachat de l'entreprise par les salariés (RES) et la reprise par une SCOP (société coopérative de production) sont deux cas particuliers de reprises de titres.
Plusieurs modalités existent donc pour reprendre une firme. L'ANCE (1996) distingue les reprises d'actifs (avec notamment l'achat du fonds de commerce, la location-gérance, le rachat partiel ou total d'actifs) et les prises de contrôle (par rachats d'actions ou de parts sociales, ou par augmentation de capital de la société cible).
La reprise par le particulier se caractérise par de forts enjeux de pouvoir et de propriété du repreneur. Seule l'acquisition de la propriété permet de qualifier une opération de reprise. En effet, en dernier ressort, le pouvoir suprASme est détenu par les propriétaires.
Nous avons choisi tout d'abord de présenter les modalités classiques de reprise (achat de fonds de commerce, location-gérance, reprise de titres), puis de détailler les cas particuliers que sont les reprises par les salariés, par SCOP et les acquisitions d'entreprises en difficulté.
Les différentes modalités de la reprise
Le rachat partiel d'une entité passe par tous les cléments constitutifs de l'entreprise : meubles, immeubles, fonds de commerce constituant l'actif. Opter pour cette formule se conA§oit si le repreneur n'est intéressé que par un ou quelques éléments de l'actif de l'entreprise : un local, une ou plusieurs machines, du mobilier Les actifs ainsi rachetés seront exploités dans une structure juridique différente. Il existe deux types d'apports :
» l'apport pur cl simple qui transfère seule la propriété d'un ou plusieurs éléments de l'actif;
» l'apport A litre onéreux, un passif restant attaché aux éléments d'actifs apportés. Seule la valeur nette, passif déduit, csi alors rémunérée.
Deux cas de rachat partiels sont particuliers : le rachat du fonds de commerce et la location gérance.
Le rachat du fonds de commerce
Le fonds de commerce comprend un ensemble d'éléments :
» corporels que sont le matériel et l'outillage mais A l'exclusion, toutefois, du stock de marchandises,
» incorporels constitués par le droil au bail, la clientèle, le nom commercial, Fcnscigne et, éventuellement, les brevets et licences. L'intérASt majeur que présente le rachat d'un fonds de
commerce consiste A disposer, immédiatement, d'une infrastructure déjA en place. En effet, lorsqu'une personne créé une entreprise, elle doit trouver un local commercial, du personnel, créer une image, se faire connaitre ce qui exige des investissements importants qui ne seront pas productifs rapidement. C'est pourquoi, de nombreux créateurs d'entreprises choisissent la formule du rachat total ou partiel, pour gagner du temps, profiter d'une opportunité qui se présente A eux ou, encore, minimiser les
risques du démarrage d'une actité nouvelle qui part de - zéro -.
Par ce biais, le repreneur peut disposer, tout de suite, d'une structure développée, A savoir :
» un emplacement commercial équipé.
» une clientèle.
» une connaissance des fournisseurs et partenaires financiers.
En revanche, il s'agit d'une opération délicate et très réglementée et l'une des difficultés majeures consiste A apprécier la valeur du fonds. De plus, il est difficile de savoir si la collaboration acheteur/vendeur a effectivement lieu. D'autre part, le coût fiscal de cette opération est très élevé : les actes préparatoires A la vente, comme la promesse unilatérale de vente doivent AStre enregistrés et l'acte de cession entraine le paiement des droits d'enregistrement.
Le radiai du fonds de commerce et d'industrie se trouve souvent combiné A l'acquisition de parts sociales dans le cadre plus spécifique de la reprise des petites entités, surtout familiales. Ces dernières représentent, dans beaucoup de cas, des sociétés d'exploitation dont le fonds qu'elles exploitent appartient au propriétaire dirigeant. Aussi, s'agit-il de racheter A la fois le fonds de commerce et les parts sociales de la société d'exploitation.
- La reprise d'un fonds de commerce de détail, inscrit dans un circuit marchand d'offre, se différencie-t-elle fortement de la reprise d'une petite affaire de construction d'une dizaine de salariés et plus encore de la reprise d'une PMI familiale (exigeant la création d'un holding, la vente partielle de certaines actités ? -
Létowski, 1999.
Contrairement A l'opinion qui consiste A croire qu'acheter un fonds de commerce se déroule principalement dans les commerces de détail, 93 % des rachats de fonds de commerce ont eu lieu dans les serces (36 %) ou l'industrie (57 %). Ainsi, la reprise d'un fonds de commerce ne caractérise pas uniquement des actités de commerce.
Une autre manière de reprendre le fonds consiste A procéder par le biais de la location-gérance.
La location-gérance
La location-gérance n'est pas, en elle-mASme, un mode de reprise de l'entreprise, mais elle le deent lorsque, A l'expiration de son terme, l'entreprise est rachetée par le locataire gérant, soit sous la forme d'achats d'actifs, soit sous la forme d'achats des titres sociaux (actions ou parts sociales) quand l'entreprise est exploitée sous forme de société. Pendant toute la durée de la location-gérance, le locataire gérant gère l'entreprise A ses risques et périls, sous sa responsabilité et verse des redevances (loyers) au bailleur.
En principe, ce moyen de reprise est moins onéreux et ses risques plus limités. Le locataire-gérant n'encourt que le risque d'exploitation. Si perte il y a, il la supportera. La plupart du temps, il créera une société d"cxploitation du fonds afin de limiter sa responsabilité.
La loi dispose également que jusqu'A la publication du contrat et pendant les six mois suivants, le loueur est solidairement responsable avec le locataire des dettes contractées par celui-ci A l'occasion de l'exploitation. En outre, le bailleur est responsable des impôts directs dus par le locataire-gérant sans limitation de durée. Enfin, accomnée d'une promesse de vente qui garantit le risque d'éction, la location-gérance constitue, en fait, une étape préalable A la reprise, donnant le temps d'étudier l'entreprise de l'intérieur et de l'évaluer. Quant A l'apport financier, il est composé de la redevance, d'une caution et du fonds de roulement.
Cependant, si la location-gérance possède bon nombre d'avantages, elle n'en demeure pas moins, A l'instar des autres modes de reprise, risquée sur certains s. Outre l'éventualité d'une éction A la fin du bail, le risque le plus important est d'ordre fiscal. Certains vérificateurs de l'administration fiscale estiment, en effet, que la combinaison d'une location-gérance et d'une promesse de vente des actifs constitue, en réalité, un mode d'appropriation occulte du fonds de commerce. Il s'ensuit l'obligation faite au repreneur de payer des droits de mutation au taux plein non seulement sur la valeur des actifs, mais aussi sur celle des passifs, transmis par la mASme occasion.
Dans le cas de la location-gérance, le gérant salarié gère et exploite le fonds A ses risques et périls, moyennant le versement d'une redevance. C'est le propriétaire du fonds de commerce qui continue A tirer profit de son actif commercial ; la location-gérance ne transfère donc que la seule jouissance d'un bien et non la propriété de ce dentier.
Ainsi, la formule de la location-gérance permet au propriétaire du fonds de commerce de continuer A tirer profit de son actif commercial tout en se déchargeant des soucis de l'exploitation personnelle. Cette formule peut notamment constituer une solution aux problèmes :
» du commerA§ant agé ou malade ;
» de celui qui entend faire un essai avec des associés avant d'apporter son fonds en pleine propriété ;
» des personnes qui, par voie d'iiéritage, deennent propriétaires d'un fonds qu'elles ne peuvent ou ne veulent pas exploiter.
l.e locataire-gérant, outre le fait de devoir respecter certaines obligations légales (comme l'inscription au Registre de commerce et des sociétés), exerce l'actité convenue et exploite personnellement le fonds selon la destination de celui-ci, sans interruption, ni déplacement, et sans commettre d'acte de disposition. La location-gérance ne transfère donc que la seule jouissance d'un bien, et non la propriété de ce dernier. La location-gérance reste un état précaire, sans pouvoir constituer une fin en soi. Aussi, le sort du fonds de commerce en fin de contrat demeure une des préoccupations fondamentales du bailleur. Les solutions finales sont en effet diverses :
» soit le bailleur reprend le fonds,
» soit il le cède au gérant,
» soit la société locataire et la société d'exploitation dénoueront l'opération en réalisant une fusion-absorption.
La loi du 25 janer 1985 prévoit que le locataire-gérant doit impérativement acquérir le fonds au terme du contrat dans le cadre du de cession de l'entreprise. Elle lui impose mASme, normalement d'acquérir le fonds au plus tard dans les deux ans du jugement qui arrASte le de cession. L'utilisation de ce mécanisme permet au repreneur d'aménager une certaine période au cours de laquelle pourraient AStre améliorées et affinées les modalités d'acquisition prévues par le . Ce type de formule intenient particulièrement dans les reprises d'actités de commerce.
Le rachat des titres
l.e repreneur rachètera les parts ou actions d'une société, afin d'en acquérir la propriété et le pouvoir de gestion immédiat ou A plus ou moins long terme. Le pouvoir de gestion interent immédiatement lors de l'achat de la majorité des parts ou. A tenue, par une prise de participation minoritaire accomnée d'une promesse de vente d'autres actions.
Cette dernière formule est souvent utilisée par le propriétaire dirigeant agé qui souhaite assurer la relève. Elle permet au repreneur de s'initier, progressivement et de l'intérieur, A la réalité de l'entreprise. Son introduction - en douceur - éte le choc pour les salaries, les clients, les fournisseurs et autres partenaires, d'un changement trop brutal, cause de bien des crises de succession dans les PME.
Le rachat de parts sociales constitue, la plupart du temps, la modalité au moindre coût fiscal. Néanmoins, si celui-ci devait s avérer trop important pour permettre le rachat - en bloc -, lequel satisferait A la définition de la reprise (propriété totale, majoritaire ou de manière relative du capital), des acquisitions successives dans le temps (grace A une promesse de vente pour le restant du capital de la part du ou clés anciens propriétaires) représenteraient une solution adéquate.
Pour étaler l'apport en fonds propres, la prise de contrôle d'une société se réalise de manière progressive :
» clans le cadre d'une SA, la cession des titres n'est soumise A aucun formalisme et ne fait pas l'objet de droits d'enregistrement. Elle s'opère par transfert, c'est-A -dire par l'inscription sur le registre des transferts de la société ;
» en ce qui concerne la SARL. en revanche, la cession de parts sociales requiert nécessairement la rédaction d'un acte sous seing privé ou authentique et doit, en principe, recevoir l'agrément des associés.
Le régime fiscal des cessions de parts ou d'actions de société, est beaucoup plus favorable que celui de la cession de fonds de commerce. Toutefois, des risques et incertitudes demeurent en utilisant cette modalité ; ils concernent essentiellement le bien fondé du report déficitaire, le passif réel, les problèmes de mutation de fonds de commerce. Ces trois risques peuvent avoir des conséquences dramatiques. Il est donc souhaile de prendre toutes les précautions nécessaires pour s'en prémunir.
Avant d'étudier les cas particuliers, le leau suivant fait le point sur les diverses modalités de reprise évoquées.
Les cas particuliers
Deux cas particuliers sont étudiés : tenu d'abord, la reprise des entreprises en difficulté, ensuite, la création d'une SCOP pour reprendre une entité et. enfin, la reprise d'entreprise par les salaries (RES).
La reprise d'entreprises en difficulté
S'agissant d'entreprises en difficulté au sens juridique du terme, celles-ci se trouvent souvent dans un état ne permettant plus aucune exploitation. Un remaniement profond, voire un démantèlement complet, représente parfois l'unique solution pour sauver totalement ou partiellement l'actité.
Il en découle que l'approche par le fonds de commerce et d'industrie reste la mieux A mASme de répondre au souci de la reprise des seuls éléments indispensables au maintien d'une actité. Le fonds de commerce représente alors une sorte de - fourre tout -, sa composition restant A l'initiative des acteurs et permettant donc un assainissement des conditions d'exploitation A travers le carcan des procédures judiciaires. Il va de soi que le personnel représente un élément essentiel parmi ceux qui suivent le fonds de commerce et d'industrie ou s'y trouvent rattachés.
Les mASmes avantages s'attachent A la location-gérance d'une entreprise sous procédure judiciaire ou d'entreprise saine. Ici, l'engagement final prend la forme soit d'une reprise du capital avec présentation d'un concordai, soit du seul rachat du fonds de commerce.
La plupart du temps, les parts ou actions n'ont plus grande valeur. Aussi est-il courant d'acheter les titres pour un franc symbolique. Le vérile prix que le repreneur doit s'attendre A payer réside alors dans la nécessité, d'une part, d'apporter de l'argent frais (apport en compte courant ou augmentation ultérieure du capital), d'autre part, de régler le concordat qu'il reprend ipso facto A son compte. Les droits de mutation ne sont pas calculés sur le franc symbolique mais sur les sommes servant A payer le passif, celles-ci étant analysées comme le prix d'acquisition par le Code des impôts.
Aussi, la solution de reprise des parts sociales est-elle dangereuse du fait que l'acquéreur prend la place du cédant au sein de la personne morale, et subit les conséquences de sa mauvaise gestion.
Mais elle présente, au demeurant, des avantages substantiels :
» en premier lieu, comme il y a homologation du de
cession par le tribunal de commerce, la décision de justice (l'autorité de la chose jugée) pèse sur toutes les opérations et A l'égard de tous, mASme du lise ;
» ensuite, le coût de la reprise est exactement connu, le passif ayant été légalement vérifié :
» de plus, de larges délais de paiement sont, le cas échéant, accordés ;
» enfin, l'administrateur judiciaire a déjA réalisé ou fait réaliser par des experts qui peuvent l'assister, une analyse critique de la situation. Cette étude, confrontée A celle du repreneur, lui permet d'affiner et de parfaire son point de vue.
Les différentes modalités possibles pour la reprise d'une entreprise en difficulté sont reprises dans le leau suivant.
Tableau 5.7 - Les modalités de reprise d'une entreprise en difficultés
Modalités Explications
Fonds de commerce Reprendre les seuls éléments indispensables au maintien de l'actité.
Location-gérance L'engagement final peut se traduire par la reprise du capital ou la reprise du fonds de commerce.
Rachat de parts Les parts sociales ont peu de valeur. Le de cession est entériné par la décision de justice ; l'étude est donc able et corroborée par les remarques de l'administrateur judiciaire. Des délais de paiement sont généralement accordés.
La reprise par des SCOP
Les salariés qui souhaitent reprendre une entreprise peuvent passer par la création d'une SCOP (Société Coopérative de Production) ; la
philosophie du mouvement est particulière : - Tout salarié est appelé A devenir coopérateur -
Cette dese indique qu'une SCOP est.une entreprise mais que ses créateurs ont choisi cette forme parce qu'elle repose sur une philosophie sociale : le développement de l'homme par la participation.
Dans une SCOP, la participation revASt, en effet, un caractère :
» humain,
» collectif et solidaire,
» de responsabilité (l'actionnariat engage le coopérateur A s'impliquer dans son travail cl dans la e de l'entreprise) ;
»
économique (les bénéfices sont partagés entre capital et travail ). Dans une SCOP, tout salarié est normalement coopérateur,
c'est-A -dire soit actionnaire dans une SA-SCOP, soit associé dans une SARL-SCOP. Aussi, clans ce cadre, il reent A chacun de savoir se situer A la fois comme salarié (avec les avantages que suppose la coopérative, mais avec les contraintes de toute organisation économique) et comme actionnaire ou associé (appelé A se prononcer dans le sens de l'intérASt commun). Chaque salarié participe donc au capital. Chaque mois, un pourcentage du salaire est automatiquement prélevé et versé au capital, dans un but de capitalisation.
D'après la loi du 13 juillet 1992, le statut de la SCOP ajoute aux entreprises commerciales quatre caractéristiques spécifiques :
» la majorité du capital appartient aux salariés,
» les coopératcurs votent selon la règle - un homme, une voix .
» au moins un quart des bénéfices est partagé entre les salariés,
» la pérennité de l'enueprisc est favorisée par l'impartageabilité des réserves.
La SCOP procure d'autres avantages comme l'exonération de la taxe professionnelle et de la partie non distribuée du bénéfice. Le gérant est, bien sûr, responsable de sa gestion, mais le principal intérASt réside dans le fait que le mouvement coopératif joue le rôle de conseiller, autant dans la préparation de l'opération de reprise qu'après : un représentant réalise une sorte d'audit chaque année sur la société et vérifie que la firme correspond toujours aux critères exigés par la SCOP. Ce rôle de conseil est précieux, comme en témoigne l'exemple suivant.
Exemple : Le rôle de conseiller joué par le mouvement des SCOP
Ce laboratoire d'analyses agricoles a été liquidé de manière amiable en 1996, parce qu'il n'était plus renle depuis quelques années. Les trois salariés se sont alors trouvés devant l'alternative d'AStre licenciés ou de racheter l'actité. Décidant de se battre, ils ont choisi d'acquérir le matériel, l'actité et le droit au bail. Le laboratoire était en SICA (société d'intérASt collectif agricole), statut qui oblige tout associé A AStre agriculteur ou coopérative agricole. Cette situation ne correspondait pas au cas des trois salariés. Ils ne pouvaient donc pas reprendre le laboratoire en l'état. Adhérant A la philosophe des SCOP, ils ont monté un dossier de reprise pour bénéficier de l'aide du mouvement des SCOP. Au vu du projet qui paraissait fiable, le mouvement coopératif a étudié de manière approfondie les possibilités et a conseillé les salariés dans plusieurs directions qui sont :
- augmenter le capital,
- négocier un prix ferme,
- décaler la date de la reprise, car l'actité est très saisonnière.
Aujourd'hui, quatre années plus tard, les salariés sont très satisfaits de leur choix, le laboratoire se développe et deux personnes se sont ajoutées A l'opération, devenant obligatoirement associés. Le capital de la firme a, d'autre part, pratiquement doublé.
L'exemple suivant conforte ces propos et explique plus précisément le rôle joué par le mouvement SCOP lors d'une reprise d'entreprise en difficulté.
Exemple : Le rachat d'une entreprise en difficulté par une SCOP
M. A. est PDG d'une société d'échantillonnage qui dépose le bilan en avril 1995, A la suite du départ d'un
client important. Il présente la particularité d'AStre également le gérant de la SCOP qui a repris l'actité. C'est un cas très rare.
Quand il dépose le bilan, prenant conscience de sa responsabilité sociale en tant que chef d'entreprise, il cherche une solution permettant de sauvegarder le plus d'emplois possibles. Plusieurs possibilités s'offrent A lui :
- AStre acheté par un repreneur extérieur,
- créer une SCOP, associant donc ses salariés, pour reprendre l'affaire.
Pendant la période d'observation qui a duré d'avril A décembre 1995, M. A., en tant que cédant, a travaillé en parallèle avec le repreneur extérieur et, en tant que repreneur, avec le mouvement coopératif des SCOP. Ce dernier venait donner des conseils sur le positionnement de l'entreprise et sur la
stratégie A adopter pour poursuivre l'actité. Si le mouvement des SCOP s'intéresse au dossier, c'est qu'après étude approfondie, il l'a jugé crédible.
Fin 1995, les différents protagonistes ont opté pour le dossier émis par le mouvement des SCOP. Après avoir recensé le nombre de salariés intéresses, les statuts ont été ficelés. Les salariés devaient injecter des capitaux pour pouvoir faire partie de la SCOP. Tous n'ont pas compris la démarche et seulement seize se sont lancés dans l'aventure sur ngt-trois. Néanmoins, si c'est le dossier SCOP qui a été sélectionné, c'est parce que c'était la solution qui permettait de sauvegarder le plus d'emplois.
La reprise d'entreprise par les salariés (RES)
Le RES (rachat de l'entreprise par les salariés) constitue une autre modalité de reprise. Par un triple système de leer (financier, juridique et fiscal), les repreneurs salaries peuvent, en empruntant un minimum de fonds, détenir un maximum de parts dans la société concernée.
Trois raisons essentielles conduisent les propriétaires et les salariés A mettre en œuvre une procédure de reprise de l'entreprise. La transmission est la conséquente du désir du propriétaire (unique ou principal) de réaliser la participation qu'il détient dans l'entreprise, pour des raisons successorales ou dans le cadre de la gestion de sa fortune (1). Elle peut aussi accomner une restructuration lorsqu'un groupe industriel ou commercial n'a pas d'intérASt A conserver une filiale (2). Enfin, elle constitue un mode de verrouillage du capital en cas de tentative de prise de contrôle inamicale (3).
(1) La reprise résulte du désir de l'entrepreneur de voir les cadres qu'il a formés, ou particulièrement appréciés, lui succéder. Le dirigeant asé prépare donc son départ en pratiquant les formules d'actionnariat des salariés de manière intensive, notamment les s d'options sur actions, pour permettre aux repreneurs d'avoir la majorité des droits de vote au moment où il quittera la société. Cette stratégie est idéale puisqu'elle permet aux repreneurs de répartir leur investissement dans le temps. Parallèlement A l'actionnariat des salariés, le chef d'entreprise introduit progressivement la participation A la prise de décisions pour garantir une bonne passation de pouvoir. Cette approche de la transmission d'entreprise insiste sur l'intérASt de la progressité. Elle assure également l'indépendance et la culture de la société, ainsi que la fidélité des directeurs. La reprise d'une société non cotée par les salariés peut aussi AStre l'issue nécessaire de la succession difficile du chef d'entreprise. Par exemple, si le dirigeant-propriétaire, ayant décidé de cesser son actité, n'a pas eu d'offre de rachat satisfaisante ou si les contacts et négociations avec des repreneurs potentiels ont échoué, la reprise de la firme par ses salariés s'avère AStre la seule solution qui permette d'assurer la pérennité de l'entreprise. L'opération ayant l'inconvénient de s'effectuer brutalement, les repreneurs devront mobiliser rapidement les fonds nécessaires au rachat, tout au moins le montant leur permettant d'AStre majoritaires dans le capital. Au cas où ils ne parendraient pas A détenir une participation majoritaire directe dans le capital de la société A reprendre, les salariés utiliseront différents montages financiers afin de bénéficier d'un effet de leer juridico-financier.
(2) Des conglomérats, n'ayant plus d'intérASt stratégique A conserver certaines filiales, en cèdent le contrôle A leurs salariés pour se redéployer sur d'autres actités. Il peut s'agir aussi d'une filiale non renle au sein d'un groupe industriel ou commercial, mais qui le deendrait dans le cadre d'une gestion indépendante, surtout lorsque les repreneurs sont motivés. Lors de ces cessions de filiales effectuées dans un contexte de restructuration, on peut imaginer que de nouveaux partenaires industriels participent au montage financier de la reprise par les salariés. Cette association facilite l'accès A des opérations de plus grande envergure, renforce la confiance des partenaires d'exploitation et bancaires, et favorise de nouvelles synergies.
(3) Les techniques de reprise d'entreprise par les salariés constituent enfin un moyen d'empAScher la prise de pouvoir par desInvestisseurs indésirables. L'association avec le personnel (éven-tuellement déjA impliqué financièrement dans l'entreprise) est alorsjugée préférable A un mariage forcé avec un investisseur exté-rieur n'ayant pas forcément les mASmes motivations, ni la mASme culture que les partenaires actuels (actionnaires, dirigeants, autres salariés, créanciers). Le rachat de l'entreprise par ses salariés dans le but de verrouiller le capital se produit aussi clans l'entre-prise familiale lorsque les dirigeants-propriétaires ont dû ouvrir le capital dans des proportions conduisant A mettre leur pouvoir en question. Un RES assorti d'actions A droit de vote double permet A la société de ne pas AStre sous le contrôle du tiers non accepté.
Le RES, ou le LMBO [Leverage Management Buy Ont) A la franA§aise, facilite les opérations de reprises d'entreprises par leurs salariés. Une telle opération, outre les conditions associées aux repreneurs, suppose également que la société rachetée soit en mesure de générer des bénéfices qui seront mis en distribution. et cela afin de permettre d'honorer le remboursement des emprunts contractés par les repreneurs par le biais d'un holding. Celui-ci constitue en réalité la spécificité du RES.
Les deux caractéristiques financières essentielles du RES sont les suivantes :
» d'une part, la faculté de l'entreprise A générer ses propres capacités financières nécessaires A sa reprise,
» d'autre part, l'utilisation maximal de l'endettement du holding pour l'opération de reprise.
Afin de faciliter les opérations de reprise d'entreprises parleur salariés, la loi du 9 juillet 1984 sur le développement de l'initiative économique a institué un certain nombre d'avantages fiscaux. Ce dispositif a été assoupli par la loi sur l'épargne du 17 juin 1987 complétée par le décret du 13 novembre 1987 avec la suppression de l'agrément préalable, et modifié par la loi de finance pour 1992. Traduction franA§aise du LMBO anglo-saxon, le RES actuel, datant de 1992, est la troisième version d'un dispositif devenant de plus en plus contraignant et complique pour les salariés.
Jusqu'au 31 décembre 1991, les salariés d'une entreprise qui rachetaient cette dernière, pouvaient bénéficier d'avantages fiscaux importants s'ils créaient une société holding pour effectuer une opération de RES. Le holding bénéficiait lui aussi d'un avantage fiscal non négligeable. La spécificité du RES consistait, en réalité, A utiliser, cumulativement si possible, quatre effets de leer :
» le leer juridique par l'utilisation du holding,
» le leer fiscal par le mécanisme des différentes aides fiscales,
» le leer financier par le phénomène de surendettement.
» le leer social par la motivation et la compétence des cadres. Sans entrer dans la psychologie du travail, il est édent que le
climat social dans lequel s'effectue l'opération de RES est très important. Une des dés du succès de l'opération, et aussi la meilleure garantie pour les banques, repose sur la compétence et la motivation des repreneurs dans la mesure où la reprise engendre une synergie entre l'entreprise et son personnel. L'effet de leer social résulte :
» d'une part, du sang neuf apporté clans la gestion et la direction de l'entreprise (investissements nouveaux, développement de marchés renouvelés, politique d'exportation) ;
» d'autre part, de la rigueur que les nouveaux patrons apportent A la gestion pour faire face tant au remboursement des emprunts souscrits pour le rachat qu'au développement de leur entreprise.
Plus les cadres repreneurs obtiennent une large adhésion de l'ensemble du personnel, plus l'effet de leer social sera important :
- Si le principe du RES est que l'entreprise sécrète ses propres capacités financières pour sa reprise, il est aussi qu'elle mobilise et sécrète ses propres capacités humaines. -
Delfosse, 1988.
Le régime de faveur accordé A ce type de holding a été supprimé par la loi de finance pour 1992 et les avantages attribués aux salariés ont été limités. Les conditions de leur octroi sont telles que la plupart des repreneurs salariés ne sont plus intéressés.
Pour bénéficier du régime institué par la loi de finance pour 1992 aux salariés qui réalisent un RES, il conent :
» que la société rachetée et la société nouvelle relèvent du régime de droit commun de l'impôt sur les sociétés;
» que la société rachetée exerce une actité industrielle, commerciale, agricole ou professionnelle (relevant des bénéfices non commerciaux) ;
» que la société nouvelle (dont l'objet exclusif est le rachat de tout ou partie de la société cible) détienne, dans les deux mois de sa constitution, 50 % au moins des droits de vote de la société rachetée;
» que les salariés s'approprient plus du tiers des droits de vote du holding, dès la souscription du capital et cela directement ou par l'intermédiaire d'un fonds commun de placements;
» que le nombre de salariés de la société rachetée détenant des titres de la société nouvelle ne soit pas inférieur A cinq.
Si ces conditions sont réunies, les salaries ayant effectué l'opération de RES peuvent imputer sur leurs revenus imposables les intérets d'emprunt A moins qu'ils ne préfèrent bénéficier d'une réduction d'impôt. Dans tous les cas, le salarié doit conserver les titres de la société nouvelle pendant au moins cinq ans. Par ailleurs, ce mASme salarié ne peut bénéficier du régime prévu par la loi de finance pour 1992 s'il détient directement ou indirectement1 au moins 50 % des droits de vote de la société rachetée ou de la société nouvelle.
Le RKS actuel est la formule la plus compliquée et la moins able d'un dispositif inauguré en 1984. Les avantages fiscaux s'appliquent maintenant aux salariés repreneurs plutôt qu'A leur entreprise. Une expérience a été tentée pour intéresser les cadres et promouvoir les reprises en interne, mais elle a manqué sa cible. La motivation d'une équipe de cadres est insuffisante pour maintenir hors de l'eau une entreprise endettée, surtout si la marge bénéficiaire reste faible. Ces raisons expliquent la désaffection pour le RES actuel.
Il n'est donc plus au goût du jour. Il a d'ailleurs donné lieu A quelques échecs, comme le montre l'exemple qui suit.
Exemple : Goupil
A€ la fin des années 1980, en plein ère des golden boys, cet industriel franA§ais de la micro-informatique a longtemps défrayé la chronique. 1986
marque le rachat de l'entreprise par les salariés qui détiennent 51 % de la société holding. En janer 1990, Goupil détient 18 % du
marché micro-informatique professionnel de l'Hexagone et vend des microordinateurs A la Russie. En mars, la société déclare un chiffre d'affaires (1,2 milliard de francs) qui crève les plafonds.
En 1991, c'est le dépôt de bilan. L'endettement, longtemps camouflé par les dirigeants, est évalué A 700 millions de francs et le chiffre d'affaires artificiellement majoré, n'atteignait en fait que 830 millions de francs en 1990. Siemens, puis Olivetti renoncent A reprendre l'entreprise. La société est mise en liquidation le 11 juillet, entrainant au
chômage sept cent cinquante salariés et autant de sous-traitants.
Pourtant, la deuxième formule (1987-l991 ) qui appliquait des avantages A l'entreprise, a permis A certaines d'entre elles de remporter un franc succès1, comme nous le montre l'exemple suivant.
Exemple : L'expérience de GP, un RES comme outil de politique sociale
Chez ce fabricant d'enveloppes, le RES de 1988 ne correspondait pas au départ du patron, mais A une volonté stratégique d'ouvrir le capital A des salariés-actionnaires : pour partie, un choix de management. La sérénité règne en effet A GP, numéro deux franA§ais de la fabrication d'enveloppes. 1996 est A marquer d'une pierre blanche pour six cents salariés sur les sept cent cinquante que compte cette grosse PME de la région Rhône-Alpes : dans quelques mois, ils auront réalisé le débouclage de leur RES et ce sera la fin de l'emprunt contracté en 1988 par ces salariés-actionnaires pour prendre possession de 60 % de leur entreprise.
Ce RES s'inscrit dans la continuité de la politique générale de la direction et ne constitue en aucune faA§on le reflet d'une mauvaise
santé financière. Dès 1979, l'actuel PDG propose A ses cadres, puis A tous ses salariés, d'entrer dans le capital de l'entreprise. En 1988, au moment du RES, ils en possèdent déjA 32 %. - L'ouvrier ne se dit pas qu'il travaille pour un actionnaire, et l'actionnaire ne pense pas que l'entreprise t sur son argent, puisqu'il s'agit d'une seule et mASme personne. -
Pour ce qui concerne les nouveaux salariés et la place A leur accorder dans cette structure, GP leur suggère d'épargner sur deux ans une petite partie de leur salaire (de 0,5 % pour les moins de 7 000 francs A 1 % pour les plus de 15 000 francs) A laquelle s'ajoute un abondement de l'entreprise pour parvenir A 2 % de salaire épargné. Les nouveaux salariés qui le souhaitent, s'intègrent ainsi dans le mécanisme. Ce n'est certes pas l'autogestion, mais un état d'esprit et une transparence du management.
Quand il est bien préparc, le RES a prouve qu'il pouvait AStre une bonne solution. La preuve en est qu'en Grande-Bretagne, ce type de pratique fonctionne: le Management Buy Oui (MBO), l'équivalent de notre RES cl le MB1 (pour Management Buy In) -l'opération au cours de laquelle le rachat est effectué par un groupe d'employés venant d'une entreprise extérieure - ont connu un essor impressionnant. Aujourd'hui, de plus en plus de repreneurs impliquent dans le montage financier d'anciens cadres dirigeants de l'entreprise conquise (y compris parfois le vendeur lui-mASme). Ce schéma hybride, baptisé BIMBO (mi MBI, mi MBO) qui obtient un grand succès en Grande-Bretagne, présente l'avantage d'apporter au nouveau manager la contribution motivée de l'ancien
management qui connait les rouages de l'entreprise et, éventuellement, de négocier un prix de cession moindre.
Le système du RES a montré ses limites au point que cette modalité est aujourd'hui marginale en France notamment. Cela n'empASche pas les salariés de reprendre une firme, mais en achetant les titres, tout simplement.
Le processus de reprise d'entreprise est très délicat. Il demande une capacité de maitrise très importante de la part du repreneur qui doit, en effet, procéder A un choix, car de nombreuses modalités s'offrent A lui. Outre ce cadre plus ou moins procédural, une notion subjective entre en ligne de compte quant au déroulement de la reprise : le - feeling - du repreneur, car toutes les entreprises ne sont pas - bonnes - pour le repreneur, et le repreneur n'est pas systématiquement la personne adéquate pour les entreprises A vendre.
D'autre part, certaines recherches de cibles se soldent par un échec, c'est-A -dire qu'elles sont abandonnées car le repreneur ne parent pas A réunir la somme d'argent nécessaire.